Projet de loi de finances pour 2002 - Tome I - Intérieur : Décentralisation

HOEFFEL (Daniel)

AVIS 92 - TOME I (2001-2002) - commission des lois

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Table des matières




N° 92

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME I

INTÉRIEUR :

DÉCENTRALISATION


Par M. Daniel HOEFFEL,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. René Garrec, président ; M. Patrice Gélard, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, José Balarello, Robert Bret, Georges Othily, vice-présidents ; MM. Jean-Pierre Schosteck, Laurent Béteille, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; M. Jean-Paul Amoudry, Mme Michèle André, M. Robert Badinter, Mme Nicole Borvo, MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Christian Cointat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Marcel Debarge, Michel Dreyfus-Schmidt, Gaston Flosse, Jean-Claude Frécon, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Lucien Lanier, Jacques Larché, Gérard Longuet, Mme Josiane Mathon, MM. Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Josselin de Rohan, Bernard Saugey, Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich, Jean-Paul Virapoullé, François Zocchetto.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 29 ) (2001-2002)


Lois de finances .

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Après avoir entendu, lors de précédentes réunions, M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, et M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, la commission des Lois, réunie le mercredi 28 novembre 2001, sous la présidence de M. René Garrec, président, a procédé, sur le rapport pour avis de M. Daniel Hoeffel, à l'examen des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.

La commission a observé que :

1/ Les concours de l'Etat aux collectivités locales connaissent une augmentation globale en 2002, pour atteindre un montant de 368 milliards de francs.

2/ La prolongation pour un an seulement du « contrat de croissance et de solidarité » met en cause le principe d'une programmation pluriannuelle et l'objectif de prévisibilité des concours de l'Etat aux collectivités territoriales.

3/ Les règles d'indexation de l'enveloppe « normée » ne permettent pas d'associer pleinement les collectivités locales aux fruits de la croissance à laquelle elles apportent pourtant une contribution majeure.

4/ Le contrat de croissance et de solidarité n'établit aucun lien entre l'évolution des concours de l'Etat et celle des charges des collectivités locales. Or, ces charges sont elles-mêmes fortement évolutives , en particulier sous l'effet de décisions prises par l'Etat seul, par exemple pour la rémunération des fonctionnaires ou en matière de normes.

5/ L'ajustement de l'enveloppe « normée » par le biais de la dotation de compensation de la taxe professionnelle aboutit, année après année, à une amputation très forte de cette dotation pourtant destinée à compenser des pertes de recettes fiscales. Il en résulte un manque à gagner très lourd pour les collectivités concernées.

6/ Compte tenu du nombre prévisible de créations de structures de ce type, le montant de deux milliards de francs, prélevé pour partie sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle et intégré dans la dotation globale de fonctionnement des groupements, risque d'être insuffisant pour financer les communautés d'agglomération , ce qui pourrait entraîner une ponction sur la dotation de solidarité rurale et la dotation de solidarité urbaine.

7/ La multiplication des abondements dits exceptionnels , « hors enveloppe normée », et le poids croissant des compensations d'exonération de fiscalité locale traduisent l'impasse dans laquelle est engagé un système de financement local « à bout de souffle », selon le mot du président du Sénat, M. Christian Poncelet.

8/ La réforme du système de financement local doit reposer sur l'autonomie fiscale des collectivités locales et le renforcement de la péréquation .

9/ Au-delà, il convient de franchir une nouvelle étape de la décentralisation, qui repose sur des transferts de compétences compensés par des ressources fiscales supplémentaires, l'amélioration des conditions d'exercice des mandats locaux et le développement de l'intercommunalité.

10/ L'adaptation des préfectures et des services déconcentrés de l'Etat doit être approfondie, notamment par le regroupement de certains services déconcentrés et l'affirmation de l'autorité du représentant de l'Etat sur ces services.

Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption de ces crédits.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Les concours de l'Etat aux collectivités locales s'élèveront à 56 milliards d'euros en 2002, soit 368 milliards de francs, dont plus d'un tiers destinés à des compensations au titre de la fiscalité locale.

Ainsi que l'avait annoncé le Gouvernement, les dotations de l'Etat inclues dans l'enveloppe « normée » évolueront dans les conditions d'application du « contrat de croissance et de solidarité » en 2001, c'est-à-dire selon une indexation prenant en compte 33 % de la fraction de la croissance du produit intérieur brut.

L'examen du présent projet de loi de finances est marqué par les très fortes interrogations concernant l'avenir du système de financement local. Les trois dernières années se caractérisent à la fois par une recentralisation progressive des ressources des collectivités territoriales et l'accélération de la réflexion sur l'avenir du système de financement local qui apparaît, à bien des égards, « à bout de souffle » 1( * ) .

Au-delà de ce problème crucial des finances locales, ce sont les perspectives ouvertes à un approfondissement de la décentralisation qui sont en débat. Les réflexions de la mission sénatoriale d'information, présidée par notre collègue Jean-Paul Delevoye, ont, sur le rapport (n° 447, 1999-2000) de notre collègue Michel Mercier, dressé un bilan exhaustif et formulé 56 propositions destinées à améliorer les conditions d'exercice des compétences locales. Peu après, la commission pour l'avenir de la décentralisation, présidée par notre collègue Pierre Mauroy, a elle aussi formulé diverses propositions pour « refonder l'action publique locale ».

I. L'ADMINISTRATION TERRITORIALE : UNE RÉFORME À PETITS PAS

L'augmentation des crédits de l'administration territoriale, destinée à poursuivre la modernisation des préfectures, ne doit pas faire oublier la nécessité d'engager une politique de déconcentration plus ambitieuse.

A. L'AUGMENTATION DES CRÉDITS

Les crédits consacrés à l'administration territoriale s'élèveront à 1,1 milliard d'euros (7,2 milliards de francs) en 2002, soit une progression de 2,4 % par rapport à 2001. Ils représenteront 7,2 % de l'ensemble des crédits du ministère de l'intérieur (17,28 milliards d'euros, soit 113,3 milliards de francs).

Les mesures catégorielles représenteront 14,96 millions d'euros (98,1 millions de francs), contre 5,3 millions d'euros en 2001. 9,3 millions d'euros (61 millions de francs) seront consacrés à la revalorisation du régime indemnitaire des agents des préfectures et 1,1 million d'euros (7,35 millions de francs) à la requalification des personnels administratifs et techniques.

Une provision de 4 millions d'euros est, par ailleurs, destinée à faciliter la mise en oeuvre, dans les préfectures, de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, dont les modalités font encore l'objet de négociations avec les organisations syndicales.

B. LA MODERNISATION DES PRÉFECTURES

1. Des effectifs stabilisés

a) Le corps préfectoral

Au 1 er janvier 2001, le nombre total de préfets s'élevait à 225 , pour un effectif budgétaire de 129. 109 d'entre eux étaient en poste territorial (soit moins de la moitié), 61 étaient placés hors cadre 2( * ) , 3 en congé spécial, 38 en détachement, 10 en disponibilité, 1 hors cadres, 1 en congé sans traitement.

Les sous-préfets étaient, quant à eux, au nombre de 558, pour un effectif budgétaire de 453. 460 étaient en poste territorial (soit environ 80 %), 28 hors cadre, 66 en détachement, 3 en disponibilité, 1 hors cadres.

b) Les services préfectoraux

Les effectifs de l'administration territoriale inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002 s'élèvent à 30 084, contre 28 869 en 2001. Cette augmentation résulte de la prise en compte des personnels contractuels rémunérés précédemment sur les crédits de fonctionnement (personnels relevant de la jurisprudence « Berkani » 3( * ) ). Ceux-ci sont désormais soumis à un statut de droit public, conformément aux dispositions de l'article 34 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

L'analyse de la présence de l'administration sur le territoire fait toutefois apparaître de fortes inégalités dans la répartition des effectifs et des moyens de fonctionnement.

La densité moyenne des agents en préfecture, hors Paris, s'élève ainsi à 5,3 pour 10 000 habitants. Cette moyenne recouvre des écarts sensibles selon les départements, puisque la densité va de 3,8 dans le Pas-de-Calais, 3,9 dans le Finistère, 4,2 dans le Nord, à 14,9 en Lozère, 14,7 en Corse-du-Sud et 13,8 en Haute-Corse.

D'une manière générale, et souvent en raison de tâches incompressibles, les départements les moins peuplés présentent une densité d'agents plus élevée que la moyenne nationale, alors que celle-ci est plus faible dans les départements les plus peuplés.

Ces inégalités se retrouvent dans la répartition des crédits de fonctionnement entre préfectures. Pour une moyenne métropolitaine de 24 francs par habitant (hors Paris), les dotations s'élèvent à 16 francs dans le Pas-de-Calais, 17 francs dans le Nord, 18 dans le Morbihan et la Vendée, mais à 81 francs en Corse-du-Sud, 68 francs en Lozère, 56 francs en Haute-Corse.

2. Une réforme progressive

Entre 1988 et 1993, les préfectures et les sous-préfectures ont fait l'objet d'un plan de modernisation, essentiellement axé autour de l'amélioration de l'accueil du public. Prolongé jusqu'en 1995, ce plan a permis la rénovation des halls d'accueil et le développement des équipements, en particulier informatiques.

Les Assises nationales des préfectures , organisées le 23 novembre 2000 à Lyon, au terme d'une large consultation, ont débouché sur l'élaboration d'un plan pluriannuel d'action .

Ce plan a essentiellement pour objet de donner aux préfectures une plus grande liberté d'organisation, en échange d'un contrôle plus rigoureux de leurs résultats, et une autorité plus affirmée dans la coordination des services déconcentrés de l'Etat.

La modernisation des préfectures s'articule autour de la rénovation de leur patrimoine immobilier, du développement des nouvelles technologies de l'information et de la globalisation des crédits déconcentrés.

a) La rénovation du patrimoine immobilier

Les Assises nationales des préfectures ont réaffirmé la nécessité d'améliorer les conditions d'accueil des usagers. Le ministère de l'intérieur a donc engagé, pour la période 2001-2003, un programme d'investissement de 475 millions de francs pour la rénovation, l'extension ou la construction de nouveaux équipements. Celui-ci s'appuiera sur les résultats d'un audit du patrimoine immobilier des préfectures, qui seront connus à la fin de l'année.

b) Un recours accru aux nouvelles technologies de l'information et de la communication

Les préfectures ont accompli des efforts importants (114 millions de francs en 1998, 122 millions de francs en 1999, 112 millions de francs en 2000), sur leurs crédits déconcentrés 4( * ) , pour l'équipement informatique. Le taux d'équipement est désormais de 0,88 poste informatique par agent administratif. Selon les indications communiquées à votre rapporteur, la mise en réseau des locaux des préfectures serait désormais achevée et les besoins de câblage satisfaits.

Les préfectures constituent ainsi le pivot de la mise en réseau informatique des services de l'Etat au niveau local, via les systèmes d'information territoriaux (SIT) , ouverts dans tous les départements métropolitains et en cours de généralisation dans les départements d'outre-mer.

Mais, au-delà de l'ouverture formelle de ces systèmes, leur succès se mesurera à l'usage régulier qui en sera fait. Aussi une circulaire interministérielle du 28 août 2001 invite-t-elle les préfets à développer leur utilisation entre services de l'Etat et à recourir davantage aux nouvelles technologies de l'information dans leurs relations avec les collectivités territoriales. Une évaluation des conditions concrètes d'application de cet outil sera réalisée au cours de l'automne 2002.

Pour améliorer l'accueil du public, 71 préfectures ont, au 1 er août 2001, créé des sites internet , proposant pour la plupart des services de mise en ligne de formulaires administratifs. Ces sites doivent constituer un « portail » vers ceux des autres administrations, de niveau national ou déconcentré.

Le ministère s'est également engagé dans le développement des téléprocédures, afin de réduire les déplacements inutiles aux guichets des préfectures et des sous-préfectures. La télétransmission des demandes de cartes grises par les concessionnaires de voitures est progressivement étendue aux constructeurs étrangers depuis le mois de juin 2001. Elle est actuellement en cours d'expérimentation pour les réseaux de concessionnaires et les gros vendeurs du marché des véhicules d'occasion.

Depuis la fin de l'année 2000, quatre départements pilotes (Deux-Sèvres, Rhône, Yvelines, Saône-et-Loire) ont été retenus pour expérimenter la transmission « dématérialisée » des actes des collectivités locales soumis au contrôle de légalité. Les conditions de l'extension de cette téléprocédure à d'autres départements devraient être examinées à la fin de l'année.

Des réflexions sont également en cours sur le développement des téléprocédures pour la délivrance de certificats de non-gage 5( * ) (par internet ou par l'installation de bornes devant les bâtiments administratifs), l'inscription à l'examen du permis de conduire 6( * ) ou encore le télépaiement des cartes grises émises dans le cadre de la télétransmission effectuée par les concessionnaires.

c) Une extension de l'expérience de globalisation des crédits

Quatre nouvelles préfectures , celles du Calvados, de l'Oise, de la Haute-Vienne et de l'Yonne, s'engageront en 2002 dans l'expérience de globalisation, pour trois ans, de leurs moyens de fonctionnement.

Lancée en 2000 dans quatre départements (Doubs, Finistère, Isère, Seine-Maritime), cette expérience avait été étendue à dix autres préfectures en 2001 (Charente Maritime, Eure, Eure-et-Loir, Maine-et-Loire, Haut-Rhin, Somme, Var, Vosges, Territoire de Belfort, Seine-Saint-Denis).

Les préfets concernés bénéficient, en début d'année, d'une délégation de l'ensemble des crédits de personnel, de fonctionnement et de travaux d'entretien dans une enveloppe globale fongible . Ils peuvent modifier l'affectation des crédits en cours d'exercice. Leur dotation fait l'objet d'une indexation garantie et les crédits non consommés sont reconduits automatiquement d'une année sur l'autre.

Le ministère a mis en place un dispositif, complexe, d'aide à la gestion et d'évaluation, baptisé INDIGO, qui comporte de nombreux indicateurs d'activité, de qualité ou de performance, établis chaque année par l'administration centrale. Les premiers résultats, qui ne concernent que le quatrième trimestre 2000, figurent dans le « bleu » du ministère de l'intérieur.

