C. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « APPRENTISSAGE » : UNE LÉGÈRE HAUSSE DE SES RESSOURCES

Si le compte d'affection spéciale relatif au financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage pour 2018 s'inscrit dans la continuité des précédents exercices budgétaires, et devrait être remanié l'an prochain à la suite de la réforme de l'apprentissage attendue au printemps 2018.

Le compte bénéficiera de 1,63 milliard l'an prochain de recettes, soit 59 millions de plus qu'en 2017.

Ces recettes sont constituées exclusivement de la fraction régionale pour l'apprentissage, qui s'élève à 51 % du produit de la taxe d'apprentissage 77 ( * ) .

Les dépenses du compte comprennent deux volets . Le premier vise à subventionner l'apprentissage dans les différentes régions, en fonction d'une clef de répartition fixée par la loi. Cette répartition régionale de la ressource consacrée au développement de l'apprentissage représente 86 % des dépenses du compte (1,39 milliard, en baisse de 4 millions) 78 ( * ) . Le second volet vise à corriger financièrement les disparités régionales de la taxe d'apprentissage et à donner des incitations au développement de l'apprentissage (243 millions, en augmentation de 63 millions). Cette correction consiste à répartir entre régions le solde de la fraction régionale pour l'apprentissage après versement de la part fixe 79 ( * ) .

Soucieux de faire de l'apprentissage une voie de réussite et de lutter contre le chômage des jeunes, votre rapporteur pour avis veillera à ce que la prochaine réforme annoncée par le Gouvernement pour le printemps prochain accorde plus de place aux branches professionnelles dans l'élaboration des référentiels des diplômes sans remettre en cause les prérogatives des régions. Les branches professionnelles ne peuvent pas piloter seules cette formation initiale, compte tenu de leur grand nombre, de leurs faibles ressources humaines et du peu d'appétence pour l'apprentissage des partenaires sociaux dans certains secteurs d'activité. La restructuration du paysage conventionnel, que votre rapporteur pour avis soutient, prendra encore plusieurs années, tandis que les exécutifs régionaux viennent à peine de se mettre en ordre de marche après la réforme territoriale. Un pilotage national de l'apprentissage doit donc être instauré, associant les partenaires sociaux, les ministères concernés et les régions, sur le modèle allemand.

Par ailleurs, même si l'article 19 du présent PLF n'est pas rattaché à la mission « travail et emploi », ses implications sur l'apprentissage ne sont pas neutres selon votre rapporteur pour avis, compte tenu de la baisse des ressources des chambres consulaires qu'elle entraîne 80 ( * ) .
En particulier, cet article prévoit de plafonner à 226 millions le produit de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (TA-CVAE) qui sera affectée en 2018 aux chambres de commerce et de l'industrie (CCI), alors que ce plafond était de 376 millions en 2016 et 2017 et même de 819 millions en 2013. Cette nouvelle baisse de 150 millions des ressources des CCI fait suite à des prélèvements ponctuels de 500 millions en 2015 et 170 millions en 2014, qui ont fortement perturbé la gestion des chambres. Tout en confirmant la volonté du Gouvernement de faire participer les chambres à l'effort budgétaire de l'État, le rapporteur général de l'Assemblée nationale a souhaité que « la baisse de plafond puisse se faire en distinguant les situations financières des différentes chambres » 81 ( * ) , à travers une hausse de 20 millions de la dotation du fonds de péréquation des CCI 82 ( * ) . Votre rapporteur pour avis partage cette volonté et souligne également l'engagement du Gouvernement de ne plus abaisser le plafond de la TA-CVAE dans les années à venir. Votre rapporteur pour avis rappelle à cet égard que les CCI sont responsables d'un tiers des centres de formations d'apprentis en France, et que la réduction de leurs ressources pourrait avoir in fine des conséquences néfastes sur le développement de l'apprentissage. Enfin, dans l'intérêt des entreprises et des apprentis, votre rapporteur pour avis serait favorable à un rapprochement voire à une fusion du réseau des CCI et de celui des chambres des métiers et de l'artisanat (CMA) 83 ( * ) , à condition d'une réflexion préalable approfondie, transparente et équitable associant les différentes parties prenantes.

Lors de sa réunion du 29 novembre 2017, suivant la proposition de son rapporteur pour avis, la commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « travail et emploi », sous réserve de l'adoption de l'amendement divisant par deux les crédits de paiement et les autorisations d'engagement consacrés l'an prochain à l'expérimentation des emplois francs , et un avis favorable à l'adoption du compte d'affectation spéciale « apprentissage ».


* 77 L'article L. 6241-2 du code du travail prévoit que les régions bénéficient, en plus de cette fraction de la taxe d'apprentissage, d'une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). L'ensemble, défini comme la ressource régionale pour l'apprentissage, doit au moins être égal à 1,544 milliard d'euros. Cette ressource est ensuite répartie entre les régions selon une clef de répartition qui constitue un instantané de la situation financière en valeur absolue constatée en 2015.

* 78 La part fixe de la ressource régionale est fixée par le même article L. 6241-2 à 1,544 milliard d'euros. Comme la fraction de la TICPE est estimée à 154 millions, la part fixe finalement versée aux régions s'élèvera à seulement 1,39 milliard.

* 79 En application de l'article L. 6241-2 du code du travail, cette part variable est répartie selon des critères spécifiques ayant trait à la proportion de la taxe d'apprentissage au niveau national redistribuée à l'échelon régional (60 %), au nombre d'apprentis préparant un diplôme inférieur au bac (26 %) et supérieur à ce niveau (14 %).

* 80 En outre, cet article prévoyait initialement un rétablissement du plafond des contributions à la formation professionnelle (CFP) des artisans, qui devait aboutir, dans la version initiale du PLF pour 2018, à un reversement de 6,8 millions au budget général de l'État. Le Gouvernement justifiait cette mesure par le fait que l'article 41 de la loi « Travail » avait par erreur supprimé les plafonds en vigueur, qui étaient pourtant rendus obligatoires à la fois par l'article 16 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, et par l'article 15 de la loi de programmation applicable aux années 2018 à 2022. Toutefois, un amendement du rapporteur général (I-602) a été adopté en séance publique à l'Assemblée nationale afin de garantir que l'intégralité des contributions à la formation professionnelle sera reversée l'an prochain au Fonds d'assurance formation des chefs d'entreprise artisanale (FAFCEA), écartant par conséquent tout reversement au budget général de l'État. Toutefois, le principe du plafonnement de cette ressource demeure maintenu.

* 81 Rapport fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2018 (n° 235), Assemblée nationale, tome II, examen de la première partie, par M. Joël Giraud, rapporteur général, 12 octobre 2017, p. 638.

* 82 Voir les amendements identiques du rapporteur général (I-605), du groupe La République en marche (I-1115) et de notre collègue Philippe Chalumeau (I-118).

* 83 Suite à l'adoption de l'amendement I-606 du rapporteur général, un rapport sur ce thème devra être remis par le Gouvernement au Parlement avant le 1 er février 2018.

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