D. LES VISAS, UNE ACTIVITÉ ÉCONOMIQUEMENT RENTABLE

1. Une nette reprise depuis 2017

Alors que le nombre de demandes avait légèrement fléchi en 2016 (-1,5%) après les attaques terroristes commises en 2015 sur le territoire national, il est reparti à la hausse l'année suivante, sous l'effet de la demande liée au tourisme. En 2017, année record, il a atteint 4 millions (soit +13,5%). Cette tendance s'est poursuivie en 2018. Le nombre de visas accordés progresse parallèlement : 3 432 885 en 2017 .

Cependant, le taux de refus de visas continue à augmenter, conséquence d'une baisse de la « qualité » des dossiers et de contrôles plus stricts pour prévenir le risque migratoire. Ce taux est passé de 9,31% en 2011 à 11,06% en 2016 et à 13,55% en 2017 (soit +37% de refus par rapport à 2016). Des écarts considérables existent en fonction des pays considérés. Les pays ayant les plus faibles taux de refus sont naturellement ceux dans lesquels la perception du risque migratoire est la plus faible. A titre d'exemple, des pays comme l'Afrique du Sud, l'Australie, Bahrein, le Canada, la Corée du Sud, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l'Indonésie ou encore la Nouvelle-Zélande ont eu, en 2017, un taux de refus inférieur à 2%.

A contrario, les pays à forte pression migratoire enregistrent les taux de refus les plus importants :

Nigéria

49,8 %

Centrafrique

45,35 %

Guinée

42,94 %

Irak

41,27%

Comores

39,27%

Congo (RDC)

38,49 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire

93,5% des visas délivrés (soit 3 208 750 en 2017) sont des visas de court séjour - ou visas Schengen. Ces visas permettent à leur détenteur de séjourner, dans les 26 Etats membres de l'espace Schengen, au maximum 90 jours sur une période de 180 jours. Néanmoins, un tiers de ces visas sont des visas dits « de circulation » dont la validité est comprise entre une et cinq années et qui permettent à leurs bénéficiaires (voyageurs fréquents, femmes/hommes d'affaires, membres de familles de ressortissants de l'Union européenne, conjoints de ressortissants français) de se déplacer facilement.

Les dix premiers pays bénéficiaires de visas de court séjour sont les mêmes depuis trois ans et respectent globalement le même ordre dans le classement qui, en 2017, est le suivant :

Chine

748 111

Algérie

396 653

Maroc

295 206

Russie

253 833

Inde

177 790

Turquie

127 796

Tunisie

120 320

Arabie Saoudite

111 759

109 436

Indonésie

49 207

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Les visas de long séjour sont, quant à eux, destinés aux demandeurs qui souhaitent s'établir en France (séjour supérieur à 90 jours consécutifs). Ils représentent 6,5% du total des visas délivrés en 2016 , soit 210 223 visas. Ces visas de long séjour se répartissent en trois grandes catégories :

- études (39,35%) ;

- établissement familial (21,57%) ;

- motif professionnel (7,38%).

2. Une source appréciable de recettes

Conséquence de l'augmentation constatée, les recettes tirées de l'activité visas se sont élevés à 210,4 M€ en 2017 , en hausse de 13,3% par rapport à 2016 (185,7 millions d'euros).

Le programme 151 a donc pu bénéficier en 2018 d'une attribution de produits liée à ces recettes des visas , et par conséquent, du financement de vacations « hors plafond », ce qui n'avait pas été le cas en 2017, du fait de la baisse des recettes en 2016.

Conformément à un nouveau mode de calcul adopté en début d'année 2018, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a obtenu cette année 25% de 3% des recettes collectées, soit 1,38 M€ pour financer le recrutement de personnels vacataires.

Ces vacations permettent d'apporter des renforts ponctuels appréciables aux postes qui en ont besoin pour le traitement des demandes de visas.

Le mécanisme de « retour des recettes de visas »

En 2015, une attribution de produits (ADP), intitulée « Produits des recettes additionnelles des droits de visas » a été créée au bénéfice du programme 151 et du programme 185.

Le montant de l'ADP au titre d'une année n était égal à 2/9 de la recette additionnelle (recettes de l'année n-1 - recettes de l'année n-2).

La clé de répartition suivante est alors appliquée : jusqu'à 1 M€, ce produit est affecté au titre 2 du programme 151 ; au-delà d'1 M€, le solde est réparti entre le titre T2 (10%) et le hors titre 2 (90%). Les crédits hors titre 2 sont ensuite transférés sur le programme 185 pour le versement d'une subvention à Atout France.

Compte tenu de l'absence de « retour » pour le ministère au titre de l'année 2016, du fait de la baisse de la fréquentation touristique et donc des recettes à la suite des attentats de 2015, il a été décidé, en janvier 2018, de modifier le mode de calcul de cette attribution de produits afin de supprimer la prise en compte de la progression par rapport à l'année antérieure.