Cette expérience s'inscrit pleinement dans la nouvelle logique budgétaire mise en oeuvre par la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances . Toutefois, nombre de questions doivent êtres résolues avant de pouvoir envisager sa généralisation. Celle-ci suppose notamment la résorption des inégalités entre préfectures et une affectation plus longue des préfets dans un même poste, afin de donner corps à la gestion pluriannuelle et au dialogue social qu'elle suppose. D'autre part, une incertitude demeure sur le sort des crédits provisionnés à l'issue de la période d'expérimentation de trois ans.

Au delà de la nécessaire modernisation des préfectures, il convient d'engager une politique de déconcentration plus ambitieuse.

C. LA NÉCESSITÉ D'ENGAGER UNE POLITIQUE DE DÉCONCENTRATION PLUS AMBITIEUSE

Les services déconcentrés de l'Etat revêtent une importance stratégique indéniable. Avant 1982, la déconcentration avait constitué un correctif technique et un palliatif à l'absence de décentralisation.

Depuis cette date, elle est apparue tantôt comme le complément indispensable de la décentralisation, tantôt comme un instrument au service du maintien du pouvoir central. Pourtant, elle a eu du mal à se traduire dans les faits.

a) Une mise en oeuvre laborieuse

Le rapport établi par notre collègue Michel Mercier, au nom de la mission d'information sur la décentralisation, présidée par notre collègue Jean-Paul Delevoye, a souligné la mise en oeuvre laborieuse du processus de déconcentration administrative.

Sous la précédente législature, ce processus avait pourtant constitué un axe important de la réforme de l'Etat, le préfet devant s'affirmer comme le véritable titulaire d'une compétence de droit commun et les services déconcentrés ayant vocation à être les « opérateurs » des politiques publiques.

Le préfet a ainsi été reconnu, par un décret n° 97-34 du 15 janvier 1997, comme autorité de droit commun pour prendre des décisions administratives individuelles entrant dans le champ de compétences des administrations civiles de l'Etat. Vingt six décrets des 19 et 24 décembre 1997 ont, par ailleurs, déconcentré environ six cents procédures, représentant chaque année plusieurs milliers d'actes.

Les efforts ont également porté sur une déconcentration accrue de la gestion des personnels et de la procédure de mise à disposition des fonctionnaires (décret n° 97-695 du 31 mai 1997) ; la déconcentration des crédits d'intervention et l'engagement dans la voie de la globalisation des crédits, par une réduction du nombre d'articles budgétaires et la réforme du contrôle financier local (décret n° 96-629 du 16 juillet 1996) ; le renforcement de la capacité d'action du préfet dans le domaine immobilier, notamment par l'institution à son profit d'une procédure d'avis conforme pour les projets immobiliers des services de l'Etat dans son département (décret n° 97-142 du 13 février 1997) ; la simplification des régimes d'autorisation et de déclaration administrative préalable (décret n° 97-503 du 21 mai 1997) .

En dépit de ces progrès notables, le chantier de la déconcentration reste très largement inachevé.

b) Un chantier inachevé

Le rapport précité de la mission d'information sur la décentralisation a mis en évidence que les pouvoirs des préfets s'exerçaient sur un périmètre limité, des pans entiers de l'action publique et de nombreux satellites de l'Etat échappant traditionnellement à leur autorité.

La déconcentration de la gestion des personnels est encore incomplète, en dépit de l'extension provisoire de l'expérience de globalisation des moyens de fonctionnement des préfectures. Les crédits d'investissement demeurent trop souvent gérés au niveau central, même si le décret n° 99-896 du 20 octobre 1999 a inversé la règle traditionnelle en matière d'investissements publics en faisant du maintien du pouvoir de décision central l'exception.

Enfin, comme l'a noté l'Inspection générale de l'administration, la déconcentration de la politique immobilière de l'Etat est trop souvent mise en échec par l'insuffisante information des préfets par les administrations centrales et par la multiplication des initiatives ministérielles dans ce domaine.

La mission d'information a également souligné les limites de l'effort de restructuration des administrations de l'Etat, entrepris depuis la décentralisation, constat dont témoigne la coexistence de plus d'une vingtaine de services déconcentrés dans chaque département. A ce jour, le seul regroupement significatif a concerné celui des directions du travail et de l'emploi avec l'administration de la formation professionnelle.

Le comité interministériel à la réforme de l'Etat du 13 juillet 1999, estimant qu'une démarche tendant à une recomposition fonctionnelle des services se heurtait à des rigidités statutaires et rencontrait de nombreux obstacles sur le plan structurel, a renoncé à cette réorganisation , préférant explorer d'autres voies.

Ainsi est expérimentée la formule du projet territorial de l'Etat dans le département, qui doit constituer « une démarche collective associant tous les services déconcentrés de l'Etat dans le but d'élaborer une stratégie commune et de définir une organisation optimale ». Les décrets n° 99-895 et n° 99-896 du 20 octobre 1999 ont, par ailleurs, confié aux préfets compétence pour fixer l'organisation des services déconcentrés placés sous leur autorité.

La délégation interservices a été créée, afin de regrouper les parties de services concernées par une compétence, par exemple la gestion de l'eau, dont la mise en oeuvre est partagée entre plusieurs administrations déconcentrées. Le délégué interservices a autorité fonctionnelle sur les services dans le domaine de compétences de la délégation. Il dispose de la qualité d'ordonnateur secondaire et peut recevoir délégation de signature du préfet.

Cette dernière initiative, qui répond aux préconisations de la mission d'information du Sénat, doit être saluée. Elle reste cependant en deçà de solutions plus ambitieuses.

c) Des propositions plus ambitieuses

A l'occasion du débat d'orientation générale sur la nouvelle étape de la décentralisation , organisé le 17 janvier 2001 à l'Assemblée nationale, le Premier ministre a fait de la déconcentration l'une des six priorités de son Gouvernement. Toutefois, les pistes évoquées dans sa déclaration ne font que reprendre des mesures dont l'application est en cours.

La mission sénatoriale d'information a, quant à elle, avancé plusieurs propositions pour une modernisation effective de l'administration territoriale de l'Etat. Elle a ainsi jugé nécessaire de parfaire les partages des services correspondant aux transferts de compétences aux collectivités locales ( proposition n° 5 ). Elle s'est prononcée contre la superposition des services déconcentrés, car il n'est pas nécessaire qu'à chaque niveau de collectivité décentralisée corresponde un niveau déconcentré de l'Etat, et pour le regroupement de certains d'entre eux ( proposition n° 6 ).

La mission a, en outre, jugé nécessaire de renforcer l'autorité des préfets sur les services déconcentrés, plaidé pour le développement de l'« interministérialité » de terrain et pour une généralisation des « pôles de compétences » autour des préfets ( proposition n° 7 ). Elle a, enfin, suggéré d'instituer une coordination interministérielle placée auprès du Premier ministre, à laquelle les préfets seraient rattachés ( proposition n° 8 ).

En tout état de cause, les réflexions sur l'approfondissement de la décentralisation, qui devraient marquer la prochaine législature, ne pourront ignorer la nécessité d'adapter l'organisation territoriale de l'Etat.

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2002

Effort financier de l'Etat en faveur des collectivités locales
(en millions d'euros)

 

2001 LFI

2002 PLF

Évolution
en %
2002/2001

I. DOTATIONS SOUS ENVELOPPE

 
 
 

1-1. Dotation globale de fonctionnement

17.708

18.535

4,67

dont : Majorations exceptionnelles de la DSU et de la DSR

152

145

-4,61

Majoration de la dotation d'intercommunalité

183

309

68,85

Majoration exceptionnelle pour le recensement de la population

0

0

 

1-2. Dotation spéciale instituteurs

330

294

-10,91

1-3. Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle

579

547

-5,53

1-4. Fonds national de péréquation

131

107

-18,32

1-5. Dotation élu local

43

45

4,65

1-6. Dotation globale d'équipement (AP)

850

865

1,76

1-7. Dotation régionale d'équipement scolaire (AP)

552

562

1,81

1-8. Dotation départementale d'équipement des collèges (AP)

274

279

1,82

1-9. Dotation générale de décentralisation (1)

4.256

4.390

3,15

1-10. Dotation générale de décentralisation Corse (1)

219

232

5,94

1-11. Dotation de décentralisation formation professionnelle

1.256

1.307

4,06

1-12. Dotation de compensation de la taxe professionnelle (hors REI)

1.708

1.544

-9,60

TOTAL I

27.908

28.706

2,86

II. DOTATIONS HORS ENVELOPPE

 
 
 

2-1. Compensation de la suppression de la part des salaires dans les bases de la taxe professionnelle

5.389

7.804

44,81

2-2. Compensation de la suppression de la part régionale des droits de mutation à titre onéreux

809

842

4,08

2-3. Compensation de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation

927

977

5,39

2-4. Fonds de compensation pour la TVA

3.583

3.605

0,61

2-5. Prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation

317

317

0

2-6. Subventions et comptes spéciaux du Trésor

2.510

3.337

32,95

2-7. Compensations d'exonérations et de dégrèvements législatifs

10.377

10.384

0,07

dont : Réduction pour embauche et investissement (DCTP)

48

101

110,42

Contrepartie de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties

112

100

-10,71

Compensation des exonérations relatives à la fiscalité locale

1.946

1.918

-1,44

Contrepartie de divers dégrèvements législatifs

8.271

8.265

-0,07

TOTAL II

23.912

27.267

14,03

TOTAL GÉNÉRAL

51.820

55.973

8,01

III. FISCALITÉ TRANSFÉRÉE (POUR MÉMOIRE)

5.755

5.980

3,91

(1) Dont crédits relatifs à la Culture.

II. LES FINANCES LOCALES : DES PERSPECTIVES APPAREMMENT FAVORABLES QUI MASQUENT DE RÉELS PÉRILS

Le montant total des ressources transférées par l'Etat aux collectivités territoriales s'élèvera à 56 milliards d'euros (368 milliards de francs) en 2002, contre 51,8 milliards en loi de finances initiale pour 2001 (340 milliards de francs). En dépit de cette augmentation sensible, le présent projet de loi de finances suscite quelques déceptions et des inquiétudes. Par ailleurs, on observe un effort de maîtrise de leurs budgets par les collectivités territoriales.

A. UNE AUGMENTATION GLOBALE DES CONCOURS DE L'ETAT

1. La prolongation du « contrat de croissance et de solidarité »

a) La création de l'enveloppe « normée »

Depuis 1996, les principales dotations 7( * ) de l'Etat sont regroupées au sein d'une enveloppe dite « normée », dont l'évolution est contrainte par une indexation fixée à l'avance.

Dans le « pacte de stabilité », appliqué pour la période 1996-1998, cette indexation reposait sur l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac 8( * ) .

Le « contrat de croissance et de solidarité », institué pour les années 1999 à 2001 9( * ) , prévoyait quant à lui une évolution du montant de l'enveloppe normée en fonction d'un indice composé des prix de l'année à venir et -innovation par rapport au pacte- d'une fraction du taux de croissance du produit intérieur brut de l'année en cours. La croissance du produit intérieur brut prise en compte s'est élevée à 20 % en 1999, 25 % en 2000, et 33 % en 2001.

Ce dispositif visait à garantir une meilleure prévisibilité des ressources des collectivités territoriales et des charges de l'Etat, grâce à une programmation pluriannuelle des dotations. Il constituait également un instrument de maîtrise des dépenses publiques.

Au sein de l'enveloppe « normée », les dotations évoluaient selon leur propre règle d'indexation, à l'exception de la dotation de compensation de la taxe professionnelle qui en constituait la « variable d'ajustement » : le montant de cette dernière était déterminé de manière à assurer le respect de l'indexation de l'enveloppe.

b) La reconduction pour un an de l'enveloppe « normée »

L'article 21 du présent projet de loi de finances reconduit pour un an les conditions de mise en oeuvre du « contrat de croissance et de solidarité » en 2001 , ainsi que l'avaient annoncé le ministre de l'intérieur devant le Sénat, le 26 octobre 2000, lors de l'examen de la proposition de loi constitutionnelle relative à la libre administration des collectivités locales et à ses implications fiscales et financières, puis le Premier ministre, lors du débat d'orientation générale sur la nouvelle étape de la décentralisation organisé le 17 janvier 2001 à l'Assemblée nationale.

Le périmètre de l'enveloppe « normée » en 2002 sera donc identique à celui de 2001, de même que le mode de calcul de son indexation, c'est-à-dire un indice comprenant l'évolution des prix pour l'année à venir et 33 % du taux de croissance du produit intérieur brut pour l'année en cours.

En outre, selon une pratique désormais habituelle, plusieurs dotations feront l'objet de majorations qui ne seront pas intégrées dans l'enveloppe.

2. L'évolution des dotations sous enveloppe

Compte tenu de son mode d'indexation, l'« enveloppe normée » aurait dû progresser de 2,26% en 2002. En fait, les différents abondements dont bénéficieront les dotations qui la composent porteront son montant total à 28,7 milliards d'euros (188,3 milliards de francs), soit un taux de croissance effectif de 2,9 %.

a) La dotation globale de fonctionnement (DGF)
(1) La structure de la dotation globale de fonctionnement

Premier concours de l'Etat aux collectivités territoriales -elle représente 70 % de l'enveloppe normée-, la dotation globale de fonctionnement est répartie entre les communes et leurs groupements, d'une part, et les départements, d'autre part.

La dotation des communes (14,4 milliards d'euros en 2001) est divisée en deux sous-dotations : une dotation forfaitaire (12,6 milliards d'euros en 2001) et une dotation d'aménagement . Cette dernière est elle-même divisée en trois enveloppes : la dotation d'intercommunalité (1,08 milliard d'euros en 2001), versée aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, la dotation de solidarité urbaine (575,2 millions d'euros) et la dotation de solidarité rurale (116,2 millions d'euros pour la fraction « bourgs-centres » et 245,8 millions d'euros pour la fraction péréquation en 2001), versées aux communes dites « défavorisées ». La dotation d'aménagement remplit donc une fonction de péréquation, alors que la dotation forfaitaire est destinée à donner à l'ensemble des communes les moyens nécessaires à leur fonctionnement.

