Avis n° 652 (2013-2014) de M. François PATRIAT , fait au nom de la commission des finances, déposé le 25 juin 2014
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LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES
FINANCES
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AVANT-PROPOS
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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I. L'INQUIÉTANTE DÉRIVE
FINANCIÈRE DU SYSTÈME FERROVIAIRE
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II. LES GRANDES LIGNES DE LA RÉFORME
PROPOSÉE
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III. UNE TRAJECTOIRE FINANCIÈRE
AMBITIEUSE
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A. UN OBJECTIF DE STABILISATION DE LA DETTE
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B. UN SCÉNARIO SOUMIS À DES
ALÉAS
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C. DES EFFORTS PLUS IMPORTANTS DEVRONT ÊTRE
CONSENTIS POUR RÉDUIRE LA DETTE FERROVIAIRE
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A. UN OBJECTIF DE STABILISATION DE LA DETTE
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I. L'INQUIÉTANTE DÉRIVE
FINANCIÈRE DU SYSTÈME FERROVIAIRE
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EXAMEN DES ARTICLES
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ARTICLE PREMIER - Principes
généraux du système de transport ferroviaire national,
groupe public ferroviaire, organisation et fonctionnement de
l'établissement public SNCF
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ARTICLE 2 - Constitution de SNCF
Réseau
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ARTICLE 2 TER (NOUVEAU) - Rapport sur le
traitement de la dette historique du système ferroviaire
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ARTICLE 4 - Compétences de
l'Autorité de régulation des activités ferroviaires
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ARTICLE 5 - Constitution de SNCF
Mobilités
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ARTICLE PREMIER - Principes
généraux du système de transport ferroviaire national,
groupe public ferroviaire, organisation et fonctionnement de
l'établissement public SNCF
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EXAMEN EN COMMISSION
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AMENDEMENTS PRÉSENTÉS PAR LA
COMMISSION DES FINANCES
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
N° 652
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014
Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 juin 2014 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE , portant réforme ferroviaire ,
Par M. François PATRIAT,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Marini , président ; M. François Marc , rapporteur général ; Mme Michèle André , première vice-présidente ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Jean-Pierre Caffet, Yvon Collin, Jean-Claude Frécon, Mmes Fabienne Keller, Frédérique Espagnac, MM. Albéric de Montgolfier, Aymeri de Montesquiou, Roland du Luart , vice-présidents ; MM. Philippe Dallier, Jean Germain, Claude Haut, François Trucy , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Jean Arthuis, Claude Belot, Michel Berson, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Joël Bourdin, Christian Bourquin, Mme Nicole Bricq, MM. Jacques Chiron, Serge Dassault, Vincent Delahaye, Francis Delattre, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, François Fortassin, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Charles Guené, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Yves Krattinger, Dominique de Legge, Gérard Miquel, Georges Patient, François Patriat, Jean-Vincent Placé, Jean-Marc Todeschini, Richard Yung . |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : |
1468 , 1965 , 1990 et T.A. 358 |
|
Sénat : |
650 (2013-2014) |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES FINANCES
Réunie le mercredi 25 juin sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. François Patriat, rapporteur pour avis, sur le projet de loi n° 650 (2013-2014) portant réforme ferroviaire. La commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption des articles 1 er , 2, 2 ter , 4 et 5 dont elle s'est saisie. Elle a noté que la dette du gestionnaire du réseau ferroviaire s'élève à 37 milliards d'euros et qu'elle pourrait atteindre 70 milliards d'ici 2025 et continuer de croître en l'absence de réforme. Celle-ci vise donc à stabiliser la dette à cette date. La fusion des trois entités en charge de l'infrastructure, l'effort budgétaire de l'État et la mise en place de garde-fous financiers, notamment une règle prudentielle en matière d'investissements, sont les instruments mis en oeuvre par le projet de loi en vue d'atteindre cet objectif. Elle a adopté quatre amendements visant à clarifier plusieurs dispositions relatives à l'équilibre financier du futur groupe public ferroviaire. |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le projet de loi portant réforme ferroviaire a été déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 18 octobre 2013. Il a été examiné par l'Assemblée nationale, en première lecture, les 17, 18 et 19 juin 2014.
Ce texte résulte de plusieurs travaux de réflexion lancés avec les Assises du ferroviaire organisées à la fin de l'année 2011. En particulier, la commission 2 des Assises, sur la gouvernance du système ferroviaire, avait préconisé de « regrouper les métiers de l'infrastructure ».
Au vu de ces conclusions, le Gouvernement a décidé, début 2013, de mettre en oeuvre le chantier de la réforme ferroviaire en s'appuyant sur deux rapports, l'un remis par Jean-Louis Bianco sur l'organisation du système ferroviaire public 1 ( * ) , l'autre par Jacques Auxiette sur le rôle des régions 2 ( * ) .
La réforme proposée vise d'abord à réunifier la gestion de l'infrastructure, aujourd'hui éclatée entre la SNCF et RFF, au sein d'un établissement dénommé « SNCF Réseau ». Ce dernier sera intégré à un groupe public, SNCF, comprenant une autre filiale, « SNCF Mobilités », dont le métier sera le transport de voyageurs ou de marchandises.
La commission des finances a porté un regard attentif à l'équilibre financier de la réforme dans un contexte où la dette du système ferroviaire atteint 44 milliards d'euros, dont 37 milliards au titre de l'infrastructure. Plus préoccupant encore, cette dette continue de croître à un rythme annuel de 1,5 milliard d'euros (hors financement de nouvelles lignes).
Jusqu'en mai dernier, la dette de RFF n'était pas consolidée dans la dette publique. Mais l'INSEE a revu sa doctrine et considère désormais qu'un tiers environ de sa dette doit être considérée comme de la dette publique. Cette décision n'a, pour l'instant, pas d'impact sur le respect par la France des ratios « maastrichiens ».
La question plus fondamentale tient au fait de savoir si le système ferroviaire pourra ou non faire face à sa dette et si, à terme, l'État devra se substituer à lui. Dès lors, l'objectif de stabilisation de la dette ferroviaire à horizon dix ans est un sujet qui concerne les finances publiques.
Il faut enfin noter que l'équilibre financier de la réforme n'est pas intégralement compris dans le présent projet de loi. Certaines dispositions seront inscrites dans le premier projet de loi de finances rectificative pour 2014, tandis que d'autres mesures relèvent de la gestion des futurs établissements SNCF Mobilités et SNCF Réseau.
La commission des finances a examiné l'équilibre financier de la réforme. Elle s'est plus particulièrement saisie des articles 1 er , 2, 2 ter , 4 et 5 qui comprennent des dispositions de nature financière.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. L'INQUIÉTANTE DÉRIVE FINANCIÈRE DU SYSTÈME FERROVIAIRE
A. UNE ORGANISATION RESTÉE UNIQUE EN EUROPE
1. La maintenance du réseau : une responsabilité partagée entre RFF et SNCF-Infra
L'organisation actuelle du système ferroviaire public résulte de la loi n° 97-135 du 13 février 1997 portant création de l'établissement public « Réseau ferré de France » en vue du renouveau du transport ferroviaire . La création de RFF répondait à la nécessité de se conformer à une directive européenne de 1991 3 ( * ) , qui avait imposé la séparation entre gestionnaires et utilisateurs du réseau, prémices d'une ouverture à la concurrence des activités ferroviaires.
L'architecture retenue fut toutefois unique en Europe. RFF est qualifié de « gestionnaire d'infrastructure » et, à ce titre, propriétaire du réseau. La SNCF - plus spécifiquement sa branche SNCF-Infra - est quant à elle « gestionnaire d'infrastructure délégué ». Autrement dit, si RFF assure une fonction de pilotage, il est contraint de se tourner vers SNCF-Infra et ses 40 000 cheminots pour réaliser les travaux et la maintenance quotidienne sur le réseau . Ce modèle a été retenu principalement pour des raisons sociales.
Au surplus, en 1997, alors que la France se préparait au passage à l'euro, la création de RFF présentait l'avantage de « décharger » la SNCF de sa dette historique - environ 20,5 milliards d'euros - sans pour autant qu'elle soit reprise par l'État. Une reprise de dette, à l'instar de celle opérée en Allemagne, aurait rendu plus difficile l'atteinte des « critères de Maastricht ». À ce titre, RFF est souvent qualifié de « structure de défaisance ».
Jusqu'à récemment, la dette de RFF n'était pas considérée comme de la dette publique, dite « maastrichienne », car son passif doit être mis en regard avec son actif - le réseau - qui lui permet de lever des recettes commerciales (les péages). Au regard des critères d'Eurostat, RFF était donc vu comme une entreprise privée. Cette analyse a toutefois été récemment remise en cause par l'INSEE (cf . infra ).
2. La gestion des sillons : une responsabilité partagée entre RFF et la direction de la circulation ferroviaire
Autre incongruité du modèle français, l'attribution et la gestion des « sillons » - les créneaux de circulation sur le réseau - sont pilotées par RFF mais effectivement assurées par la direction de la circulation ferroviaire (DCF), qui est un service autonome au sein de la SNCF.
Les missions de la direction de la circulation ferroviaire « Les missions de la DCF sont fixées par la loi. Les modalités sont, elles, définies par Réseau Ferré de France (RFF) dans le cadre d'une convention de gestion : « - Tracé des sillons et conception des horaires pour les trains de voyageurs et marchandises : il s'agit de déterminer les possibilités pour un train de circuler, à un moment et à un endroit donnés sur le réseau. « - Régulation du trafic par le CNO Circulation (Centre National des Opérations) et les Centres Opérationnels de Gestion des Circulations (COGC) en régions, en toute sécurité. « - Gestion opérationnelle des circulations : tracé des itinéraires (chemins que vont suivre les trains grâce aux aiguillages successifs) ; suivi en temps réel ; ordonnancement et supervision des circulations et gestion de la signalisation. « - La veille opérationnelle, la responsabilité de la sécurité des circulations au quotidien et la sécurité du personnel qui travaille sur les voies ». Source : www.circulation-ferroviaire.fr |
Or ce mode d'organisation n'a pas été jugé conforme aux textes européens par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt rendu le 18 avril 2013 4 ( * ) . La Cour estime en effet que « la DCF, bien qu'étant supervisée par RFF, gestionnaire d'infrastructure indépendant, est chargée [...] de fonctions essentielles [...] et est intégrée au sein de l'entreprise ferroviaire, à savoir la SNCF. Partant, pour pouvoir assumer des fonctions de répartition, la DCF doit également être indépendante de la SNCF sur les plans juridique, organisationnel et décisionnel.
« Ainsi, sur le plan juridique, la DCF doit disposer d'une personnalité juridique distincte de celle de la SNCF et, d'autre part, d'organes et de ressources propres, distincts, eux aussi, de ceux de la SNCF .
« Force est, toutefois, de constater que, en France, la DCF ne bénéficie pas d'une personnalité juridique distincte de celle de la SNCF, ce qui n'est pas contesté par la République française. Ainsi, l'indépendance juridique [...] n'existe pas entre la DCF et la SNCF.
« Dès lors que le critère d'indépendance juridique n'est pas rempli, il n'y a pas lieu d'examiner les critères d'indépendance organisationnelle et décisionnelle étant donné qu'il doit être satisfait à ces trois critères cumulativement, le défaut dans le chef de la DCF de l'un d'entre eux suffisant à établir un manquement à [...] la directive 91/440 ainsi qu'à [...] la directive 2001/14 ».
Compte tenu de cette décision, le statu quo n'est plus possible et la législation doit évoluer pour que la DCF soit pleinement intégrée à RFF , à défaut de quoi, la France risquerait d'être condamnée pécuniairement.
B. UNE GESTION DE L'INFRASTRUCTURE COÛTEUSE ET SOUS-OPTIMALE
1. Des relations dégradées entre RFF et SNCF-Infra
L'organisation décrite plus haut s'est révélée particulièrement peu efficace . En septembre 2012, la commission des finances du Sénat avait eu l'occasion d'en relever les défauts et les dysfonctionnements 5 ( * ) (cf . encadré).
Extraits du rapport de la commission des
finances
« Dès 1997, le législateur avait conscience de cet enchevêtrement de responsabilités puisque la loi créant RFF prévoyait, dès son article 1 er , que RFF et SNCF-Infra signent une convention. « Les deux entreprises sont engagées dans une relation de ?collaboration forcée? : RFF doit se tourner vers son partenaire incontournable, SNCF-Infra, tandis que le chiffre d'affaires de cette dernière est constitué à plus de 80 % par les commandes de RFF. « Elles ont donc conclu différentes conventions. La Cour des comptes juge que ce dispositif de conventions est ?à bout de souffle? . En effet, il a été élaboré ?dans un contexte de méfiance réciproque, il aboutit à un dispositif tatillon et procédurier, faiblement régulé, dont le renouvellement, par avenants ou nouvelles conventions, s'est effectué au prix de négociations de plus en plus laborieuses, qui mobilisent les énergies et le temps des responsables des deux établissements publics . « ?Dans ce qui apparaît de plus en plus comme un dialogue de sourds, les désaccords réciproques peuvent se résumer comme suit : « ?pour RFF, une information encore insuffisante de la part de la SNCF sur la gestion et les coûts de la maintenance, une productivité insuffisante, une difficulté de SNCF-Infra à sortir d'une maintenance au fil de l'eau et à s'adapter à l'approche industrielle prônée par RFF ; « ?pour SNCF-Infra, une incapacité de RFF à fournir une vision claire du devenir du réseau, une imprécision de la commande et une instabilité des conditions de réalisation liée à une méconnaissance de la réalité de l'exercice de la maintenance sur le terrain, une relation économiquement déséquilibrée, un refus de prendre en compte l'autonomie de gestion de la SNCF et ses responsabilités pénales en matière de sécurité?. « Illustration de cette mésentente, les systèmes d'information des deux entreprises ne sont toujours pas compatibles. « Au total, près de 200 personnes seraient affectées à la négociation de conventions minutieusement détaillées et dont la Cour des comptes souligne in fine qu'elles sont ?dépourvues d'ambition collective? ». |
Devant la commission du développement durable, Guillaume Pépy, président de SNCF, a confirmé ce diagnostic : « il y a un et un seul réseau, qui doit se partager entre les travaux, de maintenance et de régénération, et les circulations. Pour avoir vécu ces quinze dernières années le face-à-face de deux établissements publics, qui auraient pourtant dû être côte-à-côte, et la guerre ouverte qu'ils ont menés pendant quelques années, on voit bien que l'utilisation du réseau n'était pas optimale . Tout le monde connaît des tas d'exemples où des travaux prévus empêchaient la circulation des trains, alors que ces travaux n'avaient finalement pas lieu et inversement, des trains empêchant la réalisation de travaux alors que, finalement, le train ne circulait pas. De l'avis général, le réseau ferroviaire français est sous-utilisé, faute de coordination entre celui qui a la charge du réseau et ceux qui sont responsables des transports » 6 ( * ) .
2. Une insuffisante maîtrise des coûts
Les relations difficiles entre RFF et SNCF-Infra ont des conséquences directes sur le coût de la maintenance.
Le même rapport de la commission des finances relevait que RFF rémunère principalement au forfait - environ 2 200 millions d'euros par an - les interventions de SNCF-Infra et non pas au coût réel. En conséquence, cette méthode de rémunération n'emporte aucune incitation à réduire les coûts. Le rapport souligne qu'elle « s'est révélée contre-productive. Elle n'incite pas SNCF-Infra à réaliser effectivement des gains de productivité puisqu'elle peut tout aussi bien réduire le volume de ses interventions. Elle n'incite pas non plus RFF à contrôler les coûts de SNCF-Infra, par exemple à travers un système de bonus-malus ».
Or, depuis quelques années, les coûts de la maintenance ont progressé, principalement du fait que les chantiers se déroulent de nuit mais aussi compte tenu de la hausse du prix des matières premières .
La Cour des comptes estime, pour sa part, que « la capacité propre de RFF à infléchir les trajectoires financières et budgétaires est surestimée. RFF, qui est tenu de recourir à la SNCF pour la maintenance, ne dispose pas pleinement des leviers d'action indispensables pour assurer à la fois la réussite de son schéma industriel, son ambition commerciale et ses gains de productivité . En effet, les paramètres relatifs au coût social (notamment, l'incidence financière de la réforme des retraites) lui échappent. Il en est de même pour l'organisation des travaux et les gains de productivité qui lui sont associés. Ils dépendent du gestionnaire d'infrastructure délégué. De son coté, ce dernier se plaint de l'allocation de plages-travaux insuffisantes et d'un développement coûteux des chantiers nocturnes » 7 ( * ) .
