EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 23 novembre 2016, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin, président, a procédé à l'examen des crédits du programme 146 « Équipement des forces » de la mission « Défense » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2017, sur le rapport de MM. Jacques Gautier, Daniel Reiner et Xavier Pintat, rapporteurs pour avis.

M. Jacques Gautier , rapporteur pour avis . - Le projet de loi de finances pour 2017 place le budget de la défense dans la situation rare d'un niveau de crédits supérieur aux prévisions de la loi de programmation militaire (LPM), révisée à la hausse en juillet 2015 avec le soutien de la majorité du Sénat.

Avec une prévision de plus de 32,68 milliards d'euros en crédits de paiement et hors pensions, le budget de la défense dépasse de 609 millions d'euros la dotation prévue en loi de finances initiale pour 2016, et de 417 millions d'euros la prévision de la LPM révisée.

Ce budget, pensions incluses - c'est-à-dire à la norme Otan - maintiendra l'effort national de défense à hauteur de 1,8 % du PIB. La dotation de l'agrégat « Équipement » s'élèvera l'année prochaine à 17,3 milliards d'euros, en hausse de 300 millions d'euros.

Cette inflexion était indispensable pour répondre à la dégradation du contexte sécuritaire, avec l'opération Sentinelle, et pour respecter les engagements pris par le Président de la République devant le Congrès en novembre 2015 et devant les armées en janvier 2016 : fin de la déflation des effectifs, prime aux militaires de l'opération Sentinelle, revalorisation de la condition de militaire, etc.

Inquiets des réticences de Bercy, vos rapporteurs sont intervenus auprès du Président de la République et du Premier ministre avant les arbitrages en conseil de défense, lesquels ont heureusement été favorables.

Cet ajustement des moyens de la défense s'inscrit dans une nouvelle trajectoire financière. La loi de juillet 2015 avait déjà accru les ressources financières de la défense de 3,8 milliards d'euros pour la période 2016-2019. Une nouvelle révision a été décidée par l'exécutif à la suite des attentats du 13 novembre 2015.

Le rapport du Gouvernement relatif à la programmation militaire pour les années 2017-2019 présente l'impact des décisions arrêtées en conseil de défense sur la trajectoire financière et capacitaire. Celles-ci entraînent, sur trois ans, un coût nouveau de près de 3 milliards d'euros : 775 millions pour 2017, près d'un milliard pour 2018 et 1,2 milliard pour 2019.

La dépense nouvelle est aux trois quarts concentrée sur les ressources humaines : hausse des effectifs pour près de 1,2 milliard d'euros entre 2017 et 2019 et amélioration des conditions du personnel pour 1 milliard d'euros sur la même période. À quoi s'ajouteront l'acquisition de nouveaux équipements et l'entretien programmé du matériel, 812 millions d'euros sur trois ans. La trajectoire ainsi ajustée vise à adapter l'armée aux nouvelles missions des forces sur le territoire national ; à équiper et entraîner les renforts opérationnels, dont les réservistes ; à donner les moyens d'intensifier les frappes dans les opérations de contre-terrorisme ; et à accentuer la montée en puissance du renseignement et de la cyberdéfense.

L'effort supplémentaire ne porte pas majoritairement sur les opérations extérieures, les Opex, ni sur l'accélération de la livraison des matériels, notamment les Griffon et les Jaguar, que souhaite le chef d'état-major de l'armée de terre. Nous regrettons que ces demandes s'accompagnent d'économies, avec la non-rénovation d'une partie du parc des vieux VAB et des AMX 10 RC.

Les modalités de financement de ces nouvelles mesures ne sont précisées que pour l'année 2017, et non pour 2018 ni 2019. Certes, cette situation tient compte du principe d'annualité budgétaire. Mais elle révèle aussi la limite technique et la faiblesse politique du choix du Gouvernement de ne pas avoir procédé à une nouvelle actualisation de la LPM... Si bien que le futur Président de la République devra dégager 6 milliards d'euros de plus entre 2018 et 2022.

L'an prochain, le financement des nouvelles dépenses sera assuré par 317 millions d'euros de rallonge budgétaire, 100 millions de recettes de cessions immobilières additionnelles et une économie de 358 millions, à redéployer. Il s'agit notamment de 205 millions d'euros escomptés de nouveaux gains sur le coût des facteurs - prix du pétrole et de certaines fournitures, cours de la monnaie - et d'un prélèvement de 50 millions d'euros sur la trésorerie du compte des essences, grâce à la baisse du prix des carburants. Le reste provient de l'actualisation des échéanciers financiers des programmes d'armement. Or des risques pèsent sur le montant de ces diverses ressources, par nature incertaines.