La dotation globale des départements (2,9 milliards d'euros en 2001) est elle aussi répartie en une dotation forfaitaire et une dotation de péréquation 10( * ) .

Le Parlement détermine en loi de finances l'enveloppe globale de la dotation globale de fonctionnement, qui est ensuite répartie entre ses différentes composantes, selon des normes de progression définies dans la loi.

Le Comité des finances locales procède, en début d'année, à la répartition de la dotation globale de fonctionnement entre les départements, d'une part, et les communes et leurs groupements, d'autre part. Il décide quelle proportion de l'augmentation de la masse de la dotation des communes il va accorder à la dotation forfaitaire. Cette proportion peut varier entre 50 % et 55 %. En d'autres termes, la dotation forfaitaire bénéficie au minimum de la moitié et au maximum de 55 % des crédits supplémentaires au titre d'une année. Une fois défini le montant de la dotation forfaitaire, le solde constitue la dotation d'aménagement. Au sein de cette dotation, le Comité des finances locales fixe ensuite le montant de la dotation d'intercommunalité. Le solde des crédits disponibles est alors réparti entre la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale.

Par conséquent, la dotation globale de fonctionnement étant une enveloppe fermée, la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale y jouent le rôle de variable d'ajustement . L'augmentation de la dotation forfaitaire s'effectue au détriment de celle de la dotation d'aménagement. Au sein de la dotation d'aménagement, plus la dotation d'intercommunalité augmente, et moins la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale sont importantes (elles peuvent même diminuer).

(2) La dotation globale de fonctionnement en 2002

En application de l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales, la dotation globale de fonctionnement progresse comme le taux prévisionnel d'évolution des prix pour l'année à venir, majoré de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut pour l'année en cours.

Pour 2002, l'indice prévisionnel des prix s'établit à 1,5 %, tandis que le taux de croissance du produit intérieur brut pour 2001 est estimé à 2,3 %. L'indice de la dotation globale de fonctionnement s'élève donc à 2,65 %.

Ce taux est appliqué au montant de la dotation globale de fonctionnement 2001 « recalée », c'est-à-dire recalculée en fonction des derniers indices économiques connus et du montant définitif de la dotation de 2000.

Pour 2001, le « recalage » porte sur l'indice des prix qui est de + 1,6%, alors qu'il avait été estimé à +1,2% en loi de finances initiale pour 2001, et sur le taux d'évolution du produit intérieur brut en volume au titre de 2000, qui est de + 3,3%, contre + 3,4% prévu en loi de finances initiale pour 2001. Le taux d'indexation de la dotation globale de fonctionnement 2001 est donc de 3,25% au lieu de 2,9% et le montant de la dotation « recalée » à indexer est, après déduction de la régularisation négative au titre de 1999 (- 146,33 millions d'euros), de 17,61 milliards d'euros (115,53 milliards de francs), soit une augmentation de 93,77 millions d'euros (615,10 millions de francs) de la dotation globale de fonctionnement pour 2001.

On obtient ainsi un montant de 18 milliards d'euros (118,6 milliards de francs) en 2002, en progression de 4,07 % par rapport au montant ouvert en 2001.

Ce montant fera l'objet, en application des dispositions de l'article L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales, d'une régularisation en 2004, à la hausse ou à la baisse, si les indices effectivement constatés en 2001 (croissance du produit intérieur brut) et en 2002 (évolution des prix) diffèrent des prévisions retenues pour calculer la dotation globale de fonctionnement pour 2002.

En revanche, la régularisation de la dotation globale de fonctionnement pour l'année 2000 étant positive, celle-ci ne s'imputera pas sur le montant de la dotation à inscrire en loi de finances pour 2002, contrairement aux années précédentes. Elle fera l'objet, en application de l'article L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales, d'une ouverture complémentaire de crédits, dans la loi de finances rectificative pour 2001.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a indiqué devant votre commission des Lois que, pour répondre au souhait du Comité des finances locales, les attributions seront versées aux collectivités territoriales et à leurs groupements qui percevaient la dotation globale de fonctionnement en 2000 (ce qui nécessite une modification du code général des collectivités territoriales, dont la rédaction actuelle implique un versement aux collectivités bénéficiant de cette dotation en 2001) et seront rattachées à leur budget de 2001.

Par ailleurs, la dotation globale de fonctionnement fera l'objet de trois abondements en 2002, respectivement prévus par les articles 22, 24 et 25 du projet de loi de finances :

- une majoration globale d'un peu plus de 309 millions d'euros (2 milliards de francs) de la dotation d'aménagement , afin d'intégrer dans cette dotation et de pérenniser le financement des communautés d'agglomération ;

- une majoration de 122 millions d'euros (800 millions de francs) de la dotation de solidarité urbaine ;

- une majoration de 24,36 millions d'euros 11( * ) (160 millions de francs) de la dotation de solidarité rurale .

Au total, le montant de la dotation globale de fonctionnement inscrit dans le projet de loi de finances pour 2002 s'établit à 18,5 milliards d'euros, soit 4,67 % de plus qu'en 2001.

Toutefois
, au sein de la majoration de 309 millions d'euros destinée au financement des communautés d'agglomération, 126 millions d'euros sont « gagés » par une réduction d'autant du montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle .

D'autre part, la dotation globale de fonctionnement pour 2002 ayant été calculée à partir d'un taux de croissance pour 2001 de 2,3 %, son montant serait surévalué si le taux effectivement constaté s'avérait moindre, ce qui semble probable.

b) La dotation spéciale instituteurs (DSI)

Destinée à compenser les charges supportées par les communes dans le cadre du droit au logement des instituteurs, la dotation spéciale instituteurs doit, en principe, évoluer comme la dotation globale de fonctionnement de loi de finances initiale à loi de finances initiale (soit +4,07% par rapport à 2001).

Toutefois, elle s'établira à 294 millions d'euros en 2002 (-11 %), en raison de la réduction du nombre d'ayants-droit provoquée par l'intégration progressive des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles.

c) Les dotations de l'Etat au Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) et au Fonds national de péréquation (FNP)

Les dotations de l'Etat versées au Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et à la majoration du Fonds national de péréquation évoluent comme les recettes fiscales de l'Etat, nettes de divers prélèvements sur recettes opérés au profit, notamment, des Communautés européennes, soit - 1,29 % pour cette année (contre + 4,7 % l'année précédente).

Elles s'élèveront à 367 millions d'euros (2,4 milliards de francs) en 2002, soit 260 millions d'euros (1 707,4 millions de francs) pour le FNPTP et 107 millions d'euros (701 millions de francs) pour la majoration du FNP .

(1) Le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle

Le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle est l'un des mécanismes redistributifs mis en place au fil des années pour corriger les disparités de ressources fiscales entre collectivités locales.

Depuis la création du Fonds national de péréquation (FNP) par l'article 70 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, le FNPTP est constitué de deux fractions . La première correspond à la dotation de développement rural et la seconde regroupe deux parts:

- une première part est destinée à compenser les pertes que les communes ou groupements de communes peuvent enregistrer d'une année sur l'autre, au titre de leurs bases d'imposition à la taxe professionnelle ;

- une part résiduelle est attribuée aux communes subissant des difficultés financières et dont le budget en déséquilibre a été transmis à la chambre régionale des comptes.

La loi de finances pour 1999 a créé une deuxième part au sein de cette seconde fraction, destinée à compenser aux communes éligibles à certaines dotations de solidarité les pertes de dotation de compensation de la taxe professionnelle subies en 1999. Ce mécanisme a été étendu aux pertes subies en 2000 et 2001 (article 63 de la loi de finances pour 2000 et article 83 de la loi de finances pour 2001).

Le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle est alimenté par quatre sources de financement : deux dotations de l'Etat, le produit de la cotisation nationale de péréquation de la taxe professionnelle et la contribution spécifique issue de la fiscalité locale de France Télécom et de La Poste.

Le produit de la cotisation nationale de péréquation de la taxe professionnelle s'élève, cette année, à 352,16 millions d'euros (2,3 milliards de francs), en baisse de près de 3,05 millions d'euros (20 millions de francs) par rapport à l'année précédente en raison de la réforme de la taxe professionnelle.

A la suite du transfert d'actifs immobiliers et de la filialisation d'une partie des activités de France Telecom, les contributions spécifiques de cette société et de La Poste connaissent également une forte réduction, passant de 316,48 millions d'euros (2 076 millions de francs) en 2001 à 287 millions d'euros (1 882 millions de francs) en 2002.

A l'inverse de l'année précédente, le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle ne prendra pas en charge une partie des compensations de pertes de recettes résultant, pour les collectivités territoriales, des exonérations de taxe professionnelle accordées aux entreprises situées dans les zones franches urbaines et les zones de redynamisation urbaine. Institué par la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en place du plan de relance pour la ville, ce prélèvement sur le FNPTP ne peut être supérieur à la croissance de la dotation, par rapport à l'année précédente, du produit des contributions spécifiques de France Telecom et La Poste. Cette croissance étant négative pour l'année 2002, le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle ne se verra donc pas imputer cette contribution, qui s'était élevée, l'année précédente, à 21,44 millions d'euros (140,64 millions de francs).

En outre, le prélèvement de 22,87 millions d'euros (150 millions de francs) opéré en 2001 au profit de la dotation de solidarité rurale, en application de l'article 44 de la loi de finances pour 2001 ne sera pas reconduit cette année. Un abondement de même montant au profit de la dotation de solidarité rurale est bien prévu dans le présent projet de loi de finances, mais il sera entièrement pris en charge par l'Etat.

Ainsi, compte tenu de la diminution des dotations de l'Etat, de la réduction de la cotisation de péréquation et de l'abondement provenant du retour de fiscalité de France Telecom et La Poste, les ressources du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle atteindront, en 2002, un montant de 899,44 millions d'euros (5,9 milliards de francs), soit une diminution de 1,4 % par rapport à l'année précédente.

L'Assemblée nationale a considéré que le FNPTP pourrait financer la reconduction du dispositif de compensation des baisses de dotation de compensation de la taxe professionnelle constatées entre 1999 et 2001 , dont le coût global était de 187,97 millions d'euros (1.233 millions de francs) en 2001. Pour ne pas trop alourdir la charge du Fonds, elle a exclu la compensation des pertes de 2002.

(2) Le Fonds national de péréquation

L'article 70 de la loi d'orientation du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire a doté le Fonds national de péréquation de deux ressources :

- la première ressource, la plus importante, provient de la seconde fraction du FNPTP, après soustraction des montants de la première part et de la part résiduelle fixés chaque année par le Comité des finances locales. Dès lors, les ressources du FNP devraient également être affectées par la réduction des ressources du FNPTP ;

- la seconde ressource a été alimentée, en 1995, par le gel partiel de la progression, hors inflation, de la dotation de compensation de la taxe professionnelle des communes. Son montant progresse comme les recettes fiscales nettes de l'Etat.

L'article 129 de la loi de finances pour 1999 a abondé la dotation de l'Etat de 150 millions de francs par an pendant les trois années du contrat de croissance et de solidarité, pour tenir compte de la diminution du solde du FNPTP, à la suite de la compensation des pertes de dotation de compensation de la taxe professionnelle de certaines collectivités défavorisées. Le contrat précité étant reconduit pour une année et le FNPTP devant continuer à assurer la compensation des pertes de DCTP enregistrées en 1999, 2000 et 2001, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à prolonger d'une année l'abondement de 22,87 millions d'euros (150 millions de francs) du FNP.

Cependant, deux prélèvements sont opérés sur les deux ressources du fonds, proportionnellement à leur part respective dans son financement.

Le premier a pour objet de compenser, pour les collectivités locales ou leurs groupements dotés d'une fiscalité propre, la perte des recettes résultant des exonérations de taxe professionnelle liées aux extensions d'activités mentionnées à l'article 1645 A du code général des impôts, c'est-à-dire pour les entreprises existantes dans les zones de revitalisation rurale (ZRR).

Le second correspond à la quote-part des départements d'outre-mer.

Depuis la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, les crédits du FNP se répartissent en deux parts :

- la première part, ou part principale, sert à assurer la péréquation de la richesse fiscale entre collectivités locales et est répartie en fonction de leur potentiel fiscal et de leur effort fiscal. En 2001, 18.385 communes ont bénéficié de la part principale du FNP. Peuvent également en bénéficier, dans certaines conditions, les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP). Jusqu'à présent, seul le FDPTP de l'Essonne était éligible, mais il ne le sera plus en 2002 ;

- la seconde part, appelée aussi « majoration », est attribuée aux communes de moins de 200.000 habitants éligibles à la première part dont le potentiel fiscal par habitant, calculé à partir de la seule taxe professionnelle, est inférieur de 20% au potentiel fiscal par habitant des communes du même groupe démographique. C'est cette seule majoration qui apparaît sur la ligne « Fonds national de péréquation » dans le tableau retraçant l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités locales. Elle s'élève à 106,86 millions d'euros (700 millions de francs) pour 2002.

16.033 communes ont bénéficié, en 2001, de la majoration et 15.908 communes ont été éligibles aux deux fractions avec une dotation moyenne de 21,53 euros (141,25 francs) par habitant.

d) La dotation élu local

Evoluant comme la dotation globale de fonctionnement, la dotation élu local s'élèvera à 45 millions d'euros (297 millions de francs) en 2002, contre 43,6 millions en 2001. Elle aide les petites communes rurales (20 830 en 2001) à faire face aux charges résultant des dispositions relatives aux conditions d'exercice des mandats locaux.

e) La dotation globale d'équipement (DGE)

La DGE des communes est indexée sur la formation brute de capital fixe des administrations publiques. Elle atteindra 417,38 millions d'euros (2,7 milliards de francs) en 2002, soit + 1,7 %.