La part qui revient au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères est désormais 3% des recettes de visas de l'année n-1 , répartie ensuite à hauteur de 75% en faveur du programme 185 (pour Atout France) et à hauteur de 25% en faveur du programme 151 .

Sur cette base, les prévisions d'attributions pour l'année 2018 s'élèvent à 6,8 M€, dont 1,7 M€ reviendrait au programme 151.

Source : réponse aux questions des rapporteurs.

Pour mémoire, au 16 août 2018, les effectifs consacrés à l'activité « visas » s'élèvent à 860 ETP permanents , répartis en 300 emplois de titulaires (dont 12 en administration centrale), 44 emplois de volontaires internationaux et 516 emplois d'agents de droit local. A cette même date, 130 ETP (1 561,92 mois) de « vacations visas » ont par ailleurs été attribués depuis le début de l'année, 30,7 ETP de vacations (368,49 mois) restant à attribuer d'ici la fin de l'année.

En 2017 et en 2018, les effectifs ont été renforcés dans les pays connaissant une forte croissance des demandes : pays émergents (Chine, Inde, Indonésie, Philippines, Russie, Vietnam), Royaume-Uni, demandeurs traditionnels importants (Algérie, Maroc, Sénégal), pays connaissant une hausse conjoncturelle des besoins (Iran, Turquie, Pakistan).

3. Des délais de délivrance relativement stables

Le délai moyen de délivrance des visas était de 4,2 jours en 2016 , contre 3,8 jours en 2015 dans un contexte de forte augmentation de la demande de visas de court séjour.

Il convient cependant de distinguer entre les demandes émanant de « nationalités en délivrance directe », pour lesquelles le délai moyen était de 3 jours en 2016 (2,96 jours en 2015), et celles émanant de « nationalités soumises à consultation », pour lesquelles les délais sont nécessairement plus longs, les demandes étant examinées à l'échelon central (ministère de l'intérieur pour les passeports ordinaires et ministère de l'Europe et des affaires internationales pour les passeports officiels) ou par les autorités des autres Etats partenaires de l'espace Schengen, dans la mesure où elles concernent des nationalités ou des profils particuliers (lutte contre la prolifération nucléaire, demande d'asile...). Ainsi le délai pour les nationalités soumises à consultation était de 7,55 jours en 2016 (7,59 jours en 2015).

Parmi les postes présentant un délai moyen de délivrance supérieur à la moyenne, figurent notamment ceux de Beyrouth (12 jours), Oran (11 jours), Fès (11 jours) et Lagos (10 jours).

En janvier 2017, notre poste d'Alger enregistrait un retard de trois mois dans l'instruction des demandes de visas. Ce retard accumulé a été résorbé début juillet 2017 grâce à l'envoi de missionnaires en renfort sur la période de mars à juin 2017.

L'extension du dispositif « Visa en 48 heures », la poursuite de l'externalisation du traitement des visas et le déploiement de l'application informatique de gestion des demandes de visas « France visas » devraient permettre de réduire le délai de délivrance des visas.

Le déploiement de l'application France-Visas, envisagé en 2020, devrait permettre de réduire encore les délais d'instruction, qui sont en moyenne de 4,3 jours en 2017 mais restent variables selon les postes.

4. Le programme `'Visa en 48 heures''

Expérimenté en Chine à compter de janvier 2014, ce dispositif vise à r éduire à 48 heures le délai entre le dépôt du dossier de demande chez le prestataire et la remise du passeport avec le visa au demandeur .

Il ne concerne que les demandes individuelles et exclut par conséquent les demandes pour les voyages touristiques en groupe.

Il a été rendu applicable à l'Inde, à l'Afrique du Sud, au Qatar, au Koweït, à Bahreïn, Oman, aux EAU 10 ( * ) , à Singapour, la Turquie, l'Indonésie, la Géorgie et l'Arménie.

Il a été étendu en 2017 à la Russie et à six pays de l'ASEAN (Thaïlande, Philippines, Cambodge, Laos, Birmanie et Indonésie).

Son extension était envisagée en 2018 à l'Arabie Saoudite et au Vietnam, sous réserve de levée par nos partenaires Schengen de la consultation préalable obligatoire.

L'atteinte de cet objectif repose sur la mise en oeuvre des moyens suivants :

- la facilitation de la prise de rendez-vous des demandeurs individuels pour qu'ils puissent, s'ils le souhaitent, déposer leurs dossiers le jour même ou le lendemain au plus tard ;

- la mise en place de navettes supplémentaires entre les services des visas et les prestataires pour la récupération des passeports traités afin d'accélérer leur restitution ;

- un étiquetage particulier des dossiers individuels de demandes de visa de court séjour destiné à permettre un traitement prioritaire par le service des visas ;

- des effectifs supplémentaires affectés aux postes concernés et l'envoi de missionnaires en renfort à la demande pendant la période de haute saison (traditionnellement de juin à septembre).


* 9 Il s'agit des visas de court séjour délivrés à des ressortissants de pays tiers résidant régulièrement en Grande Bretagne et qui désirent se rendre en France ou dans l'Espace Schengen par la France.

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