Dès lors, la séparation des deux entreprises entrave toute recherche de gains de productivité. Si la relation contractuelle forcée, évoquée plus haut, a permis de créer une certaine émulation pour SNCF-Infra, elle reste insuffisante pour dépasser les exigences contradictoires des deux acteurs de l'infrastructure.
La situation actuelle est donc sous-optimale, alors même que les besoins apparaissent particulièrement élevés dans les années à venir .
C. DES BESOINS CONSIDÉRABLES FINANCÉS PAR L'ENDETTEMENT
1. Le poids du passé et de lourds chantiers à venir
Pour bien comprendre les enjeux financiers, il faut d'abord distinguer entre les charges de RFF selon qu'elles portent sur le développement du réseau (ouverture de nouvelles lignes), qui est un investissement, ou bien sur la maintenance . Cette dernière se décompose entre l'entretien , dépenses de fonctionnement, et le renouvellement , dépenses d'investissement. Entretien et renouvellement constituent un ensemble indissociable, le second permettant de diminuer les coûts du premier.
En 2005, l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) avait réalisé un audit du réseau ferré national, dit « audit Rivier », qui avait montré son vieillissement préoccupant . En effet, dans les années 1980, la priorité a été donnée au développement des lignes à grande vitesse (LGV) au détriment du renouvellement du réseau existant.
Entendu par la commission du développement durable, Jacques Rapoport, président de RFF, constatait ainsi que « notre réseau s'est beaucoup dégradé, du fait d'un sous-investissement chronique de trente années. Je ne jette pas la pierre à mes prédécesseurs : en 1980, une pause de cinq à dix ans était probablement justifiée, mais celle-ci a duré trente ans.
« Depuis cinq à six ans, les investissements ont repris - et c'est une excellente chose - mais ils ont repris prioritairement sur le réseau régional. Il est vrai qu'il s'agissait du plus dégradé mais, de fait, la partie la plus structurante du réseau, celle où circulent 80 % des trains, a continué à vieillir. Après les efforts très importants accomplis en 2013 et 2014, l'âge moyen du réseau va continuer à augmenter » 8 ( * ) .
En effet, à partir de 2006, comme le montre le tableau ci-dessous, les dépenses de maintenance se sont accrues de plus de 60 % , passant de 2 839 millions d'euros à 4 591 millions d'euros en 2014. Les investissements de renouvellement ont été particulièrement ciblés.
Répartition des dépenses de
développement et de maintenance
sur le réseau ferré
national
en millions d'euros |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014
|
Investissement de développement (immobilisations) |
1 183 |
1 355 |
1 570 |
1 572 |
1 387 |
2 459 |
3 117 |
4 861 |
3 876 |
Maintenance |
2 839 |
2 945 |
3 236 |
3 596 |
3 651 |
3 958 |
4 307 |
4 811 |
4 591 |
dont investissements de renouvellement (immobilisations) |
1 034 |
1 056 |
1 299 |
1 639 |
1 705 |
1 934 |
2 172 |
2 675 |
2 433 |
dont entretien (charges) |
1 805 |
1 889 |
1 937 |
1 957 |
1 946 |
2 024 |
2 135 |
2 136 |
2 158 |
Total |
4 022 |
4 300 |
4 806 |
5 168 |
5 038 |
6 417 |
7 424 |
9 672 |
8 467 |
part des dépenses de développement |
29 % |
32 % |
33 % |
30 % |
28 % |
38 % |
42 % |
50 % |
46 % |
part des dépenses de maintenance |
71 % |
68 % |
67 % |
70 % |
72 % |
62 % |
58 % |
50 % |
54 % |
Source : RFF
Fin septembre 2013, RFF a présenté le « Grand plan de modernisation du réseau » (GPMR), qui correspond à une enveloppe de 15 milliards d'euros sur six ans, soit environ 2,5 milliards d'euros par an .
Dans ce cadre, la priorité devrait être donnée aux lignes du réseau structurant, dites « lignes UIC 2 à 6 » 9 ( * ) . En effet, le document de présentation du GPMR rappelle que l'actualisation de l'audit Rivier en 2012 « a pointé le fait que ces lignes (et notamment celles des catégories 2 à 4) n'avaient pas bénéficié d'investissements suffisants au regard des besoins identifiés dans le précédent rapport de 2005 ».
Dès lors, « la priorité des six années à venir portera sur des lignes relevant des catégories UIC 2 à 6 en y allouant les moyens nécessaires pour en diminuer l'âge moyen. Les lignes relevant des catégories UIC 7 à 9 continueront à faire l'objet d'un effort de renouvellement dans le respect de la priorité précitée ».
Comme le souligne le président de RFF, « nous avons face à nous un mur de travaux dont l'impact économique est considérable . Il comporte des enjeux en matière de circulation des trains, avec une qualité de service tendanciellement à la baisse sur les zones les plus denses, notamment en Île-de-France » 10 ( * ) .
Or, la Cour des comptes rappelle que cet effort sur les lignes structurantes « exige des chantiers lourds, majoritairement réalisés la nuit, qui contribuent à l'alourdissement des coûts de maintenance. Le taux de travaux de nuit a connu une augmentation importante, passant de 19 % en 2009 à 74 % en 2012. Après une phase de maîtrise des coûts jusqu'en 2011, il en résulte une hausse du coût du GOPEQ 11 ( * ) en 2012 (1,18 million d'euros pour un objectif de 1,15 million d'euros) et des risques nouveaux.
« Outre la dérive des charges d'entretien, la multiplication des chantiers provoque un mitage du réseau qui empêche toute augmentation de sa productivité et de sa performance commerciale » 12 ( * ) .
Au surplus, ces lourds investissements à venir pour arrêter le vieillissement du réseau ne permettent pas encore de faire baisser les coûts d'entretien. En septembre 2012, devant la commission des finances, Alain Quinet, directeur général délégué de RFF, avait indiqué que, à terme, l'on attend que « l'effort de rénovation et le rajeunissement du réseau permettent des économies sur l'entretien, mais cet effort est aujourd'hui encore trop récent pour avoir des effets visibles et tangibles sur l'entretien.
« On est donc dans cette phase de transition, difficile à gérer sur le plan industriel et sur le plan financier . Dans notre esprit, cet effort de rénovation doit être poursuivi plusieurs années encore et doit gagner en efficacité » 13 ( * ) .
En valeur absolue, les moyens ont augmenté au profit de la maintenance. Toutefois, il faut également souligner que les investissements de développement ont à nouveau crû à partir de 2011. RFF indique que « l'accroissement récent de la part des dépenses de développement par rapport à la maintenance traduit le poids des quatre chantiers de LGV 14 ( * ) en construction simultanée » 15 ( * ) .
Le président de RFF, entendu par la commission du développement durable, a ainsi déclaré : « un ordre de grandeur, pour que l'on se rende bien compte : faire fonctionner le réseau coûte 4 milliards d'euros par an, hors frais financiers . Nous investissons 7,5 milliards, soit quasiment 200 % de notre chiffre d'affaires ! Aucune entreprise ne le fait. Nous avons des investissements considérables : les quatre lignes à grande vitesse (LGV) en travaux représentent, à elles seules, une vingtaine de milliards sur cinq ans » 16 ( * ) .
2. La difficile équation financière de RFF
a) Des recettes contraintes
Les recettes de RFF sont principalement constituées par les redevances d'infrastructure (péages) qu'il facture aux entreprises ferroviaires pour l'utilisation du réseau et par les subventions publiques, principalement de l'État.
Depuis 2009, dans le cadre du précédent contrat de performance avec l'État, RFF a procédé à une importante augmentation des tarifs des péages puisqu'ils représentaient 2,9 milliards d'euros fin 2008 et 5,3 milliards d'euros fin 2012 .
Cette hausse, significative en valeur absolue, n'a pas permis d'atteindre les objectifs poursuivis. En effet, sur la même période, l'État a diminué le montant de ses subventions (hors dotation d'investissement) et la crise économique a provoqué une baisse du volume de trafic. La nouvelle tarification n'a donc pas apporté des ressources supplémentaires au gestionnaire.
Pour les années à venir, l'augmentation des péages sera inévitablement limitée.
D'une part, les évolutions de la tarification de RFF sont désormais soumises à un avis conforme de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF). L'année dernière, elle a émis un avis négatif sur la hausse des prix envisagée pour le service horaire 2014, conduisant RFF à revoir sa copie initiale. La Cour des comptes note que « RFF s'est engagé à mieux corréler l'évolution de la redevance de circulation avec les variations prévisionnelles des coûts d'exploitation et de maintenance, en rétrocédant les gains de productivité inscrits en cible dans sa trajectoire financière » 17 ( * ) .
D'autre part, afin de limiter une tendance inflationniste, qui pèse sur les comptes des entreprises ferroviaires - et en premier lieu sur la SNCF - le Gouvernement a décidé un encadrement pluriannuel des péages sur la période 2014-2018.
RFF indique ainsi que, « concernant les péages, SNCF Réseau reprend l'engagement de RFF vis-à-vis des entreprises ferroviaires de voyageurs sur la période 2014-2018 : l'ensemble du barème de péage évoluera en moyenne comme ?l'inflation ferroviaire?, ajustée de plus ou moins 0,3 % (hors mise en service de lignes nouvelles). Les péages des entreprises ferroviaires de fret évolueront en fonction des concours publics versés par l'État afin de respecter la réglementation européenne qui prévoit de couvrir le coût marginal » 18 ( * ) .
Il n'est, au surplus, pas prévu que l'État augmente les dotations versées à RFF (ou au futur SNCF Réseau). Dès lors, le gestionnaire d'infrastructure ne peut pas compter sur une hausse importante de ses recettes dans les années à venir .
b) Un déficit structurel de 1,5 milliard d'euros par an
RFF est autorisé à recourir à l'emprunt pour couvrir ses dépenses d'investissement (renouvellement et développement).
Toutefois, s'agissant des investissements de développement, RFF est soumis à la règle de l'article 4 de ses statuts 19 ( * ) , qui dispose que « RFF ne peut accepter un projet d'investissement sur le réseau ferré national, inscrit à un programme à la demande de l'État, d'une collectivité locale ou d'un organisme public local ou national, que s'il fait l'objet de la part des demandeurs d'un concours financier propre à éviter toute conséquence négative sur les comptes de RFF sur la période d'amortissement de cet investissement ». Concrètement, son endettement ne peut excéder les recettes attendues (péages) du projet de développement .
En l'état actuel, le document de présentation du Grand plan de modernisation du réseau rappelle que « les sommes consacrées au fonctionnement du réseau ferroviaire, bien qu'importantes, ne permettent pas de couvrir le coût complet du réseau existant . [...] Il apparaît de manière récurrente un déficit de l'ordre de 1,5 milliard d'euros , une fois inclus les investissements indispensables à la rénovation du réseau [et sans tenir compte] des investissements de développement , normalement couverts par le gage de recettes futures (avec accroissement de la dette) et/ou des subventions ».
Fin 2013, la dette de RFF atteignait 33,7 milliards d'euros, soit une augmentation de 7 % sur un an , l'établissement n'étant pas capable d'autofinancer les investissements de rénovation et de modernisation du réseau. Au total, sur l'exercice 2013, RFF a réalisé 30 opérations de levée de dette pour un montant total de 4,9 milliards d'euros (pour une maturité moyenne de 17 ans). Il faut également noter la baisse du coût moyen des emprunts (4,13 % en 2013 contre 4,56 % en 2012), compte tenu des faibles taux d'intérêt.
Pour Jacques Rapoport, président de RFF, « il est clair que cette part publique de la dette va croître dans les années qui viennent . [...] Ce sont des sommes considérables qui sont investies sur le réseau. Or , il n'existe pas d'autofinancement, qu'il s'agisse de celui dégagé par l'exploitation, qui est de quelques centaines de millions d'euros par an, ou des subventions perçues, qui ne sont évidemment pas suffisantes . Il manque donc 3 milliards d'euros , et ceux-ci viennent augmenter un peu plus la dette chaque année » 20 ( * ) .
Le graphique ci-dessous, transmis par la SNCF à votre rapporteur, montre l'évolution de l'endettement du système ferroviaire (SNCF Mobilités et SNCF Réseau) en l'absence de tout plan de performances et de réforme ferroviaire.
Source : SNCF
Ainsi, en 2025, si l'endettement du transporteur peut être stabilisé, celui du gestionnaire d'infrastructure (dans toutes ses composantes : RFF, SNCF-Infra et DCF) atteindrait 69 milliards d'euros contre 37 milliards d'euros actuellement .
Il faut également souligner que RFF - et SNCF Réseau - risque de se trouver confronter à un « effet boule de neige », par lequel l'établissement serait obligé de s'endetter afin de couvrir les intérêts de sa dette. En 2013, malgré des taux d'intérêts relativement bas, les charges financières ont représenté plus de 1,3 milliard d'euros. Comme le note la Cour des comptes, « il ressort de l'analyse des comptes que RFF est confronté à un déséquilibre structurel lié essentiellement à sa dynamique d'endettement . L'importance de cet endettement se traduit par des frais financiers considérables et un résultat financier qui dégrade fortement le résultat net de l'établissement » 21 ( * ) .
La réforme ferroviaire se justifie pleinement au regard de ce constat préoccupant.
II. LES GRANDES LIGNES DE LA RÉFORME PROPOSÉE
A. L'UNIFICATION DES MÉTIERS DE L'INFRASTRUCTURE
Fin décembre 2011, les Assises du ferroviaire avaient retenu le principe de la création d'un « gestionnaire d'infrastructure unifié » (GIU) par regroupement de RFF, SNCF-Infra et la DCF. La Commission 2 des Assises, qui avait étudié les questions de gouvernance, avait ainsi exprimé « une préférence à une unification de la gestion de l'infrastructure au sein d'un groupe-pivot du secteur ferroviaire, qui offre un schéma mobilisateur pour les personnels et de meilleures perspectives industrielles, sous réserve de la réalisation des conditions identifiées pour sa réussite (garanties de transparence et d'équité d'accès au réseau, définition d'un projet d'entreprise ambitieux, s'assurer de la compatibilité du projet sur le plan communautaire dans le cadre du 4 e paquet ferroviaire à venir) » 22 ( * ) .
Le rapport Bianco, en avril 2013, avait confirmé le diagnostic et le remède : « l'impasse opérationnelle que connait le système ferroviaire appelle une solution technique : la constitution du gestionnaire d'infrastructure unifié (GIU) , décisive pour améliorer la performance et la productivité du système ferroviaire tout entier .
« Il s'agit d'assurer l'efficacité du système ferroviaire en réunissant au sein de la même entité tous les services qui concourent à l'activité de gestion du réseau . Bien que RFF ait contribué à favoriser l'innovation dans le domaine de la gestion du réseau, le maintien du statu quo déboucherait sur une impasse. Malgré le professionnalisme, la qualité et l'investissement des personnels des deux entreprises, la séparation artificielle entre RFF et deux services de la SNCF (SNCF Infra d'une part, et la direction de la circulation ferroviaire, d'autre part) a entraîné de l'opacité, de la bureaucratie, de la paperasse, et surtout, à travers ces dysfonctionnements, un inacceptable gaspillage du travail humain ».
La solution du GIU avait également été préconisée par le rapporteur spécial de la commission des finances du Sénat 23 ( * ) .
Le présent projet de loi permet le regroupement au sein d'un seul établissement public industriel et commercial (EPIC), dénommé SNCF Réseau, les fonctions assurées aujourd'hui par RFF, SNCF-Infra et la DCF .
Outre l'article 2, qui détermine les missions exercées par SNCF Réseau, l'article 10 organise la transmission des biens nécessaires à la gestion de l'infrastructure vers le nouvel EPIC.
En pratique, les trois entités ont déjà commencé à travailler ensemble . Fin 2013, elles ont mis en place un comité national de coordination. De même, le Grand plan de modernisation de réseau est paru sous leurs trois timbres avec la mention « Trajectoire GIU ». Ces initiatives s'inscrivent dans la droite ligne du « plateau commun » établi depuis avril 2011 entre RFF et SNCF-Infra.
Néanmoins, si la fusion sera achevée, d'un point de vue juridique, le 1 er janvier 2015, la création effective d'une entreprise unique prendra plusieurs années. Ainsi que le soulignait Jacques Rapoport, devant la commission du développement durable, « s'agissant de la mise en oeuvre de SNCF Réseau, de l'intégration des cultures et de la politique de ressources humaines, la construction du GIU représentera trois à cinq ans de travail .
« C'est effectivement une intégration de plusieurs structures qui ont non seulement des cultures différentes, mais qui se sont en outre affrontées durant quinze ans. Ce travail est faisable, mais il ne faut pas croire que tout sera réglé au 1 er janvier 2015 ».