La DGE des départements -également indexée sur la formation brute de capital fixe des administrations publiques- s'élèvera à 447,38 millions d'euros (2,9 milliards de francs) .

f) Les dotations de compensation financière des transferts de compétences

La dotation générale de décentralisation (DGD) , inscrite au chapitre 41-56 du budget du ministère de l'intérieur, progresse de 3 % en 2002, pour atteindre 4,4 milliards d'euros .

L'article L. 1614-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que cette dotation évolue comme la dotation globale de fonctionnement, qui progresse de 4,07 % en 2002. Pourtant, le taux de progression de la DGD constaté est rarement identique à celui de la DGF car elle fait l'objet, chaque année, d'ajustements afin de tenir compte de l'évolution de la répartition des compétences et des personnels entre l'Etat et les collectivités locales.

Ainsi, dans le projet de loi de finances pour 2002, la DGD des communes progresse de 4,01 %, la DGD des départements de 1,8 % et la DGD des régions de 4,07 %.

Il convient de rappeler qu'en dépit de l'objectif affiché par les lois de décentralisation, l'intégralité des crédits correspondant à la compensation des transferts de compétence n'est pas regroupée au sein de la DGD. D'autres crédits subsistent au ministère de la culture et au ministère de l'emploi et de la solidarité au titre de la formation professionnelle.

L'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales prévoit que ceux-ci sont principalement compensés par des transferts de fiscalité et, pour le solde, par la DGD. Aujourd'hui toutefois, la dotation générale de décentralisation des départements sert presque exclusivement à compenser des pertes de recettes issues de la suppression ou de la réduction du produit d'impôts transférés au début des années 80.

La collectivité territoriale de Corse perçoit une dotation globale de décentralisation spécifique, inscrite au chapitre 41-57 du budget du ministère de l'intérieur. Son montant sera de 232 millions d'euros, en augmentation de 5,1 %, afin de tenir compte des transferts de compétences prévus dans le projet de loi relatif à la Corse.

La dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) et la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) sont indexées sur l'évolution de la formation brute de capital fixe des administrations publiques, dont le taux d'évolution pour 2002 est de 1,7 %. Ce taux est appliqué au montant des autorisations de programme de 2001 et permet, pour 2002, de prévoir 561,8 millions d'euros pour la DRES et 279 millions d'euros pour la DDEC.

En crédits de paiement, les crédits de la DRES progressent de 2 %, pour s'élever à 554,4 millions d'euros, tandis que ceux de la DDEC augmentent de 2,2 %, pour s'établir à 275,3 millions d'euros.

g) La dotation de compensation de la taxe professionnelle (hors la fraction « réduction pour embauche et investissement »)

Le montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle qui résulte de l'application de l'indexation de l'enveloppe normée en 2002 s'établit à 1,6 milliard d'euros. Il est inférieur de 6,94 % à son montant de 2001.

Toutefois, en application des dispositions de l'article 22 du présent projet de loi de finances relatives au financement des communautés d'agglomération qui prévoient un prélèvement de 126 millions d'euros, la baisse de la DCTP entre 2001 et 2002 s'établit à 7,5 %.

Il convient de souligner que les collectivités et établissements publics de coopération intercommunale qui perçoivent des attributions au titre de cette dotation verront leur baisse réduite en raison de l'abondement de la dotation de compensation de la taxe professionnelle en application des dispositions de l'article 11 du présent projet de loi de finances. Cet abondement, dont le montant s'élève à 80,04 millions d'euros, est destiné à financer les sommes qui seront reversées aux collectivités locales en compensation de la validation législative proposée par cet article et, ainsi, à couper court aux contentieux liés à la non prise en compte des rôles supplémentaires de taxe professionnelle pour le calcul des attributions de DCTP. Ces contentieux se développent depuis qu'est intervenu l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 octobre 2000 Commune de Pantin 12( * ) .

Avec cet abondement, la baisse de la dotation de compensation de la taxe professionnelle est ramenée à 2,4 %. Ces sommes constituent, pour les collectivités locales, une ressource exceptionnelle qui ne devrait pas être prise en compte pour apprécier l'évolution de la dotation entre 2001 et 2002.

Le dispositif prévu en loi de finances pour 1999 ayant été reconduit, les collectivités éligibles aux dotations de solidarité ne supporteront que la moitié de la réduction du montant de leur dotation de compensation de taxe professionnelle. Le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle viendra compenser les pertes subies par certaines de ces collectivités défavorisées.

3. L'évolution des dotations exclues de l' « enveloppe normée »

Ces concours hors enveloppe ont longtemps regroupé, pour l'essentiel, des dotations dites « passives », c'est-à-dire ne faisant pas l'objet d'une indexation spécifique.

Les multiples réformes de la fiscalité locale engagées ces trois dernières années ont conduit à donner une part croissante à diverses compensations ayant la même indexation que la dotation globale de fonctionnement. On observera que ces compensations de pertes de fiscalité locale sont présentées par le Gouvernement, pour la première fois cette année, comme des dotations hors enveloppe et non plus sous une rubrique spécifique.

a) Le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée est la principale contribution de l'Etat aux dépenses d'investissement des collectivités locales et constitue un droit ouvert à ces dernières. Son montant prévisionnel inscrit en loi de finances pour 2002 s'élève à 3,6 milliards d'euros (23,65 milliards de francs), contre 3 582,5 millions d'euros (23,5 milliards de francs) en 2001, soit une augmentation de 0,6 %.

La loi n° 2000-656 du 13 juillet 2000 portant loi de finances rectificative pour 2000 a apporté deux modifications aux modalités d'attribution du Fonds.

D'une part, en raison de la réduction du taux normal de TVA à 19,6%, le taux de compensation forfaitaire a été fixé à 15,482 %. Compte tenu de la date d'effet de la baisse d'un point du taux de TVA (1 er avril 2000) et du décalage de deux ans, ce nouveau taux n'entrera en vigueur qu'en 2003. Pour les communautés d'agglomération et de communes, le taux restera de 16,176% pour les dépenses facturées avant le 1 er avril 2000 et de 15,482% pour celles qui ont été facturées après.

D'autre part, une dérogation à la règle du décalage de deux ans pour le versement du FCTVA a été admise pour les dépenses liées à la réparation des dommages causés par les intempéries des 12 et 13 novembre et du 25 au 29 décembre 1999. Le FCTVA sera attribué l'année même de la réalisation des dépenses réelles d'investissement engagées à cette fin en 1999 et 2000.

Du fait de difficultés locales, certaines des dépenses précitées n'auront pu être réalisées qu'en 2001. Lors de l'examen en première lecture du présent projet de loi, l'Assemblée nationale a donc adopté un article 25 ter visant à étendre aux dépenses réalisées en 2001 la dérogation en question.

Il convient de noter, enfin, que la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte a étendu le champ d'application du FCTVA aux communes et à la collectivité départementale de Mayotte.

Par ailleurs, la proposition de loi relative aux sociétés d'économie mixte locales, actuellement en examen au Parlement, tend à permettre aux collectivités locales et aux établissements publics de coopération intercommunale de bénéficier du FCTVA, au titre des investissements pour lesquels ils ont apporté une participation financière, dans le cadre d'une opération d'aménagement confiée à une société d'économie mixte, à compter de l'intégration du bien dans leur patrimoine.

b) Le prélèvement au titre des amendes de police relatives à la circulation routière

Le produit des amendes de police devrait atteindre 317 millions d'euros ( 2,08 milliards de francs) en 2002, soit un montant identique à celui de 2001.

c) Les subventions et comptes spéciaux du Trésor

Les subventions de fonctionnement des ministères s'élèvent à 2,3 milliards d'euros en 2002, contre 1,1 milliard d'euros en 2001 (+103,8%).

Cette très forte progression est imputable à la compensation opérée au profit des régions pour tenir compte du transfert de compétences en matière de transport ferroviaire de proximité.

A la suite d'un rapport de notre collègue Hubert Haenel, un processus expérimental de décentralisation des services ferroviaires régionaux a été institué par la loi n° 95-115 du 4 février 1995 pour l'aménagement et le développement du territoire, auquel ont participé sept régions et dont le bilan s'est avéré globalement positif.

Dès lors, la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains a prévu, dès le 1 er janvier 2002, le transfert aux régions de l'organisation et du financement des services régionaux de voyageurs.

Les comptes spéciaux du Trésor s'élèvent à 212,6 millions d'euros.

d) La compensation d'exonérations et de divers dégrèvements législatifs

Près de 60% des dotations dites « passives » sont composées de compensations d'exonérations et de dégrèvements législatifs, pour un montant de 10,38 milliards d'euros (68,11 milliards de francs).

Le principal poste est celui du dégrèvement résultant du plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée (5,73 milliards d'euros, soit 37,6 milliards de francs).

S'y ajoutent notamment :

- la compensation au titre de la réduction pour embauche et investissement (REI) de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, soit 100,76 millions d'euros (661 millions de francs) en 2002, contre 47,87 millions d'euros (314 millions de francs) en 2001. Cette forte progression est liée à l'abondement de 22,87 millions d'euros (150 millions de francs) qui correspond, au titre de 2002, à une première tranche de remboursement forfaitaire de 8% sur les rôles supplémentaires de taxe professionnelle émis de 1998 à 2000 (compensation à la suite de la jurisprudence « commune de Pantin »). Le remboursement global prévu sur ces rôles est évalué à 14,34 millions d'euros (750 millions de francs) sur trois ans. Par ailleurs, le coût de la prise en compte, à compter de 2002, des rôles supplémentaires est estimé à 30,49 millions d'euros (200 millions de francs) par an ;

- le montant des compensations relatives à la fiscalité locale, soit 1,91 milliard d'euros (12,58 milliards de francs) en 2002, contre 1,94 milliard d'euros (12,76 milliards de francs) en 2001 ;

- la contrepartie de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties, soit 100,34 millions d'euros (658,193 millions de francs) en 2002, contre 111,75 millions d'euros (733 millions de francs) en 2001.

L'Assemblée nationale a adopté, en première lecture du présent projet de loi de finances, un article 25 bis visant, d'une part, à étendre aux personnes de plus de 65 ans (contre 70 ans auparavant) le bénéfice du dégrèvement d'office de la taxe sur le foncier bâti, et, d'autre part, à accroître jusqu'à 100 euros le montant de ce dégrèvement. Cette mesure devrait avoir un coût de 50,31 millions d'euros (330 millions de francs) en 2002.

4. La compensation des « réformes » fiscales

Aux compensations évoquées précédemment, dont l'évolution est surtout liée à celle de l'assiette de l'impôt concerné, se sont ajoutées, ces dernières années, des compensations indexées comme la dotation globale de fonctionnement, au titre de plusieurs réformes de la fiscalité locale (droits de mutation à titre onéreux, taxe professionnelle, taxe d'habitation, vignette).

La suppression progressive , à partir de 1999 et sur cinq ans, de la part « salaires » des bases de la taxe professionnelle a été compensée à hauteur de 5,30 milliards d'euros (34,81 milliards de francs) en 2001. La compensation est indexée chaque année en fonction du taux d'évolution de la DGF entre 1999 et l'année de versement. A compter de 2004, la compensation devrait être intégrée à la dotation globale de fonctionnement et évoluer comme elle. En 2002, le montant de la compensation de la part salaires s'élève à 7,8 milliards d'euros (51,19 milliards de francs), soit + 47,1%.

Il importe de souligner que le chiffre de la compensation ne fournit qu'une approche du coût brut de la réforme de la taxe professionnelle pour l'Etat . Le coût net est sensiblement inférieur , en raison notamment de la hausse corrélative de l'impôt sur les sociétés (en application du 4° du I de l'article 39 du code général des impôts, la taxe professionnelle est déductible du bénéfice imposable). Ainsi, selon le dossier relatif aux dispositions fiscales joint au présent projet de loi de finances, la réforme de la taxe professionnelle se serait traduite, pour les entreprises, par un allégement net fiscal de 3,74 milliards d'euros (24,53 milliards de francs) en 2001 et conduirait à un allégement net de 5,07 milliards d'euros (33,26 milliards de francs) en 2002. Ces derniers chiffres sont, bien sûr, à comparer avec le montant de la compensation pour 2002, rappelé précédemment (7,8 milliards d'euros, soit 51,19 milliards de francs).

Le montant de la compensation des pertes de recettes fiscales aux régions s'élève globalement, en 2002, à 1,82 milliard d'euros (11,93 milliards de francs), soit 842,33 millions d'euros (5,52 milliards de francs) au titre des droits de mutation à titre onéreux et 977,04 millions d'euros (6,4 milliards de francs) au titre de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation.

Ces compensations indexées s'élèvent ainsi à 9,62 milliards d'euros (63,10 milliards de francs), soit +36,5% par rapport au montant de ces mêmes compensations en exécution de la loi de finances pour 2001, du fait essentiellement de la montée en charge de la réforme de la taxe professionnelle.

Les diverses compensations de fiscalité locale, hors enveloppe normée, atteignent donc 20 milliards d'euros (131,19 milliards de francs). A cette somme peuvent être ajoutées des compensations figurant dans l'enveloppe normée , en particulier la dotation de compensation de la taxe professionnelle et la majoration de la dotation générale de décentralisation liée à la réduction de la part départementale des droits de mutation à titre onéreux.

S'agissant des départements, la compensation financière de la réforme des droits de mutation à titre onéreux a été intégrée dans la DGD. Son montant, au titre de 2002, est égal à 1,35 milliard d'euros (8,85 milliards de francs).

Quant à la compensation de la suppression de la vignette automobile , elle s'élève, en 2002, à 1,96 milliard d'euros (12,92 milliards de francs) et est également intégrée dans la DGD. On notera que l'Assemblée nationale a adopté des amendements visant à étendre les dispositifs d'exonération de la vignette.

B. DES MOTIFS DE DÉCEPTION ET D'INQUIÉTUDE

L'évolution des concours de l'Etat en 2002 est caractérisée par la même indexation de l'enveloppe normée qu'en 2001, intégrant 33% de la croissance économique. En outre, la dotation globale de fonctionnement connaîtra une augmentation significative , qui doit être soulignée.

Le Gouvernement a, par ailleurs, cherché à corriger par divers abondements « hors enveloppe » les insuffisances du contrat de croissance et de solidarité, notamment au profit de l'intercommunalité et des dotations de solidarité.

