EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 16 novembre 2016, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Gilbert Barbier sur l'action « Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) » du programme « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » du projet de loi de finances pour 2017.

M. Gilbert Barbier , rapporteur pour avis . - La lutte contre les addictions a bénéficié d'une couverture médiatique très importante ces dernières semaines en raison de l'aboutissement du projet le plus emblématique du Gouvernement dans ce domaine : l'ouverture, à titre expérimental, d'une salle de consommation à moindre risque (SCMR) à Paris et à Strasbourg à destination des consommateurs d'opiacés. J'y étais personnellement opposé, en raison du message qui est ainsi envoyé à nos jeunes et de l'impact mal évalué en matière sanitaire et d'ordre public.

Je n'ai pas changé d'avis sur la question, malgré les quelques aménagements positifs, notamment la localisation sur des emprises hospitalières, qui sont intervenus depuis la présentation de ces projets. Surtout, l'attention qu'ils ont suscitée est venue masquer le champ plus large de la politique conduite par le Gouvernement et pilotée par la Mildeca pour faire face aux conduites addictives.

Le public potentiel de ces SCMR se compte en centaines de personnes, voire peut-être un millier. En revanche, des millions de nos concitoyens consomment des produits psychotropes et sont touchés par une addiction à une substance ou comportementale.

Comme vous le savez, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), ex-Mildt, est chargée d'assurer auprès du Premier ministre la coordination des politiques publiques menées par les différents ministères (Santé, Intérieur, Justice, Ville, Jeunesse, etc.) et d'en définir les priorités. A ce titre, l'année 2017 devrait être pour la Mildeca une année de transition, avec le départ annoncé de sa présidente et le terme du plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017.

Ce budget s'en ressent, puisqu'il est en baisse de 5,6 % par rapport à 2016, à 17,83 millions d'euros. Hors dépenses de personnel (2,34 millions d'euros), qui restent inchangées, cette diminution est plus marquée puisqu'elle atteint 6,45 %. En 2017, la Mildeca disposera ainsi de 15,5 millions d'euros, contre 16,57 millions en 2016, 22 millions en 2012 et même 36,5 millions en 2007.

Certes, à cette époque, le fonds de concours alimenté par le produit de la vente des biens saisis et confisqués dans le cadre d'affaires de trafic de stupéfiants n'en était qu'à ses balbutiements, puisque son montant s'élevait à 1,5 million d'euros. Après 11 millions d'euros en 2015, déjà 10,9 millions ont été transférés à la Mildeca en 2016.

Cette ressource reste cependant aléatoire, et elle est redistribuée aux services enquêteurs afin de financer l'achat de matériel opérationnel, des formations ou des initiatives de coopération internationale. Seuls 10 % reviennent à la Mildeca pour prendre en charge des actions de prévention dans le domaine sanitaire. De plus, un travail de sensibilisation des juridictions à l'importance des saisies et des confiscations doit encore être réalisé : 20 % d'entre elles ne contribuent toujours pas au fonds de concours.

Cette situation budgétaire n'est donc pas satisfaisante, même s'il semblerait qu'elle constitue une amélioration importante par rapport aux propositions initiales de Bercy lors de l'élaboration du PLF. En effet, selon la Mildeca, le ministère du budget envisageait à l'origine une baisse de 30 % de ses crédits, et ce n'est que grâce à un arbitrage du Premier ministre que de telles velléités ont été mises en échec et qu'un compromis a été trouvé.

Cette dotation a trois objets. Elle assure le financement de deux opérateurs essentiels, l'observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) et le centre interministériel de formation anti-drogue (Cifad), situé en Martinique, qui ont déjà été sévèrement frappés ces dernières années par les réductions budgétaires. La subvention versée à l'OFDT a ainsi diminué de 20 % en cinq ans et s'élève à 2,8 millions d'euros. Si elle ne baisse que de 1,7 % cette année, c'est en raison de l'intervention de la Mildeca qui a estimé qu'une réduction plus importante mettrait en péril le fonctionnement même de la structure. Son directeur m'a d'ailleurs confié qu'il lui fallait désormais rechercher des financements extérieurs pour pouvoir réaliser certains projets et qu'il faisait face à des difficultés croissantes pour préserver son socle d'activité. Il a néanmoins obtenu l'appui d'acteurs locaux pour développer l'observation de la toxicomanie dans les territoires, comme l'impact de la « chimique » à Mayotte grâce au soutien de l'ARS.