La constitution de SNCF Réseau doit permettre de trouver le meilleur équilibre économique par l'arbitrage entre travaux et attributions de sillons (générateurs de recettes commerciales). Lors de la même audition, le président de RFF déclarait en effet que « nous avons quinze ans de travaux devant nous ; or, le sujet fondamental, pour notre système ferroviaire, réside dans l'arbitrage entre sillons et travaux, sujet horriblement compliqué » 24 ( * ) .
B. LA CRÉATION D'UN GROUPE FERROVIAIRE PUBLIC
Dans la situation actuelle, RFF et SNCF sont deux établissements autonomes d'un point de vue juridique même s'ils sont contraints de coopérer sur une base contractuelle.
Lors de la préparation de la réforme, la question a été posée de savoir si le GIU devait conserver une totale autonomie par rapport à l'opérateur historique, dont les missions seraient alors recentrées sur l'activité de transport (de voyageurs ou de marchandises).
Ce débat rejoint la question de l'euro-compatibilité de la nouvelle architecture. En effet, la Commission européenne plaide pour un « dégroupage » maximaliste de sorte que le gestionnaire d'infrastructure n'ait aucun lien avec une entreprise ferroviaire.
Néanmoins, dans le cadre de la discussion en cours autour du « 4 e paquet ferroviaire », il est apparu qu'un gestionnaire et une entreprise ferroviaire peuvent cohabiter au sein d'un même groupe pour autant que des « murailles de Chine » soient élevées entre eux.
Ce schéma a été retenu par le Gouvernement dans le cadre de la présente réforme.
Ainsi, outre SNCF Réseau, qui devient le gestionnaire d'infrastructure, le projet de loi crée SNCF Mobilités, établissement public industriel et commercial, chargé de l'activité de transports. Les deux EPIC sont coiffés par un établissement mère appelé « SNCF » , comme le montre le schéma ci-dessous.
L'article L. 2102-2 du code des transports (créé par l'article premier du présent projet de loi) dispose que « les attributions dont SNCF est dotée par le présent code à l'égard de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités sont identiques à celles qu'une société exerce sur ses filiales ». Cette précision est importante car il n'existe pas de lien capitalistique entre l'EPIC de tête et les deux EPIC fille.
L'EPIC de tête se voit confier par la loi des missions transversales qui intéressent l'ensemble du groupe ferroviaire (par exemple, la définition de la politique de ressources humaines et de la politique sociale, les systèmes d'information, etc.), mais aussi toutes les entreprises ferroviaires (par exemple en matière de sûreté).
L'EPIC de tête sera constitué d'un conseil de surveillance et d'un directoire, ce dernier comprenant deux membres, le président de SNCF Mobilités et le président de SNCF Réseau. En cas de désaccord entre eux, c'est le président du conseil de surveillance qui tranchera.
Lors de son audition devant la commission du développement durable, Jacques Rapoport, président de RFF, a défendu cette nouvelle gouvernance : « Quelle que soit l'ampleur de la concurrence, les parts de marché de l'opérateur historique régressent très lentement. [...] Un opérateur qui a 95 % du marché est concerné par le système global, tout comme le gestionnaire d'infrastructures, dont c'est la mission.
« Il faut donc une forte intégration entre le transporteur et le gestionnaire d'infrastructures, parce que tous deux poursuivent le même but, qui est le bon fonctionnement du système. [...] Un opérateur qui détient des parts de marché très élevées est autant concerné que le gestionnaire d'infrastructures. Qui a été sollicité lors de la catastrophe de Brétigny ou de l'affaire des trains soi-disant trop larges ? La SNCF. Aux yeux de l'opinion publique, c'est la SNCF » 25 ( * ) .
III. UNE TRAJECTOIRE FINANCIÈRE AMBITIEUSE
A. UN OBJECTIF DE STABILISATION DE LA DETTE
Lors de son audition par la commission du développement durable, Guillaume Pépy, président de SNCF, a rappelé que, « d'un point de vue économique, nous partageons la même analyse avec Jacques Rapoport. Le projet de loi tel qu'il est permet aux deux établissements publics de stabiliser leur dette à une échéance proche de 2020. Mais il s'agit de la stabiliser et à un niveau très élevé » 26 ( * ) .
L'objectif de stabilisation - et non pas de réduction - de la dette a été confirmé à votre rapporteur tant par les représentants du ministère des finances et des comptes publics que de celui des transports. Le Gouvernement semble néanmoins retenir un horizon temporel à 10 ans.
1. Par des gains de productivité et de mutualisation
En octobre 2013, la SNCF a présenté son nouveau plan stratégique intitulé « Excellence 2020 ». D'après les réponses transmises à votre rapporteur par la SNCF, il consiste « en un plan de performance transverse et un plan de performance industrielle et commerciale », qui permettront de dégager un milliard d'euros au sein de SNCF Mobilités .
En outre, sur le périmètre SNCF Réseau, le plan Excellence 2020 permettra également d'économiser 400 millions d'euros . Cela correspond à la part imputée sur la branche SNCF-Infra intégrée au nouveau gestionnaire d'infrastructure.
Enfin, l'unification des métiers de l'infrastructure au sein d'un même établissement devrait dégager des gains de mutualisation (achats, rapprochement des structures, mise en place de processus nouveaux) pour un montant estimé à environ 500 millions d'euros .
Au total, l'ensemble du groupe ferroviaire pourrait réaliser des économies pour un montant proche de 1,9 milliard d'euros à une échéance comprise entre 2020 et 2025 .
2. Par un effort de l'État
Dans le cadre de la réforme ferroviaire, l'État va également consentir un effort qui représente un gain d'environ 500 millions d'euros pour SNCF Réseau .
D'une part, il accepte de ne plus recevoir de dividendes de la part de SNCF Mobilités.
Désormais, l'EPIC de tête SNCF pourra percevoir « un dividende sur le résultat de SNCF Mobilités. [...] Le montant de ce dividende est fixé après examen de la situation financière de SNCF Mobilités et constatation, par le conseil de surveillance, de l'existence de sommes distribuables. Il est soumis, pour accord, à l'autorité compétente de l'État » (nouvel article L. 2102-17 du code des transports, créé par l'article premier du présent projet de loi).
Parallèlement, SNCF Réseau pourra percevoir « le produit des dotations versées par la SNCF » (4° de l'article L. 2111-24 du code des transports, créé par l'article 2 du présent projet de loi).
Comme le montre le schéma ci-dessous, les dividendes de SNCF Mobilités seront transférés, via l'EPIC de tête, à SNCF Réseau .
La trajectoire financière retenue par les établissements et les pouvoirs publics prévoit que, d'ici 2020, environ 300 millions d'euros seraient ainsi distribués. Cette somme correspond à un gain de 500 millions d'euros pour SNCF Réseau car elle permet « une réduction de l'endettement en raison de l'économie générée par les frais financiers évités » 27 ( * ) .
Par ailleurs, une disposition introduite dans le premier projet de loi de finances rectificative pour 2014 permet au groupe public de se constituer en groupe fiscal (intégration fiscale). L'ensemble des bénéfices et des déficits fiscaux de SNCF, SNCF Mobilités, SNCF Réseau et de leurs filiales seront ainsi mutualisés, permettant de réduire l'impôt sur les sociétés dû . Le tableau ci-dessous rappelle la chronique de versement d'impôt sur les sociétés par SNCF Groupe.
Montant de l'impôt sur les sociétés versé par SNCF Groupe
(en millions d'euros)
Année |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
205 |
95 |
295 |
346 |
166 |
Source : ministère des finances et des comptes publics
Le bénéfice de l'intégration fiscale n'est pas, à ce jour, chiffré. Le ministère des finances et des comptes publics indique en effet que « le montant des impôts qui seront versés est très sensible aux trajectoires financières des établissements. Or ces trajectoires ne sont pas arrêtées à ce stade. Il n'est donc pas encore possible » d'évaluer cette mesure. Il souligne également que la mise en oeuvre du pacte de responsabilité devrait avoir un impact positif sur les comptes du groupe ferroviaire sans être en mesure de le quantifier.
3. Par la mise en place de garde-fous
a) Une mission de surveillance de la trajectoire financière confiée au régulateur
Conformément au nouvel article L. 2111-10 du code des transports, créé par l'article 2 du présent projet de loi, « SNCF Réseau conclut avec l'État un contrat d'une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans pour une durée de dix ans. Le projet de contrat et les projets d'actualisation sont soumis pour avis à l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et cet avis est rendu public ».
En particulier, le contrat déterminera :
« La trajectoire financière de SNCF Réseau et dans ce cadre :
« a) Les moyens financiers alloués aux différentes missions de SNCF Réseau ;
« b) Les principes qui seront appliqués pour la détermination de la tarification annuelle de l'infrastructure [...] ;
« c) L'évolution des dépenses de gestion de l'infrastructure [...] ainsi que les mesures prises pour maîtriser ces dépenses et les objectifs de productivité retenus ;
« d) La chronique du taux de couverture du coût complet à atteindre annuellement ainsi que la trajectoire à respecter du rapport entre la dette nette de SNCF Réseau et sa marge opérationnelle ».
Outre celui sur le projet de contrat, l'ARAF rend également un avis sur chaque projet de budget de SNCF Réseau, qui vérifie qu'il tient compte de la trajectoire financière définie par le contrat. À cet égard, si elle constate que « SNCF Réseau a manqué à ses obligations contractuelles ou que la trajectoire financière s'est écartée de celle prévue au contrat, elle en analyse les causes et peut recommander au conseil d'administration de SNCF Réseau de mettre en oeuvre des mesures correctives appropriées ».
Ainsi que le soulignait Jacques Rapoport, président de RFF, lors de son audition devant la commission du développement durable, « on ne met pas assez en lumière le renforcement considérable des pouvoirs de l'ARAF. Celle-ci devra émettre un avis, ce qui n'est pas rien, sur les équilibres financiers de SNCF Réseau. C'est capital. L'un de vous a expliqué que RFF subit des pressions pour s'endetter. Je le confirme, mais RFF ne sera plus seul. L'ARAF pourra attirer l'attention sur le fait que cela plombe le système ! C'est un élément de régulation très fort » 28 ( * ) .
Devant la commission des finances, Alain Quinet, directeur général délégué de RFF, avait, pour sa part, estimé qu'il faut « une tutelle et une régulation forte. Il est tout aussi important de mentionner le rôle du régulateur . [...] Si nous sommes unifiés un jour, nous n'aurons plus d'excuses pour ne pas être performants et productifs. Un des rôles du régulateur, comme dans les autres secteurs régulés, est de pousser le gestionnaire d'infrastructure à plus d'efficacité année après année » 29 ( * ) .
b) Une règle prudentielle renforcée en matière d'investissements
Ces dernières années, la dette de RFF a progressé notamment du fait d'importants investissements de développement. La Cour des comptes relève en effet que « la protection instaurée par l'article 4 du décret du 5 mai 1997 présente, par ailleurs, des faiblesses dans ses modalités de calcul et dans la prise en compte d'aléas de financement. Ces modalités de calcul sont suffisamment malléables pour permettre de moduler dans certaines limites la participation de RFF, comme l'attestent les relevés de certains débats en conseil d'administration .
« D'une manière générale, RFF semble parfois considérer qu'il est de son devoir de mettre en oeuvre les décisions prises dans d'autres enceintes, sans considération de l'impact économique réel des projets pour l'établissement et des conséquences sur son endettement futur. Les services de l'établissement, techniquement compétents, ont ainsi pour souci premier de répondre aux sollicitations de ses tutelles, tant au siège qu'en régions. Dans un jeu d'acteurs poussant au développement de ces projets, l'établissement n'apparaît ainsi pas assez modérateur dans le sens de son intérêt social » 30 ( * ) .
C'est ainsi, comme le rappelait Jacques Rapoport, que, « quoi que l'on fasse, nous aurons, avec les quatre LGV en cours, 10 milliards d'euros de dette supplémentaires ! Nous demandons donc simplement, pour l'avenir, que les décideurs soient les payeurs » 31 ( * ) .
C'est pourquoi, dès le projet de loi initial, le Gouvernement a entendu introduire une « règle d'or » - ou règle prudentielle - renforcée par rapport à l'actuelle disposition de l'article 4 des statuts de RFF , évoquée plus haut, et qui n'a, de toute évidence, pas atteint son but.
Dans sa version issue du texte adopté par l'Assemblée nationale, cette règle prudentielle renforcée prévoit que les investissements de développement sont appréciés au regard de ratios comme, par exemple, la dette nette de SNCF Réseau sur sa marge opérationnelle. S'il apparaît que ces ratios dépassent les seuils fixés par décret, alors SNCF Réseau ne peut participer au financement de l'infrastructure, lequel sera intégralement à la charge de l'État, des collectivités territoriales ou de tout autre demandeur. Dans le cas contraire, la règle de l'article 4 des statuts s'applique.
Dans tous les cas, l'ARAF émet un avis « sur le montant global des concours financiers devant être apportés à SNCF Réseau et sur la part contributive de SNCF Réseau ». Comme le note l'établissement, « l'expérience acquise par RFF avec la pratique de ?l'article 4? suggère de renforcer la protection offerte par la règle d'or en donnant explicitement à l'ARAF un droit d'avis motivé sur la contribution financière du gestionnaire d'infrastructure à ces investissements » 32 ( * ) .
4. Un indicateur central : la couverture du coût complet
Le document de référence du réseau pour l'horaire de service 2014 définit ainsi le coût complet du réseau : c'est « le coût économique de long terme de l'infrastructure correspondant au maintien du réseau principal dans sa consistance actuelle » 33 ( * ) .
Dans le document précité, au 20 août 2012, le coût complet du réseau existant est estimé à 7,3 milliards d'euros , à raison de :
- 3,3 milliards d'euros de coûts d'exploitation courants (entretien et exploitation) ;
- 2,3 milliards d'euros d'amortissements économiques, « reflétant le besoin moyen de rénovation » ;
- 1,7 milliard d'euros de rémunération du capital pour couvrir le coût des charges financières et les risques.
Toutefois, dans les réponses au questionnaire de votre rapporteur, RFF calcule que le coût complet, en 2012, serait de 7,8 milliards d'euros, mais sans indiquer la répartition entre les différents facteurs de coûts.
Le document de référence du réseau souligne également que « la couverture du coût complet par les recettes commerciales, les recettes budgétaires et les autres ressources de RFF constitue un repère de l'équilibre économique du gestionnaire ». Il a donc vocation à atteindre 100 % .
À ce jour, et sur la base des réponses de RFF, le coût complet ne serait couvert qu'à 80 %. Autrement dit les péages, les ressources propres et les recettes apportées par l'État et les autres collectivités publiques, soit un montant total de 6,3 milliards d'euros, sont insuffisants pour le couvrir. En conséquence, l'établissement est contraint de s'endetter pour assurer la maintenance du réseau.
Le projet de loi a donc inscrit la couverture du coût complet comme étant l'un des objectifs inscrits dans le contrat signé entre l'État et SNCF Réseau.
L'article L. 2111-10 du code des transports (créé par l'article 2 du présent projet de loi) mentionne en outre que l'ARAF rend son avis sur le projet de contrat en prenant en compte « l'objectif de couverture du coût complet dans un délai de dix ans à compter de l'entrée en vigueur du premier contrat entre SNCF Réseau et l'État ».
S'agissant des ressources de SNCF Réseau, une autre disposition prévoit que, « tant que le coût complet du réseau n'est pas couvert par l'ensemble de ses ressources, SNCF Réseau conserve les gains de productivité qu'il réalise ». Autrement dit, il n'est pas possible d'imposer à SNCF Réseau une diminution ou bien une moindre augmentation de ses ressources (péages ou subventions publiques) en arguant du fait que l'établissement réalise des gains de productivité.
B. UN SCÉNARIO SOUMIS À DES ALÉAS
1. Sur le montant et les échéances des économies attendues
L'ensemble des interlocuteurs rencontrés par votre rapporteur ont souligné le caractère ambitieux de la trajectoire financière retenue. Votre rapporteur n'a pas obtenu de décompte précis sur les gains de productivité et de mutualisation attendus de la réforme. En particulier, les éléments détaillés présentés par notre collègue député Olivier Faure, rapporteur pour avis de la commission des finances, ne lui ont pas été confirmés 34 ( * ) .
Interrogé par votre rapporteur lors de son audition devant la commission du développement durable, Jacques Rapoport, président de RFF, a cependant affirmé qu'à la « lumière de mon expérience, à la RATP ou à La Poste, je sais que nous avons les 500 millions d'euros de productivité, qui représentent moins de 10 % de notre chiffre d'affaires , grâce à une organisation normale que nous n'avons pas aujourd'hui . [...]
« Le système actuel exclut le développement de l'innovation technologique. Est-ce l'affaire de RFF ou de la SNCF de réaliser la surveillance embarquée des voies ? Dans les trains, les contrôleurs sont équipés informatiquement ; sur les voies, les mainteneurs ont un carnet à souche ! Des papiers se perdent en chemin ! On vit au Moyen Âge ! Pourquoi ? Ce n'est pas de la mauvaise volonté !