Pour autant, le présent projet de loi de finances suscite quelques déceptions et des inquiétudes. Il témoigne, une nouvelle fois, des limites du cadre fixé pour les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales. Comme le soulignait M. Christian Poncelet, président du Sénat, devant le 84 ème Congrès de l'Association des maires et des présidents de communautés de France, le système de financement local semble, à bien des égards, être « à bout de souffle ».

1. L'indexation de l'enveloppe normée

Le choix de reconduire l'indexation de l'enveloppe normée de 2001 peut constituer une déception à un double titre :

- la rupture avec le principe d'une enveloppe triennale est regrettable car, d'une part, elle met en cause l'objectif de prévisibilité des concours de l'Etat aux collectivités territoriales, d'autre part, elle empêche la tenue d'un débat d'ensemble sur le système de financement local ;

- la reconduction de la fraction du produit intérieur brut de 33 % est contraire à la logique du contrat de croissance et de solidarité qui avait retenu, depuis 1999, chaque année une part croissante de l'évolution du produit intérieur brut.

Plus globalement, il faudra mettre l'année à venir à profit pour s'interroger sur la finalité de l'enveloppe normée . Présentée par la secrétaire d'Etat chargée du budget, lors de la discussion à l'Assemblée nationale en première lecture du présent projet de loi de finances, comme une disposition permettant « l'association des collectivités locales aux fruits de la croissance » 13( * ) , l'enveloppe normée actuelle constitue en réalité, du fait du taux d'indexation retenu pour son évolution, un mécanisme uniquement destiné à réduire le montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle d'une année sur l'autre.

Si le contrat de croissance et de solidarité n'existait pas, les concours financiers de l'Etat aux collectivités locales augmenteraient plus vite qu'ils ne le font aujourd'hui. Il est donc difficile d'y voir une association des collectivités locales aux fruits de la croissance.

D'autre part, le contrat de croissance et de solidarité n'établit aucun lien entre l'évolution des concours de l'Etat et celle des charges des collectivités locales. Or ces charges sont elles-mêmes fortement évolutives , en particulier sous l'effet de décisions prises par l'Etat seul, par exemple pour la rémunération des fonctionnaires ou en matière de normes.

Enfin, l'ajustement de l'enveloppe normée par le biais de la dotation de compensation de la taxe professionnelle aboutit, année après année, à une amputation très forte de cette dotation pourtant destinée à compenser des pertes de recettes fiscales. Il en résulte un manque à gagner très lourd pour les collectivités concernées.

2. Le financement de l'intercommunalité

Le poids croissant de l'intercommunalité à fiscalité propre pose le problème de son financement.

a) L'augmentation du nombre de groupements à fiscalité propre

L'année 2001 a été, à nouveau, caractérisée par une augmentation importante (+8,4%) du nombre de groupements à fiscalité propre (après +10% en 2000, +6,5% en 1999 et +9% en 1998). Au 1 er janvier 2001, ils étaient au nombre de 1998, regroupant 23.481 communes et près de 42 millions d'habitants.

Depuis la promulgation de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, six catégories d'établissements publics de coopération intercommunale, énumérées à l'article L. 5211-29 du code général des collectivités territoriales, bénéficient de la dotation d'intercommunalité : les communautés urbaines et les communautés de communes, distinguées selon qu'elles font application ou non de la taxe professionnelle unique ; les communautés d'agglomération créées avant le 1 er janvier 2005 ; les syndicats d'agglomération nouvelle. La masse des crédits affectée à cette dotation a atteint 1,08 milliard d'euros (7,07 milliards de francs) en 2001 .

Etablissements publics de coopération intercommunale
par catégorie en 2001

Catégorie

nombre au 1/1/2000

nombre au 1/1/2001

différence

population DGF

nombre de communes

DGF par habitant

Communautés urbaines 4 taxes

10

7

-3

3 183 380

215

456,89 F

Communautés urbaines à taxe professionnelle unique

2

7

+5

3 025 765

133

456,89 F

Communautés de communes 4 taxes

1 527

1 480

-47

17 275 438

17 540

105,83 F

Communautés de communes à taxe professionnelle unique

245

406

+161

5 806 325

4 111

129,25 F
(CC à DGF non bonifiée)

177,10 F
(CC à DGF bonifiée)

Communautés d'agglomération

50

90

+40

11 644 221

1 435

253 F

Syndicats d'agglomération nouvelle

9

8

-1

677 035

47

277,27 F

TOTAL

1 843

1 998

155

41 612 164

23 481

 

Source : Direction générale des collectivités locales, ministère de l'intérieur.

On observe une nette progression des établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, alors que le nombre des communautés de communes à fiscalité additionnelle ne cesse de diminuer depuis 1999 (1.557 en 1999, 1.527 en 2000 et 1.480 en 2001). Toutefois, celles-ci forment encore la catégorie la plus importante du point de vue démographique, puisqu'elles regroupent 17,2 millions d'habitants.

Ainsi, sur les 1998 établissements publics de coopération intercommunale existants en 2001, 511 d'entre eux avaient opté pour le régime fiscal de la taxe professionnelle unique. Ils comptaient 5.726 communes et 21,1 millions d'habitants, soit la moitié de la population totale regroupée au sein d'établissements publics de coopération intercommunale.

Ce succès des établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique a eu des conséquences, en 2001, sur la dotation globale de fonctionnement des communautés de communes à fiscalité additionnelle . La très forte augmentation du coefficient d'intégration fiscale moyen due au niveau d'intégration fiscale élevé des groupements qui demeurent dans la catégorie et la baisse du potentiel fiscal moyen ont entraîné, à masse globale par habitant constante, une diminution des valeurs de point de respectivement - 19% pour la dotation de base et - 20,5% pour la dotation de péréquation.

Cette diminution des valeurs de points explique en grande partie les baisses de dotations enregistrées par les établissements publics de coopération intercommunale dont les critères individuels sont restés stables ou ne se sont que faiblement améliorés.

b) Le succès croissant des communautés d'agglomération

Les communautés d'agglomération créées ou issues de la transformation d'un établissement public de coopération intercommunale avant le 1 er janvier 2005 bénéficient d'une dotation globale de fonctionnement bonifiée de 38,57 euros par habitant.

L'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales, issu de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale prévoyait leur financement par :

- la dotation globale de fonctionnement, à hauteur des sommes correspondant à la dotation perçue par les structures intercommunales avant leur transformation en communautés d'agglomération ;

- un prélèvement sur les recettes de l'Etat qui assurait la prise en charge, dans une limite maximale de 500 millions de francs en 2000 et de 1.200 millions de francs en 2001, du surcoût des communautés d'agglomération issues de la transformation d'établissements publics de coopération intercommunale existants et la totalité du coût des communautés d'agglomération créées ex nihilo ;

- et, en cas de dépassement de cette enveloppe, un prélèvement à due concurrence sur la dotation de compensation de taxe professionnelle.

La loi du 12 juillet 1999 avait ainsi pris le parti d'éviter que le financement des communautés d'agglomération ne se traduise par une augmentation de la dotation d'intercommunalité, susceptible de réduire les sommes disponibles au titre de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale. D'autre part, elle avait limité, à l'initiative du Sénat, la possibilité de recourir à la dotation de compensation de la taxe professionnelle aux années 2000 et 2001.

En raison du succès remporté par les communautés d'agglomération, dont le nombre est passé de 50 à 90 entre 2000 et 2001, un prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle de 827 millions de francs a été nécessaire en 2001 (après 497 millions de francs en 2000). Entre 20 et 40 nouvelles communautés d'agglomération pourraient être créés l'année prochaine.

Pour éviter qu'il ne pèse à nouveau sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle, l'article 22 du présent projet de loi de finances propose d' intégrer l'ensemble du financement de la dotation globale de fonctionnement bonifiée de ces groupements au sein de la dotation d'aménagement .

S'il était nécessaire de trouver de nouvelles sources de financement à compter de 2002, le système proposé par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale présente deux défauts :

- il maintient le prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle , en gelant son montant à son niveau de 2001 ;

- il intègre dans la dotation globale de fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale les sommes correspondant au financement « hors dotation globale de fonctionnement » des communautés d'agglomération en 2001, sans prévoir les crédits permettant de financer l'augmentation du coût des communautés d'agglomération entre 2001 et 2002. Par conséquent, compte tenu des mécanismes de répartition de la DGF, ce coût sera pris en charge par une réduction à due concurrence des sommes disponibles au titre de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale .

Le manque à gagner pour ces deux dotations devrait s'établir à environ 150 millions d'euros (près d'un milliard de francs). C'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles le Gouvernement propose de les majorer, à nouveau, par des abondements exceptionnels.

Le dispositif proposé cumule donc les inconvénients : il instaure ce que le législateur de 1999 avait souhaité éviter -une pénalisation de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale par le financement des communautés d'agglomération- et revient sur le principe selon lequel la dotation de compensation de la taxe professionnelle ne devait pas financer les communautés d'agglomération au delà de 2001.

3. Un système de financement local « à bout de souffle »

La multiplication des abondements dits exceptionnels , « hors enveloppe normée », et le poids croissant des compensations d'exonérations de fiscalité locale traduisent la complexité des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales.

Faute de doter ces dernières de ressources stables et évolutives , l'Etat, année après année, est contraint de prévoir des versements exceptionnels destinés à assurer la mise en oeuvre de certains objectifs, tels que la solidarité avec les collectivités défavorisées.

Or, cette pratique n'offre aucune garantie aux collectivités locales quant à la stabilité et à la prévisibilité de leurs ressources. Comme votre commission des Lois l'a déjà relevé au titre du dernier exercice budgétaire, elle risque d'aboutir à un double mécanisme : d'une part, une enveloppe normée évoluant selon ses règles d'indexation ; d'autre part, des abondements ponctuels dépendant du bon vouloir de l'Etat et dont le maintien ne serait en rien garanti pour les exercices suivants.

La dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale seront abondées de montants équivalents à ceux de 2001 (145 millions d'euros contre 152 l'année passée), en retrait par rapport à 2000 (175 millions d'euros). On observera toutefois, cette année, que la majoration de la dotation de solidarité rurale ne sera pas financée par un prélèvement sur le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle mais par l'Etat.

La majoration de 309 millions d'euros de la dotation d'intercommunalité sera financée, en partie, par un prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle et pourrait s'avérer insuffisante compte tenu de l'essor de l'intercommunalité, qui risque de peser sur les dotations de solidarité. Par ailleurs, la majoration de 200 millions de francs de la dotation d'aménagement, prévue en 2000 pour limiter l'impact sur la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale de la prise en compte des résultats du recensement général de la population, n'a pas été reconduite depuis.

Enfin, comme on l'a vu, le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et le Fonds national de péréquation se trouvent dans une situation financière délicate.

Au total, l'objectif de péréquation pourtant affiché comme une priorité apparaît malmené.

Quant au poids croissant des compensations, il traduit les effets de la politique menée par le Gouvernement consistant à amputer progressivement la fiscalité locale , qui peut être considérée comme une atteinte à l'autonomie financière des collectivités territoriales . Comme l'a souligné, à juste titre, la mission sénatoriale d'information sur la décentralisation, il en résulte également une charge incompressible pour le budget de l'Etat, ainsi qu'une modification de la structure des concours de l'Etat aux collectivités locales. Au terme de la réforme de la taxe professionnelle, les dotations dites « actives » devraient représenter moins de la moitié de ces concours.

Au total, votre commission des Lois ne peut que renouveler le constat qu'elle faisait l'an passé sur la mise en cause progressive de l'objectif même d'une programmation pluriannuelle des concours de l'Etat aux collectivités locales et des conséquences qui devaient résulter d'une telle programmation, à savoir le caractère plus prévisible et la lisibilité de ces concours.

C. LA MAÎTRISE DES BUDGETS LOCAUX

1. La situation d'ensemble

Le rapport établi par notre collègue Joël Bourdin au nom de l'Observatoire des finances locales sur l'état des finances des collectivités territoriales en 2001 met en lumière une évolution contrastée de leurs dépenses de gestion (dépenses de fonctionnement hors intérêts de la dette).

Si l'on ne tient pas compte de la suppression des contingents communaux d'aide sociale et de l'aide médicale des départements, décidée par la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 créant une couverture maladie universelle, ces dépenses ont augmenté de 3,9 %.

Les dépenses de personnel sont en nette progression en 2000 (+5,7%), sous l'effet des revalorisations salariales, des hausses successives des taux de contribution employeur (+0,5 point en 2000 et en 2001) et du « glissement - vieillesse - technicité » (GVT), mais aussi du passage aux 35 heures et du recrutement d'emplois-jeunes.

On observera que le développement des structures intercommunales se traduit par des transferts des personnels des communes vers leurs groupements : en 2000, les établissements publics de coopération intercommunale représentent 7 % du total des frais de personnel.

L'augmentation des dépenses de gestion est également imputable au renchérissement des prix de l'énergie, qui pèse sur le poste « achats et charges externes ».

Les premières informations disponibles pour 2001, qui concernent les budgets primitifs des départements et des régions, laissent penser que l'exercice 2001 devrait voir se poursuivre un rythme de progression (+6,4 %) pour les frais de personnel assez proche de celui de 2000, accompagné de la poursuite des transferts vers les structures intercommunales.

Les efforts de maîtrise des dépenses de gestion , depuis 1997, ont concerné toutes les catégories de collectivités.

Les départements ont limité les transferts versés (+2,2% en 2000), notamment les dépenses d'aide sociale. En 2000, l'entrée en vigueur de la couverture maladie universelle a eu pour conséquence le retrait au département de la compétence relative à l'aide médicale, ce qui a entraîné une diminution mécanique des dépenses départementales de plus de 9 milliards de francs (mais, parallèlement, une baisse des recettes au titre de la dotation générale de décentralisation). Les dépenses pour les collèges enregistrent une progression très nette (+8,6 %).