Les crédits budgétaires assurent ensuite la dotation des chefs de projet placés dans les préfectures - traditionnellement les directeurs de cabinet des préfets - afin qu'ils puissent, grâce à des cofinancements locaux, mener des actions de prévention. Depuis deux ans, l'organisation de cette politique territoriale a été revue, afin notamment de favoriser un pilotage régional de la répartition des fonds disponibles.

Initiée par la Mildeca et sa présidente, cette modernisation risque toutefois d'être freinée en 2017 par la baisse de 6,6 % des crédits alloués, qui passent de 9,1 à 8,5 millions d'euros. En complément, près de 18 millions d'euros sont apportés par d'autres acteurs locaux, principalement les ARS et les collectivités territoriales. Toutefois, plusieurs fragilités n'ont pas encore été corrigées : plus de 50 % des projets sont renouvelés d'une année sur l'autre, alors que moins de 50 % des territoires réalisent chaque année l'évaluation d'une action qu'ils financent. Enfin, alors qu'ils sont en principe réservés à la prévention, une partie de ces crédits finance encore du matériel d'investigation pour les forces de l'ordre.

Environ un quart des ressources de la Mildeca sert à financer la mise en oeuvre du plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017, qui a été décliné en deux plans d'actions, le premier portant sur la période 2013-2015 et le second sur les années 2016 et 2017. Il est construit autour de trois priorités qui font consensus : fonder l'action publique sur l'observation, la recherche et l'évaluation ; prendre en compte les populations les plus exposées pour réduire les risques et les dommages sanitaires et sociaux ; lutter contre les trafics et toutes les formes de délinquance liés aux drogues.

Cette ambition initiale avait conduit à élaborer 131 actions à mener entre 2013 et 2015, de nature et d'ampleur très hétéroclites. 80 % de ce total a été réalisé, pour un coût global de 62 millions d'euros, dont 15 millions à la charge de la Mildeca.

Le plan 2016-2017 comprend quant à lui pas moins de 254 actions. Dans le délai restreint qui lui est imparti et au vu des contraintes budgétaires, il semble possible d'affirmer que sa mise en oeuvre ne sera, au mieux, que partielle. Jusqu'à présent, la Mildeca avait réussi à y consacrer environ 4,4 millions d'euros par an. L'an prochain, alors que la présidente de la Mildeca souhaite privilégier le soutien aux chefs de projet territoriaux, elle ne disposera pas des moyens pour maintenir une telle contribution.

Il s'agit donc d'un catalogue de mesures à la portée inégale, dont la majorité devrait rester virtuelle. Il appartiendra à la prochaine équipe de la Mildeca d'en tirer les conséquences et, à mes yeux, de mener une réflexion visant à construire sa politique autour d'un nombre plus restreint d'actions.

Un tel sursaut est d'autant plus urgent que la situation française en matière de consommation de drogues et de conduites addictives reste très préoccupante.

En matière d'alcool, comme l'a souligné lors de son audition le directeur de l'OFDT, toute l'Europe adopte progressivement les comportements des pays nordiques : la diminution de la consommation quotidienne se poursuit, tandis que les comportements à risque, les phénomènes d'alcoolisation ponctuelle importante (binge drinking) se sont répandus durant les années 2010, en particulier chez les jeunes.

Alors qu'il est trop tôt pour évaluer les effets des dernières mesures de la loi de modernisation de notre système de santé en la matière, comme le paquet neutre, la consommation de tabac n'a pas été endiguée : environ 30 % de nos concitoyens fument quotidiennement, et même 32 % des adolescents.

S'agissant des substances illicites, le cannabis s'est bien évidemment banalisé. La tendance de consommation est à la hausse entre 2010 et 2014, avec 42 % d'expérimentateurs et 3 % d'usagers réguliers, soit au moins dix fois par mois, chez
les 18-64 ans, ce qui représente 1,4 million de personnes. Si, parmi les plus jeunes, l'âge d'entrée dans la consommation recule légèrement, l'usage problématique a fortement crû, puisqu'il est passé de 5 % à 8 % des jeunes de 17 ans entre 2011 et 2014. De plus, le développement de l'autoculture a renforcé la disponibilité de cette substance, dont la teneur en principe actif, le tétrahydrocannabinol (THC), a fortement augmenté ces dernières années en raison du développement de nouvelles variétés de cannabis, en particulier en provenance des Pays-Bas.