« L'innovation, qui est un gisement considérable dans toutes les entreprises, est massivement sous-exploitée par la séparation. Je réfute donc tout scepticisme ! » 35 ( * ) .
Dans le cadre de la préparation de la réforme et de la construction de la trajectoire financière, le Gouvernement a fait appel à un cabinet de consultants afin de réaliser des contre-expertises sur les gains de productivité potentiels mis en avant tant par la SNCF que par RFF.
Pourtant, en réponse au questionnaire de votre rapporteur, le ministère des finances et des comptes publics indique : « bien que l'État ait participé aux travaux sur la trajectoire financière des futures entités et connaisse les hypothèses du scénario, les données permettant d'alimenter les modèles financiers sont sous l'entière responsabilité des établissements ».
Le ministère des transports souligne, quant à lui, que « le travail se poursuit avec le futur groupe public sur les moyens de stabiliser la dette du futur gestionnaire d'infrastructure unifié , tout en faisant un effort sans précédent de rénovation du réseau l'objectif prioritaire. Les travaux préparatoires à la conclusion des contrats [entre l'État et SNCF Mobilités et SNCF Réseau] , permettront d'aboutir à l'identification des leviers permettant de stabiliser la dette du système ferroviaire ».
La réalité des économies réalisées conditionne la trajectoire financière suivie par le groupe ferroviaire. Par exemple, si SNCF Mobilités ne parvient pas à atteindre les objectifs du plan « Excellence 2020 », alors le montant des dividendes pouvant être remontés à l'EPIC de tête puis reversés à SNCF Réseau sera inférieur au 300 millions d'euros attendus. Or ce montant apparaît déjà très élevé au regard des dividendes précédemment versés par SNCF Groupe à l'État.
Montant du dividende versé par SNCF Groupe à l'État
(en millions d'euros)
Année |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
183 |
0 |
69 |
199 |
209 |
Source : ministère des finances et des comptes publics
Enfin, la Cour des comptes souligne un enjeu important auquel sera confronté SNCF Réseau : « s'il est acquis que le prochain gestionnaire d'infrastructure unifié aura la pleine dimension de ses responsabilités avec la réunification de la circulation et de la maintenance, l'un de ses défis sera de porter remède aux inconvénients nés de l'actuel schéma institutionnel, sans faire disparaître l'émulation économique et méthodologique que la création de RFF a néanmoins apportée au système, son action ayant de fait constitué un aiguillon vis-à-vis de l'opérateur historique » 36 ( * ) .
2. Sur l'environnement économique
La trajectoire financière retenue sera également sensible à l'évolution de la conjoncture économique . Sur les cinq dernières années, tant RFF et SNCF ont souffert de la dégradation de l'activité économique.
Ainsi, conformément à son contrat de performances, RFF a augmenté ses péages. Mais la chute du trafic a minoré l'effet attendu sur ses comptes.
Pour SNCF, cette hausse des péages a contribué, parmi d'autres facteurs, à réduire la rentabilité de l'activité TGV, ce qui l'a conduit à déprécier les actifs TGV à hauteur de 1,4 milliard d'euros dans les comptes pour 2013. Le ministère des finances et des comptes publics explique que « les marges de l'activité TGV se sont dégradées, sous l'effet de la stagnation du trafic et du développement des offres low-cost , mais aussi de l'évolution des péages, qui ont fortement augmenté de 2008 à 2013. [...]
« Dans les années à venir, les perspectives économiques de SNCF Mobilités seront en partie conditionnées par l'atteinte des objectifs du plan stratégique ?Excellence 2020?, dans un contexte économique qui reste incertain ».
L'autre point d'attention conjoncturel concerne les taux d'intérêt . Comme l'ensemble des émetteurs de la sphère publique française, RFF bénéficie de conditions d'emprunt particulièrement favorables. Néanmoins, en 2013, les charges financières ont représenté 1,3 milliard d'euros pour RFF, montant qui ne peut que s'accroître dans le futur sous l'effet de l'augmentation du volume d'endettement au moins jusqu'à sa stabilisation d'ici dix ans.
Or, comme le rappelait Guillaume Pépy, président de SNCF, devant la commission du développement durable, « sur la question de la dette, je pense qu'il faut d'abord bien distinguer le surendettement de l'endettement. Nous sommes aujourd'hui surendettés, cela signifie que nous risquons de devoir réemprunter pour assumer la charge de notre dette. Les taux d'intérêt sont très bas, s'ils remontent nous serons en situation de surendettement . C'est pourquoi l'objectif de stabilisation de la dette est vital » 37 ( * ) .
C. DES EFFORTS PLUS IMPORTANTS DEVRONT ÊTRE CONSENTIS POUR RÉDUIRE LA DETTE FERROVIAIRE
1. La reprise de dette par l'État : une question légitime
À l'occasion de l'examen du présent projet de loi, la question de la reprise d'une partie, si ce n'est de l'intégralité, de la dette de RFF par l'État a été posée. Il est vrai que plusieurs arguments plaident en faveur de cette solution.
Tout d'abord, l'Allemagne a procédé à une reprise de dette de l'opérateur Deutsche Bahn (DB) , principal concurrent de la SNCF en Europe et à l'international. La reprise de dette permettrait ainsi de créer une égalité de concurrence.
Ensuite, comme l'indique RFF, « depuis sa création en 1997, RFF gère et porte dans ses comptes une dette dont une partie ne pourra sans doute jamais être amortie par le système ferroviaire . De ce fait, la performance du gestionnaire d'infrastructure est davantage révélée par sa marge opérationnelle que par son résultat net ou l'évolution de sa dette. Le cantonnement d'une partie de la dette actuellement supportée par RFF affinerait l'interprétation de la structure bilantielle de SNCF Réseau et favoriserait la comparaison avec celle des autres opérateurs industriels et gestionnaires d'infrastructure » 38 ( * ) .
Enfin, environ un tiers de la dette de RFF est désormais considéré comme de la dette publique . En effet, avec l'entrée en vigueur du nouveau plan comptable européen 39 ( * ) , l'INSEE a constaté que « RFF ne dégage pas un résultat d'exploitation suffisant pour faire face à ses obligations sans l'appui permanent de l'État . Depuis sa création, l'équilibre financier de RFF repose donc sur des contributions publiques qui représentent une part importante, quoique minoritaire, de ses recettes. En base 2010, la dette de l'État est relevée d'un montant égal à une fraction de la dette de RFF. [...] Le surcroît de dette ainsi imputé à l'État, classé dans la catégorie des emprunts à long terme, s'élève à 10,8 milliards d'euros en 2010, 10,7 milliards d'euros en 2011 et 10,4 milliards d'euros en 2012 » 40 ( * ) .
Votre rapporteur estime cependant que la reprise de dette par l'État, si elle peut être envisagée à moyen terme, ne présente pas un caractère urgent .
Tout d'abord, RFF puis SNCF Réseau conserve un statut d'émetteur crédible. Le montant de la dette et les perspectives de son accroissement n'ont pas conduit les investisseurs à modifier leur opinion favorable à l'égard de l'établissement. En novembre 2013, l'agence de notation Standard & Poor's notait ainsi qu'il « est à peu près certain que RFF recevrait un soutien exceptionnel suffisant de la part de l'État français en cas de difficultés financières. [...]
« Nous considérons que la réforme ferroviaire en cours n'est pas de nature à remettre en cause cette évaluation. [...] De notre point de vue, le projet de loi confirme le rôle crucial de RFF pour l'État. [...] RFF va conserver son statut légal d'établissement public industriel et commercial [...] et rester intégralement contrôlé par l'État. Nous comprenons également que si un soutien financier exceptionnel est nécessaire, il sera plus que probablement assuré en direction » 41 ( * ) de SNCF Réseau et non de l'EPIC de tête.
RFF a confirmé à votre rapporteur qu'à partir du moment où le projet dispose que « SNCF réseau serait un EPIC dans un secteur monopolistique, qu'il garderait avec l'État des liens directs forts (de type contrat de performance en plus du statut) et qu'il reprendrait les actifs/passifs de RFF, la capacité de financement de RFF (et donc celle de SNCF Réseau) n'a pas été remise en cause par la communauté financière ».
Le graphique ci-dessous indique que l'écart de taux entre RFF et l'État - pour des maturités similaires - reste minime, ce qui confirme que les investisseurs considèrent RFF comme un émetteur fiable. Il montre aussi que, du point de vue des administrations publiques dans leur ensemble, la reprise de la dette de RFF par l'État ne permettrait pas de réaliser d'importantes économies en termes de charges financières.
Écart de taux entre RFF et l'État
Source : RFF
Devant la commission du développement durable, Jacques Rapoport, président de RFF, a confirmé « l'appétit » des investisseurs pour la dette de l'établissement : « nous empruntons aujourd'hui dans d'excellentes conditions, y compris pour refinancer la dette ancienne, surtout grâce au fait que nous sommes adossés à l'État. Le marché apprécie la dette d'infrastructures, les dettes d'État étant par trop gigantesques . En réalité, nous empruntons 5 milliards d'euros, 3 milliards d'euros de dette nouvelle et 2 milliards d'euros de refinancement, soit un million par heure ».
Il faut ensuite souligner que le reclassement en dette publique d'un tiers environ de la dette de RFF n'emporte pas de conséquence sur les ratios « maastrichiens » que la France doit respecter. En effet, l'INSEE considère que « l'État voit sa dette brute augmenter mais pas sa dette nette . Il est en effet considéré que l'État s'endette pour prêter à RFF les fonds nécessaires à ses investissements. Cette créance, équivalent à l'endettement supplémentaire, est enregistrée à l'actif de l'État. Le nouveau traitement de RFF ne modifie pas non plus le déficit public , le surcroît d'actifs équilibrant le surcroît d'endettement ».
En revanche, si l'État venait à reprendre une partie de la dette, aucun actif ne serait plus inscrit en face de ce passif, puisque le réseau - générateur de recettes commerciales - resterait la propriété de SNCF Réseau. Dès lors, l'endettement net de l'État augmenterait et viendrait peser sur ses choix budgétaires. Au regard de la trajectoire de redressement des comptes publics inscrite dans le programme de stabilité 2014-2017, une telle solution n'est pas envisageable.
Enfin, comme le soulignait Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État chargé des transports, devant la commission du développement durable, « certains veulent que l'État prenne la dette à son compte. Outre que l'effacer du tableau d'un coup d'éponge magique ne serait guère vertueux , le ministère des transports n'est pas de ceux qui sont assez près de la Seine pour y puiser...
« Sans réforme de structure, nous ne stabiliserons pas la dette et c'est alors que l'État devra intervenir. Faisons plutôt la démonstration de l'efficacité du système ferroviaire en recherchant productivité et compétitivité - deux termes qui ne sont pas pour moi des gros mots » 42 ( * ) .
De fait, le montant de la dette constitue désormais un aiguillon pour la modernisation et la transformation de SNCF Réseau. Il met le système « sous tension », y compris en poussant les pouvoirs publics et l'établissement à s'engager avec parcimonie dans de coûteux projets de développement.
L'Assemblée nationale a adopté un article 2 ter qui demande au Gouvernement un rapport sur les « solutions qui pourraient être mises en oeuvre afin de traiter l'évolution de la dette historique du système ferroviaire ». Si la trajectoire financière de SNCF Réseau se révèle intenable, l'État devra en effet envisager de contribuer plus largement au redressement du système ferroviaire, que ce soit par une augmentation de ses concours financiers ou bien par une reprise de dette.
2. Un réseau plus petit mais plus performant
En septembre 2012, devant la commission des finances, Alain Quinet, directeur général délégué de RFF, avait estimé que l'on « a besoin d'une tutelle forte et d'une participation des régions pour clarifier la consistance du réseau et les trafics que l'on souhaite y voir circuler » 43 ( * ) .
En l'état actuel, la réforme est construite autour du principe que la trajectoire financière de SNCF Réseau sera établie « à réseau constant ». Comme le soulignait Jacques Rapoport, lors de son audition par la commission du développement durable, « pour ce qui est du fait qu'on ne nous sollicitera plus pour financer les LGV, c'est pour moi une ardente obligation ! ». C'est l'objet de la règle prudentielle évoquée plus haut.
Néanmoins, sous cette hypothèse, la dette pourrait être stabilisée mais pas réduite .
Votre rapporteur s'est donc interrogé sur les moyens de faire diminuer, à terme, la dette du système ferroviaire. Le ministère des finances et des comptes publics souligne que « la rationalisation du périmètre du réseau fait partie des recommandations de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) qui a réalisé deux audits sur l'état du réseau et qui indiquait en conclusion de son dernier rapport sur le sujet qu'il ? est [...] probable qu'il va falloir opérer certains choix stratégiques qui avaient été repoussés jusqu'ici, notamment concernant le périmètre du réseau ? ».
De fait, d'après le document de présentation du Grand plan de modernisation du réseau, « 30 % du linéaire de lignes supporte près de 80 % des tonnages, tandis que la moitié du réseau ne transporte que 6 % des trafics ».
La Cour des comptes, s'appuyant sur le rapport d'audit de l'EPFL, estime que « la compression des coûts annuels d'entretien, grâce à une réduction du périmètre du réseau, pourrait être de l'ordre de 5 % à 10 % si l'on se fonde sur l'expérience des chemins de fer fédéraux suisses » 44 ( * ) .
Dans ce contexte, votre rapporteur considère que la question de la fermeture de lignes ne doit pas être taboue dès lors qu'elle permettrait à SNCF Réseau de dégager des marges de manoeuvre pour améliorer le fonctionnement du réseau structurant . Une telle réflexion s'inscrirait dans la droite ligne des travaux conduits par la commission Mobilité 21 sur les projets d'infrastructure.
EXAMEN DES ARTICLES
ARTICLE PREMIER - Principes généraux du système de transport ferroviaire national, groupe public ferroviaire, organisation et fonctionnement de l'établissement public SNCF
Commentaire : cet article a pour objet de fixer les principes généraux du système de transport ferroviaire national, de créer le « groupe public ferroviaire » et de déterminer le cadre juridique de l'établissement public SNCF.
L'article premier du présent projet de loi crée un nouveau titre au sein du code des transports, qui définit à la fois les grands principes du système de transport ferroviaire national et établit le groupe public ferroviaire constitué par la SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités (article L. 2101-1). Il fixe le cadre juridique applicable à l'EPIC de tête - la SNCF.
Au titre de l'équilibre financier de la réforme, votre rapporteur a plus particulièrement examiné les nouveaux articles L. 2102-2, L. 2102-7, L. 2102-16 et L. 2102-17 du code des transports.
L'article L. 2101-2 dispose que « les attributions dont la SNCF est dotée par le présent code à l'égard de SNCF Réseau et de SNCF Mobilités sont identiques à celles qu'une société exerce sur ses filiales ». La SNCF n'a en effet aucun lien capitalistique avec les deux autres établissements, ce qui emporte la nécessité de préciser, par la loi, la nature de leur lien juridique.
C'est ainsi que l'article L. 2101-7 prévoit que « la SNCF établit et publie chaque année les comptes consolidés de l'ensemble formé par le groupe public ferroviaire et les filiales des établissements du groupe ». Cette disposition permet, sous réserve d'une modification parallèle du code général des impôts 45 ( * ) , que le groupe puisse procéder à une intégration fiscale . Le groupe pourra ainsi réduire son impôt sur les sociétés, ce qui participe de son équilibre financier.
Enfin, l'article L. 2101-16 détermine les ressources de l'EPIC de tête, qui comprennent :
- les rémunérations perçues au titre des « missions transversales au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national, exercées au bénéfice de l'ensemble des acteurs de ce système » (2° de l'article L. 2102-1), notamment la sûreté ferroviaire, mais aussi au titre des missions mutualisées au sein du groupe exercées au bénéfice de SNCF Réseau ou de SNCF Mobilités 46 ( * ) ;
- le produit du dividende sur les résultats de ses filiales et de SNCF Mobilités ;
- les rémunérations perçues au titre des missions que lui confient les autorités publiques ;
- « toutes les recettes autorisées par les lois et règlements ».
Compte tenu de l'absence de lien capitalistique évoqué plus haut, il importe que la loi précise que la SNCF puisse percevoir un dividende sur le résultat de SNCF Mobilités, puisque cette ressource doit permettre à la SNCF d'alimenter SNCF Réseau.
L'article L. 2101-17 encadre la procédure de fixation de ce dividende. À ce titre, il prévoit que ce « dividende est prélevé en priorité sur le bénéfice distribuable de l'exercice, au sens de l'article L. 232-11 du code de commerce 47 ( * ) . Il peut être prélevé sur les réserves disponibles.