Avec l'ouverture de 100 millions d'euros de plus à consommer sur les recettes du compte « Immobilier », la prévision de ressources extrabudgétaires du budget de la défense pour 2017 s'élève ainsi désormais à 250 millions d'euros : 200 millions de produits de ventes immobilières - contre 100 millions d'euros dans la LPM actualisée en juillet 2015 - et 50 millions d'euros de produits de cessions de matériel. Le caractère aléatoire du calendrier et du produit de ces ventes, avec en particulier les demandes de la Ville de Paris en matière de logement social, fragilise ces ressources extrabudgétaires.

Elles ne constituent plus qu'une part très mineure du budget de la défense, mais il ne faudrait pas que cette part augmente trop, alors même qu'elle avait été réduite en 2015.

En intégrant 205 millions d'euros d'économies nouvelles sur le coût des facteurs, la construction du budget 2017 repose sur une prévision de 480 millions d'euros d'économies, puisque la LPM 2015 en avait déjà programmé 275 millions. Mais on ne sait quelle sera exactement la conjoncture économique ni le niveau d'activité opérationnelle des forces... De plus, ce calcul prend en compte des programmes d'équipement qui restent à lancer. Cette prévision constitue donc une prise de risque importante pour la gestion 2017.

En outre, le retard pris dans le paiement de la prime Sentinelle, promise à 10 000 militaires par le Président de la République en janvier 2016, est préoccupant. Cette prime doit être versée rétroactivement depuis le 1 er janvier 2015, or elle vient seulement d'être intégrée dans le logiciel Louvois, dont on connaît les dysfonctionnements. Les intéressés recevront le montant à la rentrée 2017. Cela représente tout de même quelques dizaines de millions d'euros, or aucune recette ne semble prévue pour faire face à cette échéance ! Heureusement, le Gouvernement vient de me communiquer des éléments rassurants.

Il est heureux que le projet de collectif budgétaire déposé à l'Assemblée nationale vendredi dernier ait levé les inquiétudes quant aux mesures de régulation de la fin de gestion de l'exercice 2016.

Concernant l'état d'avancement des programmes d'armement, l'année 2017 sera encore marquée par de très nombreuses livraisons et commandes d'équipements. Le programme 146 est structuré en cinq systèmes de forces : la dissuasion ; le commandement et la maîtrise de l'information ; la projection, la mobilité et le soutien ; l'engagement et le combat ; enfin, la protection et la sauvegarde.

J'évoquerai ici le système de forces « projection-mobilité-soutien ». L'an prochain seront livrés 9 hélicoptères de transport et de surveillance NH90, dont 2 en version navale et 7 en version terrestre et 5 hélicoptères de transport tactique Cougar rénovés. Ces hélicoptères font l'objet de critiques répétées, en raison du coût prohibitif de leur maintenance, de l'immobilisation importante du parc qu'elle requiert et du manque de disponibilité opérationnelle qui en découle. Je vous renvoie au rapport pour avis de notre collègue député François Lamy.

Seront également livrés 3 avions de transport A400 M et 1 avion de transport tactique C130 J. Concernant l'A400 M, je rappelle qu'en raison des difficultés de développement et de production annoncées par Airbus au début de 2015, 8 des 15 avions qui seront livrés à l'armée de l'air d'ici à 2019 seront au standard initial, et serviront donc uniquement pour le transport logistique. Le plan d'action industriel présenté en juillet 2016 prévoit la livraison progressive jusqu'en 2020 des capacités tactiques attendues : extraction de charges lourdes par la rampe arrière, parachutage par les portes latérales, autoprotection contre des missiles, ravitaillement en vol d'hélicoptères et atterrissage sur terrain sommaire. La réalisation du plan a pris du retard.

Deux premiers A400 M dotés de capacités tactiques, ont été livrés en juin et juillet derniers. L'appareil attendu d'ici à la fin de cette année doit également correspondre à ce standard militaire. Encore faudra-t-il qu'Airbus respecte l'engagement pris par son président vis-à-vis du ministre de la défense.

