III. L'ÉQUATION À MULTIPLES INCONNUES DE LA SMA
A. UNE DIRECTIVE POUR SAUVER LA PRODUCTION EUROPÉENNE
La directive « services de médias audiovisuels » (« SMA ») a été adoptée le 14 novembre 2018. Sa transposition, initialement prévue dans le cadre du projet de loi « audiovisuel », devait être achevée avant le 19 septembre 2020.
Son article 13 retient le principe du pays ciblé pour les contributions au financement de la création exigées des fournisseurs de services de médias audiovisuels. Le même article prévoit également la possibilité d'exiger un quota de 30 % d'oeuvres européennes dans tous les catalogues des fournisseurs de services de médias audiovisuels à la demande, avec obligation de mise en avant des contenus concernés .
Pour préciser les exemptions aux obligations de contributions financières et la mise en oeuvre des quotas, la commission européenne a publié le 2 juillet 2020 des lignes directrices concernant le calcul de la part des oeuvres européennes dans les catalogues des services de médias audiovisuels à la demande et la définition d'une faible audience et d'un chiffre d'affaires peu élevé.
La transposition de la directive doit :
ü d'une part, permettre de structurer les investissements des grandes plateformes numériques en faveur de la création française. Il est en effet essentiel, dans un contexte de développement de nouveaux modèles de consommation des oeuvres, de permettre à la création française de bénéficier de ces nouveaux usages sans remise en cause de ses fondamentaux ;
ü d'autre part, la transposition doit garantir les deux piliers d'un système qui a déjà fait ses preuves : le préfinancement des oeuvres et le soutien de la production indépendante .
Ce modèle du préfinancement vise à impliquer en amont les diffuseurs et partager ainsi avec eux tant les risques que les bénéfices potentiels du développement et de la production des oeuvres. Il permet, par la sécurité qu'il implique pour les créateurs, de renforcer la diversité de la création . A l'occasion de la transposition de la directive SMA, ce modèle doit être rééquilibré de manière à inclure les plateformes étrangères de vidéo à la demande et permettre que celles-ci participent aussi, par des contributions financières, à la mise en production des oeuvres.
L'autre pilier est le soutien de la production indépendante . Les producteurs indépendants ont historiquement permis la diversité de la création et la structuration d'un tissu économique générateur de croissance et de profits pour l'ensemble de la filière. Le risque d'un changement de modèle émerge aujourd'hui , avec la préférence de certaines plateformes internationales pour un schéma de production intégrée impliquant la concentration de tous les actifs et la rémunération des auteurs au forfait . Un tel schéma risque de déstructurer l'industrie française et de la transformer en simple prestataire d'exécution . La transposition de la directive doit permettre d'écarter ce risque par le fléchage d'une partie des obligations de financement vers la production indépendante et la réaffirmation du caractère central de celle-ci.