2. La difficulté d'établir un bilan « coût/bénéfice » global de l'immigration

Au-delà du seul point de vue du budget de l'Etat, plusieurs études ont récemment tenté d'établir un bilan coût/avantage de l'immigration 15 ( * ) , en s'efforçant de prendre en compte des facteurs tels que le taux d'activité des immigrés, leur contribution à la protection sociale et aux impôts, les dépenses sociales dont ils bénéficient. Leurs résultats, très divergents, évoquent des contributions positives pouvant aller jusqu'à 12 milliards d'euros aussi bien que des soldes négatifs allant jusqu'à 30 milliards d'euros.

Ainsi, les études d'économistes ayant contribué à l' « audit de la politique d'immigration, d'intégration et de codéveloppement », publié par des parlementaires tendent à montrer que le taux d'activité entre des étrangers de 30 à 49 ans et des Français du même âge est sensiblement identique (90 % et 95 %). En outre, les migrants sont présents dans tous les secteurs de l'économie , avec une complémentarité sur le marché du travail dont les besoins sont divers en qualifications, ce qui tend à démontrer qu'une politique migratoire ne mettant l'accent que sur l'immigration des personnes qualifiées est inefficace. En ce qui concerne le problème du vieillissement de la population, l'audit indique que l'immigration compense partiellement le déficit de naissances mais ne peut lutter à elle seule contre le vieillissement . En tout état de cause, une « immigration zéro » aurait pour conséquence un besoin de financement de la protection sociale de 5 % du PIB en 2050.

Une équipe de chercheurs de l'université de Lille travaillant pour le compte de la mission recherche (MiRe) de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), s'est efforcée d'analyser les diverses influences des flux migratoires et de leurs caractéristiques sur les finances de la protection sociale en France. Selon les auteurs, la structure par qualification et par âge des immigrés est une caractéristique essentielle qui détermine en grande partie les principaux effets sur les finances de la protection sociale. Or, les immigrés sont plus jeunes que les personnes nées en France, ont une espérance de vie moindre et des retraites inférieures. De ce fait, même s'ils sont plus souvent au chômage et bénéficient davantage des aides sociales, les immigrés auraient une contribution financière globale positive au système de protection sociale .

Inversement, d'autres études tendent à établir que l'immigration coûte davantage qu'elle ne rapporte à l'Etat, en particulier du fait des dépenses de structures supplémentaires que l'Etat doit financer (éducation, santé, logement) pour accueillir la population immigrée. Si elles ont leur intérêt en prenant en compte des coûts que d'autres études ne considèrent pas avec la même précision, elles semblent également tributaires de présupposés qui, à leur tour, ont pu être remis en cause.

Ainsi, un déficit public ne signifie pas toujours une perte pour l'économie nationale s'il se traduit par un surcroît de consommation de la part de ceux qui en bénéficient. En outre, une partie du moindre apport de cotisations sociales fournies par les immigrés provient de ce que la qualification égale, ils occupent toujours des emplois moins bien rémunérés. Dans cette optique, ce ne sont pas les immigrés, mais plutôt la discrimination dont ils font l'objet sur le marché du travail, qui représente un coût supplémentaire.

Par ailleurs, les transferts financiers entre les migrants et leurs pays d'origine, que ce soit du fait des solidarités familiales ou à la suite de la création par des immigrés, en France, d'associations de développement, contribuent à maintenir le niveau de l'aide aux pays en voie de développement.

Enfin, votre rapporteuse s'est attaché à montrer dans le présent avis qu'une partie non négligeable des coûts liés à l'immigration était due à la politique menée dans ce domaine au cours des dernières années. En effet, non seulement cette politique a parfois donné une image négative de notre pays au-delà de nos frontières, en particulier les restrictions imposées aux étudiants souhaitant travailler en France à l'issue de leurs études ou encore l'approche répressive privilégiée en ce qui concerne les roms, qui a suscité l'adoption d'une résolution du Conseil de l'Europe 16 ( * ) et une mise en garde de l'Organisation des Nations-Unies ; mais encore, cette politique a été très coûteuse, notamment en raison de l'insécurité juridique des décisions de l'administration à tous les stades, de la délivrance des visas à la naturalisation, insécurité juridique à l'origine d'un contentieux de plus en plus abondant et générant des frais qui n'apparaissent pas dans la présente mission budgétaire.

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Sous le bénéfice de ces observations, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à l'immigration et à l'intégration de la mission « Immigration, asile et intégration » du projet de loi de finances pour 2013.


* 15 Audit de la politique d'immigration, d'intégration et de codéveloppement, réalisé par des membres des Parlements français et européen.

* 16 Résolution du Conseil de l'Europe du 9 novembre 2011, prise sur le rapport du comité européen des droits sociaux (CEDS).

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