B. ÉVITER L'ÉVICTION POTENTIELLE DES COMMISSIONS DES AFFAIRES SOCIALES DU CHAMP DES FINANCES PUBLIQUES

1. La consolidation des textes budgétaires, un nécessaire regard conjoint des commissions des affaires sociales et des commissions des finances

La coexistence, à l'article 34 de la Constitution, de deux projets de loi financiers, l'un sur le budget de l'Etat, le projet de loi de finances, l'autre sur la sécurité sociale, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, est un élément de complexité, d'autant qu'interviennent sur chacun de ces deux textes deux commissions distinctes, la commission des affaires sociales et la commission des finances, avec chacune une forte légitimité.

La mention à l'article 34 de la Constitution des projets de loi de programmation, déterminant les orientations pluriannuelles des finances publiques, a introduit un nouveau texte, sans supériorité juridique sur les deux premiers. Ce texte est par nature consolidé : il concerne toutes les administrations publiques.

Toutes les propositions visant à la consolidation des textes budgétaires ont jusqu'à présent souligné la nécessité de ne pas évincer les commissions des affaires sociales du champ des finances publiques.

Ainsi, nos anciens collègues Alain Lambert et Didier Migaud sur leur rapport relatif à la mise en oeuvre de la LOLF avaient-ils écrit : « la LOLF et la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS) ayant été bâties sur des principes convergents, il nous paraît indispensable de rapprocher peu à peu la loi de finances annuelle et la loi de financement de la sécurité sociale, dans la perspective de les fusionner en un seul texte financier annuel. Un texte unique donnerait toute sa cohérence au pilotage global des finances publiques. Il va de soi qu'un tel système n'a pas pour but de remettre en cause la participation des partenaires sociaux à la gestion des organismes de sécurité sociale. Il suppose de développer, au sein des assemblées parlementaires, le travail en commun entre les commissions chargées des affaires sociales et les commissions chargées des finances ».

Au cours de l'examen du projet de loi constitutionnelle relative à l'équilibre des finances publiques, qui créait une « loi cadre d'équilibre des finances publiques », de nature organique, supérieure aux projets de lois de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale, votre commission des affaires sociales avait obtenu, dans le texte adopté au Sénat 6 ( * ) , que les projets de loi-cadre d'équilibre des finances publiques soient envoyés pour examen à une commission spécialement désignée à cet effet « composée à parité de membres de la commission chargée de l'examen des projets de loi de finances et de la commission chargée de l'examen des projets de loi de financement de la sécurité sociale ».

2. A l'automne, les risques de l'article liminaire du projet de loi de finances pour les compétences de la commission des affaires sociales

Le suivi annuel de la mise en oeuvre de la programmation pluriannuelle pour l'ensemble des administrations publiques par un article liminaire de constatation ne devrait pas échoir en théorie, à un texte financier en particulier, projet de loi de finances ou projet de loi de financement de la sécurité sociale, et donc à une commission en particulier, commission des affaires sociales ou commission des finances.

A l'automne, pour les raisons de calendrier précédemment évoquées, il est pourtant difficile d'échapper à un article liminaire relatif aux administrations publiques inscrit dans le seul projet de loi de finances.

Cette solution n'est toutefois pas sans risque : celui de vouloir tirer les conséquences des écarts éventuels avec la trajectoire pluriannuelle des finances publiques en adoptant des mesures de recettes dès la première partie du projet de loi de finances, sans passer par le PLFSS.

Il convient en effet de noter que le PLFSS n'a pas l'exclusivité des recettes, et en particulier des impositions de toutes natures, affectées à la sécurité sociale. Dans sa décision n° 2012-654 DC du 9 août 2012, le Conseil constitutionnel a ainsi fait valoir, s'agissant de l'affectation de recettes fiscales à la sécurité sociale par le biais d'un projet de loi de finances rectificative, « que les contributions sociales sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de placement, les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de placement et la contribution pour le remboursement de la dette sociale sont destinés à assurer le financement des dépenses des régimes obligatoires de sécurité sociale et des organismes concourant au financement de ces régimes ou à l'amortissement de leur dette et ne constituent pas des cotisations ouvrant des droits aux prestations et avantages servis par ces régimes (...) que, par suite, les dispositions de l'article 29 sont relatives à l'assiette ou au taux d'impositions de toutes natures ; qu'elles ont donc leur place dans la loi de finances rectificative ».

3. Au printemps, l'examen d'un mécanisme de correction qui doit concerner, conjointement, les commissions des affaires sociales et les commissions des finances

Au printemps, pour la mise en oeuvre du mécanisme de correction prévu par le traité budgétaire, en cas d'écart important entre les objectifs de la programmation pluriannuelle des finances publiques et le dernier exercice clos, relatif à l'ensemble des administrations publiques, rien ne justifie que le Parlement soit saisi des écarts éventuels par le truchement du seul projet de loi de règlement, qui arrête les comptes du seul Etat. La commission des comptes de la sécurité sociale arrête, par ailleurs, ses comptes entre le 15 avril et le 15 juin chaque année, et le projet de loi de règlement de la sécurité sociale n'est lui examiné qu'à l'automne, dans le cadre de l'examen du PLFSS.

Mieux vaudrait donc organiser la mise en oeuvre du mécanisme de correction prévu par le traité budgétaire dans le cadre du débat d'orientation des finances publiques, qui associe à parité les commissions des affaires sociales et les commission des finances.

Avant le 15 juin de chaque année, le Haut Conseil des finances publiques rendrait un avis identifiant, le cas échéant, les écarts importants que ferait apparaître la comparaison des résultats de l'exécution de l'année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques.

Cet avis serait rendu public par le Haut Conseil des finances publiques.

Lorsque l'avis du Haut Conseil identifierait des écarts, le débat d'orientation des finances publiques, prévu aux articles 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances et de l'article LO 111-5-3 du code de la sécurité sociale, serait le lieu permettant d'en prendre connaissance. Dans le rapport élaboré en vue de ce débat, le Gouvernement exposerait les raisons des écarts et présenterait les mesures de correction envisagées.

Le Parlement, avec la contribution tant des commissions des affaires sociales et des commissions des finances, pourrait ainsi plus utilement débattre du mécanisme de correction que dans le cadre du projet de loi de règlement. Tel est le sens de l'amendement que propose votre commission des affaires sociales à l'article 16.

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Sous réserve des amendements qu'elle a déposés, votre commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur le projet de loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.


* 6 Le texte n'a jamais été soumis au Congrès.

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