B. LA PRÉSERVATION DES DROITS MORAUX ET MATÉRIELS RECONNUS AUX ANCIENS COMBATTANTS
1. Les pensions militaires d'invalidité
Les pensions militaires d'invalidité constituent la principale dépense du programme. Selon l'article L. 2 du CPMIVG, ouvrent droit à pension :
- les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ;
- les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ;
- l'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ;
- les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service.
Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité constaté . Les conjoints survivants des militaires qui bénéficiaient d'une pension correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % peuvent toucher une pension de réversion . Avec un nombre de pensionnés évalué à 252 593 en 2014, le coût sera d'environ 1,43 milliard d'euros , en baisse de 4,3 % par rapport à 2013. La valeur du point de PMI est à l'heure actuelle de 13,93 euros .
2. La carte et la retraite du combattant
La carte du combattant symbolise la reconnaissance de la Nation envers celles et ceux qui l'ont servie au combat. Elle est créatrice de droits pour son titulaire, notamment le versement de la retraite du combattant , la possibilité de se constituer une rente mutualiste et une demi-part fiscale à compter de soixante-quinze ans. Toute personne à qui la carte est attribuée acquiert également la qualité de ressortissant de l'Onac et de sa politique d'aide sociale.
Ceux ayant participé à la guerre d'Algérie ou aux combats au Maroc et en Tunisie entre 1 er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 peuvent recevoir la carte du combattant dès lors qu'ils justifient de 120 jours de présence dans ces territoires. Les critères pour les soldats ayant servi en Opex sont différents. En application des articles L. 253 ter et R. 224 bis du CPMIVG, il faut avoir soit :
- appartenu pendant trois mois à une unité combattante ;
- appartenu à une unité ayant connu, pendant son temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ;
- pris part à cinq actions de feu ou de combat ;
- reçu une blessure de guerre ou liée à leur service.
L'ouverture du droit au versement de la retraite du combattant, à l'âge de soixante-cinq ans, est ce qui distingue la carte du combattant du titre de reconnaissance de la Nation (TRN), accordé aux soldats ayant servi au moins quatre-vingt-dix jours sur un théâtre d'opération et qui ouvre le droit à la retraite mutualiste du combattant et confère la qualité de ressortissant de l'Onac. En 2012, 24 192 cartes du combattant ont été attribuées, pour un taux de rejet de 11,11 % .
Tableau n° 5 : Répartition, au 31 décembre 2012, du nombre de retraites du combattant selon le conflit au titre duquel elles ont été attribuées
Conflit |
Opérations de guerre avant 1939 |
Seconde Guerre mondiale et Indochine |
Guerre d'Algérie |
Opex
|
Non déterminé 14 ( * ) |
Total |
Effectif |
1 606 |
149 608 |
996 427 |
30 275 |
59 778 |
1 237 694 |
Source : Ministère délégué chargé des anciens combattants
Le nombre de retraites du combattant versées est en diminution en raison du vieillissement des principales catégories de bénéficiaires. Ainsi, entre 2011 et 2012, l'effectif de ceux qui la touchaient au titre de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre d'Indochine a diminué de 13,8 % . La catégorie des anciens d'Algérie commence également à décroître, les nouveaux entrants étant moins nombreux que les sortants.
Au total, le Gouvernement estime à 1 146 494 le nombre de titulaires de la retraite du combattant au 31 décembre 2014, en baisse de 4 % sur un an, ce qui correspond à un solde négatif de 48 000 .
Cela s'explique en partie par le fait que la majorité des nouveaux détenteurs de la carte du combattant n'est pas éligible à la retraite du combattant. En effet, rares sont les anciens des Opex à avoir atteint 65 ans : au premier semestre 2013, sur 7 134 cartes attribuées à ce titre, seulement 244 étaient dans cette situation.
En 2014, le coût total de la retraite du combattant sera de 807,9 millions d'euros , son montant annuel étant toujours fixé à 48 points de PMI, soit 668,64 euros .
3. Une dépense fiscale en augmentation
Selon la définition qui en est donnée par le Gouvernement, les dépenses fiscales sont des dispositions législatives ou réglementaires dont la mise en oeuvre entraîne pour l'Etat une perte de recettes et donc pour le contribuable un allègement de la charge fiscale par rapport à ce qui aurait résulté de l'application des principes généraux du droit fiscal français. Six sont rattachées à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », et en particulier au programme 169, en raison des finalités de ce dernier.
Ces mesures fiscales font partie intégrante du droit à réparation et sont associées à la qualité de combattant. Une demi-part fiscale est attribuée aux titulaires de la carte du combattant âgés de plus de soixante-quinze ans, et en cas de décès est transférée à leur conjoint survivant. Les versements effectués en vue de bénéficier d'une rente mutualiste sont déductibles du revenu imposable. Enfin, la retraite du combattant, les PMI, la rente mutualiste, dès lors qu'elle est inférieure à son plafond majorable, et l'allocation de reconnaissance servie aux harkis sont exonérées d'impôt sur le revenu .
Selon le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances, ces dépenses fiscales s'élèveront à 606 millions d'euros en 2014 , après avoir atteint 566 millions d'euros en 2013 et 535 millions en 2012 . La hausse est de 7,1 % sur un an et de 13,7 % sur deux ans , alors que dans le même temps les crédits du programme 169 ont diminué respectivement de 2,75 % et 5,3 % .
