2. Une évolution très inégale de la fréquentation
a) Une évolution globale positive
Le parc cinématographique français compte 5 422 écrans, soit une progression de 9 % au cours des 10 dernières années. Cette évolution s'est toutefois accompagnée d'une baisse du nombre d'établissements (99 de moins en 10 ans), les multiplexes concentrant un nombre important d'écrans.
Le parc a été modernisé, restructuré et étendu, partiellement grâce aux aides à l'exploitation distribuées par le CNC, et la création de nouvelles salles, implantées le plus souvent dans les unités urbaines petites et moyennes, devrait se poursuivre. Cet équipement exceptionnel, le troisième du monde, a fortement contribué à la hausse de la fréquentation des salles.
Selon les dernières estimations de la direction des études, des statistiques et de la prospective du ministère, 144,2 millions d'entrées ont été réalisées au cours des neuf premiers mois de l'année 2009, soit 3,4 % de plus que sur la période janvier-août 2008.
De septembre 2008 à septembre 2009 , les entrées dans les salles sont estimées à 194,48 millions, ce qui constitue une progression de 7,2 % .
b) Mais une dégradation préoccupante de la situation économique de nombre de petites et moyennes salles
Néanmoins, cette évolution recouvre des évolutions très divergentes selon le type d'exploitations 3 ( * ) :
(1) Des difficultés spécifiques à la petite et moyenne exploitation cinématographique
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Une évolution très
inégale de la fréquentation des salles
En effet, de janvier à juillet 2009 :
- la grande exploitation, notamment parisienne, bénéficie d'une forte progression de la fréquentation de ses salles (environ + 2,2 %) ;
- en revanche, la moyenne et la petite exploitation souffrent d'un très sévère tassement de leur fréquentation, de respectivement 4,3 % et 10,5 % par rapport à la même période de 2008.
•
Une dégradation préoccupante
de la situation économique de nombre de petites et moyennes
salles
- La majorité des exploitations concernées ont réalisé d'importants investissements de modernisation des installations et elles doivent supporter de nouvelles contraintes et des charges d'exploitation de plus en plus lourdes, liées notamment à la climatisation, l'informatisation, la sécurité, l'accessibilité aux personnes handicapées, sans compter les investissements qu'entraînera la numérisation des salles.
- Dans le même temps, le taux d'occupation au fauteuil baisse et le prix du billet n'augmente pas, en euros constants.
- Par ailleurs, le taux de location des films par les distributeurs aux exploitants, a augmenté pendant 20 ans, jusqu'en 2004. Surtout, les prix consentis par les distributeurs sont très supérieurs lorsqu'ils négocient avec une petite ou moyenne exploitation, surtout dans les unités urbaines de taille moyenne.
En effet, l'étude du CNC d'octobre 2009 sur le taux moyen de location des films montre que le taux moyen de location apparait plus élevé pour les établissements de la petite exploitation (48,1 % en 2008) que pour ceux de la moyenne (47,3 % en 2008) et surtout de la grande exploitation (46,4 % en 2008).
Le critère géographique est aussi essentiel.
Le taux moyen de location des films est moins élevé :
- dans l'agglomération parisienne (45,8 % en 2008) et dans les unités urbaines de plus de 200 000 habitants (47,4 % en 2008), les plus grandes agglomérations présentant un enjeu plus déterminant pour les distributeurs ;
- ainsi que dans les zones rurales (46,9 % en 2008) et les unités urbaines de moins de 10 000 habitants (47,5 % en 2008), c'est-à-dire dans les localités où les films arrivent plus souvent après la première semaine d'exploitation nationale ;
- en revanche, le taux de location atteint 48,8 % dans les unités urbaines de 10 000 à 20 000 habitants.
Les exploitants s'inquiètent aussi :
- de l'impact de la révision de la chronologie des médias qui prévoit une réduction du délai entre l'exposition d'un film en salles et sa commercialisation sous forme de vidéo ;
- et des conséquences de la réforme de la taxe professionnelle , dont les communes pouvaient décider de les exonérer, en tout ou partie selon les cas.
Pour toutes ces raisons, les petites et moyennes exploitations sont dans une situation économique très fragile et préoccupante, qui justifie que des mesures soient rapidement engagées en leur faveur . Il en va aussi de l'aménagement culturel de notre territoire.
(2) Les mesures de soutien envisageables
Deux mesures sont évoquées :
- une baisse du plafond du taux de location des films au bénéfice de tous les exploitants. Une telle mesure bénéficierait cependant à l'ensemble des exploitations alors que, comme indiqué ci-dessus, la politique tarifaire des distributeurs désavantage les petites et moyennes exploitations, surtout celles situées dans les localités de 10 000 à 20 000 habitants. Une mesure plus ciblée sur les exploitations les plus fragiles semblerait donc plus légitime, efficace et équilibrée à l'égard des distributeurs et, par conséquent, de l'ensemble de la chaîne des ayants droit ;
- une exonération de la contribution locale d'activité .
Trois régimes d'exonération de taxe professionnelle coexistent actuellement au sein de l'article 1464 A du code général des impôts et sont à la disposition des collectivités territoriales qui peuvent ou non en faire bénéficier les salles de leur territoire :
. l'exonération partielle, dans la limite de 66 % pour les exploitants dont les établissements sont situés dans les communes de moins de 100 000 habitants qui, quel que soit le nombre de leurs salles, réalisent en moyenne hebdomadaire moins de 2 000 entrées ;
. l'exonération totale pour les exploitants qui, quel que soit le nombre de leurs salles, réalisent en moyenne hebdomadaire moins de 7 500 entrées et sont classés « Art et Essai » ;
. l'exonération partielle, dans la limite de 33 %, pour tous les autres.
Votre commission a adopté l'amendement proposé par son rapporteur à l'article 2 du projet de loi de finances pour 2010 afin de profiter de la réforme de la taxe professionnelle pour améliorer ce dispositif. Il s'agirait :
- d'une part, d'élargir le périmètre de l'exonération totale de cotisation locale d'activité à l'ensemble de la petite et moyenne exploitation cinématographique, c'est-à-dire aux établissements réalisant un nombre d'entrées annuel inférieur à 450 000 ;
- d'autre part, de permettre l'exonération, dans la limite de 33 % sur le montant dû au titre de la cotisation locale d'activité, des établissements de spectacles cinématographiques réalisant au moins 450 000 entrées.
* 3 Chaque établissement cinématographique fait l'objet d'un classement en petite, moyenne ou grande exploitation, en fonction notamment de son niveau annuel d'entrées. Ainsi, les cinémas réalisant moins de 80 000 entrées sur une année relèvent de la petite exploitation, ceux qui enregistrent entre 80 000 et 450 000 entrées de la moyenne exploitation, les autres étant classés dans la grande exploitation. Cependant, par convention, tous les établissements exploités par des entreprises propriétaires de 50 écrans au moins sont classés dans la grande exploitation, indépendamment de leur niveau d'entrées.