4. La question de l'apprentissage

Unanimement, les représentants des entreprises considèrent que la réforme n'a pas été pensée en fonction des spécificités de l'apprentissage. Ils insistent notamment sur l'allongement, intenable selon eux, de la durée des contrats d'apprentissage jusqu'au bac. Ils s'inquiètent également, dans certaines branches, de la dissolution des BEP et de l'évanescence des certifications intermédiaires, qui risquent de conduire à un affaiblissement des qualifications de niveau V , qui peuvent être importantes dans certains métiers.

Pour sa part, tout en rappelant son attachement à un enseignement professionnel sous statut scolaire fort et dynamique, votre rapporteure tient à souligner l'incohérence de la politique menée par le Gouvernement . Il paraît en effet paradoxal d'un côté, de stimuler l'apprentissage par un engagement politique vigoureux et des incitations fiscales massives, de l'autre, de mettre en place une réforme qui perturbe les formations en CFA. La multiplication des sections d'apprentissage au sein des lycées ne règle certainement pas le problème.

En affaiblissant à la fois l'apprentissage et la voie scolaire, le Gouvernement ne peut qu'inciter les branches à utiliser les contrats de professionnalisation comme instrument de formation initiale, ce qui ne serait ni viable ni satisfaisant à long terme.

En tout état de cause, les moyens consacrés au lycée professionnel aussi bien par l'État que par les entreprises diminuent, notamment en raison d'un affaiblissement alarmant des subventions aux établissements via le barème de la taxe d'apprentissage . Pourtant, dans certains lycées, d'après le SNPDEN, un tiers des investissements ne peut être couvert que grâce à la dotation de taxe d'apprentissage.

En outre, la répartition du produit de la taxe d'apprentissage introduit des distorsions de financement injustifiées. Selon les derniers chiffres agrégés 26 ( * ) , sur 1,17 milliard d'euros reçus par les établissements, 615 millions ont été affectés aux CFA, 284 millions à l'enseignement supérieur, 147 millions au second degré public et 125 millions au second degré privé. Ces sommes représentent 1 740 euros par apprenti, 409 euros par étudiant et 192 euros par élève du second degré.

Deux points notamment surprennent vivement votre rapporteure :

- au sein du second degré, le public reçoit 12,5 % du produit de la taxe et le privé 10,7 % alors que ce dernier scolarise cinq fois moins d'élèves ;

- au sein du second degré public, les lycées généraux et technologiques reçoivent 4,8 % du produit de la taxe contre seulement 2,9 % pour les lycées professionnels qui ont de gros besoins et accueillent des élèves plus fragiles.

Les dispositions du code du travail et du code général des impôts sont ainsi faites qu'elles permettent à un lycée coté de centre-ville d'ouvrir une section technologique pour bénéficier de la taxe d'apprentissage d'une part, à des formations du supérieur de niveau III de récupérer plus que leur part du barème en ponctionnant les formations du second degré, d'autre part.

La construction du barème de la taxe et l'affectation des fonds par les organismes collecteurs désavantagent donc très nettement les élèves de l'enseignement professionnel public, à qui ne sont pas données toutes les chances de réussite.

C'est pourquoi votre rapporteure demande la sanctuarisation d'une fraction infongible du barème de la taxe d'apprentissage au profit des lycées professionnels de l'éducation nationale. En outre, une modification du système de collecte de la taxe d'apprentissage devrait être étudiée pour en améliorer le rendement et l'équité.


* 26 Ministère de l'éducation nationale, RERS, p. 347. Le produit total de la taxe en 2009 est de 1,90 milliard d'euros (Annexe au PLF 2012 - Formation professionnelle, p.74).

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