LES CRÉDITS DU TITRE 2

I. UN BUDGET MARQUÉ PAR L'EVOLUTION DU CONTEXTE SECURITAIRE

A. DES RÉDUCTIONS D'EFFECTIFS REMISES EN CAUSE

1. L'actualisation de la programmation militaire par la loi du 28 juillet 2015

La LPM de décembre 2013 avait défini un programme de réduction d'effectifs portant sur un total de 33 675 équivalents temps plein (ETP) sur la durée de la programmation (2014-2019), dont 10 175 ETP correspondaient au reliquat de la programmation précédente et 23 500 ETP constituaient de nouvelles déflations, à réaliser selon le cadencement suivant :

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

2014-2019

Déflation LPM 2014-2019

-5 000

-7 500

-7 500

-3 500

-23 500

Créations de postes au titre des réformes précédentes

+ 103

+ 103

+206

Déflation résiduelle au titre des réformes précédentes

-7 881

-2 500

-10 381

Déflation totale

-7 881

-7 500

-7 397

-7 397

-3 500

0

-33 675

Cette déflation visait à permettre une meilleure maîtrise de la masse salariale. Elle avait vocation à porter en priorité sur le soutien et l'environnement , afin de préserver les forces opérationnelles, et devait s'accompagner d'un rééquilibrage des effectifs au profit du personnel civil dans les secteurs non opérationnels.

La cible fixée pour 2014, première année d'exécution de cette programmation avait été atteinte et même dépassée (8 007 déflations réalisées en 2014, soit 126 de plus que prévu).

Toutefois, la décision prise par le Président de la République, lors du Conseil de défense du 29 avril 2015, de renforcer significativement les effectifs de la Force opérationnelle terrestre (FOT), afin de permettre le maintien dans la durée de l'opération Sentinelle, engagée à la suite des attentats du 8 janvier 2015 et donc la présence en permanence de 7 000 hommes (avec une capacité de remontée à 10 000 hommes pendant un mois en cas de crise) sur le territoire national a rendu nécessaire une révision à la baisse des objectifs de déflations initialement fixés .

La loi du 28 juillet 2015 d'actualisation de la programmation militaire a par conséquent acté la diminution du n ombre de déflations à réaliser , qui ne seraient plus que de 14 925 ETP sur la période 2014-2019 au lieu des 33 675 ETP initialement prévus, soit 18 750 « moindres déflations ».

Compte tenu des 8 007 déflations effectivement réalisées en 2014, l'effort sur la période 2015-2019 ne porterait plus que sur 6 918 ETP , répartis comme suit :

2015

2016

2017

2018

2019

Total

0

+2300

-2600

-2800

-3818

-6918

Les 18 750 déflations évitées sur la période 2017-2019 devaient permettre :

- 15 250 créations de postes au titre des nouvelles missions du ministère , réparties de la manière suivante :

. 13 400 destinées à renforcer la mission de protection , dont 11 000 pour renforcer la force opérationnelle terrestre ( FOT), dont les effectifs seront portés de 66 000 à 77 000 hommes, le solde (2 400) servant à assurer le soutien de l'opération Sentinelle ainsi que la mission Cuirasse de protection des installations militaires (qui concerne les trois armées) ;

. près de 900 pour le renseignement et la lutte informatique active , dont 250 découlant des annonces faites par le Premier ministre à la suite des attentats de janvier 2015 ;

. environ 950 consacrés au soutien à l'exportation (dit « SOUTEX »), notamment dans le cadre de la vente d'avions Rafale à l'Egypte et au Qatar, au renforcement des systèmes d'information et des infrastructures opérationnelles ainsi qu'à la mise en oeuvre de matériels nouveaux ;

- le maintien de 3 500 postes , dont la suppression s'avérait difficilement réalisable (sur un total de 7 000), ce qui signifie que plus de 3 500 déflations problématiques devront encore être réalisées.