La consommation de cocaïne, en très forte croissance depuis vingt ans et qui a encore connu une légère progression entre 2011 et 2014, n'est plus l'apanage de certains milieux aisés. Elle s'inscrit dans le cadre de polyconsommations, et ce ne sont pas les cadres qui ont le niveau d'expérimentation le plus élevé mais les artisans et commerçants (7,2 % contre 4,9 %).

Les opiacés restent la source des plus importants dommages sanitaires et sociaux, bien que leur nombre d'usagers soit faible au regard de la population générale. 1 % des jeunes de 17 ans a néanmoins expérimenté l'héroïne, et 280 000 personnes peuvent être considérées comme des usagers problématiques, en faisant une consommation régulière par voie intraveineuse. Chez ces toxicomanes, la prévalence de l'hépatite C est de 64 % et celle du VIH de 13 %.

Les pouvoirs publics semblent démunis face aux nouveaux produits de synthèse. Bien que leur consommation en France n'atteigne pas les niveaux que connaissent certains de nos voisins européens, ils peuvent être plus dangereux que les drogues traditionnelles, en particulier pour les néophytes, car leur nocivité est souvent sous-estimée.

Il faut enfin mentionner l'existence de phénomènes addictifs localisés. Comme la délégation de notre commission qui s'y est rendue au printemps dernier l'a constaté, La Réunion est confrontée au détournement de certains psychotropes comme l'Artane ®, qui en association avec l'alcool produit une sensation d'euphorie et à un effet désinhibant qui favorise le passage à l'acte. Mayotte est quant à elle confrontée à la « chimique », drogue de synthèse dérivée du cannabis et importée d'Asie qui se révèle très addictive.

Consciente de cette situation, la Mildeca n'est pas restée inactive. Pour autant, aucun progrès n'a été réalisé ces dernières années sur l'un des aspects essentiels de la politique de lutte contre les addictions : la réponse pénale à la première consommation de stupéfiants.

A l'heure actuelle, toute personne interpellée pour usage simple de drogue est passible d'une peine d'un an de prison et de 3 750 euros d'amende. Cette sanction est bien évidemment virtuelle et a perdu son rôle dissuasif auprès des jeunes. A deux reprises, en 2011 puis dans le cadre des débats sur le projet de loi santé, le Sénat a proposé, à mon initiative, de lui substituer, pour le premier usage, une contravention de troisième classe d'un montant de 68 euros. Devant être acquittée dans un délai de 45 jours, l'effectivité de l'interdit qui lui est associé en serait grandement renforcée, la sanction étant quasiment immédiate.

Lors des débats au Sénat, la ministre avait justifié son opposition à cette mesure en invoquant une réflexion interministérielle alors en cours sous l'égide de la Mildeca. La presse nous a pourtant appris que celle-ci avait remis son rapport au Premier ministre dès octobre 2015, et qu'il s'est empressé de l'enterrer sans le rendre public.

On sait néanmoins que les auteurs de ce rapport partageaient mon constat de l'inefficacité du cadre pénal actuel et proposaient de le remplacer par une contravention. Il appartiendra au prochain gouvernement, quel qu'il soit, de traiter ce dossier et de tirer un trait sur une politique qui, en 46 ans, a fait la démonstration de son incapacité à traiter les racines des addictions.

Sur ces considérations, je vous invite à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de l'action « Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives » du programme « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » du projet de loi de finances pour 2017.

M. Philippe Mouiller . Je prends note de la baisse marquée des crédits de la Mildeca depuis plusieurs années. Quand nous avions débattu de la mise en place des SCMR, le Gouvernement avait pourtant indiqué qu'elles seraient accompagnées de moyens conséquents en matière de prévention et de lutte contre la consommation de drogues. Je suis donc étonné par le décalage entre ce discours et la réalité des chiffres.