« Le montant de ce dividende est fixé après examen de la situation financière de SNCF Mobilités et constatation, par le conseil de surveillance de la SNCF, de l'existence de sommes distribuables . Il est soumis, pour accord, à l'autorité compétente de l'État, qui se prononce dans un délai d'un mois. À défaut d'opposition à l'issue de ce délai, l'accord de celle-ci est réputé acquis ».
La commission des finances a adopté un amendement de précision relatif aux rémunérations perçues par la SNCF au titre de ses missions transversales et de ses missions mutualisées.
Décision de la commission : votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de cet article, ainsi modifié .
ARTICLE 2 - Constitution de SNCF Réseau
Commentaire : cet article crée le nouvel établissement public en charge de l'infrastructure, SNCF Réseau, par regroupement de RFF, SNCF-Infra et de la direction de la circulation ferroviaire. Il détermine également les modalités selon lesquelles seront fixées sa trajectoire financière en vue d'équilibrer son endettement d'ici dix ans.
L'article 2 procède à une réécriture en profondeur de la section du code des transports relative à RFF, afin de créer SNCF Réseau.
Votre rapporteur a particulièrement examiné l'article L. 2111-10 qui comprend les dispositions les plus importantes en vue du retour de l'équilibre financier du gestionnaire d'infrastructure.
Cet article prévoit que SNCF Réseau et l'État concluent « un contrat d'une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans pour une durée de dix ans. Le projet de contrat et les projets d'actualisation sont soumis pour avis à l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et cet avis est rendu public ».
Ce contrat détermine notamment :
« 3° La trajectoire financière de SNCF Réseau et, dans ce cadre :
« a) Les moyens financiers alloués aux différentes missions de SNCF Réseau ;
« b) Les principes qui seront appliqués pour la détermination de la tarification annuelle de l'infrastructure , notamment l'encadrement des variations annuelles globales de cette tarification ;
« c) L'évolution des dépenses de gestion de l'infrastructure [...] ainsi que les mesures prises pour maîtriser ces dépenses et les objectifs de productivité retenus ;
« d) La chronique de taux de couverture du coût complet 48 ( * ) à atteindre annuellement ainsi que la trajectoire à respecter du rapport entre la dette nette de SNCF Réseau et sa marge opérationnelle ;
« 4° Les mesures correctives que SNCF Réseau prend si une des parties manque à ses obligations contractuelles ».
Un autre alinéa précise que l'avis de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF) devra examiner l'adéquation des recettes et des dépenses prévisionnelles « de façon à atteindre l'objectif de couverture du coût complet dans un délai de dix ans à compter de l'entrée en vigueur du premier contrat entre SNCF Réseau et l'État ».
Ainsi, la loi ne prescrit pas directement que le coût complet de SNCF Réseau soit couvert d'ici dix ans , mais donne cet horizon à l'ARAF pour examiner la trajectoire financière qui sera inscrite dans le contrat signé entre l'État et SNCF Réseau.
Le même article du code des transports établit la « règle d'or » ou règle prudentielle relative aux investissements de SNCF Réseau. Ainsi, il est prévu que les investissements liés à la maintenance (renouvellement des voies) soient financés dans les conditions applicables actuellement avec pour objectif qu'il ne soit plus nécessaire de recourir à l'endettement pour assurer ces travaux.
Pour leur part, les investissements de développement seront évalués sur la base de ratios fixés par décret. Par exemple, un ratio qui pourrait être retenu est celui de la dette de SNCF Réseau sur sa marge opérationnelle. Ainsi, « en cas de dépassement d'un de ces ratios, les projets d'investissement de développement sont financés par l'État, les collectivités territoriales ou tout autre demandeur ». En d'autres termes, SNCF Réseau ne pourra pas s'endetter pour financer cet investissement.
Dans le cas contraire, « les projets d'investissement de développement font l'objet, de la part de l'État, des collectivités territoriales ou de tout autre demandeur, de concours financiers propres à éviter toute conséquence négative sur les comptes de SNCF Réseau au terme de la période d'amortissement des investissements projetés ». Il s'agit de la reprise de la règle prudentielle actuelle fixée à l'article 4 des statuts de RFF.
En tout état de cause, le présent article impose également que l'ARAF émette un avis motivé sur « le montant global des concours financiers devant être apportés à SNCF Réseau et sur la part contributive de SNCF Réseau, au regard notamment des stipulations du contrat ».
En particulier, cet avis porte « sur la pertinence des prévisions de recettes nouvelles, en particulier au regard de leur soutenabilité pour les entreprises ferroviaires , ainsi que sur l'adéquation du niveau de ces recettes avec celui des dépenses d'investissement projetées ». Cette disposition vise à éviter que les entreprises ferroviaires soient trop largement mises à contribution par le biais de péages trop élevés. Il en va de même pour la disposition imposant que les ratios précités permettent de « garantir une répartition durable et soutenable du financement du système de transport ferroviaire entre gestionnaires d'infrastructure et exploitants du réseau ferré ».
Enfin, à l'initiative de notre collègue député Olivier Faure, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, l'Assemblée nationale a ajouté un alinéa qui prévoit que « la prime de risque à appliquer [aux projets d'investissement] soit encadrée par décret afin de trancher le débat sur la légitimité du gestionnaire d'infrastructures à appliquer des primes de risque au calcul d'actualisation des recettes » (extrait de l'exposé des motifs de l'amendement).
Votre rapporteur, pour les raisons exposées dans l'exposé général, est favorable à la fois à la signature d'un contrat déterminant la trajectoire financière de SNCF Réseau mais aussi à la mise en oeuvre d'une règle prudentielle renforcée . Les modalités de cette règle sont toutefois essentiellement renvoyées à un décret. Or le Gouvernement n'a pas encore arrêté les ratios (et leur niveau de dépassement) qui seront utilisés. Le législateur devra donc rester attentif à l'application de la loi sur ce point.
La commission des finances a adopté un amendement visant à réorganiser et à clarifier les différents alinéas de l'article L. 2111-10 du code des transports. Elle a également proposé de créer un nouvel article L. 2111-10-1 spécifiquement consacré à la règle prudentielle.
*
Votre rapporteur a également examiné les dispositions de l'article L. 2111-24 du code des transports relatives aux ressources de SNCF Réseau. En particulier, cet article est modifié par le présent projet de loi afin de préciser que l'établissement peut recevoir des dotations versées par la SNCF (disposition miroir de celle sur les dividendes de SNCF Mobilités).
En outre l'article L. 2111-25, relatif aux principes de calcul des redevances d'utilisation du réseau ferré national, est complété par un alinéa disposant que « tant que le coût complet du réseau n'est pas couvert par l'ensemble de ses ressources, SNCF Réseau conserve les gains de productivité qu'il réalise ».
Par là, le Gouvernement entend inscrire dans la loi le principe selon lequel les ressources (péages et subventions publiques) de SNCF Réseau ne peuvent pas subir une diminution (ou une moindre augmentation) au prétexte que le gestionnaire serait plus performant.
La commission des finances a proposé de supprimer cet alinéa . En effet, il n'apparaît guère explicite dans sa formulation (« conserver des gains de productivité ») et, surtout, peu normatif dans ses effets. Les redevances font l'objet d'un avis conforme de la part de l'ARAF, qui devra tenir compte de l'objectif de couverture du coût complet. Le gestionnaire semble donc suffisamment protégé de ce point de vue. Quant aux subventions publiques de l'Etat, elles sont fixées par une loi de finances, qui peut bien évidemment déroger à cette disposition légale.
Décision de la commission : votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de cet article, ainsi modifié .
ARTICLE 2 TER (NOUVEAU) - Rapport sur le traitement de la dette historique du système ferroviaire
Commentaire : cet article demande que le Gouvernement remette, d'ici deux ans, un rapport au Parlement sur les « solutions qui pourraient être mises en oeuvre afin de traiter l'évolution de la dette historique du système ferroviaire ».
Adopté à l'initiative de nos collègues députés Gilles Savary et Olivier Faure, respectivement rapporteur et rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, le présent article dispose que « dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet aux commissions permanentes du Parlement, compétentes en matière ferroviaire et financière, un rapport relatif aux solutions qui pourraient être mises en oeuvre afin de traiter l'évolution de la dette historique du système ferroviaire ».
Votre rapporteur est favorable à cet article qui contribue à alimenter la réflexion des pouvoirs publics sur l'endettement du système ferroviaire. Plutôt que de plaider pour une reprise de dette immédiate, dont l'exposé général a montré qu'elle n'était peut-être pas la meilleure voie pour le moment, la remise d'un rapport d'ici deux ans permet d'examiner, avec le recul nécessaire, toutes les pistes possibles pour faire diminuer la dette (augmentation des subventions publiques, création d'une caisse d'amortissement de la dette ferroviaire, reprise de dette par l'État, diminution du réseau, etc.).
Décision de la commission : votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de cet article .
ARTICLE 4 - Compétences de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires
Commentaire : cet article porte sur le rôle et les compétences de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires.
L'article 4 du projet de loi porte sur le rôle et les compétences de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF). Votre rapporteur a particulièrement examiné les deux articles du code des transports consacrés aux pouvoirs de l'ARAF en matière financière.
Ainsi, la nouvelle rédaction de l'article L. 2133-5 prévoit que l'ARAF « émet un avis conforme sur la fixation des redevances d'infrastructure liées à l'utilisation du réseau ferré national [au regard] :
« 2° De la soutenabilité de l'évolution de la tarification pour le marché du transport ferroviaire, et en considération de la position concurrentielle du transport ferroviaire sur le marché des transports ;
« 3° Des dispositions du contrat [...] conclu entre l'État et SNCF Réseau ».
En outre, le nouvel article L. 2133-5-1 dispose que « préalablement à l'examen du budget de SNCF Réseau par le conseil d'administration de celui-ci, [l'ARAF] émet un avis motivé sur ce projet. Cet avis porte notamment sur le respect de la trajectoire financière définie par le contrat conclu entre l'État et SNCF Réseau [...] .
« Si l'Autorité de régulation des activités ferroviaires constate que SNCF Réseau a manqué à ses obligations contractuelles ou que la trajectoire financière s'est écartée de celle prévue au contrat, elle en analyse les causes et peut recommander au conseil d'administration de SNCF Réseau de mettre en oeuvre des mesures correctives appropriées ».
Le présent article s'inscrit dans le prolongement des pouvoirs d'avis accordés à l'ARAF par l'article 2 du présent projet de loi sur le contrat signé entre l'État et SNCF Réseau et sur le respect de la règle prudentielle. Le régulateur devra donc surveiller l'évolution des recettes et des dépenses de SNCF Réseau. Il a, auprès des pouvoirs publics, un rôle de « lanceur d'alerte » si la trajectoire financière s'écarte de celle initialement prévue.
Il faut aussi noter que le pouvoir d'avis conforme sur la fixation des péages rend l'ARAF en partie responsable de l'équilibre économique du système ferroviaire .
Décision de la commission : votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de cet article .
ARTICLE 5 - Constitution de SNCF Mobilités
Commentaire : cet article crée l'établissement public SNCF Mobilités, principalement en charge du transport de voyageurs et de marchandises.
L'article 5 procède aux modifications du code des transports nécessaires pour constituer le nouvel opérateur de transport « SNCF Mobilités ».
Il est d'une portée moins significative en termes d'équilibre financier de la réforme. Il convient cependant de souligner que, à l'instar des dispositions prévues pour SNCF Réseau, « SNCF Mobilités conclut avec l'État un contrat d'une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans pour une nouvelle durée de dix ans. Ce contrat détermine notamment les objectifs assignés à l'entreprise en matière de qualité de service, de trajectoire financière , de développement du service public ferroviaire, d'aménagement du territoire et de réponse aux besoins de transports de la population ».
En particulier, ce contrat devrait fixer les prévisions de dividendes versées à l'EPIC de tête. Néanmoins, contrairement à SNCF Réseau, le contrat n'est pas soumis à un avis préalable de l'ARAF .
Décision de la commission : votre commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption de cet article .
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 25 juin 2014, sous la présidence de M. Philippe Marini, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. François Patriat, sur le projet de loi n° 1468 (AN - XIV e législature) portant réforme ferroviaire .
M. François Patriat , rapporteur pour avis. - Le système ferroviaire français, dans sa configuration actuelle, résulte de la loi de 1997 qui a créé Réseau ferré de France (RFF). Il s'agissait alors de séparer le transporteur et le gestionnaire d'infrastructure, conformément aux premières règles européennes en la matière.
Seulement, nous ne sommes pas allés au bout de la logique. En effet, si RFF est propriétaire et gestionnaire de l'infrastructure, il se doit se tourner vers une filiale de la SNCF - SNCF-Infra - pour réaliser les travaux. SNCF-Infra, qui comprend environ 40 000 cheminots, est ainsi qualifiée de gestionnaire d'infrastructure délégué. Cette solution avait été retenue en 1997 afin de préserver la paix sociale au sein de l'entreprise SNCF.
Le gestionnaire d'infrastructure et le gestionnaire d'infrastructure délégué sont donc dans une situation de collaboration forcée, formalisée par de nombreuses conventions, au contenu procédural et tatillon.
En 1997, RFF a repris 20,5 milliards d'euros de dette à la SNCF. Ainsi, l'opérateur historique retrouvait des marges de manoeuvre financières pour son développement. En outre, l'État ne reprenant pas cette dette, il était plus aisé d'atteindre les critères de Maastricht en vue du passage à l'euro. RFF est en effet considéré comme une entreprise commerciale puisque son actif - le réseau - lui procure des recettes qui permettent de couvrir son passif. RFF n'est donc pas consolidé dans les comptes des administrations publiques. C'est, en quelque sorte, une structure de cantonnement d'une dette quasi-publique.
Enfin, RFF pilote la gestion et l'attribution des « sillons », c'est-à-dire des créneaux de circulation sur le réseau, mais c'est une direction autonome de la SNCF, appelée la direction de la circulation ferroviaire (DCF), qui en assure la gestion opérationnelle au quotidien.
Pour résumer, RFF, bien que propriétaire et gestionnaire de l'infrastructure, est obligé de s'en remettre à deux filiales du transporteur historique - SNCF-Infra et la DCF - pour mener à bien ses missions.
Aujourd'hui, ce système fonctionne mal. S'agissant de la gestion des sillons, la France a été condamnée l'année dernière par la Cour de justice de l'Union européenne. Il faut donc que la DCF quitte le giron de la SNCF pour être pleinement intégrée à RFF.
S'agissant de la maintenance, une enquête de la Cour des comptes demandée en 2012 par Marie-Hélène Des Esgaulx, rapporteur spécial pour les transports terrestres, avait tracé un constat accablant.
RFF et SNCF-Infra sont des partenaires contraints avec des objectifs contradictoires. Guillaume Pépy, président de SNCF, et Jacques Rapoport, président de RFF, disent eux-mêmes que les deux entreprises ont l'habitude de se « faire la guerre ». En conséquence, elles ont conclu différentes conventions dont le suivi est assuré par plus de 200 personnes de part et d'autre. Les systèmes d'information ne sont pas non plus compatibles.
Plus grave, les coûts d'entretien du réseau sont insuffisamment maîtrisés. Les arbitrages entre sillons et travaux sont mal assurés. En effet, le gestionnaire doit arbitrer entre réaliser des travaux et perdre des recettes de péages. Il s'agit d'un réglage fin, que les deux entreprises, faute d'une bonne communication, ne réalisent pas au mieux.
Le diagnostic est largement partagé. Il avait fait l'objet d'un consensus lors des Assises du ferroviaire, organisées par le Gouvernement à la fin 2011.
Le remède est lui aussi consensuel : il s'agit de réunir au sein d'un même établissement public RFF, SNCF-Infra et la DCF. C'est ainsi que le projet de loi crée un nouvel établissement public industriel et commercial appelé SNCF Réseau. Ce dernier sera donc le propriétaire et le gestionnaire à part entière de l'ensemble du réseau ferré national.
Un autre établissement public industriel et commercial est également créé. Il poursuit les activités de l'opérateur historique en matière de transports de voyageurs et de marchandises. Il s'appellera SNCF Mobilités.
SNCF Mobilités et SNCF Réseau sont deux filiales parfaitement étanches l'une de l'autre, pour des raisons d'euro-compatibilité. Elles sont coiffées par un établissement public industriel et commercial (EPIC) appelé SNCF.
La tête aura vocation à assurer des fonctions transversales à l'ensemble du groupe (sûreté ferroviaire, informatique, définition de la politique de ressources humaines, etc.).
Ainsi, le projet de loi procède à la réunification de l'infrastructure mais aussi à la création d'un groupe public ferroviaire. C'est un point important d'un point de vue financier.