Au final, 95 % de l'allègement des déflations devait bénéficier aux forces armées.

Malgré cet allègement des déflations, la manoeuvre des départs se poursuit. Les cibles annuelles d'évolution des effectifs fixées par la programmation actualisée sont en effet des soldes résultant d'un double mouvement de créations et de suppressions de postes.

Compte tenu des créations de postes prévues, atteindre la cible de 6 918 déflations nettes sur 2015-2019 suppose en effet de supprimer 22 317 postes sur 2015-2019 , comme le montre le tableau suivant, qui figure dans le rapport annexe de la loi du 28 juillet 2015 :

2015

2016

2017

2018

2019

Total

2015-2019

Créations de postes

+ 7 500

+6 800

+ 819

+ 218

+ 62

+ 15 399

Suppressions de postes

- 7 500

- 4 500

- 3 419

- 3 018

- 3 880

- 22 317

Bilan

0

+ 2 300

- 2 600

- 2 800

- 3 818

- 6 918

L'essentiel des créations de postes (14 300 sur un total de 15 399) interviendra en 2015 et 2016, afin de permettre de procéder rapidement aux recrutements nécessaires pour soulager les forces armées sous pression. La loi prévoyait ensuite que l'effort à accomplir en matière de réduction des effectifs serait important en 2015 puis plus modéré et bien réparti sur les années suivantes de la programmation.

2,8 milliards d'euros (sur les 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires consacrés à la défense par rapport à la LPM initiale) devaient permettre de financer ces moindres déflations et les coûts de fonctionnement correspondants.

2. Les conséquences des attentats du 13 novembre 2015 et de la menace sur le territoire national

Les attentats dramatiques commis à Paris le 13 novembre dernier viennent de marquer une nouvelle inflexion dans les évolutions d'effectifs prévues sur la fin de la programmation.

Dans le discours qu'il a prononcé devant le Parlement réuni en Congrès, le lundi 16 novembre 2015, le Président de la République a en effet annoncé que la situation de « guerre » dans laquelle nous nous trouvions implique une augmentation des moyens.

S`agissant des armées, compte tenu de leur grande sollicitation en vue de la protection du territoire et dans le cadre des opérations extérieures, « il n'y aurait aucune diminution d'effectifs dans la défense jusqu'en 2019 », au bénéfice des unités opérationnelles, de la cyberdéfense et du renseignement.

Le Président a demandé au gouvernement de lui présenter sans attendre une nouvelle planification des effectifs de la défense jusqu'en 2019.

Selon M. Jacques Feytis, directeur des ressources humaines du ministère de la défense, auditionné le 18 novembre, l'année 2016 - qui prévoit au demeurant une augmentation nette des effectifs en application de la loi du 28 juillet dernier - ne serait pas impactée par cette annonce , la révision de la trajectoire ne portant que sur les années 2017-2019.

Il n'est pas possible d'estimer à ce stade avec précision l'impact de cette décision en termes d'évolution des effectifs. En effet, les termes utilisés par le Président donnent lieu à différentes interprétations :

- doit-on considérer que ce sont les déflations nettes (soldes figurant au bas du tableau figurant dans le rapport annexe de la loi du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire) qui sont annulées (soit 9 218 ETP sur 2017-2019), ce qui signifierait une stabilisation des effectifs à leur niveau de 2016 ?

- ou que ce sont l'ensemble des suppressions de postes qui sont visées (soit 10 317 ETP sur 2017-2019), ce qui permettrait au ministère de la défense de bénéficier de 1 099 créations nettes de postes sur la période 2017-2019 ? C'est naturellement cette dernière interprétation qui, au sein de votre commission, reflète le mieux la priorité que le Président de la République a entendu donner à la remontée en puissance des effectifs militaires.

Le débat en séance publique, nous l'espérons, permettra sans doute d'éclaircir ce point car nos armées ont besoin de visibilité en la matière.

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