L'acquisition de nouveaux C130 J a été décidée, conformément à l'actualisation de la LPM de juillet 2015, en raison de la tension sur la capacité de transport tactique et dans l'attente de la montée en capacité de l'A400 M. La commande de 4 appareils neufs a été effectuée en janvier 2016 auprès de l'armée de l'air américaine. La livraison d'un premier appareil est prévue en 2017, les trois autres d'ici à 2019.

Deux avions seront équipés afin de pouvoir ravitailler les hélicoptères en vol. Cependant, comme nous l'avons fait observer dès l'année dernière, seuls les Caracal en service dans l'armée de l'air sont munis de la perche permettant le ravitaillement en vol et seuls les Caracal peuvent être ainsi configurés. Cette faculté n'a pas été prévue pour le NH90.

Au début du mois d'octobre dernier, les ministres français et allemand de la défense ont annoncé leur intention de mutualiser une partie de leur flotte d'avions C130 J. C'est un élément de plus dans la coopération franco-allemande de défense. Et cela me semble très positif.

M. Daniel Reiner , rapporteur pour avis. - Jacques Gautier, comme moi, considère donc que ce budget est bon... Chaque année, nous manifestons une inquiétude sur la fin de gestion de l'année en cours. Si celle-ci était défaillante, le budget suivant s'exercerait dans de mauvaises conditions. D'année en année, les conditions de fin de gestion ont toutefois été améliorées par des dégels successifs et la couverture des surcoûts de toute nature. Cette année comme la précédente, le dégel des crédits de la défense est entièrement réalisé et les surcoûts des opérations extérieures et intérieures sont intégralement couverts par la solidarité interministérielle ; 600 millions d'euros de crédits de 2015 ont également été débloqués. Les choses sont claires !

Le budget exécuté de l'année 2016 s'élèvera ainsi à 33,5 milliards d'euros, que l'on peut comparer à l'engagement pris dans la loi de programmation militaire. Les aspects techniques de ces opérations seront étudiés en commission des finances ; un décret d'avance sera signé, et la loi de finances rectificative précisera les détails.

La Cour des comptes a regretté que le financement des opérations extérieures ne soit pas suffisamment pris en compte dans le budget initial. Nous sommes d'accord. Nous n'avons inscrit à ce titre que 450 millions d'euros dans la loi de programmation militaire, alors même que les prévisions approchaient 1 milliard d'euros. Nous entendions ainsi ne pas pénaliser le budget de la défense, et notamment celui des équipements militaires. Ainsi que je l'ai dit devant le rapporteur de la Cour des comptes, nous ne verrions aucun inconvénient à ce que le budget général prenne en compte les opérations extérieures dans une mission spéciale, en leur attribuant une somme plus raisonnable. Il en va de même aujourd'hui des opérations intérieures (Opint).

Les programmes d'armement sont décrits dans un document préparé par le ministère, listant les livraisons et les commandes prévues cette année. En ce qui concerne le système de forces « Engagement et combat », pour compléter les propos de Jacques Gautier, dans le respect du calendrier de la loi de programmation militaire seront livrés 3 avions Rafale dont 2 marine, 6 hélicoptères Tigre, une frégate multimissions (Fremm), les premiers véhicules blindés légers (VBL), et les premiers 5340 fusils d'assaut HK de nouvelle génération, choisis par appel d'offres parmi d'autres marques européennes pour remplacer le Famas : et seront commandés 12 000 de ces fusils, un sous-marin nucléaire d'attaque (SNA) Barracuda, 20 engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) Jaguar, 319 véhicules blindés multirôles (VBMR) Griffon, des VBL ; enfin, pour les forces spéciales, 23 véhicules poids lourd (PLFS) et 120 petits véhicules aérolargables de type fardier.

Nous nous réjouissons des efforts qui ont conduit au succès à l'export du Rafale. Un contrat a été signé avec l'Inde avec une première tranche de 36 avions annoncée dès avril 2015, après les contrats conclus avec l'Égypte et le Qatar pour 24 appareils chacun. Ces ventes ont permis de lever l'hypothèque budgétaire pesant sur loi de programmation militaire de 2013, l'État s'étant alors engagé à commander 11 appareils par an pendant six ans en cas de non-réalisation des objectifs à l'export.

Nous souhaitons en outre que soit étudiée l'idée d'une anticipation à 2017 du développement du standard F4 du Rafale, afin de préserver les compétences des bureaux d'étude.