Les dispositions concernées sont le reflet de la reconnaissance de la Nation envers ses anciens combattants, il n'est donc aucunement dans l'intention de votre rapporteure d'en remettre en cause le bien-fondé. En revanche, comme l'an dernier, la fiabilité du chiffrage réalisé par les services du ministère de l'économie et des finances semble pouvoir connaître des améliorations .
L'évolution du coût de la demi-part supplémentaire a, comme en 2012, été mal anticipée. Dans les documents annexés au PLF pour 2013, son coût pour 2012 était évalué à 270 millions d'euros ; il a été révisé à la hausse à 295 millions d'euros , pour cette même année, dans le PLF pour 2014. Il en va de même pour l'année 2013. Alors qu'une stabilité par rapport à 2012 était envisagée l'an dernier, le PLF pour 2014 retient une augmentation de 60 millions d'euros . Entre 2011 et 2012, le nombre de bénéficiaires a augmenté de 11,9 % . Cette hausse devrait se poursuivre dans les années à venir, car si au 31 décembre 2012 il y avait 810 131 titulaires de la carte du combattant âgés d'au moins 75 ans, il y en avait également 423 976 dans la tranche d'âge 70-74 ans.
L'évolution démographique des bénéficiaires de ces dépenses fiscales doit donc être mieux prise en compte afin d' améliorer la qualité de l'information fournie au Parlement . Néanmoins, votre rapporteure salue le fait que le champ d'application de ces dispositifs, qui souvent viennent compenser le faible montant des pensions versées, ne soit pas réduit par le budget pour 2014, car elle sait que les associations représentant le monde combattant y sont très attachées.
Graphique n°
6
: Les
dépenses fiscales associées à la mission
« Anciens combattants, mémoire et liens avec la
Nation »
Impôt concerné |
Dispositif |
Nombre de
bénéficiaires
|
Chiffrage pour 2013
|
Chiffrage pour 2014 |
(en millions d'euros) |
||||
Impôt
|
Exonération de la retraite du combattant, des pensions militaires d'invalidité, des retraites mutualistes servies aux anciens combattants et aux victimes de guerre et de l'allocation de reconnaissance servie aux anciens membres des formations supplétives de l'armée française en Algérie (Harkis) et à leurs veuves Date de création : 1934 |
2 014 000 |
200 -200 |
200 |
Demi-part supplémentaire pour les contribuables (et leurs veuves) de plus de 75 ans titulaires de la carte du combattant Date de création : 1945 |
578 000 |
270 -330 |
370 |
|
Déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant Date de création : 1941 |
169 200 |
35 -36 |
36 |
|
Exonération des indemnités versées aux victimes des essais nucléaires français et à leurs ayants droit Date de création : 2010 |
nd |
å |
å |
|
Droits d'enregistrement
|
Réduction de droits en raison de la qualité du donataire ou de l'héritier (mutilé, etc.) Date de création : 1959 |
nd |
å |
å |
Exonération de droits de mutation pour les successions des victimes d'opérations militaires ou d'actes de terrorisme Date de création : 1939 |
nd |
nc |
nc |
|
Total |
2 761 200 1 |
505 -566 1 |
606 1 |
|
1 : approximation compte tenu des données manquantes |
||||
å : coût inférieur à 0,5 million d'euros |
||||
nd : non déterminé |
||||
nc : non chiffrable |
Source : Projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances
4. Pour une administration plus efficace au service du monde combattant
Dans le cadre de la modernisation de l'action publique (Map), une mission conjointe du contrôle général des armées (CGA), de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'inspection générale des finances (IGF) a réalisé l'évaluation de la gestion des prestations en faveur des populations relevant du ministre délégué chargé des anciens combattants . Ses conclusions ont été présentées au conseil interministériel pour la modernisation de l'action publique (Cimap) du 17 juillet 2013, qui les a validées.
En conséquence, la procédure d'instruction des PMI va être réformée afin de réduire les délais de traitement des dossiers, qui sont déjà passés de 539 jours en 2011 à 455 jours en 2012 et devraient tomber à 350 jours en 2013. Ce niveau élevé était la conséquence de la suppression de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS) et du transfert de ses missions. Désormais, la sous-direction des pensions (SDP) de la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD) est en charge de cette procédure, avec l'appui de dix centres d'expertise médicale - commissions de réforme (CEM-CR).
Plusieurs pistes de progrès ont été identifiées. Ainsi, les structures vont être simplifiées et leur nombre sera réduit. Les CEM-CR seront supprimés : les expertises peuvent être réalisées par des experts agréés proches du domicile du demandeur, tandis que la création d'un pôle médical au siège de la SDP favorisera la cohérence de la doctrine du service et fera diminuer les délais. Moins d'expertises devraient être demandées, en particulier lorsque la recevabilité administrative du dossier n'est pas établie ou en cas de révision ou renouvellement d'une pension. Au total, la réduction des délais de transmission et de mise en forme des dossiers et du nombre d'expertises permettrait de gagner jusqu'à 180 jours , soit la moitié du temps aujourd'hui nécessaire, à compter de son dépôt, pour qu'une décision sur un dossier soit notifiée à la personne concernée.
* 14 Cette catégorie correspond aux retraites du combattant payées à l'étranger, pour lesquelles le conflit concerné n'est pas connu.