Par ailleurs, de nombreux acteurs interviennent dans le champ de la prévention, notamment en direction des jeunes. Existe-t-il un espace de coordination de leur communication, qu'il s'agisse des outils, des messages ou des opérations ?

Mme Catherine Génisson . - Le groupe socialiste se trouve dans une situation particulière. Nous nous félicitons, et la ministre l'a d'ailleurs souligné, de la qualité des débats que nous avons eus, en commission et en séance, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. En revanche, l'examen du projet de loi de finances, suivant le souhait de la majorité sénatoriale, ne devrait pas avoir lieu. Dès lors, il semble parfaitement inutile d'avoir un simulacre de débat au sein des commissions. Sans nier l'intérêt des rapports qui sont présentés, nous ne participerons ni aux débats, ni au vote.

M. Olivier Cadic . - La conclusion du rapporteur sur 46 ans d'échec d'une politique menée est assez cruelle !

Je me suis récemment rendu en Uruguay, premier Etat du monde à avoir légalisé la production, la distribution et la consommation de cannabis, afin de contrôler le marché et de le soustraire au crime organisé. Selon eux, la fin de la répression a permis de tarir le marché noir, de porter atteinte à l'économie parallèle, de garantir la qualité des produits et de promouvoir directement auprès des consommateurs des messages sanitaires sur la nocivité du cannabis. Est-il prévu de réaliser une évaluation de cette initiative et de celles, comparables, qui commencent à être mises en oeuvre dans d'autres pays étrangers ?

M. Michel Forissier . - Ce sont évidemment les préfets qui, au niveau local, répartissent les crédits de l'Etat. Sur ce point, je tiens à souligner les effets pervers des dernières réformes de la politique de la ville, qui ont réduit le périmètre des zones prioritaires. Les communes qui en sont sorties, après en avoir bénéficié pendant plus de vingt ans, ont subi une diminution des crédits consacrés au financement des ateliers santé ville, qui traitent notamment des conduites addictives. Ces actions de prévention ne devraient pas concerner une seule partie du territoire d'une commune : la consommation de drogue ne cesse pas lorsqu'on quitte une rue ou un quartier, mais elle doit être appréciée globalement sur l'ensemble d'une collectivité. Ce problème est particulièrement marqué en Auvergne-Rhône-Alpes, et la baisse des dotations ne nous permet pas de compenser le désengagement de l'Etat.

M. Daniel Chasseing . - Il faut rappeler à ceux qui souhaitent légaliser le cannabis qu'il est à l'origine de troubles du comportement et d'une détérioration de la mémoire, en particulier chez les jeunes. Sa consommation favorise le passage aux drogues dures. Il serait donc dangereux de le légaliser, mais il faut renforcer la prévention sur les territoires.

M. René-Paul Savary . - Le problème des polyaddictions n'est pas suffisamment pris en compte. Comme en matière de handicap, nous raisonnons trop en silo alors qu'une approche globale est nécessaire.

De plus, il faut souligner que le milieu rural est tout autant touché par les addictions que le milieu urbain. Ce n'est pas un problème lié à la politique de la ville mais un problème de société.

Est-ce que le caractère cancérigène du cannabis a été évalué, alors qu'il a fallu des décennies pour identifier les effets négatifs du tabac ? La politique actuelle, sur ce produit légal, n'est pas suffisamment dissuasive au vu du nombre de consommateurs. La légalisation du cannabis produirait les mêmes effets dans 30 ans. Il faut plutôt aller dans la voie de la contraventionnalisation de l'usage.

Mme Pascale Gruny . - L'impact des addictions sur les accidents de la route et les accidents du travail a-t-il été mesuré ? C'est un sujet qui prend de l'importance en entreprise : la prévention est limitée, et le dépistage est presque impossible. Seul le médecin du travail peut intervenir. L'employeur peut éventuellement réaliser un test global, de tous ses salariés, mais ne peut cibler certains d'entre eux.

La prise en charge des toxicomanes est souvent réduite à ses aspects sanitaires, voire parfois sociaux, sans se préoccuper de leur retour sur le marché du travail. C'est la cause de bien des échecs. Dans mes travaux précédents sur cette question, j'avais pu constater qu'en Italie un centre réalise un travail remarquable de réinsertion. Nous devrions nous en inspirer.