Pour la marine, la réflexion sur les frégates de taille intermédiaire (FTI) a conduit à compléter le format Fremm par des frégates de plus petite taille, plus faciles à exporter. Cette réflexion conjointe de la DGA, DCNS et Thalès nous place à la pointe du progrès à l'échelle mondiale. Ces FTI représentent une avancée technologique majeure. La société DCNS peine toutefois à retrouver les compétences qu'elle a perdues, comme l'indique le retard de livraison du Barracuda.

M. Xavier Pintat , rapporteur pour avis. - En complément des exposés de Jacques Gautier et Daniel Reiner, dont, bien sûr, je partage les orientations, j'aborderai trois sujets : la dissuasion, l'espace, et les drones.

Concernant notre force de dissuasion nucléaire, en 2017, l'action stratégique « dissuasion » doit bénéficier de près de 2,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 3,8 milliards d'euros en crédits de paiement. Ces sommes importantes ne doivent toutefois pas provoquer un effet d'éviction d'autres équipements.

La conjoncture internationale justifie le maintien de l'effort de dissuasion, qui est essentielle à la crédibilité de la France sur la scène internationale - elle justifie notre siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. La programmation militaire actualisée a renforcé les moyens de notre outil de défense, sans remettre en cause cet effort budgétaire, mobilisé pour les deux composantes de la dissuasion, aéroportée et océanique.

Dans les prochaines années, la modernisation du dispositif de dissuasion, en particulier de sa composante aéroportée, appellera d'importants investissements. Cet effort nécessaire devra faire l'objet d'une programmation financière pour soutenir les programmes de dissuasion, tout en conservant des marges de manoeuvre pour des opérations d'armements conventionnels. Ceux-ci permettent en effet de répondre aux menaces les plus pressantes, notamment le terrorisme.

Le budget pour 2017 intègre le financement de la poursuite de la rénovation indispensable à mi-vie du missile ASMP-A (air-sol moyenne portée amélioré), des travaux de conception du sous-marin nucléaire lanceur d'engins de troisième génération, de l'adaptation au missile M51 du Téméraire , le dernier sous-marin livré, et de la quatrième génération des supercalculateurs Tera 1000.

Le tir d'acceptation du M51 effectué le 1 er juillet dernier a été couronné de succès. Il s'agissait du huitième tir d'essai du programme et le premier du missile dans sa version 2 depuis le SNLE Le Triomphant , permettant ainsi de qualifier la tête nucléaire océanique. L'échec de 2013 paraît désormais lointain.

S'agissant de l'espace militaire, les crédits sont prévus à hauteur de 492 millions d'euros, contre 489 millions en 2016, mais 151 millions en 2015 et 389 millions en 2014. Ces fortes variations s'expliquent par le cycle des programmes.

La dotation vise principalement à financer les programmes d'imagerie optique et de radar (Musis), de renseignement électromagnétique (Ceres), et de communications par satellite (Syracuse IV). Les priorités du spatial militaire restent en effet les télécommunications, avec Syracuse IV, le renseignement, avec les programmes Musis et Ceres, ainsi que l'alerte avancée pour la défense antimissile, dont le calendrier a cependant été décalé au-delà de la période couverte par la LPM pour 2014-2019.

Le secteur spatial doit être soutenu en tant qu'enjeu de souveraineté et parce qu'il représente un enjeu scientifique, technologique et industriel - les technologies spatiales constituent un véritable laboratoire d'innovations. La France est un investisseur mondial de premier plan, derrière les États-Unis, qui dépensent 50 milliards d'euros, et sans doute derrière la Russie et la Chine, dont les budgets, que l'on ne connaît pas, approchent peut-être 10 milliards d'euros.

Il faut donc soutenir les coopérations européennes, comme le programme Musis, issu de la coopération décidée en mars 2015 entre le système allemand d'observation radar par satellite (SARah) et la composante spatiale optique (CSO) réalisée sous responsabilité française. Je rappelle qu'un troisième satellite CSO est financé aux deux tiers de son coût, soit 210 millions d'euros, par l'Allemagne, pour un lancement prévu en 2021, à la suite du lancement des deux premiers, lesquels sont financés par la France.