La dette ferroviaire atteint environ 44 milliards d'euros, à raison de 7 milliards d'euros pour la SNCF et de 37 milliards d'euros pour le gestionnaire du réseau. La dette de la SNCF apparaît sous contrôle et ne pose de problème particulier.
En revanche, la dette de RFF est plus préoccupante. En l'état actuel, l'établissement est confronté à un déficit annuel de 1,5 milliard d'euros au titre de la maintenance du réseau existant. En outre, il doit également lever environ 1,5 milliard d'euros pour financer le développement de quatre nouvelles lignes à grande vitesse (LGV), qui seront mises en service à compter de 2017.
Ainsi, en l'absence de réforme, on estime que la dette de RFF pourrait atteindre 70 milliards d'euros d'ici dix ans. Il est donc urgent d'agir et de rétablir les comptes du gestionnaire.
L'équilibre financier de la réforme est le suivant. D'abord, la constitution de SNCF Réseau doit permettre de dégager de substantiels gains de productivité et de mutualisation, estimés à environ 900 millions par an d'ici dix ans.
Ensuite, SNCF Mobilités est engagé dans un plan de performances qui doit permettre de dégager 500 millions d'euros en 2020. Une partie de cette somme serait transférée de SNCF Mobilités vers SNCF Réseau via l'EPIC de tête. Autrement dit, une partie des bénéfices de Mobilités permet de rééquilibrer les comptes du gestionnaire du réseau, d'où l'importance de constituer un groupe unique. Parallèlement, l'État ne percevrait plus de dividendes de la part de SNCF Mobilités.
Enfin, l'État a accepté que le groupe ferroviaire se constitue en groupe fiscal. Ainsi, les déficits de SNCF Réseau pourront être compensés par les bénéfices de SNCF Mobilités, ce qui réduit l'impôt sur les sociétés dû par le groupe.
Au total, l'effort de l'État, au titre de l'abandon du dividende et de l'impôt sur les sociétés, représente un gain de 500 millions d'euros pour SNCF Réseau.
L'objectif poursuivi par la réforme consiste donc à stabiliser la dette de SNCF Réseau à horizon dix ans. Je note cependant que mes interlocuteurs sont restés très prudents sur la cible visée d'ici 2025. Certains ont évoqué une stabilisation à hauteur de 60 milliards d'euros à cette date.
Le projet de loi comprend des garde-fous pour éviter que SNCF Réseau ne dérive de la trajectoire financière fixée par l'État.
Ainsi, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF) a pour mission d'émettre un avis sur le projet de budget annuel de SNCF Réseau et de l'inciter à le corriger s'il s'écarte de la trajectoire retenue.
Le second garde-fou, c'est la « règle d'or » ou règle prudentielle pour le financement des investissements de développement, c'est-à-dire l'ouverture de nouvelles lignes.
Aujourd'hui, l'article 4 des statuts de RFF prévoit que, pour la création d'une nouvelle ligne, il ne peut s'endetter qu'à hauteur des recettes prévisionnelles. Dans le cas contraire, les autorités publiques doivent apporter le complément de financement.
En pratique, le retour sur investissement de plusieurs lignes mises en chantier récemment risque de se révéler plus faible que prévu. Autrement dit, RFF va devoir supporter une part du financement plus importante. Le renforcement de la règle d'or part donc du constat que les opérations de développement ont lourdement pesé sur les comptes de RFF.
Le projet de loi propose de réécrire la règle d'or. Ainsi, la capacité de SNCF Réseau de financer des investissements serait évaluée en fonction de différents ratios, notamment le poids de la dette par rapport à sa marge opérationnelle. Si SNCF Réseau apparaît déjà comme étant trop endetté, il ne pourra pas investir dans un projet de développement.
Dans le cas contraire, il pourra investir mais, tout comme aujourd'hui, seulement à hauteur des recettes attendues. Le respect de la règle d'or est lui-même surveillé par l'ARAF.
Cette trajectoire financière est-elle tenable ?
Aux dires de la SNCF et de RFF, l'État ne va pas assez loin et les comptes ne seront pas équilibrés à horizon dix ans. Il est vrai que des contraintes fortes pèsent sur le secteur.
D'abord, les recettes de SNCF Réseau risquent de ne pas être dynamiques. La crise économique a conduit à une baisse du trafic voyageurs et de marchandises. Les hausses des péages d'infrastructure, fortes ces quatre dernières années, seront limitées au moins jusqu'en 2018. SNCF Réseau ne pourra donc pas augmenter ses recettes par un effet-prix.
Ensuite, les subventions publiques seront, au mieux, maintenues mais il y a peu de chance pour qu'elles augmentent.
Enfin, SNCF Réseau reste exposé, comme l'État, au risque que les taux d'intérêt remontent dans les mois qui viennent.
Les efforts sur la dépense devront donc être très importants. L'idée de la reprise d'une partie de la dette de SNCF Réseau par l'État est régulièrement avancée pour l'aider à retrouver plus rapidement une trajectoire financière équilibrée.
Cette idée s'appuie notamment sur le fait que l'INSEE, le mois dernier, a requalifié un tiers de la dette de RFF, soit environ 10 milliards d'euros, en dette publique. Il s'agit donc de la fin d'un tabou et peut-être aussi d'une forme d'hypocrisie.
Néanmoins, il faut souligner que l'INSEE a reconnu qu'un actif - le réseau - était inscrit face à cette dette. En conséquence, le stock de dette publique nette - celui qui est pris en compte pour le calcul des ratios « maastrichiens » - n'est pas modifié.
À l'inverse, si l'État venait à reprendre cette dette, il n'y aurait plus d'actif inscrit en contrepartie et la dette nette augmenterait à due concurrence. La reprise de dette me semble être fausse bonne idée pour l'instant.
D'abord, RFF reste un emprunteur crédible sur les marchés. Une analyse de Standard & Poor's montre que les investisseurs considèrent qu'il s'agit d'une dette de l'État français. La dette est donc peu risquée et la différence de taux d'intérêt entre RFF et l'État est minime. En pratique, il n'y a pas d'urgence à libérer RFF de ce fardeau.
Surtout, on pourrait s'interroger sur le caractère vertueux d'une reprise de dette par l'État. Aujourd'hui, le poids de la dette est un puissant moteur pour que RFF, puis SNCF Réseau, se transforme et se modernise. C'est aussi un aiguillon qui pousse à choisir avec parcimonie les projets de développement.
Enlever un tiers de la dette ne contribue pas à nous interroger collectivement sur les bons choix à opérer pour notre réseau ferré national. En particulier, tous les rapports d'expertise soulignent que le réseau est trop grand et qu'il doit être réduit pour que nous réussissions à le maintenir dans un état de performance acceptable. L'année dernière, le rapport de la Commission Mobilité 21 a souligné que nous devions faire des choix, établir des priorités entre la construction de nouvelles infrastructures et maintenir le réseau en l'état. La reprise de la dette ne doit pas occulter ces questions fondamentales.
Ceci étant dit, il y a également un consensus pour dire qu'une partie de la dette de SNCF Réseau ne sera pas amortissable par le système ferroviaire. À terme, l'État sera donc probablement contraint d'en reprendre une partie.
L'article 2 ter du projet de loi, voté à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, demande au Gouvernement de rendre un rapport, d'ici deux ans, afin d'étudier les possibilités permettant de « traiter l'évolution de la dette historique du système ferroviaire ». Faudra-t-il faire une caisse d'amortissement de la dette ferroviaire (CADEF) ? La question sera posée.
Cela me semble un bon compromis. Pour l'instant, la reprise de dette ne me paraît pas urgente, moins urgente en tout cas qu'une réflexion collective sur le devenir de notre réseau.
Sous le bénéfice de ces observations et des amendements que je vous proposerai, je suis d'avis que la commission des finances propose au Sénat d'adopter le projet de loi portant réforme ferroviaire et, plus particulièrement, les articles 1 er , 2, 2 ter , 4 et 5 qui comportent des dispositions qui intéressent plus directement l'équilibre financier de la réforme.
Ce texte de loi a quatre points essentiels. Celui de maintenir l'unité de la SNCF ; celui de garantir le statut des personnels ; celui de permettre de faire des économies et de réduire la dette ; celui de permettre l'ouverture à la concurrence que demande l'Europe d'ici 2019.
M. Philippe Marini , président. - Permettez-moi de saluer votre position courageuse en ce qui concerne le refus de l'hypothèse de la reprise par l'État de la dette, ou d'une quote-part de celle-ci. Cette position va dans le sens des responsabilités qu'une commission des finances doit exercer.
M. François Marc , rapporteur général . - Notre rapporteur est fondé à proposer l'adoption de ce texte, qui a la vertu d'éclaircir la situation, de laisser ouverte la perspective de la concurrence sur les réseaux et de clarifier les choses en ce qui concerne la dette.
Ma question porte sur la nouvelle règle d'or et son lien avec les préconisations du rapport Duron. La règle d'or, qui était auparavant un peu sommaire dans sa mise en oeuvre, tiendrait désormais compte de différents ratios. La nouvelle règle d'or implique-t-elle un examen des projets au cas par cas ? En d'autres termes, s'agit-il d'une logique - osons le mot - libérale, qui impliquerait que chaque ligne ferroviaire soit financée par ses propres recettes, de manière autosuffisante ? Dès lors, les préoccupations d'aménagement du territoire et de solidarité peuvent paraître quelque peu mises à l'écart par la formulation de cette nouvelle règle d'or. Les préconisations du rapport Duron aboutiraient alors à une hiérarchisation entre les projets rentables, lesquels seraient mis en oeuvre tout de suite, et les projets qui le sont moins, lesquels seraient repoussés ad vitam eternam ...
M. Philippe Marini , président . - Permettez-moi de faire une réserve sémantique sur l'utilisation de l'expression « règle d'or ». Cette expression recouvre d'ordinaire l'idée selon laquelle l'emprunt doit être réservé aux investissements. La « règle d'or » proposée ici est plus complexe, car adaptée au contexte du système ferroviaire public - même s'il fallait bien trouver une appellation simple et pédagogique. Pourriez-vous nous rappeler ce que cette règle d'or contient en l'espèce ? Qu'en est-il de l'aménagement du territoire évoqué par le rapporteur général ? On peut toutefois rappeler qu'il existe d'autres outils d'aménagement du territoire, comme par exemple le fait de ne pas appliquer de manière homogène les écotaxes...
M. François Marc , rapporteur général . - Il y a aussi la navigation fluviale...
M. Philippe Marini , président . - Absolument. Et de fait, tous les territoires ne sont pas traversés par des canaux... Nous vivons bien nos contradictions.
M. François Patriat , rapporteur pour avis. - D'abord, une réflexion personnelle du président d'exécutif local que je suis : peut-être que si nous avions eu d'autres règles d'or plus tôt, nous aurions aujourd'hui sur nos territoires moins d'équipements dont l'efficacité n'est pas démontrée... Je pourrais vous citer maints exemples de dépenses importantes en matière d'équipements portuaires, aéroportuaires ou ferroviaires, à la charge de l'État et des collectivités territoriales, dont l'efficacité n'a pas été vérifiée.
Par exemple, mon prédécesseur à la tête de la région Bourgogne - auquel je n'ai pas de reproches à faire - avait engagé entre 2002 et 2004 près de 10 millions d'euros pour huit gares de transport de bois, dans les massifs du Morvan et du Châtillonnais. Aujourd'hui, ces huit gares-bois sont fermées. Si nous nous étions demandé à l'époque si ces gares-bois allaient être utilisées, aurait-on réalisé ces investissements ? Voilà pourquoi nous avons besoin d'une règle d'or intelligente, qui permette d'investir avec lucidité. Certains équipements sont parfois brillants sur le plan politique, excellents en termes de perspectives et d'espoir pour les territoires, mais leur rentabilité n'est pas prouvée. Voyez par exemple la ligne « Paris - Orléans - Clermont-Ferrand » (POCL), pour laquelle j'ai dû participer à plus de 35 réunions...
La règle d'or permettra donc de protéger les finances de SNCF Réseau, d'où un raisonnement au cas par cas sur les projets. Quant au développement de projets d'intérêt général pour le territoire, il n'est évidemment pas oublié, mais leur financement sera à la charge de l'État ou des collectivités, et pas de SNCF Réseau.
M. Roger Karoutchi . - Je remercie François Patriat qui, en creux, dit assez clairement les choses sur la dette, sur le risque que cette dette ne s'amenuise pas et sur le fait que les résultats de cette réforme demeurent incertains.
Une fois de plus, on ne prend pas le taureau par les cornes, on ne met pas tout sur la table, on ne fait pas complètement la réforme des transports publics qui est pourtant un vrai sujet. Après la Bourgogne, je prendrai le cas de l'Île-de-France : la SNCF et la RATP se font concurrence sur certaines lignes, ouvrent des lignes parallèles... uniquement parce que les deux entreprises refusent de travailler ensemble ! Combien de gares avec un quai SNCF et un quai RATP ? Cela coûte des dizaines de millions d'euros et personne n'intervient pour remettre de l'ordre. Voilà qui nécessiterait une règle d'or ! On nous explique que les ingénieurs ne travaillent pas ensemble et que les entreprises ont des projets différents pour le territoire, mais ce sont les collectivités territoriales et les usagers qui paient le prix de ces divergences.
Deuxièmement, je n'ai jamais été favorable à la séparation entre la SNCF et RFF. J'ai organisé des réunions entre les deux, au titre de mes différentes fonctions : ils répètent qu'ils ne peuvent pas travailler ensemble et en oublient qu'ils travaillent d'abord pour le service des usagers. On ne peut donc pas se lamenter de la disparition de RFF.
Mais en réalité, que fait-on ? On remplace RFF par SNCF Réseau, mais cette nouvelle entité sera gérée de manière totalement autonome par rapport à SNCF Mobilités, et pour que l'ensemble puisse fonctionner, on va prendre de l'argent à SNCF Mobilités pour le donner à SNCF Réseau qui est couvert de dettes ! En clair, on nous dit très sereinement qu'il va falloir soit augmenter les tarifs des voyageurs, soit demander aux collectivités territoriales de faire les compensations nécessaires, pour que SNCF Mobilités puisse combler les dettes de SNCF Réseau. Nous sommes quand même dans un système un peu fou ! Et je ne parle pas des grèves qui viennent d'avoir lieu, car le statut des cheminots n'est pas en cause dans cette réforme.
La réalité est que l'équilibre financier du système n'est absolument pas garanti. La réforme ne change absolument rien. Elle va supprimer un monstre de technocratie, de bureaucratie et d'administration... pour en créer un autre ! Elle est présentée comme une réorganisation, mais ne fait que transférer deux entreprises à une entité qui couvre en fait deux entreprises totalement autonomes, qui ne sont ni à l'équilibre, ni réformées. Il n'y a pas de réforme, il n'y a qu'un transfert. Ce n'est pas plus simple, c'est la même chose !
En Île-de-France, nous nous battons pour une vision plus rationnelle du transport public, mais personne n'intervient sur la RATP, personne n'intervient sur la SNCF. Ces autorités considèrent qu'elles sont les seules détentrices de la capacité et de la compétence, que les hommes politiques sont par définition des incompétents et des incapables. Mais viendra un moment où l'on ne pourra plus faire l'économie d'une véritable réforme du transport public en Île-de-France. En attendant, je ne voterai pas la réforme proposée.
M. Philippe Marini , président . - Je remercie Roger Karoutchi pour son exposé éclairant. Il faudrait que nous puissions mieux comprendre ce que change concrètement cette nouvelle organisation, même si nous ne sommes en l'occurrence que saisis pour avis. S'agit-il d'une simple réorganisation juridique ? Ou bien d'une véritable simplification qui permettra de réduire les coûts et de clarifier le financement des investissements, comme le dit le Gouvernement ?
J'ai vu passer de nombreuses réformes depuis 1986. On nous disait que la séparation des infrastructures et de la gestion du réseau était indispensable au regard du droit communautaire et permettrait l'ouverture à la concurrence des infrastructures de transport ; il semblerait qu'il soit désormais possible de regrouper ces deux activités au sein du même établissement public.
Je me demande cependant si les deux filiales auront deux bilans et deux comptes d'exploitation séparés ? C'est un point important car une seule d'entre elle est tenue de respecter la règle d'or.
M. Aymeri de Montesquiou . - Le rapporteur peut-il nous dire s'il y a des pays comparables dont le réseau ferroviaire est bénéficiaire ? Par ailleurs, nous n'avons pas abordé la question du statut des 250 000 cheminots, sur lequel on entend des choses délirantes. Or cela a un effet sur le coût du fonctionnement.
Enfin, j'entends le rapporteur dire qu'il faudrait supprimer les lignes déficitaires. Mais ces lignes constituent un service public. Il est schizophrénique de vouloir supprimer des lignes de chemin de fer quand dans le même temps on tient des discours environnementalistes...
