B. LA NÉCESSITÉ D'UNE APPLICATION PRAGMATIQUE DE LA RÉFORME DES DÉLAIS DE PAIEMENT
Le plan de soutien au financement des PME s'intègre dans une action plus globale de soutien à ces entreprises mise en place par le Gouvernement, qui comprend notamment l'exonération d'impôt sur la fortune (ISF) des investissements des particuliers aux fonds propres des PME 29 ( * ) , la réforme prochaine du droit des entreprises en difficultés, qui permettra de façon plus souple les conversions de dette en capital, mais aussi la réduction des délais de paiement à 60 jours calendaires ou à 45 jours fin de mois.
Sur ce dernier point, qui résulte des articles 21 et 22 de la LME, votre commission pour avis reste particulièrement vigilante. La réduction des délais de paiement doit assurément permettre de diminuer les charges de trésorerie des PME : en effet, un paiement plus rapide améliore le fonds de roulement des entreprises. Le Gouvernement estime ainsi le gain de trésorerie à 170 M€ pour les fournisseurs du secteur de la plasturgie. Plus globalement, il annonce que cette réforme rapportera 4 milliards d'euros de trésorerie en plus aux PME.
L'article 21 de la LME prévoit la possibilité de déroger provisoirement à cette nouvelle règle en matière de délais de paiement par le biais d'accords interprofessionnels, pour permettre une mise en oeuvre progressive de la loi. Afin de bénéficier de cette dérogation temporaire, trois conditions sont à remplir : motiver le dépassement légal par des raisons objectives et spécifiques au secteur, prévoir dans l'accord spécifique la réduction du délai dérogatoire vers le délai légal et limiter la durée de la dérogation, qui ne peut dépasser le 1 er janvier 2012. A ce titre, lors de son audition devant la commission des affaires économiques le 5 novembre 2008, M. Hervé Novelli a indiqué avoir déjà reçu des accords signés dans les secteurs du jouet et du bricolage, un autre accord étant en voie d'être signé dans celui du bâtiment, avant d'être soumis, pour homologation, à l' Autorité de concurrence .
Néanmoins, comme chacun en est convenu lors de l'examen du projet de loi de modernisation de l'économie au Sénat, la diminution substantielle du crédit interentreprise qui résultera nécessairement de la réduction des délais de paiement doit, pour être supportable, être accompagnée d'une augmentation à due proportion du crédit bancaire 30 ( * ) . Or, l'accès des entreprises à ce crédit ne semble pas s'ouvrir, bien au contraire.
Dans l'espoir de restaurer une certaine fluidité du crédit, le Gouvernement maintient aujourd'hui la date de mise en oeuvre de la réforme, soit le 1 er janvier 2009. Toutefois, comme l'a suggéré le président de votre commission pour avis, M. Jean-Paul Emorine, lors de son intervention dans la discussion générale ouvrant l'examen par le Sénat du projet de loi de finances rectificative pour le financement de l'économie, le 15 octobre 2008, un report de la mesure mériterait sans doute d'être envisagé si, malgré l'action de l'État, les conditions d'obtention des prêts bancaires restaient relativement tendues et ne retrouvaient pas d'ici quelques semaines le niveau qui était le leur au moment de l'adoption de la LME.
Alors même que les perspectives s'assombrissent de plus en plus, pour la filière automobile notamment (baisse des ventes de véhicules, chômage technique chez les constructeurs, chute des commandes pour les équipementiers), les craintes, exposées par M. Gérard Larcher, alors président de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi de modernisation de l'économie, et par son rapporteur, Mme Élisabeth Lamure, ainsi que par plusieurs de nos collègues lors du débat au Sénat 31 ( * ) sur ce texte, relatives à l'impact d'une réduction trop brutale des délais de paiement sur l'équilibre de nombreuses filières importantes de notre économie, pourraient se révéler fondées.
Votre commission pour avis interrogera donc le gouvernement pour savoir, si, dans l'hypothèse où l'accès « normal » au crédit n'était pas rétabli avant la fin de l'année, il serait toujours opposé à un report de la mise en oeuvre des nouveaux délais de paiement, sans quoi risqueraient d'être encore fragilisées davantage des entreprises qui supportent, par leur activité, l'ensemble d'une filière.
* 29 Inscrite dans la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, cette mesure a permis d'injecter un milliard d'euros au capital des PME en 2008.
* 30 Pour plus de détails, voir pages 123 et suivantes du tome I du rapport n° 413 (2007-2008) de M. Laurent Béteille, Mme Elisabeth Lamure et M. Philippe Marini, au nom de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi de modernisation de l'économie.
* 31 Le 2 juillet 2008.