Concernant les drones, l'accord conclu l'année dernière entre l'Allemagne, l'Italie et la France, rejointes par l'Espagne, pour conduire une étude sur deux ans visant à déterminer les prérequis opérationnels et à élaborer le prototype d'une nouvelle génération de drones de moyenne altitude et de longue endurance (Male) à l'horizon 2025, marque la poursuite de l'effort de recherche. L'arrangement-cadre est entré en vigueur le 22 juin 2016 et la notification du contrat d'étude de définition est intervenue en septembre dernier. Les maîtres d'oeuvre en sont Dassault, Airbus-Allemagne et Leonardo - anciennement Finmeccanica - en attendant une possible participation industrielle de l'Espagne. Il sera toutefois difficile de produire un drone Male européen conjuguant la satisfaction d'un besoin militaire partagé et un coût susceptible de créer un marché.

Concernant les drones Reaper en service dans notre armée de l'air, la loi de programmation militaire a prévu d'ici à 2019 la livraison de 4 systèmes complets, comprenant chacun 3 vecteurs, pour un total de 12 drones.

Un premier système, composé de 2 vecteurs, a été livré sur la base aérienne de Niamey, au Niger, fin 2013 et officiellement mis en service au début 2014, puis complété par son troisième vecteur en mai 2015. Un deuxième système a été commandé en juillet 2015, pour une livraison prévue fin 2016, et la commande d'un troisième système a été passée en décembre 2015, pour une livraison en 2019. La commande du quatrième système est programmée pour la fin de l'année 2016, pour une livraison en 2019. Nous disposerons alors des 4 systèmes complets.

Ces Reaper servent de manière intensive dans la bande sahélo-saharienne. Ils ont amélioré de manière significative la capacité opérationnelle de nos forces, qui ne peuvent désormais plus se passer de cet apport essentiel en matière de renseignement.

Du côté de l'armée de terre, le programme de système de drones tactiques (SDT) vise à remplacer, à l'horizon 2017, les drones tactiques Sperwer actuellement en service. En janvier dernier, la DGA a choisi le Patroller de Sagem, de préférence au Watchkeeper de Thalès qui équipe les forces britanniques. Un des points forts du Patroller tient à sa boule optronique, offrant des performances remarquables pour l'identification d'objectifs. De même, son acceptation dans l'espace aéronautique français paraît plus facile. Le premier système opérationnel est attendu pour la fin de l'année 2018, le second, avec les moyens de formation et d'entraînement, en 2019.

Le chef d'état-major de l'armée de terre attend beaucoup du Patroller. Lors de son audition par notre commission, il a souligné que l'armée de terre et l'armée de l'air ne se concurrençaient pas dans ce domaine. Un prochain exercice commun est d'ailleurs prévu, dans lequel des avions et des drones de l'armée de l'air vont travailler avec des drones de l'armée de terre afin de démontrer leur complémentarité.

Les drones concernent aussi la marine, le salon Euronaval l'a montré comme notre récente audition de l'amiral Prazuck, chef d'état-major de la marine. À cet égard, les crédits du programme 146 comprennent les moyens de financement du système de lutte anti-mines marines du futur (Slamf), qui prépare le renouvellement de la capacité de guerre des mines pour remplacer le système actuel. La réalisation d'un prototype a été commencée en 2016 et se poursuivra l'année prochaine. En outre, je signale que les études et les expérimentations en vue de l'intégration d'un drone aérien sur les plateformes de la marine doivent être lancées d'ici à 2019, notamment au profit des futures frégates de taille intermédiaire.

Jacques Gautier, Daniel Reiner et moi-même émettons, sur les crédits du programme 146 prévus pour 2017, une appréciation positive. Sous réserve de l'avis des autres rapporteurs, nous recommandons l'adoption des crédits de la mission « Défense », quand bien même leur examen ne devrait pas aller jusqu'à la séance publique du Sénat.

M. Jean-Pierre Raffarin , président . - Ce rapport conséquent est à la dimension du sujet ! Avant de donner la parole à nos collègues, je vous rappelle que le vote sur les crédits de la mission se fera à la fin de l'examen de l'ensemble des rapports pour avis sur les divers programmes.

M. Jean-Marie Bockel . - Certains de nos collègues se sont livrés pour la dernière fois à cet exercice du rapport budgétaire, cela a été relevé dans le monde militaire, qui est très respectueux de leur remarquable travail.

Devrions-nous travailler sur le renouvellement des matériels aéroportés ? Le rapport de notre collègue député Lamy, mentionné par Jacques Gautier, fait le point sur la question, et des militaires affirment qu'une amélioration commence à être perceptible. Ce n'est toutefois pas le cas partout.