M. Dominique de Legge . - On nous dit que cette réforme devrait permettre des gains de productivité, mais je ne vois pas bien d'où ils pourraient provenir... Je note par ailleurs que l'addition de deux dettes ne permet pas à elle seule de les faire diminuer...
S'agissant de l'état du réseau de la SNCF, il est tout à fait satisfaisant en ce qui concerne le réseau principal, mais l'état du réseau secondaire m'inquiète. En quoi cette réforme permettra-t-elle d'améliorer cette situation ? Sinon, ce sont les collectivités territoriales qui devront financer...
Je partage le souci de Roger Karoutchi de mettre de l'ordre dans notre dispositif. Il faut que les diverses autorités organisatrices des transports s'entendent.
Mme Marie-France Beaufils . - La séparation de RFF et de la SNCF n'a pas fonctionné, en termes de service public proposé, que ce soit pour le transport de passagers ou de marchandises. Les entreprises qui voudraient recourir au fret ferroviaire ne le peuvent pas, faute d'une offre suffisante. Mais cela n'empêche pas de tenir parallèlement des discours volontaristes lors des Grenelles...
Je suis sceptique quant aux gains de productivité que permettrait le projet qui nous est présenté. Pour en réaliser, il faudrait investir dans les infrastructures et sur le matériel roulant. Sinon, les seuls gains de productivité porteront sur la réduction des personnels... qui a ses limites, si on ne veut pas dégrader le service rendu.
On nous avait dit qu'on ferait payer les sillons à un niveau qui permettrait d'équilibrer le budget. Mais ce n'est pas le cas ! Et leur niveau est pourtant très élevé... D'ailleurs, on voit bien en matière de transports urbains qu'il faut toujours une intervention publique pour équilibrer les budgets. Et l'on observe que l'Allemagne et le Royaume-Uni ont dû réinjecter de l'argent public dans leur système ferroviaire. Il faut des outils de financement.
Ce projet de loi ne répond pas à la nécessité de rendre le système plus efficace. On risque d'augmenter encore la dette de la SNCF. Quant à l'ouverture à la concurrence, on a bien vu qu'elle ne fonctionnait pas concernant le transport de marchandises, en se portant exclusivement sur les créneaux les plus rentables.
M. Vincent Delahaye . - Je n'étais pas convaincu à l'époque que la séparation des deux entités permette des économies, pas plus que je ne suis persuadé que leur réunification aujourd'hui puisse permettre d'améliorer le système.
Néanmoins, les mouvements sociaux de ces derniers jours ont perturbé la vie de millions de Français et m'ont convaincu qu'il fallait aller dans le sens de cette réforme, car je crois qu'ils étaient alimentés par la crainte de gains de productivité. Mais à combien s'élèveront ces gains de productivité ? Il me semble qu'ils ne sont pas vraiment documentés.
Et comment fonctionnera précisément cette règle d'or ? Il sera possible de s'endetter pour construire de nouvelles lignes à hauteur des recettes prévisionnelles : mais sur quelle durée ? Et ce critère ne me semble pas suffisant : les infrastructures de transport peuvent être créatrices de richesse. Je pense par exemple au Grand Paris Express, pour lequel j'avais d'ailleurs proposé un financement à partir de la valorisation du territoire que ces investissements permettent.
Mme Nicole Bricq . - François Patriat nous a tenu un discours de vérité et, par les amendements qu'il propose, fait ce qu'il peut dans le cadre du dispositif. Je souhaiterais toutefois revenir un peu en arrière. Des choix ont été faits en faveur du TGV. C'était aussi un moyen de soutenir la filière ferroviaire, notamment Alstom dont nous avons beaucoup parlé ce week-end. Mais nous ne l'avons guère vendu qu'au Maroc... et financé par des subventions publiques françaises. Nous sommes concurrencés par d'autres pays qui offrent la même qualité, mais qui sont moins onéreux et qui sont capables de s'inscrire dans une concurrence mondiale - je pense à la Corée, à l'Espagne, et bien sûr à l'Allemagne. Or notre soutien au TGV s'est fait au détriment de l'entretien des infrastructures en Île-de-France, qui ont pour beaucoup plus de 40 ans et ne sont plus au rendez-vous aujourd'hui, d'où d'énormes problèmes causés par de petites pannes. Les gens qui viennent travailler en RER n'en peuvent plus. Ils ont très mal vécu le mouvement de ces derniers jours.
De même, il y a un véritable problème avec Roissy : après 6 heures du matin, il faut deux heures pour arriver à Paris ! Dans une capitale comme Moscou, qui compte 23 millions d'habitants, une demi-heure suffit pour rejoindre le centre-ville depuis l'aéroport. Il faut donc absolument faire quelque chose. Mais on ne trouve ni financement public, ni financement privé. Une grande entreprise française a renoncé il y a quelques années. On me dit que la RATP serait en train de préparer un projet, mais rien n'est joué. Les choix stratégiques du passé pèsent sur les choix que nous sommes obligés de faire aujourd'hui.
Concernant la concurrence que se livrent la SNCF et la RATP, je peux tout de même attester d'une réussite : Systra, une structure commune d'ingénierie, qui fait un excellent travail et mérite d'être soutenue à l'international. Malheureusement, c'est le seul exemple.
La question essentielle à mes yeux est celle de la dette. François Patriat a fait référence à la CADEF, qui serait une structure de cantonnement. La dette est en effet une question essentielle.
Le montage - une holding et deux filiales - est conçu pour passer l'étape bruxelloise : la dette de la nouvelle entité ne sera donc pas prise en compte dans la dette publique au sens de Maastricht, mais il n'empêche qu'elle est là. La question reste donc entière. Cela ne m'empêchera pas, bien sûr, de voter le texte, car il faut en finir avec cette affaire.
Je m'interroge tout de même sur le sens de cette « règle d'or ». Ce n'est pas le terme qui me gêne, mais le fait qu'on fixe une règle qui pourrait ne pas être appliquée. Il y a des représentants de l'État dans les conseils d'administration : quel est leur rôle, si ce n'est de choisir les projets, se prononcer pour tel choix et pas un autre ?
M. Philippe Marini , président . - En d'autres termes : faut-il que cela se trouve dans la loi ? En libéral indécrottable, je n'aime pas que tout soit figé dans les textes.
M. Jean Germain . - En libéral anti-européen...
M. Philippe Marini , président . - Mais non, pas anti-européen, euro-réaliste !
Mme Nicole Bricq . - Si l'État n'est pas d'accord avec un projet, il peut le dire par la voix de ses représentants. À quoi cela sert-il d'avoir des administrateurs si c'est pour qu'ils soient - c'est le terme qu'on a souvent utilisé - transparents, si c'est pour qu'ils ne participent pas aux choix stratégiques ? C'est leur travail.
M. Philippe Marini , président . - Quand on a l'esprit transparent, on n'y peut rien. On sera toujours transparent. Ça ne se décide pas dans les textes.
Mme Nicole Bricq . - On peut toujours faire mieux. Vous avez une vision de droite pessimiste, j'ai une vision de gauche optimiste.
M. Philippe Marini , président . - La dette, qu'elle soit maastrichtienne ou pas, reste de la dette. Il faudra la rembourser, et c'est du risque qui ne fait que s'accumuler. Il en va pour la dette ferroviaire comme pour la dette des investissements d'avenir, dont on nous exposait hier les règles très complexes : il faudra en assurer le service. Peu importe l'habillage.
M. Jean Germain . - Je n'ai pas l'opinion définitive et déterminée de certains, car je suis utilisateur de la SNCF, et j'ai aussi connu, comme tout exécutif local, les demandes qui nous sont faites par les uns et les autres. Cette réforme est complexe - si les solutions étaient simples, cela se saurait depuis des années. C'est d'ailleurs pour cela qu'à l'Assemblée nationale comme au Sénat, à gauche comme à droite, les opinions des uns et des autres peuvent être différentes et parfois concordantes. Cela d'ailleurs ne me choque pas : je pense que l'un des défauts du système politique français est d'empêcher les accords transpartisans, sauf à être condamné par son propre camp... alors que dans le même temps le parti populaire européen (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D) se mettent d'accord pour présider alternativement le Parlement européen.
La SNCF n'est pas une entreprise comme les autres. C'est une entreprise qui a une histoire, une histoire importante dans les moments difficiles de notre pays, et qui touche énormément de Français chaque jour - c'est pour cela que les conflits sociaux sont compliqués.
Voici ce que je comprends de la réforme. Alors que la dette de 44 milliards d'euros augmente de 3 milliards d'euros par an, la réforme permettrait d'économiser 1,5 milliard d'euros chaque année. De plus, les discussions à l'Assemblée nationale ont permis de dégager un socle social commun, avec notamment un comité central d'entreprise (CCE) unique, qui a convaincu, sinon l'ensemble, au moins un certain nombre de cheminots et de syndicats. Enfin, une règle d'or prévoit que ceux qui demandent de nouvelles lignes - l'État ou les collectivités - en assurent le financement. Je pense qu'il s'agit d'une réforme compréhensible pour les Français et d'une véritable avancée à défaut de solution complète. C'est toujours mieux que le statu quo .
Je souscris au propos de Marie-France Beaufils : comme tout service public, le transport ferroviaire ne peut fonctionner sans subvention publique. Certes, l'Allemagne n'a plus de dette ferroviaire, mais la raison est très simple : lors de la réunification, il a été décidé du rachat total des dettes des deux systèmes, celui de la République fédérale d'Allemagne et celui de la République démocratique d'Allemagne - rachat d'ailleurs en partie payé par l'Union européenne. Mis à part ce cas très particulier, le système ferroviaire ne s'autofinance dans aucun pays à ma connaissance.
Le TGV illustre le fait que la SNCF est une entreprise spéciale. Le TGV ne s'est certes pas beaucoup vendu : à l'Espagne, à l'Italie, à la Corée du Sud et au Maroc - et encore dans ce dernier cas s'agit-il d'une compensation du roi pour avoir préféré le F16 américain au Rafale français. Mais le TGV, c'est aussi un rêve français. Bien sûr, on pourrait raisonner en purs technocrates et en constater après le résultat - notamment la progression de certains partis. Le TGV ne s'est pas vendu, mais il est quand même une grande réussite technologique de l'intelligence française. On peut se moquer des records de vitesse, mais pour beaucoup dans notre pays, c'est une fierté - et je ne m'en désolidarise pas. Évidemment, nous pourrions avoir de meilleurs commerciaux, mais il reste que nos ingénieurs ont accompli quelque chose de bien. Il est légitime que les cheminots en soient fiers.
Un dernier mot sur les gares-bois évoquées par François Patriat. Il y a dans certaines régions des mots sacrés, et j'imagine qu'en disant « le bois ! » dans un hémicycle, on suscite immédiatement l'enthousiasme des écologistes, des sylviculteurs, du monde agricole, des conseillers généraux, de certains maires etc.
Ensuite, les choses s'enchaînent : nous avons le plus grand réseau forestier, mais nous n'arrivons pas à le vendre, faute de pouvoir le transporter. Comment le transporter ? Arrêtons les camions qui polluent et choisissons le rail. On ne peut que voter pour cela ! Ensuite, les syndicats accentuent leurs pressions, enthousiastes devant les perspectives de créations d'emplois. Puis l'on trouve un petit village avec une gare en dépérissement : c'est l'endroit idéal pour la gare-bois, car cela permettra de maintenir l'école. Et pour peu que le directeur de l'école vienne s'étonner que l'on transporte du bois - même si cela ne marche pas - et pas des élèves, on décide de faire passer un TER !
Bien sûr, je suis le seul à céder à ce genre de pressions, à avoir cette espèce de faiblesse devant les électeurs... Je fais cette confession. Je sais que chacun, autour de la table, a refusé de manger de ce pain-là, n'ayant pour seul souci que le solde structurel du pays. Je demande donc à tous ceux qui savent lutter de me dire comment ils ont réussi à le faire !
Plus sérieusement, il faut bien comprendre que c'est notre système lui-même qui aboutit, de fil en aiguille, à cette situation : la responsabilité est partagée.
M. Philippe Marini , président . - Vous nous avez exposé votre vécu de ce système, que nous partageons... Chacun doit faire son autocritique.
Mme Nicole Bricq . - Je suis convaincue que nous avons les meilleurs ingénieurs du monde.
M. Philippe Marini , président . - Quand ils font du rentable, ce n'est pas plus mal ! Ils sont parfois un peu perfectionnistes.
Ainsi, je dois dire que mon père - qui était ingénieur - avait une notion de la vérité, du blanc et du noir, ce qui est vrai, ce qui est faux... Il avait certainement raison. Quant à moi, la vie m'a plutôt amené dans des zones grises...
M. Francis Delattre . - Ça tombe bien, pendant vingt ans on m'a appelé « le député des petits gris » !
La vraie question que pose ce texte c'est qu'il y a de la bonne et de la mauvaise dette. Or nous sommes désormais bloqués dans notre possibilité d'investir par les critères européens sur le déficit. Je pense qu'il faudrait que les investissements finançant des infrastructures soient exclus de la dette maastrichtienne. Il me semble que ce genre de mesure pourrait être acceptable... sinon on ne peut plus rien négocier ! Je souhaiterais que cette motion soit mise aux voix.
M. Philippe Marini , président . - On peut négocier quand on respecte ses engagements ; mais si l'on veut faire évoluer les règles pour pouvoir toujours s'endetter davantage... La vraie question est de savoir pourquoi on a exclu les investissements dans les infrastructures du périmètre des investissements d'avenir. Les deux co-présidents du comité de surveillance du programme d'investissements d'avenir (PIA) avaient d'ailleurs sur ce point des avis différents : Michel Rocard y était favorable, tandis qu'Alain Juppé y était opposé.
Nous ne pouvons pas faire de motion mais peut-être pourrions-nous formuler un voeu sur l'intégration du transport terrestre dans le périmètre du PIA.
M. Yannick Botrel . - Je constate que le statut des personnels n'est pas en cause, on peut donc se désoler de l'archaïsme de certains syndicats qui pendant plusieurs jours ont pénalisé les entreprises et les usagers.
Je note également que la séparation de la SNCF et de RFF a été un facteur de confusion et une erreur, puisque l'on revient dessus.
Par ailleurs, je m'inquiète des difficultés à financer la ligne à grande vitesse vers la Bretagne, qui est pourtant nécessaire. À l'issue de cette réforme, quelle sera la capacité d'investissement de la SNCF ? Enfin, pense-t-on sérieusement que la SNCF sera en capacité de rembourser sa dette, dans le contexte que nous venons de décrire ?
Mme Fabienne Keller . - J'ai été pendant quatre ans administratrice de RFF, je connais donc bien le sujet. RFF faisait des travaux pour justifier la non inclusion de sa dette dans le périmètre maastrichtien, en se basant sur la rentabilité de son réseau... mais la réalité financière des dernières années a montré que cela ne fonctionnait pas. La dette de RFF a augmenté comme une boule de neige, notamment car l'État n'a pas respecté le contrat d'objectifs et de moyens. Je pense en particulier au plan de régénération du réseau secondaire. Je souhaite souligner qu'aucun réseau ferroviaire ne s'autofinance... mais que cela est également vrai pour les réseaux routiers.
Par ailleurs, le conseil d'administration était préoccupé du glissement des charges de personnels, dont 10 000 avaient le statut SNCF. Au traumatisme du partage du patrimoine a succédé une tension SNCF - RFF liée à cette question du personnel mis à disposition.
Nicole Bricq faisait remarquer il y a un instant qu'il y avait des représentants de l'État dans les conseils d'administration, mais ils ne sont pas toujours d'accord entre eux... entre les budgétaires, ceux qui s'occupent des comptes de RFF, ceux qui représentent le ministère des transports... d'où la nécessité d'une règle d'or.
M. François Patriat , rapporteur pour avis. - Il faut effectivement être lucide. Si l'on fait un état des lieux : le service du réseau ferré s'améliore-t-il en France ? Non ! Il se dégrade. Chaque jour, je prends le TGV entre Dijon et Paris. Quatre fois sur cinq, le train a entre quinze et vingt minutes de retard. Il n'est jamais à l'heure, pour des raisons d'infrastructures, de caténaires, etc.
Un rapport de l'École polytechnique fédérale de Lausanne confirme que l'état de notre réseau est dramatiquement mauvais. Sur certaines lignes, il n'est plus possible de rouler au-delà de 40 kilomètres par heure, sous peine que les trains ne versent. Nous n'avons pas le meilleur système du monde, ni le plus performant, ni le plus sécurisé. Je vous livre le sentiment de l'usager que je suis.