Les régions connaissent une augmentation de leurs dépenses de transfert plus modérée qu'en 1999 (+2,8% contre +5,7 % en 1999). Cependant, celle-ci devrait devenir plus forte sous l'influence des transferts de compétences, notamment en matière de transport ferroviaire et de formation professionnelle.

Quant aux communes, elles connaissent une diminution de leurs dépenses réelles de fonctionnement (-0,3 %), essentiellement due à la suppression des contingents communaux d'aide sociale.

Pour la septième année consécutive, la charge des intérêts de la dette diminue en 2000 (-7,6%). Elle atteint 3,87 milliards d'euros (25,4 milliards de francs), c'est-à-dire son niveau de 1985 en francs courants. Plus que d'une baisse des taux d'intérêts, cette diminution résulte d'une gestion active de la dette mais également d'une politique résolue de désendettement des collectivités.

La fiscalité directe et indirecte du secteur local poursuit sa mutation, sous l'effet de plusieurs mesures législatives : réforme de la taxe professionnelle, suppression de la part régionale de la taxe d'habitation, suppression de la vignette et réforme des droits de mutation.

De plus, l'intercommunalité à fiscalité propre se développe, notamment sous forme de taxe professionnelle unique, ce qui provoque un transfert de la fiscalité des communes vers les établissements publics de coopération intercommunale.

Au total, les impôts et taxes des collectivités territoriales, à l'exclusion des établissements publics de coopération intercommunale, stagnent en 2000.

2001 devrait voir se prolonger la phase de modération fiscale qui prévaut depuis 1999. La part de l'Etat dans la fiscalité directe locale est estimée aux alentours de 31,4  %.

En dépit de l'écart existant en termes de progression entre les dépenses de gestion (+5,1 %) et les recettes courantes (+4,9 %) en 2001, l'importance de la masse des recettes (768 milliards de francs) par rapport aux dépenses devrait permettre à l'épargne de gestion d'augmenter de 4 % en 2001, selon Dexia-Crédit local 14( * ) . Entre 1995 et 1999, l' épargne brute (qui résulte de la soustraction du montant des intérêts de la dette à l'épargne de gestion) a progressé de 40% en volume pour approcher les 150 milliards de francs. Elle devrait augmenter de 4,3% en 2000 et de 5,3 % en 2001. Cette hausse masque toutefois une grande disparité entre niveaux de collectivités.

Le rapport de notre collègue Joël Bourdin observe une nette reprise des investissements en 2000, largement autofinancés : +13,2 % dans les collectivités territoriales et +46 % dans les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Dynamisé par l'achèvement des projets des municipalités avant les élections, le niveau des investissements directs en 2000 dépasse même le plus haut niveau jamais atteint par les communes (110 milliards de francs, soit 16,8 milliards d'euros).

Selon Dexia-Crédit local, les investissements locaux devraient enregistrer en 2001 une très légère progression en valeur, portée principalement par les dépenses dans le domaine de l'environnement, dans un contexte post-électoral traditionnellement peu favorable aux dépenses d'investissement.

La nouvelle génération des contrats de plan représentera un engagement financier de la part des régions à hauteur de 116 milliards de francs. Celles-ci consacreront parallèlement plus de 5 milliards de francs aux contrats de villes.

A plus long terme, les projets recensés par le Groupement des autorités responsables de transports (GART) d'ici 2010, sont estimés à plus de 100 milliards de francs. Sur la prochaine mandature municipale (2001-2007), les projets pouvant être réalisés concerneraient 29 agglomérations et représenteraient 45 milliards de francs.

2. La situation par catégorie de collectivité

a) Les budgets des communes

Selon Dexia-Crédit local, les recettes courantes communales s'élèvent à environ 389 milliards de francs en 2001, en progression de 2,7 % par rapport à 2000.

Le produit voté, qui en représente près de 40 %, accuse une forte baisse (155 milliards de francs, -4,8 %). Comme en 2000, la fiscalité des communes enregistre l'impact de la montée en puissance du mécanisme de la taxe professionnelle unique.

Compte tenu de la prise en compte, pour la deuxième année consécutive, des résultats du recensement général de la population de 1999 et de la réfaction au titre de la suppression des contingents communaux d'aide sociale mise en place sur deux ans à compter de 2000, la dotation forfaitaire des communes de métropole progresse de 0,9 %. Stable en 2000, l'épargne de gestion devrait connaître une progression légèrement plus vive en 2001 (+1,8 %). Compte tenu de la stabilisation des frais financiers, l' épargne brute devrait conserver une tendance haussière (+2,2%).

Alimentées par les reports de 1999, les réparations liées aux intempéries et l'achèvement des projets de la mandature municipale, les dépenses d'investissement se sont accrues considérablement (+16%) en 2000. Cette accélération de l'investissement s'est conjuguée avec une hausse de l'emprunt (+10,6%). En 2001, les besoins d'équipement recensés, notamment dans le domaine de l'environnement, tendraient à limiter la baisse des dépenses d'investissement traditionnellement constatée l'année de renouvellement des équipes municipales. Globalement l'investissement devrait accuser une légère diminution (-0,2 % en valeur).

b) Les budgets des établissements publics de coopération intercommunale

Le rôle accru des groupements à fiscalité propre doit être souligné. Les budgets des quelque 20 000 établissements publics de coopération intercommunale s'élèvent aujourd'hui à plus de 200 milliards de francs . Ils sont constitués à 48 % de dépenses de fonctionnement et à 52 % de dépenses d'investissement , contre respectivement 69 % et 31 % pour les budgets communaux.

Les dépenses d'équipement direct des groupements (de l'ordre de 50 milliards de francs) représentent à elles seules plus du quart des budgets intercommunaux. Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, en particulier les communautés urbaines, en assument une part croissante.

c) Les budgets des départements

Dexia-Crédit local relève que la volonté de maîtrise de la fiscalité, déjà observée en 1999 et 2000, est encore plus marquée en 2001. Seuls 6 départements ont augmenté leur taux de taxe d'habitation, tandis que 13 l'ont diminué et 76 l'ont stabilisé. Globalement, en raison des différentes réformes, les recettes fiscales perçues par les départements, d'un montant de 134 milliards de francs, diminuent de près de 5 %.

Depuis 1997, les dépenses de gestion connaissent une décélération régulière. En 2001, elles ne devraient guère s'éloigner de leur tendance moyenne (143 milliards de francs, + 3,5 %). Leur principale composante, les dépenses d'aide sociale (environ 80 milliards de francs en 2001) devrait enregistrer une hausse modérée liée à la progression nettement moins rapide des dépenses au titre du revenu minimum d'insertion et au ralentissement de la prestation spécifique dépendance, dans l'attente de la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie . Cette réforme devrait se traduire, en coût net , par une augmentation des dépenses des départements de l'ordre de 1,7 milliard d'euros en régime de croisière.

L' épargne de gestion , d'un montant de 59 milliards de francs en 2001, poursuit sa progression. Sous l'effet de la nouvelle diminution des charges financières, l'épargne brute croît plus rapidement (53 milliards de francs, +5,6 %).

Portées par des besoins d'investissement direct (voirie, réparation dans les collèges à la suite des intempéries de 1999) et par le dynamisme des subventions versées aux communes, les dépenses d'investissement (62 milliards de francs) devraient progresser de 5,4 % en 2001, sans mettre en cause le mouvement de désendettement.

d) Les budgets des régions

Comme en 2000, une très large majorité des régions a stabilisé ses taux d'imposition, l'une d'entre elles les a même diminués. Cependant, cinq les ont augmentés, d'où une progression globale de 1,1 %. Dans leur ensemble, les recettes fiscales des conseils régionaux, d'un montant de près de 35 milliards de francs, enregistrent une diminution de 9,5 %.

Alors que les transferts versés -qui représentent environ 80 % des dépenses de fonctionnement des régions- ont enregistré une évolution historiquement faible en 2000, ils connaîtraient un ressaut en 2001, lié à la participation du conseil régional d'Ile-de-France au syndicat des transports de la région. Même si la croissance des frais de personnel reste soutenue en 2001 (+9,3 % après +9 % en 2000), ils pèsent encore peu dans les budgets (environ 6 % des dépenses réelles de fonctionnement) comparés à ceux des autres collectivités territoriales.

Résultat des marges de manoeuvre dégagées par la section de fonctionnement, l'épargne brute est en hausse (30 milliards de francs, +6,6 %).

Les dépenses d'investissement devraient connaître une très légère progression (34 milliards de francs, +2,2 %) selon Dexia-Crédit local. Elles augmenteront sans doute plus sensiblement en 2002, à la suite de nouveaux transferts de compétences, en particulier en matière de transport ferroviaire régional.

III. LA DÉCENTRALISATION : LA NÉCESSITÉ DE FRANCHIR UNE NOUVELLE ÉTAPE

Les trois dernières années se caractérisent à la fois par une recentralisation croissante des ressources des collectivités locales et l'accélération de la réflexion sur l'avenir de la décentralisation.

Le rapport établi par notre collègue Michel Mercier au nom de la mission d'information présidée par notre collègue Jean-Paul Delevoye, a dressé un bilan complet et clairement mis en évidence les pistes qui devraient être poursuivies pour permettre l'émergence d'une « République territoriale ».

A la suite des conclusions du rapport de la commission pour l'avenir de la décentralisation , présidée par notre collègue Pierre Mauroy, le Gouvernement a, pour sa part, annoncé la mise en chantier d'un certain nombre de réformes par la voie législative ou réglementaire. Lors du débat d'orientation sur la nouvelle étape de la décentralisation, organisé à l'Assemblée nationale le 17 janvier 2001, le Premier ministre a ainsi affirmé six priorités : la rénovation des institutions locales, l'approfondissement de la démocratie locale, un meilleur partage des compétences, la modernisation des finances locales sur la base d'un rapport à paraître avant la fin de l'année, la réforme de la fonction publique territoriale, et l'approfondissement de la déconcentration.

Le Gouvernement a déposé un projet de loi relatif à la démocratie de proximité, adopté par l'Assemblée nationale au mois de juin dernier. Ce texte sera examiné par le Sénat au mois de janvier prochain.

Le Sénat et l'Assemblée nationale avaient, sans attendre, adopté des propositions de loi visant à relancer la décentralisation. La proposition de loi constitutionnelle relative à la libre administration des collectivités territoriales et à ses implications fiscales et financières, signée par le Président Christian Poncelet et nos collègues Jean-Paul Delevoye, Jean-Pierre Fourcade, Jean Puech et Jean-Pierre Raffarin, adoptée par le Sénat le 26 octobre 2000, propose d'inscrire dans la Constitution le principe d'un financement majoritaire des collectivités locales par la fiscalité. Celle présentée par M. Pierre Méhaignerie et adoptée par l'Assemblée nationale le 16 janvier 2001, vise à instituer un droit à l'expérimentation au bénéfice des collectivités locales.

Dans le cadre du présent avis, votre commission des Lois examinera trois questions essentielles pour la décentralisation : les conditions d'exercice des mandats locaux pour lesquelles certains progrès, enregistrés sous l'impulsion du Sénat, doivent être amplifiés, la réforme de l'intercommunalité et l'avenir du système de financement local.

A. L'AMÉLIORATION PROGRESSIVE DES CONDITIONS D'EXERCICE DES MANDATS LOCAUX

Depuis plusieurs années, le Sénat a fait de la sécurité juridique des mandats un thème prioritaire de ses réflexions et a pris dans ce domaine des initiatives. Mettre en place un environnement juridique sûr apparaît, en effet, indispensable pour éviter un découragement de beaucoup d'élus locaux, périlleux pour notre démocratie locale.

Avant d'évoquer brièvement la question du « statut » de l'élu, qui sera à nouveau examinée par le Sénat dans le cadre du projet de loi relatif à la démocratie de proximité, votre rapporteur souhaite jeter un regard sur deux réformes importantes survenues en 2001. La première, réglementaire, est l'entrée en vigueur d'un nouveau code des marchés publics ; la seconde, législative et à laquelle le Sénat a apporté une contribution décisive, concerne les chambres régionales des comptes.

1. L'entrée en vigueur du nouveau code des marchés publics

Le nouveau code des marchés publics, fruit d'une réflexion engagée en 1995 et d'une large concertation avec les associations d'élus et les entreprises, est entré en vigueur le 9 septembre 2001.

Le décret n° 2001-210 du 7 mars 2001 auquel il est annexé prévoit, en effet, qu'il entrera en vigueur six mois après sa publication, sauf pour les dispositions afférentes à la computation des seuils, qui ne prendront effet qu'à compter du 1 er janvier 2002.

L'ensemble de la réforme a une portée considérable puisque les dépenses d'achat des administrations publiques (Etat, collectivités territoriales, sécurité sociale) s'élevaient en 1999 à 746,1 milliards de francs soit 15,7 % des dépenses des administrations publiques et 8,5 % du produit intérieur brut. Dans cet ensemble, le montant des marchés publics s'élève à 191 milliards de francs , 60 % étant passés par les collectivités locales .

En moyenne annuelle, sur la période 1995-1998, les collectivités locales ont ainsi passé 188.600 marchés, d'un montant moyen de 700.000 francs, et l'Etat 39.900 marchés, d'un montant moyen de 2,3 millions de francs.

Il convient de souligner que le nouveau code des marchés publics pourrait subir des modifications prochaines, en raison de la refonte des directives communautaires tendant à la coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures, services et travaux 15( * ) .

La réforme du code des marchés publics s'est opérée autour de deux axes majeurs : la clarification des textes et la simplification des procédures.

a) La clarification des textes

Sur le plan formel, les règles du nouveau code des marchés publics sont désormais présentées suivant l'ordre chronologique de la passation d'un marché, à savoir de la définition des besoins à son exécution. Par ailleurs, les dispositions afférentes à la passation des marchés de l'Etat et des collectivités locales ont été fusionnées, ce qui a permis de réduire le nombre d'articles à 136 au lieu de 399.

Sur le fond, les dispositions de ce texte définissent aussi précisément que possible tant le champ d'application du code que les procédures de passation à mettre en oeuvre. De telles définitions sont de nature à lever les interrogations et les interprétations divergentes générées par l'imprécision des articles du précédent code. Les marchés d'entreprise de travaux publics sont supprimés.