Les rapporteurs pour avis peuvent-ils développer cette question, surtout si nous ne sommes pas amenés à l'étudier de manière approfondie ?

M. Jacques Gautier , rapporteur pour avis . - Le rapport Lamy est très précis, mais il est trop tôt pour en dire plus. L'armée de terre dispose de 300 hélicoptères, dont seuls 100 sont disponibles, quand il en faudrait au moins 150. S'il est normal que le parc se partage entre les appareils en rénovation et ceux qui sont en phase opérationnelle, le rapport ne saurait se maintenir à un sur trois.

L'industriel a conçu des hélicoptères modernes et sophistiqués, mais l'armée a également besoin d'équipements plus rustiques. Il faudra un jour parvenir à faire coïncider l'intelligence demandée aux matériels et la réalité de leur emploi.

Quant à l'hélicoptère interarmées léger, le HIL, Airbus souhaite proposer un hélicoptère commun aux trois armées, dont les besoins sont pourtant différents. Un programme commun déboucherait sur un six-tonnes cher, sophistiqué, dont les coûts d'entretien seraient exorbitants. Cela ne correspond pas aux besoins des armées. Nous devons donc rester vigilants.

M. Jean-Marie Bockel . - Il y a matière, peut-être, à un travail de la commission ?

M. Jean-Pierre Raffarin , président . - Assurément. Nous verrons cela le moment venu.

M. Daniel Reiner , rapporteur pour avis . - Nous souhaitions mener ce travail. La situation des régiments d'hélicoptères - ceux engagés en Centrafrique, dans l'opération Barkhane ou en France - n'est pas satisfaisante. Les Allemands connaissent les mêmes difficultés - mais cela ne règle pas nos problèmes !

Nous voulions comprendre comment nous en sommes arrivés là. Dans son rapport sur l'aviation légère de l'armée de terre, M. Lamy a livré dix éléments d'explication ; il reste à trouver les dix solutions correspondantes. Le ministre de la défense a amorcé, il y a un an et demi, une réflexion incluant toutes les parties prenantes. Les rapports d'étape analysant les difficultés ont été présentés devant le comité exécutif restreint (COMEX) du ministère, mais les solutions tardent à émerger. Les responsabilités sont partagées entre tous les acteurs. Le constructeur, d'abord, est en situation de monopole et s'intéresse plus au civil qu'au militaire. Il fabrique donc des hélicoptères dérivés du civil, qui ne conviennent pas aux militaires. Le processus de maintien en condition opérationnelle comprend beaucoup d'étapes, dont chacune requiert un délai, durant lequel rien n'est fait. Ainsi, un Tigre peut rester 360 jours au sol pour entretien, parce qu'il aura fallu 100 jours pour obtenir les documents, puis 100 jours pour recevoir les pièces, et ainsi de suite.

Nous voulions taper du poing sur la table, identifier et analyser les responsabilités, afin de sortir enfin de cette situation insupportable. Nous n'étions d'ailleurs pas d'accord avec les achats nouveaux. Les hélicoptères sont trop importants, aujourd'hui, dans l'aérocombat, pour que l'on s'en prive ainsi. Au vu de la mobilisation du ministère, nous sommes optimistes. Mais nous devons lancer un cri d'alarme, et condamner l'immobilisme.

M. Jean-Paul Émorine . - C'est Airbus qui a repris EADS, donc Eurocopter, et l'État en est actionnaire. Ne peut-il pas imposer un programme ? Airbus vend des appareils dans 180 pays, cette entreprise doit être en mesure de fournir les hélicoptères qui conviennent aux besoins des armées !

M. Jacques Gautier , rapporteur pour avis . - Je réponds ici à une question que m'avait posée Joël Guerriau au sujet du pôle d'excellence franco-britannique sur les missiles. Notre collègue s'interrogeait sur l'utilisation d'uranium appauvri dans les vecteurs qui en sont issus. Toutefois, un député a directement posé la question au Gouvernement, à propos des missiles que nous achetons aux Américains. Dans sa réponse, le ministre a assuré que la France n'achetait pas d'armes contenant de l'uranium appauvri.

Enfin, je rappelle la position des rapporteurs sur les crédits inscrits pour 2017 dans le programme 146 : elle est favorable.

À l'issue de cette réunion, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense » .

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