M. Gérard Roche . - Ce rapport donne une vision très claire des différentes problématiques liées aux conduites addictives. Elles ont certes des répercussions directes sur la santé des personnes, indirectes aussi, mais leur corollaire est la désintégration sociale qu'elles engendrent. L'économie souterraine qu'elles alimentent met en jachère de la République certaines zones où il n'y a plus d'Etat de droit. Il faut s'y attaquer de manière résolue.

M. Jean-Marie Morisset . - Je voudrais revenir sur la diminution des crédits délégués au niveau territorial. Les associations départementales subissent une double peine : tout d'abord cette baisse des financements, mais également la nouvelle organisation régionale. Dans la Nouvelle-Aquitaine à douze départements, de nombreux refus sont opposés à des associations qui menaient pourtant des actions de longue date. Dans le même temps, la contribution des conseils départementaux a la plupart du temps disparu.

Mme Élisabeth Doineau . - Je partage le point de vue de mes collègues sur la question de la lutte contre les conduites addictives. Il faut aussi rappeler l'impact de la consommation de drogue dans les familles, comme l'illustre l'ouverture cette semaine du procès des parents de la petite Fiona. Les comportements violents qui en découlent ne sont pas suffisamment portés à la connaissance du public, tout comme les conséquences dramatiques qu'elle peut avoir pour de jeunes enfants.

M. Gilbert Barbier , rapporteur pour avis . - Pour répondre à Philippe Mouiller, c'est bien le rôle de la Mildeca d'assurer la coordination des actions de communication et des campagnes de prévention, qui ne sont d'ailleurs pas exemptes de critiques.

La dépénalisation du cannabis soulève à mes yeux de très importantes difficultés. L'OFDT va d'ailleurs réaliser une étude comparant les expériences étrangères en la matière et leurs conséquences. Il faut toutefois avoir à l'esprit que les effets du cannabis varient en fonction de la teneur de celui-ci en principe actif, le tétrahydrocannabinol (THC). Si l'Etat venait à commercialiser du cannabis, sa concentration en THC serait sans doute très inférieure aux 25 % aujourd'hui atteints par certaines variétés importées des Pays-Bas. Elle serait plus modérée, entre 5 % et 7 %. Les réseaux de trafic continueront donc à prospérer en proposant du cannabis ayant un niveau de THC plus élevé.

De plus, si le cannabis est dépénalisé, il est à craindre qu'un report vers des produits de synthèse ou la cocaïne se produise. Je partage le point de vue de René-Paul Savary et de Daniel Chasseing : la consommation de cannabis a des effets néfastes sur la santé indéniables, notamment cancérogènes, en particulier lorsqu'il est mélangé avec du tabac pour être fumé.

Tout le territoire est touché par le cannabis : ce n'est pas une problématique limitée aux quartiers de la politique de la ville. Il s'est désormais répandu dans les zones rurales, où les niveaux de consommation sont proches de ceux des zones urbaines.

La consommation en milieu professionnel est souvent un phénomène collectif. Dans ma commune, la moitié des 225 salariés d'une usine était concernée. Il s'agit d'un moment de détente entre collègues. En ce qui concerne la sécurité routière, des tests salivaires de dépistage rapide permettent désormais de multiplier les contrôles qui étaient jusqu'à présent très fastidieux puisqu'ils impliquaient une prise de sang. De plus, il faut avoir une approche basée sur la santé globale de la population, pas uniquement une politique visant à faire diminuer le nombre d'accidents de la route.

L'exemple italien du centre Don Mario Picchi, qui travaille à la réinsertion des toxicomanes, mériterait d'être reproduit en France. Sur ce sujet, je vous invite à consulter le rapport de la mission commune d'information Assemblée nationale - Sénat sur les toxicomanies de 2011, dont j'étais le rapporteur pour le Sénat et qui s'était penché sur la question.

Enfin, je comprends les inquiétudes des associations qu'a exprimées Jean-Marie Morisset. Si les crédits du dispositif territorial sont en légère baisse, la régionalisation de son financement a nécessairement des conséquences au niveau de chaque département.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de l'action « Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives » du programme « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » du projet de loi de finances pour 2017.

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