De plus, les modalités de computation des seuils, jusqu'alors sources de nombreuses contestations, sont désormais précisées par l'article 27 du nouveau code des marchés publics. La notion de fournitures ou de prestations de services homogènes étant au coeur de l'appréciation de tous les seuils fixés dans le code, il est indiqué que ce caractère homogène sera apprécié par référence à une nomenclature définie par arrêté interministériel.

Le code vise ainsi à fournir aux élus locaux un recueil clair et synthétique des principales règles applicables à la passation et à l'exécution d'un marché public.

b) La simplification des procédures

Les modalités de passation des marchés publics sont fonction, soit du montant du marché, soit de sa nature.

S'agissant des modes de passation des marchés en raison de leur montant, le code adopte désormais une structure simple à trois étages. Il prévoit le relèvement du seuil des achats passés sans formalisme à 90.000 euros HT au lieu de 300.000 francs TTC. Au-delà de ce seuil s'applique une procédure simplifiée qui combine la transparence de l'appel d'offres et les avantages du marché négocié 16( * ) . A partir des seuils communautaires, c'est-à-dire 200.000 euros HT pour les collectivités locales, il convient de recourir à l'appel d'offres. Dès lors, la superposition entre appels d'offres au plan communautaire et au plan national disparaît. Cette mesure de simplification est de nature à limiter les contraintes de procédure qui pesaient jusqu'alors sur les petits marchés des collectivités locales.

Il sera cependant toujours possible de recourir à la procédure du marché négocié, notamment en cas d'urgence impérieuse résultant de circonstances imprévisibles telles que celles rencontrées lors des tempêtes de fin décembre 1999.

Par ailleurs, en ce qui concerne les modalités de passation des marchés en raison de leur nature, les dispositions du nouveau code prévoient que les services récréatifs, culturels et sportifs, sociaux, sanitaires, d'éducation, de qualification ou d'insertion professionnelle peuvent être passés selon une procédure allégée de tout formalisme.

Désormais, il sera possible de prendre en compte les conditions sociales et environnementales de l'exécution d'un marché public (mais non les utiliser comme critère de choix des candidats) 17( * ) . La règle du choix du « mieux disant » plutôt que du « moins disant » est affirmée (principe du choix de l'offre économiquement la plus avantageuse). Dans l'objectif d'une ouverture à l'innovation, les entreprises candidates pourront proposer des variantes de nature à améliorer le projet de l'administration.

Afin d'ouvrir les marchés aux petites et moyennes entreprises et aux artisans, le contrôle de la régularité de la situation sociale et fiscale des sociétés est simplifié et la retenue de garanties allégée. Les collectivités publiques devront s'engager contractuellement sur des délais de paiement globaux auprès de leurs fournisseurs, tout retard de paiement étant sanctionné automatiquement par le versement d'intérêts moratoires. Enfin, l'accès des petites et moyennes entreprises à la commande publique devrait être facilité par l'encouragement du recours à l'allotissement et au groupement des offres.

c) La nécessité d'une réforme législative

Votre commission des Lois se félicite de l'entrée en vigueur du nouveau code des marchés publics, tout en regrettant que le Parlement n'ait pas été associé à cette réforme essentielle.

Certes, le code des marchés publics était une construction entièrement réglementaire en vertu, d'ailleurs, de textes forts anciens 18( * ) , tous antérieurs à la Constitution de la V ème République qui instaure un partage constitutionnel entre domaine de la loi et domaine réglementaire .

Comme le soulignait notre collègue Pierre Jarlier dans son rapport pour avis sur le projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, l'un des aspects les plus importants d'une véritable réforme de la commande publique eût été le reclassement des règles entre les principes fondamentaux, qui sont du ressort de la loi , les mécanismes d'application d'ordre public, qui relèvent du décret , et les règles supplétives, qui peuvent trouver place dans de simples recommandations.

La réforme du code des marchés publics, comme l'a montré le projet de loi déposé en 1997 par le Gouvernement de M. Alain Juppé, était l'occasion de donner une valeur législative aux principes qui gouvernent l'achat public par l'Etat et ses établissements publics, par parallélisme avec ce qui était constitutionnellement nécessaire pour les marchés des collectivités territoriales.

En effet, le Conseil d'Etat a jugé, dans un arrêt du 29 avril 1981 19( * ) , que les dispositions du code des marchés publics applicables aux collectivités locales relevaient du domaine de la loi.

Ce changement de fondement juridique pouvait sembler justifié car la réglementation des marchés constitue, en pratique, une organisation de la liberté du commerce et de l'industrie. Ainsi, par exemple, des principes d'appel public à la concurrence et d'égalité de traitement des candidats, dont il pouvait sembler utile que la loi les explicitât pour l'Etat, comme elle doit le faire pour les collectivités locales.

Le Gouvernement n'en a pas jugé ainsi, qui a simplement proposé, lors de l'examen du projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, de reprendre dans la loi la définition jurisprudentielle de la notion de délégation de service public et de qualifier d'administratifs tous les contrats soumis au code des marchés publics.

Ce projet de loi, adopté définitivement par l'Assemblée nationale le 20 novembre dernier, prévoit également d'autoriser les présidents des conseils généraux et régionaux, par délégation de l'assemblée délibérante, à passer des marchés d'un montant inférieur à 90.000 euros HT et, d'autre part, de ne plus rendre obligatoire la transmission au préfet, dans le cadre du contrôle de légalité, les marchés publics des collectivités locales d'un montant inférieur à 90.000 euros HT, en cohérence avec la nouvelle définition des modes de passation et des seuils.

Votre commission regrette, enfin, l'absence d'une réforme d'ensemble de la commande publique qui eût permis de rassembler dans un même code l'ensemble des règles dans ce domaine qu'il s'agisse, par exemple, des dispositions relatives aux délégations de service public ou des dispositions de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée.

2. La réforme des chambres régionales des comptes

Les chambres régionales des comptes ont été créées par la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, en contrepartie du renforcement des pouvoirs dévolus aux collectivités locales et de la suppression de la tutelle préfectorale sur leurs actes.

Elles remplissent une triple mission : le jugement des comptes , qui est leur seule attribution juridictionnelle, le contrôle des actes budgétaires et l'examen de la gestion des collectivités territoriales. Corollaire indispensable de la décentralisation, ce contrôle représente également un indéniable facteur de transparence de la gestion publique locale.

Toutefois, la charge croissante de travail pesant sur les magistrats financiers et l'imperfection des procédures applicables devant les chambres régionales des comptes ont suscité, au fil des années, incompréhensions, défiances et crispations.

a) Une gestation difficile

Prenant très tôt conscience du malaise des magistrats et des élus, le Sénat avait décidé, en avril 1997, la création d'un groupe de travail commun à la commission des Lois et à celle des Finances, présidé par notre collègue Jean-Paul Amoudry et dont le rapporteur était notre collègue Jacques Oudin.

Sur la base de ces travaux, il avait adopté, le 11 mai 2000, une proposition de loi tendant à réformer les conditions d'exercice des compétences locales et les procédures applicables devant les chambres régionales des comptes.

De son côté, l'Assemblée nationale votait, le 30 mars 2000, non sans l'avoir enrichi de deux articles tendant à réformer les conditions d'examen de la gestion locale, un projet de loi élaboré par le Gouvernement afin de revaloriser le statut des magistrats des chambres régionales des comptes, en prenant pour exemple celui de leurs homologues des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

Finalement, au terme d'une longue procédure législative, les deux assemblées sont parvenues à un accord sur un texte qui permet de répondre tout à la fois aux attentes légitimes des magistrats financiers de jouir d'un meilleur déroulement de carrière et au souhait des élus d'une réforme des procédures applicables devant les chambres régionales des comptes qui leur offre une plus grande sécurité juridique.

b) Une avancée réelle

Le texte adopté par le Sénat le 21 novembre 2001, sur les conclusions de la commission mixte paritaire, donne une définition législative de l'examen de la gestion locale , affirmant clairement que celui-ci ne peut porter sur l'opportunité des objectifs fixés par les collectivités territoriales. Il améliore également la procédure de contrôle. Les documents provisoires des chambres régionales des comptes seront soumis à la règle de non communication déjà en vigueur pour les mêmes documents de la Cour des comptes. Les élus seront désormais en mesure d'apporter une réponse écrite aux observations des juridictions financières, qui sera publiée en même temps que le rapport d'observations définitives. En cas d'élections, celles-ci ne pourront être publiées ou communiquées dans un délai de trois mois précédant le renouvellement de l'assemblée délibérante de la collectivité concernée. En cas d'erreur matérielle ou d'erreur manifeste, les personnes mises en cause disposeront d'un droit à rectification du rapport d'observations.

En revanche, la proposition du Sénat de considérer les observations définitives des chambres régionales des comptes comme des actes faisant griefs, susceptibles d'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat, n'a pas été retenue en commission mixte paritaire.

S'agissant du jugement des comptes , le texte confie à l'apurement administratif, c'est-à-dire aux comptables supérieurs du Trésor, les comptes des quelque 15.000 associations syndicales autorisées et des associations de remembrement, ce qui allégera considérablement la tâche des chambres régionales et leur permettra de concentrer leurs travaux sur les collectivités locales. Il relève également les seuils démographiques et financiers en dessous desquels le jugement des comptes des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des établissements publics de coopération intercommunale sera confié aux comptables publics.

Il ramène de trente à dix ans la durée de la prescription en matière de gestion de fait et met fin à la sanction automatique d'inéligibilité, applicable aux comptables de fait. Lui sera substitué un mécanisme de suspension des exécutifs locaux de leurs fonctions d'ordonnateur à l'issue d'un jugement définitif. Ce dispositif n'aura toutefois pas pour effet d'écarter toute sanction élective : de telles sanctions subsisteront pour les gestions de fait dont le caractère frauduleux conduirait à la mise en oeuvre d'une procédure pénale, au terme de laquelle des peines complémentaires d'inéligibilité peuvent, le cas échéant, être prononcées.

Enfin, le projet de loi tend à rénover le statut des magistrats des chambres régionales des comptes, à accroître leurs liens avec la Cour des comptes et à mettre en place une gestion plus concertée du corps.

3. Des progrès à amplifier

Ces progrès incontestables, qui portent sur la sécurité juridique des mandats, doivent être amplifiés par des mesures destinées à améliorer le « statut » des élus locaux dans un contexte marqué par une diversification de plus en plus grande de leurs tâches.

Le Livre blanc élaboré au sein de l'Association des Maires de France, qui a été présenté lors du 82 è congrès de l'association, a formulé de manière très pertinente divers éléments de réflexion.

La mission sénatoriale d'information a fait de cette question du « statut » de l'élu un autre thème prioritaire de ses réflexions. Son rapport d'étape précité souligne l'inadaptation du cadre juridique en vigueur -très largement issu de la loi du 3 février 1992- lequel ne garantit plus l' égal accès de tous les citoyens à un mandat local , comme en témoigne la forte représentation des retraités et des agents de la fonction publique parmi les maires.

La mission d'information a formulé un ensemble de propositions pour favoriser l'accès des citoyens aux fonctions électives et rééquilibrer la représentation sociologique des élus. Ces propositions tendent à concilier plus aisément une activité professionnelle et l'exercice d'un mandat local et à faciliter l'exercice à plein temps du mandat local. Tout en exprimant son attachement au principe de gratuité du mandat, la mission d'information a néanmoins préconisé une revalorisation des indemnités de fonction . Enfin, elle a souhaité que l'exigence de formation de l'élu soit mieux reconnue et généralisée.

Sur le rapport de notre collègue Jean-Paul Delevoye, au nom de la commission des Lois, le Sénat a adopté, le 18 janvier 2001, une proposition de loi relative à la démocratie locale qui s'inscrit dans le droit fil de ces orientations et servira de base pour l'examen du projet de loi relatif à la démocratie de proximité.

B. LE NÉCESSAIRE DÉVELOPPEMENT DE LA COOPÉRATION INTERCOMMUNALE

Votre commission des Lois souhaite que se poursuive le mouvement indispensable d' approfondissement de la coopération intercommunale, dont elle a souligné l'ampleur. Aussi nécessaires soient-elles, les incitations financières ne pourront aboutir que si elles se conjuguent avec une véritable volonté des élus de travailler ensemble autour de projets communs.

1. Assouplir le cadre juridique de la coopération intercommunale

Dans ce but, la mission d'information sur la décentralisation a, à juste titre, souhaité, d'une part, que soit poursuivie la simplification du cadre juridique de l'intercommunalité et la rationalisation des structures , d'autre part, que le rôle de la commission départementale de la coopération intercommunale soit renforcé ( proposition n° 8 ).

Cette proposition traduit l'idée majeure selon laquelle la coopération intercommunale devant reposer sur la libre volonté des communes, la loi ne doit pas prétendre régler dans les moindres détails les problèmes qui peuvent se poser au quotidien mais, au contraire, faire confiance aux élus locaux pour trouver les meilleures solutions correspondant au contexte local. Ainsi, comme l'avait voulu le Sénat, le législateur n'a pas donné une définition uniforme de la notion d'intérêt communautaire des compétences transférées, préférant laisser une marge de discussion aux acteurs locaux.

En outre, des assouplissements du cadre juridique doivent être envisagés chaque fois qu'une règle mal adaptée constitue une entrave au renforcement de l'intercommunalité.

Comme l'a parfaitement souligné la mission d'information sur la décentralisation, ce développement de la coopération intercommunale ne doit pas se faire au détriment de l'identité communale . Niveau d'administration de proximité, les communes doivent jouer un rôle essentiel dans la prise en charge d'un certain nombre de besoins relevant de la vie quotidienne de nos concitoyens. Cette dimension devra être prise en compte dans les réflexions sur la désignation au suffrage universel direct des délégués intercommunaux, perspective ouverte tant par la mission sénatoriale d'information que par la commission pour l'avenir de la décentralisation, et introduite par l'Assemblée nationale dans le projet de loi relatif à la démocratie de proximité.

