ANNEXE N° 3
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CONTRIBUTION ÉCRITE DE LA CGT
Quelles sont les perspectives de l'emploi pour 2002
Depuis plusieurs mois, l'on assiste à une
décélération du rythme des créations d'emplois et
une remontée du chômage. La dégradation de la conjoncture
(nationale et internationale) risque d'intensifier cette tendance. Il est donc
indispensable de prendre des mesures pour dynamiser l'économie. On ne
reviendra pas ici sur l'importance d'une politique monétaire qui devrait
donner la priorité à l'emploi et à la croissance et non
uniquement à la stabilité des prix. D'autres pistes existent
aussi.
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Il faut dynamiser les salaires et sortir de la
« modération sociale »
qui caractérise
l'évolution salariale depuis déjà plusieurs années.
Le dynamisme salarial est nécessaire au moins pour deux raisons :
1°) L'évolution de la productivité du travail sur le
long terme met en évidence un écart grandissant entre celle-ci et
le salaire réel.
2°) Les salaires augmentent moins vite en France que par rapport
à la moyenne des pays membres de l'Union européenne
(cf. l'enquête de l'Institut de Dublin).
- Le Gouvernement compte relancer la consommation surtout par la baisse
des impôts.
L'amélioration du pouvoir d'achat ne peut s'appuyer
uniquement, ou prioritairement, sur la réduction des impôts.
Et cela au moins pour deux raisons :
1°) La moitié des ménages n'acquitte pas l'impôt
sur le revenu.
2°) La baisse des impôts, alors que le Gouvernement poursuit
l'objectif de la réduction du déficit, conduit
nécessairement à la baisse des dépenses et notamment de
celles qui ont une utilité élevée du point de vue
économique et social, comme par exemple les dépenses en faveur de
l'emploi.
- Compte tenu de la décélération des créations
d'emplois et de la remontée du chômage, il est nécessaire
aussi d'intensifier des mesures qui permettent de créer des emplois. De
ce point de vue, les mesures prises en faveur des entreprises de moins de
20 salariés pour le passage aux 35 heures sont fortement
critiquables.
La politique d'emploi a-t-elle permis de réduire le chômage
structurel ?
Nous sommes très critiques de la notion de « chômage
structurel » et ses variantes, « chômage
naturel », « chômage non accélérateur
de l'inflation » (NAIRU), etc. Lorsque l'on parle du chômage
structurel de 9 %, on admet que 2,5 millions de personnes devraient
rester en permanence au chômage.
Ces notions considèrent qu'un niveau incompressible du chômage est
« naturel ». Selon l'OCDE, pour la France, il s'agirait
d'un taux de chômage de 9 %. Dans la mesure où celui-ci a
atteint de « seuil » et est réparti à la
hausse, certains disent qu'effectivement le taux de chômage de 9 %
serait structurel ou naturel.
Précisons que les chiffres officiels du chômage n'intègrent
pas la totalité des privés d'emplois. Autrement dit, il ne s'agit
pas de créer quelques 2,5 millions d'emplois pour les
chômeurs officiellement recensés. Il faudrait créer au
moins deux fois plus d'emplois pour résorber à la fois le
chômage officiellement recensé, mais aussi pour résorber le
sous-emploi et pour permettre aux nouveaux arrivants sur le marché du
travail de trouver un emploi.
Si aujourd'hui le chômage remonte, ce n'est pas parce que l'on serait
arrivé au « seuil du chômage structurel ».
Le chômage remonte parce que la croissance des années 1997-2000
n'a pas été suffisamment élevée et surtout parce
qu'elle portait des contradictions importantes qui ont affaibli les bases d'une
croissance durable.
Il s'agit surtout des facteurs suivants :
- la progression de la précarité ;
- l'insuffisance des investissements en France, surtout dans les nouvelles
technologies et dans la recherche-développement ;
- l'importance des investissements à l'étranger (en 2000,
pour un franc d'investissement en France, les entreprises françaises ont
investi 60 centimes à l'étranger) ;
- l'insuffisance des efforts de qualification, notamment de la part des
entreprises ;
- un partage de la valeur ajoutée qui reste en défaveur des
salaires.
La dégradation de la conjoncture internationale affecte aussi
l'économie française, mais les causes fondamentales du
ralentissement de la croissance en France se trouvent à
l'intérieur des espaces français et européen.
Le budget de l'emploi pour 2002 est-il adapté à la
conjoncture économique ?
D'une manière générale, les hypothèses du budget
2002 (surtout une croissance de 2,5 %) sont jugées trop optimistes
par la plupart des observateurs.
Ce budget porte aussi les marques des engagements pris dans le cadre du
programme pluriannuel et du pacte de stabilité et de croissance. Le
programme pluriannuel a été élaboré dans une phase
de croissance plus élevée ; la situation a changé et
il est nécessaire que le budget de l'Etat tienne compte de ce
changement. Qui plus est, le pacte de stabilité laisse une marge de
manoeuvre (un déficit budgétaire inférieur à
3 % du PIB) qu'il convient d'utiliser lorsque la croissance se ralentit et
que le chômage remonte.
Ces remarques fournissent une grille de lecture du budget de l'emploi pour
2002. Remarquons au préalable que le ministère de
l'économie et des finances s'est engagé à améliorer
la transparence des statistiques. Or, force est de reconnaître qu'en
l'état, le projet de loi de finances est difficile à
décortiquer. En particulier, des informations manquent en ce qui
concerne le montant et la répartition des aides accordées aux
entreprises au titre de l'emploi.
Le budget global du ministère de l'Emploi et de la solidarité est
de 31,7 milliards d'euros. Les crédits sont stables, ce qui
signifie en fait une baisse en termes réels.
Les crédits au titre de l'emploi sont de 16,8 Milliards d'euros, ce
qui représente à structure constante, une baisse de 1,7 %
sur l'année 2001.
3,2 milliards d'euros sont destinés au programme
« nouveaux services emplois-jeunes » ;
4,5 milliards à l'insertion des chômeurs de longue
durée et autres personnes ayant les plus grandes
difficultés ; 1,65 milliards d'euros à
« l'accompagnement des restructurations », etc.
Compte tenu de la dégradation de la situation de l'emploi et
l'arrivée à terme des premiers emplois-jeunes en 2002, nous
considérons que le budget de l'emploi devrait progresser plus vite.
Notre critique porte aussi et essentiellement sur les crédits
alloués sous forme d'aides et d'allégements de charges
patronales. Nous demandons une mise à plat des aides. La Commission du
contrôle des aides devrait fournir des éléments
d'évaluation de ces aides, notamment en ce qui concerne leur impact sur
les créations d'emplois, car les estimations disponibles varient
considérablement selon les hypothèses retenues.