III. LES MOYENS RENFORCÉS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL DEPUIS QUATRE ANS POUR ASSURER SA PROFESSIONALISATION
Les crédits finalement alloués au Conseil constitutionnel pour 2019 se sont élevés à 12,5 millions d'euros contre 11,7 millions d'euros en 2018. La hausse constatée pour l'exercice en cours correspond uniquement aux frais nécessaires pour permettre au Conseil constitutionnel d'assurer le suivi du recueil des soutiens à la première proposition de loi déposée sur le fondement de l'article 11 de la Constitution.
A. LE PREMIER DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI MENTIONNÉE À L'ARTICLE 11
Par une décision du Conseil constitutionnel du 9 mai 2019, la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris, déposée à l'Assemblée nationale le 10 avril 2019, a été reconnue conforme à la Constitution, ouvrant une période de neuf mois de recueil de soutiens à cette initiative auprès des inscrits sur les listes électorales. Avec les règlements des assemblées et les lois organiques, les propositions de loi mentionnées à l'article 11 sont les seules à faire l'objet d'un tel contrôle a priori obligatoire, en vertu de l'article 61 de la Constitution.
En l'absence de précédent, une enveloppe spéciale de 500 000 euros pour les opérations liées au référendum d'initiative partagée (RIP) a été sollicitée en cours d'exercice 2019 par le Conseil constitutionnel, et un montant de 285 000 euros est prévu pour 2020.
Concrètement, le Conseil constitutionnel est destinataire de l'ensemble des données recueillies dans le cadre du dispositif mis en place par le ministère de l'intérieur, et est même le seul habilité à accéder à certaines d'entre elles, telle la publication du nombre total de soutiens déposés.
L'enveloppe spéciale correspond principalement aux moyens informatiques nécessaires au recueil des soutiens et aux frais exposés pour l'exercice des contrôles qui sont opérés en propre par le Conseil constitutionnel. Auditionnés par votre rapporteur pour avis, Laurent Fabius, président et Jean Maïa, secrétaire général du Conseil constitutionnel, ont informé votre rapporteur du fait que plusieurs réunions de travail se tenaient chaque semaine, avec le ministère, pour vérifier notamment la solidité du dispositif informatique mis en place.
Le Conseil identifie en outre les difficultés au moyen des réclamations dont il est rendu destinataire par les électeurs.
La première mise en oeuvre de ce dispositif est l'occasion de définir et d'ajuster un processus totalement inédit. Votre rapporteur pour avis souligne que des améliorations ont été apportées par le Conseil constitutionnel, en lien avec le ministère de l'intérieur, pour ce qui est de l'ergonomie du site Internet de recueil des soutiens, dont la version initiale présentait objectivement des lacunes et n'incitait pas les électeurs à apporter son soutien. Toutefois, votre rapporteur regrette que les dispositions législatives en vigueur n'imposent pas un degré d'information plus important des électeurs sur la possibilité d'apporter leur soutien à cette initiative. En effet, ainsi que l'a rappelé son président, Roch-Olivier Maistre, le Conseil supérieur de l'audiovisuel ne peut contraindre les médias audiovisuels à informer les citoyens de l'existence du processus et de la possibilité qu'ils ont de le soutenir. Le silence de la loi sur ce point ne lui donne pas compétence pour agir en ce sens.
Cette situation explique probablement en partie le nombre de soutiens recueillis : au 6 novembre 2019, le Conseil constitutionnel a fait état de 924 000 soutiens apportés, très loin à ce jour des 10 % requis du corps électoral sur 9 mois, soit 4 717 396 soutiens nécessaires à la poursuite du processus.
Le Conseil constitutionnel rend ce nombre public tous les quinze jours et a fait savoir à votre rapporteur que ce rythme était difficilement améliorable car « il entend ne communiquer que des informations fiables, ce qui implique notamment de sa part un ensemble de contrôles sur les données brutes venant jusqu'à lui ».
Le délai de cinq jours, imparti au ministère de l'intérieur pour procéder à des vérifications administratives concernant la qualité d'électeurs des personnes ayant soutenu l'initiative référendaire est prévu par les textes adoptés en 2013 et 2014. Si ces contrôles ont pu être accélérés en métropole au moyen du répertoire électoral unique, ils demeurent plus lents en Nouvelle-Calédonie, où ils sont effectués par l'institut statistique local.
Ce contrôle est bien sûr indispensable afin de vérifier l'identité des électeurs apportant leur soutien. À ce jour, une seule tentative de fraude a été détectée et signalée au Procureur de la République, un individu ayant tenté d'apporter son soutien au nom du Président de la République en exercice.
Si l'on fait abstraction de cette enveloppe spéciale, le budget du Conseil constitutionnel reconduit en 2019 sera maintenu au global en 2020, la hausse des frais de fonctionnement étant cette année encore compensée par une diminution des investissements. Après dix années d'un programme d'investissement soutenu, qui a permis la restauration de l'aile Montpensier du Palais royal, le montant des investissements en 2019, comme en 2020, est légèrement moindre que les années précédentes, permettant un renforcement des moyens de fonctionnement nécessaires à une activité toujours plus soutenue du Conseil constitutionnel.
En 2020 comme en 2019, les dépenses de fonctionnement s'élèvent à 10 269 000 euros contre 10 016 000 euros en 2018. Le budget consacré aux membres a été reconduit à l'identique tandis que le budget relatif au personnel a été programmé en légère augmentation compte tenu de la nécessité de renforcer et de professionnaliser le secrétariat général du Conseil constitutionnel. Les dépenses d'investissement ont représenté environ 1 450 000 euros en 2019 contre 1 703 000 euros en 2018, et devraient être reconduites à l'identique pour 2020, toujours principalement absorbées par des investissements informatiques et des travaux d'aménagement.
Si l'on fait abstraction des enveloppes spéciales « RIP » pour 2019 et 2020, le budget du Conseil constitutionnel est donc reconduit cette année encore à l'identique. S'ils restent élevés et dépassent de 18,1 % le montant de la dotation versée par l'État en 2016, ces crédits s'expliquent par l'importante activité du Conseil constitutionnel, qui a impliqué de « renforcer et professionnaliser les services », et la mobilisation de moyens pour mieux faire connaître son rôle et son action.