2. Rénover le cadre financier de la coopération intercommunale

La politique consistant à financer en partie l'intercommunalité par des concours extérieurs à la dotation globale de fonctionnement, afin de ne pas pénaliser la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale, atteint ses limites et ne parvient d'ailleurs pas toujours à garantir à ces dotations une progression convenable.

Pour remédier à cette difficulté, la création d'une enveloppe spécifique destinée au financement de l'intercommunalité au sein de la dotation globale de fonctionnement constitue une piste de réflexion souvent évoquée. Il convient cependant d'avoir en mémoire le lien existant entre les dépenses des communes et celles des établissements publics de coopération intercommunale dont elles sont membres. Il pourrait donc être envisagé de remplacer le lien actuel entre la dotation d'intercommunalité et les dotations de solidarité urbaine et rurale par un lien entre la dotation forfaitaire des communes et celle des établissements publics de coopération intercommunale .

La réforme du financement de la dotation d'intercommunalité doit s'accompagner d'une réflexion sur les critères de péréquation , utilisés pour sa répartition. Aujourd'hui, les budgets et les compétences des structures intercommunales sont tels que celles-ci ne peuvent plus s'accommoder d'attributions de dotation globale de fonctionnement dont le montant peut fluctuer dans des proportions importantes d'une année sur l'autre du fait de l'évolution des coefficients d'intégration fiscale (CIF) des établissements publics de coopération intercommunale au sein d'une même catégorie. La réforme du mode de calcul du CIF devient d'ailleurs prioritaire : les modalités de prise en compte des dépenses de transfert sont devenues d'une extrême complexité et susceptibles de nombreuses contestations.

La question du développement de l'intercommunalité apparaît donc étroitement liée à celle de la réforme des finances locales.

C. L'AVENIR DU SYSTÈME DE FINANCEMENT LOCAL

La nécessité de réformer le système de financement local semble faire l'objet d'un large consensus. L'an passé, votre rapporteur avait exposé les propositions de la mission commune d'information du Sénat sur la décentralisation. La commission pour l'avenir de la décentralisation et le Conseil économique et social ont également apporté des contributions importantes à la réflexion 20( * ) .

Le Premier ministre lui même a annoncé une « grande réforme » des finances locales, avec la présentation, à la fin de l'année 2001, d'un rapport sur les voies et moyens d'une réforme des ressources des collectivités locales. Une note d'étape a été communiquée au Comité des finances locales et aux commissions parlementaires, le 12 juillet 2001. Les membres du comité ont réagi à ce document lors d'un séminaire au mois de septembre.

Ces différentes contributions cernent les mêmes enjeux, sans pour autant toujours aboutir aux mêmes préconisations. A ce stade, votre commission des Lois souhaite simplement souligner que la réforme du système de financement local devra reposer sur deux piliers : l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et la péréquation.

a) L'indispensable autonomie fiscale des collectivités territoriales

L'autonomie financière constitue l'une des conditions, essentielle, de la libre administration des collectivités territoriales, dont le principe est affirmé à l'article 72 de notre Constitution.

D'aucuns, prenant exemple sur la situation d'autres pays européens tels que le Royaume-Uni ou les Pays-Bas, voudraient la réduire à une autonomie de dépenses. Votre commission des Lois estime, au contraire, que l'autonomie fiscale constitue non seulement un facteur d'efficacité de la gestion des collectivités territoriales mais surtout un fondement de la démocratie locale .

La Constitution n'établit aucun lien explicite entre le principe de libre administration et celui d'autonomie fiscale locale, ni d'ailleurs avec celui d'autonomie financière. Elle réserve à la loi (article 34) le pouvoir de fixer « l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature ». C'est de la loi du 10 janvier 1980 que les conseils élus des collectivités territoriales tiennent le pouvoir de voter chaque année les taux des impôts directs locaux.

Toutefois, dans sa décision n° 98-405 du 29 décembre 1998, relative à la suppression de la part salariale de l'assiette de la taxe professionnelle, le Conseil constitutionnel a rappelé, selon une jurisprudence bien établie, que les règles posées par la loi « ne sauraient avoir pour effet de restreindre les ressources fiscales des collectivités au point d'entraver leur libre administration » . Il a considéré en l'espèce que, « puisqu'en contrepartie de la suppression progressive de la part salariale de la taxe professionnelle, la loi institue une compensation (...) ces règles n'ont ni pour effet de diminuer les ressources globales des collectivités locales, ni de restreindre les ressources fiscales au point d'entraver leur libre administration. »

Telle est la raison pour laquelle le Sénat, sur le rapport de notre collègue Patrice Gélard, a adopté le 26 octobre 2000 une proposition de loi constitutionnelle relative à la libre administration des collectivités territoriales et à ses implications fiscales et financières, signée par le Président Christian Poncelet et nos collègues Jean-Paul Delevoye, Jean-Pierre Fourcade, Jean Puech et Jean-Pierre Raffarin, qui tend à inscrire dans la Constitution le principe d'un financement majoritaire des collectivités locales par la fiscalité.

Comme l'a souligné la mission d'information du Sénat sur la décentralisation, la réforme de la fiscalité locale suppose, tout d'abord, de réviser les bases des impôts . L'assiette de l'impôt local a vieilli ; elle est à l'origine de nombreuses inégalités, entre les citoyens comme entre les collectivités, et fausse les mécanismes de la péréquation dont elle détermine largement les critères. L'existence de bases d'imposition justes et régulièrement actualisées permettrait, au contraire, de maintenir durablement une fiscalité locale vivante et de réduire les charges incompressibles pesant sur le budget de l'Etat. En la matière, si l'hypothèse du transfert aux communes de la possibilité de réviser les bases locatives paraît séduisante, il convient d'en mesurer toute la complexité, dès lors que les impôts locaux sont partagés entre plusieurs niveaux de collectivités locales.

La simplification des impôts semble également une nécessité. La fiscalité locale est caractérisée par une grande complexité, en raison notamment du partage du produit des impositions entre plusieurs niveaux de collectivités.

L'idée d'une spécialisation des impôts locaux , reprise à son compte par la commission pour l'avenir de la décentralisation, doit être examinée avec prudence. Appliquée de manière stricte, elle ferait dépendre les ressources d'un niveau de collectivité d'une seule base fiscale, ce qui pourrait compromettre leur stabilité. Par ailleurs, les propositions généralement avancées de répartition des impôts existants entre niveaux de collectivités ne semblent pas compatibles avec le maintien de leurs ressources actuelles.

La spécialisation « de fait », par le biais de mécanismes tels que la taxe professionnelle unique, sur la base de l'adhésion libre des communes, semble à la fois plus souple et plus opérationnelle. De même, l'affectation au profit de certaines collectivités d'impôts spécifiques pourrait les conduire à ne plus souhaiter percevoir l'un des impôts existants.

Enfin, la possibilité d'affecter aux collectivités locales une fraction du produit d'un ou plusieurs impôts d'Etat doit être envisagée à l'aune de deux exigences : une base susceptible d'être territorialisée et un taux susceptible d'être modulé par la collectivité bénéficiaire. Sinon, elle risquerait de s'assimiler à une dotation et de porter atteinte à l'autonomie financière locale.

b) Le renforcement de la péréquation

L'autonomie financière des collectivités territoriales, surtout si elle est très large, ne va pas sans certaines inégalités et certaines distorsions économiques. La péréquation s'avère donc indispensable pour assurer la cohésion du territoire national. Si la solidarité entre collectivités territoriales doit être encouragée, il convient également de rénover les concours financiers que l'Etat leur apporte.

La mise en place d'une enveloppe normée et d'un engagement pluriannuel ont constitué un réel progrès, dans la mesure où ils ont permis aux collectivités territoriales de disposer de ressources stables et prévisibles. Il serait donc souhaitable d'en reconduire le principe, en retenant une indexation qui permette aux collectivités locales de bénéficier davantage des fruits de la croissance : l'indexation devrait être portée de 33 % à 50 % de la croissance du produit intérieur brut. Le maintien de la dotation de compensation de la taxe professionnelle dans le rôle de variable d'ajustement de l'enveloppe normée doit également être réexaminé.

Comme l'a souligné la mission d'information du Sénat sur la décentralisation, il conviendrait en outre, afin de permettre aux élus locaux d'avoir une vision claire de leurs ressources, de simplifier et de globaliser , autant que faire se peut, les dotations de l'Etat. Une condition nécessaire de la réussite du processus de simplification serait l'interruption de la pratique consistant à financer à partir d'une même enveloppe des actions sans cesse plus nombreuses. Le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et le Fonds national de péréquation en sont les meilleurs exemples.

Enfin, les mécanismes de péréquation au sein de la dotation globale de fonctionnement pourraient être améliorés. La dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale représentent moins de 10 % de la dotation globale de fonctionnement des communes. La dotation d'intercommunalité est en revanche très péréquatrice, puisque 85 % de son montant est réparti en tenant compte du potentiel fiscal des structures intercommunales.

Le montant des crédits consacré à la péréquation pourrait être accru en ramenant la part de l'augmentation de la dotation globale de fonctionnement d'une année sur l'autre consacrée à la dotation forfaitaire à moins de 50 % (contre 50 % à 55 % aujourd'hui).

Assurer une meilleure péréquation entre les collectivités locales nécessite surtout une refonte des critères de répartition des dotations , ceux-ci étant trop nombreux d'une part, et de moins en moins pertinents d'autre part. Ainsi, le potentiel fiscal est calculé à partir de bases d'imposition obsolètes et se trouve considérablement affecté par la croissance des compensations fiscales.

Les pistes de réflexion sont donc nombreuses. En tout état de cause, il conviendra d'instituer des mécanismes de péréquation respectueux de la libre administration des collectivités locales.

*

* *

Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission des Lois a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.


1 Discours de M. Christian Poncelet, président du Sénat, au 84 ème Congrès des maires et des présidents de communautés de France, le 21 novembre 2001.

2 La position « hors cadre », spécifique au corps préfectoral, permet aux préfets d'accomplir des missions qui leur sont confiées par les pouvoirs publics. Elle est souvent utilisée pour les rémunérer, sur les crédits du ministère de l'intérieur, lorsqu'ils se trouvent dépourvus d'affectation. La position « hors cadres », prévue par le statut général de la fonction publique, s'apparente à une disponibilité. Elle est celle du fonctionnaire remplissant les conditions pour être détaché auprès d'une administration ou d'une entreprise publique, dans un emploi ne conduisant pas à pension du régime général de retraite, ou détaché auprès d'organismes internationaux. Dans cette position, il cesse de bénéficier de ses droits à l'avancement et à la retraite.

3 Dans un arrêt du 25 mars 1996 « Préfet de la région Rhône-Alpes, préfet du Rhône contre Conseil de prud'hommes de Lyon », dit arrêt « Berkani », le Tribunal des conflits a opéré un revirement de jurisprudence concernant les agents non titulaires de la fonction publique, en considérant que
« les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère administratif sont des agents contractuels de droit public quel que soit leur emploi ».

4 Chapitre 37-10, budget de fonctionnement des préfectures.

5 Pièce à fournir pour l'établissement d'une carte grise lors d'une vente de véhicule d'occasion.

6 Une expérimentation est actuellement en cours dans la préfecture de la Haute-Vienne, qui concerne l'établissement des dossiers d'inscription par les auto-écoles et la délivrance du titre après réussite à l'examen.

7 Les dotations concernées sont les dotations dites « actives », c'est-à-dire soumises à une indexation propre : la dotation globale de fonctionnement (DGF), la dotation spéciale instituteurs (DSI), la dotation particulière élu local, les dotations de l'Etat au Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) et au Fonds national de péréquation (FNP), la dotation globale d'équipement (DGE), les dotations générales de décentralisation (DGD, DGD Corse, DGD formation professionnelle), ainsi que les dotations d'équipement scolaire des départements et des régions (DDEC, DRES).

8 Article 32 de la loi de finances pour 1996.

9 Article 57 de la loi de finances pour 1999.

10 Les départements perçoivent également, le cas échéant, une dotation de fonctionnement et une garantie de progression minimales. Enfin, ils bénéficient d'un concours particulier du fait de la suppression des contingents communaux d'aide sociale.

11 L'article 25 du projet de loi de finances pour 2002 prévoit une majoration de 1,5 million d'euros de la dotation de solidarité rurale au titre de la compensation de la suppression de l'intervention de l'Etat dans l'achat par les communes d'imprimés d'état-civil et dans l'abonnement au Journal officiel, et un abondement de 22,867 millions d'euros de la fraction « bourgs-centres » de cette dotation.

12 Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat a considéré que la dotation compensatrice au titre d'une année devait être calculée
« en fonction de la totalité des bases d'imposition à la taxe professionnelle retenues dans les rôles de la commune au titre de cette année, qu'il s'agisse des rôles primitifs ou des rôles supplémentaires », ce que n'avait pas fait l'Etat.

13 JO Assemblée nationale, séance du 19 octobre 2001, p. 6341.

14 Note de conjoncture sur les grandes tendances des finances locales, juillet 2001.

15 Proposition de la Commission européenne du 10 mai 2000, à la suite du débat sur le Livre vert sur les marchés publics.

16 La procédure du marché négocié permet à la personne publique de négocier directement avec les candidats afin de rechercher l'offre économiquement la plus intéressante, alors que le principe en appel d'offres est celui de l'intangibilité des offres et de la prohibition de toute négociation avec les candidats. Elle s'accompagne de garanties renforcées de transparence.

17 Article 14 du code des marchés publics annexé au décret n° 2001-210 du 7 mars 2001.

18 La compétence principale du pouvoir réglementaire en matière de marchés publics est fondée sur les dispositions de l'article 12 de la loi de finances du 31 janvier 1833, sur le décret-loi du 12 novembre 1938 portant extension de la réglementation en vigueur pour les marchés de l'Etat aux marchés des collectivités locales et de leurs établissements publics et, concernant les marchés de travaux, sur la loi n° 57-908 du 7 août 1957.

19 Conseil d'Etat, Assemblée, 29 avril 1981 - Ordre des architectes.

20 L'avenir de l'autonomie financière des collectivités locales. Rapport présenté par M. Jean-Pierre Brunel, séance des 12 et 13 juin 2001.


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