En tant que président de région, en donnant chaque année 150 millions d'euros à la SNCF pour faire fonctionner les TER, j'ai l'impression de ne pas en avoir pour mon argent. Quand je prends le TER et qu'il est à l'heure à Paris : « la SNCF est heureuse de vous avoir accompagné et vous souhaite une bonne journée » ; s'il est en retard : « la région Bourgogne s'excuse du retard »...
J'ai donc un peu du mal à comprendre ceux qui ne veulent pas voter cette réforme. Soit ils pensent que ça marche très bien, soit ils pensent qu'elle ne va pas assez loin. En tout cas, une chose est sûre, de mon point de vue, le statu quo ne permettra pas de meilleurs résultats.
La SNCF s'est engagée, d'ici 2020, sur un plan de performances permettant de dégager un milliard d'euros et pas seulement - je le dis à Marie-France Beaufils - sur les réfactions de personnel.
Monsieur le Président, la réforme va au-delà d'une simple clarification juridique. La mutualisation des métiers de l'infrastructure (RFF, SNCF-Infra et DCF) est un élément fort de la maîtrise des coûts et de l'équilibre du gestionnaire. Il y aura bien deux bilans et une séparation stricte entre Mobilités et Réseau. La tête a notamment pour fonction de recevoir des dividendes depuis SNCF Mobilités et de les faire redescendre vers SNCF Réseau. Cette organisation permet de garantir l'euro-compatibilité tout en visant l'équilibre financier.
On peut faire des économies à la fois par des gains de productivité mais aussi en évitant tous les dysfonctionnements qui coûtent chers aujourd'hui. L'objectif c'est la stabilisation de la dette. Sans réforme, sans économies, la dette atteindra 70 milliards d'euros dans 10 ans, continuera à croître et le système ira à vau-l'eau.
Pour répondre à Aymeri de Montesquiou, je suis désolé d'avoir gâché sa matinée... Les fonctions de gestion de réseau sont rarement bénéficiaires, comme vient de le dire Jean Germain. En Allemagne, la situation serait plus favorable car l'État a repris la dette. Quand j'en discute avec Guillaume Pépy, il me dit « donnez-moi les conditions d'exploitation allemandes et, demain, je serai bénéficiaire ». Il parle aussi bien de la dette que du statut et des rémunérations.
Sur le fret, les concurrents de la SNCF peuvent atteindre des prix 45 % moins chers. Le problème un jour, se posera dans ces termes-là. Je ne dis pas qu'il faut changer le statut...
M. Aymeri de Montesquiou . - Et pourquoi pas ?
M. François Patriat , rapporteur pour avis. - ... Mais il faut avoir à l'esprit que les conditions d'exploitation doivent être modifiées.
S'agissant des gains de productivité, pour répondre à Dominique de Legge et à Vincent Delahaye, le Gouvernement a mené des contre-expertises sur les montants avancés par les deux entreprises. Néanmoins, nous ne pouvons avoir aucune certitude sur leur montant et leur échéance. Nous avons fixé un cap. Le rapport écrit sera plus précis sur ce point.
Je rappelle que la « règle d'or » ne s'applique qu'à SNCF Réseau : elle n'empêche pas que l'État ou tout autre demandeur finance le développement d'une infrastructure.
Je voudrais rassurer Marie-France Beaufils : il est bien prévu que les interventions publiques soient maintenues. D'ailleurs, l'État consent 500 millions d'euros pour l'abandon des dividendes et la moindre recette d'impôt sur les sociétés.
Il nous faut fermer des lignes TER. En Bourgogne, si nous payions un taxi pour transporter les gens entre Saulieu et Avallon, je gagnerais de l'argent ! Vous avez dit « il faut des outils de financement ». Oui, mais lesquels envisagez-vous ?
Nicole Bricq a justement rappelé que les investissements pour développement le TGV ont été réalisés au détriment de l'entretien du réseau existant. Au surplus, ils ont contribué à augmenter la dette de RFF. Pour l'instant, nous avons pour objectif de stabiliser - et pas de diminuer - cette dette. Pour l'instant, si l'INSEE considère que 10 milliards d'euros de dette portée par RFF est de la dette publique, cela n'a d'impact que sur le niveau de la dette brute et non sur celui de la dette nette.
Comme le disait Jean Germain, dans aucun pays ou presque, le gestionnaire du réseau n'atteint l'équilibre financier. C'est aussi pourquoi il n'a souvent pas la responsabilité de financer le développement, qui est laissée à l'État et aux collectivités territoriales. Pour le reste, je souscris totalement à ses propos.
Si l'on suit la proposition de Francis Delattre, à savoir ne pas inclure dans les ratios les dettes dites « productives », alors, demain, toutes les dettes seront ainsi qualifiées. Ce serait un artifice.
Quant aux analyses de Fabienne Keller, je les partage
Elle connaît bien la question également d'un point de vue régional. La région Alsace a fait un effort conséquent en finançant deux LGV en même temps. Sur la ligne Rhin-Rhône, pour 10 kilomètres en Bourgogne, nous avons participé à hauteur de 110 millions d'euros. Nous avons donc beaucoup aidé l'Alsace. Cette voie fait déjà la liaison entre les régions Bourgogne et Franche-Comté, même si elle n'a de terminaison ni vers Mulhouse, ni vers Dijon.
M. Philippe Marini , président. - Pouvez-vous nous présenter vos amendements ?
M. François Patriat , rapporteur pour avis. - Ils sont tous rédactionnels ou quasi-rédactionnels. Certains procèdent à des réorganisations au sein du texte. Ils visent à la clarification des dispositions financières.
M. Philippe Marini , président. - Je crois que nous pouvons donner au rapporteur acte de son travail et le soutenir dans son entreprise de clarification.
Les amendements n° 1, n° 2, n° 3 et n° 4 sont adoptés.
M. Philippe Marini , président. - Sur l'avis sur les articles dont nous sommes saisis, je vais consulter la commission.
Quant à la proposition de Francis Delattre, un amendement doit être présenté par écrit et fera l'objet d'un avis de la commission saisie au fond.
M. Francis Delattre . - Je souhaite que la commission des finances se prononce.
M. Philippe Marini , président. - Je me retourne alors vers notre rapporteur. Il s'agit d'un amendement visant à financer les infrastructures de transport ferroviaire au titre des programmes d'investissement d'avenir. Cet amendement doit encore être rédigé, mais cela ne doit pas être trop difficile.
M. François Patriat , rapporteur pour avis. - Il faut que cet amendement soit rédigé pour que nous puissions en débattre. Je ne vois pas très bien comment on pourrait, à la hussarde, à la va-vite, voter une motion d'une telle importance.
M. Philippe Marini , président. - Vous ne souhaitez donc pas émettre d'avis à ce stade ?
Mme Michèle André . - La procédure des commissions parlementaires, c'est de présenter des amendements écrits pour qu'ils soient soumis à la discussion et au vote. Il ne faudrait pas créer de précédent. Notre tradition est celle du droit écrit.
M. Philippe Marini , président. - Faute d'un support écrit, nous ne pouvons aller plus loin.
M. Francis Delattre . - On va tous pleurer sur les investissements et la dégradation des infrastructures... Je regrette qu'il n'y ait pas une unanimité de notre commission pour envoyer un signal sur cette question importante. Je m'expliquerai donc lors de la séance publique.
M. Philippe Marini , président. - Je regrette que votre intention généreuse n'ait pas été suivie.
Je vais maintenant vous consulter.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des articles dont elle s'est saisie, tels que modifiés par ses amendements.
M. Philippe Marini , président. - Nous devons également donner l'autorisation au rapporteur de déposer en vue de la séance publique les amendements que la commission du développement durable, saisie au fond, n'aurait pas intégrés à son texte.
Il en est ainsi décidé.
AMENDEMENTS PRÉSENTÉS PAR LA COMMISSION DES FINANCES
ARTICLE 1 ER
Alinéa 116
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° Les rémunérations perçues d'une part au titre des missions mentionnées au 2° de l'article L. 2102-1 qui sont accomplies à titre onéreux en exécution de contrats conclus entre la SNCF et SNCF Réseau, ou entre la SNCF et toute entreprise ferroviaire dont SNCF Mobilités et d'autre part au titre des missions mentionnées au 4° de l'article L. 2102-1 qui sont accomplies en exécution de conventions conclues entre la SNCF et SNCF Réseau ou SNCF Mobilités ;
ARTICLE 2
Alinéas 24 et 25
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
« L'avis de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires porte notamment sur le niveau et la soutenabilité de l'évolution de la tarification de l'infrastructure pour le marché du transport ferroviaire et sur l'adéquation du niveau des recettes prévisionnelles avec celui des dépenses projetées, au regard des 1°, 2° et c du 3° du présent article, tant en matière d'entretien et de renouvellement que de développement, de façon à atteindre l'objectif de couverture du coût complet dans un délai de dix ans à compter de l'entrée en vigueur du premier contrat entre SNCF Réseau et l'État.
« Pour l'application du présent article, le coût complet correspond, pour un état donné du réseau, à l'ensemble des charges de toute nature supportées par SNCF Réseau liées à la construction, à l'exploitation, à la maintenance et à l'aménagement de l'infrastructure, incluant l'amortissement des investissements et la rémunération des capitaux investis par SNCF Réseau.
« SNCF Réseau établit la méthode d'imputation du coût complet aux différentes catégories de services offerts aux entreprises ferroviaires.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par un décret en Conseil d'Etat ».
ARTICLE 2
Alinéas 26 à 35
Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :
« Art L. 2111-10-1. - Un décret établit les règles de financement des investissements de SNCF Réseau en vue de maîtriser sa dette, selon les principes suivants :
« - les investissements de renouvellement du réseau ferré national sont financés selon des modalités prévues par le contrat mentionné au premier alinéa de l'article L. 2111-10 ;
« - les investissements de développement du réseau ferré national sont évalués au regard de ratios fixés par décret.
« En cas de dépassement d'un de ces ratios, les projets d'investissement de développement sont financés par l'État, les collectivités territoriales ou tout autre demandeur.
« En l'absence de dépassement d'un de ces ratios, les projets d'investissement de développement font l'objet, de la part de l'État, des collectivités territoriales ou de tout autre demandeur, de concours financiers propres à éviter toute conséquence négative sur les comptes de SNCF Réseau au terme de la période d'amortissement des investissements projetés.
« Pour chaque projet d'investissement dont la valeur excède un seuil fixé par décret, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires émet un avis motivé sur le montant global des concours financiers devant être apportés à SNCF Réseau et sur la part contributive de SNCF Réseau, au regard notamment des stipulations du contrat mentionné au premier alinéa de l'article L. 2111-10. Cet avis porte notamment sur la pertinence des prévisions de recettes nouvelles, en particulier au regard de leur soutenabilité pour les entreprises ferroviaires, ainsi que sur l'adéquation du niveau de ces recettes avec celui des dépenses d'investissement projetées. »
ARTICLE 2
Alinéa 79
Supprimer cet alinéa.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Mardi 17 juin
Ministère des finances et des comptes publics
- M. Romain Valenty, conseiller chargé des participations de l'État, cabinet du ministre des finances et des comptes publics ;
- Mme Solenne Lepage, directrice de participations, sous-direction transports et audiovisuel, Agence des participations de l'État ;
- M. Franck Lirzin, chef du bureau des transports, direction du budget ;
- Mme Marie Gayrel, adjointe au chef du bureau des transports, direction du budget.
Mardi 24 juin
Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie
- M. Julien Matabon, conseiller services ferroviaires et transports collectifs, cabinet du secrétaire d'Etat chargé des transports ;
- M. Thierry Guimbaud, directeur des services de transport, direction générale des infrastructures, des transports et de la mer ;
- Mme Nancy Canoves-Fuster, conseillère en charge des relations avec le Parlement et les élus, cabinet du secrétaire d'Etat chargé des transports ;
- M. Ludovic Espinasse, chef du bureau des opérateurs de transport ferroviaire, direction générale des infrastructures, des transports et de la mer.
* 1 Jean-Louis Bianco, Réussir la réforme du système ferroviaire , avril 2013.
* 2 Jacques Auxiette, Un nouveau destin pour le service public ferroviaire français : les propositions des Régions , avril 2013.
* 3 Directive du Conseil du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires (91/440/CEE).
* 4 Arrêt de la Cour (première chambre) du 18 avril 2013 - Commission européenne / République française (Affaire C-625/10).
* 5 Rapport d'information n° 783 (2011-2012), Le réseau ferré à l'heure des choix , fait au nom de la commission des finances par Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
* 6 Audition du 4 juin 2014.
* 7 Cour des comptes, Réseau ferré de France, exercices 2008-2012 , rapport particulier, octobre 2013.
* 8 Audition du 11 juin 2014.
* 9 Il s'agit de la classification de l'Union internationale des chemins de fer (UIC). Les lignes LGV sont les lignes UIC 1, les grandes lignes UIC 2 à 6, les lignes régionales ou locales, UIC 7 à 9.
* 10 Audition du 11 juin 2014.
* 11 Grande opération programmée équivalente : indice de mesure des opérations de renouvellement ; un GOPEQ équivaut au renouvellement complet d'un kilomètre de voie et de ballast.
* 12 Cour des comptes, Réseau ferré de France, exercices 2008-2012 , rapport particulier, octobre 2013.
* 13 Audition du 26 septembre 2012.
* 14 Tours-Bordeaux (Sud Est Atlantique), contournement Nîmes-Montpellier, LGV Bretagne, LGV Est 2 nde phase.
* 15 Réponse au questionnaire du rapporteur.
* 16 Audition du 11 juin 2014.
* 17 Cour des comptes, Réseau ferré de France, exercices 2008-2012 , rapport particulier, octobre 2013.
* 18 Réponse au questionnaire du rapporteur.
* 19 Décret n° 97-444 du 5 mai 1997 relatif aux missions et aux statuts de Réseau ferré de France.
* 20 Audition du 11 juin 2014.
* 21 Cour des comptes, Réseau ferré de France, exercices 2008-2012 , rapport particulier, octobre 2013.
* 22 Extrait du dossier de presse, Les Assises du ferroviaire : présentation et recommandations , 15 décembre 2011.
* 23 Rapport d'information n° 783 (2011-2012), Le réseau ferré à l'heure des choix , fait au nom de la commission des finances par Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
* 24 Audition du 11 juin 2014.
* 25 Audition du 11 juin 2014.
* 26 Audition du 4 juin 2014.
* 27 Réponse du Gouvernement au questionnaire du rapporteur.
* 28 Audition du 11 juin 2014.
* 29 Audition du 26 septembre 2012.
* 30 Cour des comptes, Réseau ferré de France, exercices 2008-2012 , rapport particulier, octobre 2013.
* 31 Audition du 11 juin 2014 devant la commission du développement durable.
* 32 Réponse au questionnaire du rapporteur.
* 33 Annexe 10. 1 Principes de la tarification des prestations minimales.
* 34 Avis n° 1965 présenté au nom de la commission des finances, sur le projet de loi portant réforme ferroviaire (n° 1468), par M. Olivier Faure, 21 mai 2014, pp. 24-25.
* 35 Audition du 11 juin 2014.
* 36 Cour des comptes, Réseau ferré de France, exercices 2008-2012 , rapport particulier, octobre 2013.
* 37 Audition du 4 juin 2014.
* 38 Réponse au questionnaire du rapporteur.
* 39 Règlement (UE) n° 549/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans l'Union européenne.
* 40 INSEE, Révision de la dette des administrations publiques au sens de Maastricht, de la dette nette, des actions cotées et titres de participation entre les publications de mai 2013 et mai 2014 , mai 2014.
* 41 Standard & Poor's, Rail network Réseau ferré de France downgraded to AA after similar action on France ; outlook now stable , 12 novembre 2013. Traduction de la commission des finances.
* 42 Audition du 11 juin 2014.
* 43 Audition du 26 septembre 2012.
* 44 Cour des comptes, Réseau ferré de France, exercices 2008-2012 , rapport particulier, octobre 2013.
* 45 Cette disposition est inscrite dans le premier projet de loi de finances rectificative pour 2014 (article 5 octies), actuellement en cours d'examen devant le Parlement.
* 46 Au sein d'un groupe, il est habituel qu'un membre facture, éventuellement à marge nulle, les prestations qu'il réalise au profit d'un autre membre au titre des frais de gestion.
* 47 Article L. 232-11 du code de commerce : « Le bénéfice distribuable est constitué par le bénéfice de l'exercice, diminué des pertes antérieures, ainsi que des sommes à porter en réserve en application de la loi ou des statuts, et augmenté du report bénéficiaire ».
* 48 Le coût complet « correspond, pour un état donné du réseau, à l'ensemble des charges de toute nature supportées par SNCF Réseau liées à la construction, à l'exploitation, à la maintenance et à l'aménagement de l'infrastructure, incluant l'amortissement des investissements et la rémunération des capitaux investis par SNCF Réseau ».