C. LA NÉCESSAIRE LIMITATION DES AIDES AU RETRAIT D'ACTIVITÉ
1. La nécessité d'augmenter le taux d'activité des salariés âgés
Grâce à une forte augmentation du nombre des
jeunes
quinquagénaires (50-54 ans) et aux arrivées aux âges
élevés de générations de femmes plus actives, le
taux d'emploi des 20-59 ans a augmenté de 6 points entre 1990 et 2000
pour atteindre 67,2 %
34(
*
)
.
Toutefois, la hausse est beaucoup plus faible pour les 55-59 ans (53,7 % en
mars 2000 contre 51,9% en janvier 1990).
La plupart des partenaires sociaux et des organismes auditionnés par
votre rapporteur ont insisté sur la nécessité de revenir
sur le faible taux d'activité des salariés âgés.
La CCIP considère qu'une hausse du taux d'emploi des seniors pourrait
permettre de réduire les difficultés de recrutement dans certains
secteurs. Les syndicats, comme la CGT-FO et la CFE-CGC, estiment quant à
eux qu'il faut renforcer la formation des salariés âgés
afin de les maintenir dans l'emploi.
La question de l'emploi des travailleurs âgés est devenue une
priorité européenne. Ainsi l'agenda social européen,
adopté au Conseil européen de Nice des 7, 8 et 9 décembre
2000, a-t-il préconisé
« des politiques ambitieuses
en termes d'augmentation des taux d'activité »
et
l'accroissement des
« possibilités d'éducation et de
formation tout au long de la vie »
.
Force est de constater que si le Gouvernement a commencé à
réduire les crédits en faveur du retrait d'activité, on
est encore loin d'avoir une politique qui chercherait à promouvoir
l'augmentation du taux d'activité des seniors. Cette carence trouve en
partie son origine dans l'absence de réforme des retraites, puisque ce
qui est en question tient également au taux d'activité des
salariés de plus de 60 ans.
2. La baisse des crédits en faveur des retraits d'activité
Conformément à la ligne directrice n°3 du
Plan
national d'action pour l'emploi
35(
*
)
pour 2001 et aux engagements
souscrits lors du sommet de Stockholm, le Gouvernement a intensifié ses
efforts visant à réduire les départs précoces des
travailleurs les plus âgés.
En 2002, les dotations affectées aux mesures de préretraite
diminueront dans leur ensemble de 22 %.
Retraits d'activité
|
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Allocations spéciales du FNE |
1.699,64 |
1.503,73 |
1.265,74 |
738,46 |
632,66 |
339,96 |
152,45 |
Cessations d'activité CATS |
|
|
|
|
|
60,98 |
143,30 |
Préretraites progressives |
370,48 |
552,48 |
468,98 |
304,59 |
243,92 |
216,33 |
192,09 |
Sidérurgie |
279,77 |
235,17 |
176,39 |
131,32 |
64,29 |
30,10 |
16,42 |
Mesures spéciales |
3,55 |
1,57 |
0,93 |
0,68 |
0,21 |
0,00 |
0,00 |
TOTAL |
2.353,44 |
2.292,94 |
1.912,04 |
1.175,06 |
941,08 |
647,37 |
504,26 |
(en
millions d'euros)
Plus précisément, les crédits consacrés aux
préretraites ASFNE et aux CATS mises en place en 2000 pour les
salariés ayant exercé leur activité professionnelle dans
des conditions particulières de pénibilité
s'élèveront à 295 millions d'euros, en baisse de plus de
26 %.
Financement du retrait d'activité
et participation
de
l'Etat aux dépenses de chômage
|
LFI 2001 |
PLF 2002 |
Evolution (%) |
RETRAIT D'ACTIVITÉ |
1.905,67 |
1.578,93 |
- 17,1 |
A - Retrait d'activité |
647,36 |
504,26 |
- 22,1 |
ASFNE et CATS |
400,94 |
295,75 |
- 26,2 |
PRP |
216,33 |
192,09 |
- 11,2 |
Sidérurgie |
30,10 |
16,42 |
- 45,4 |
Mesures spéciales |
0,00 |
0,00 |
0,0 |
B - Indemnisation du chômage |
1.255,27 |
1.071,62 |
- 14,6 |
Fonds de solidarité |
1.255,27 |
1.071,62 |
- 14,6 |
C - Régimes de retraites |
3,05 |
3,05 |
0,1 |
Validation points de retraites et ACO |
3,05 |
3,05 |
0,1 |
(en
millions d'euros)
Par ailleurs, la subvention de l'Etat au fonds de solidarité diminue de
14,6 % par rapport à 2001.
Les dispositifs de cessation anticipée totale d'activité
Ne sont
étudiés ici que les systèmes de préretraites du
secteur privé
(1)
• Les dispositifs financés par l'Etat et par les partenaires
sociaux
L'ASFNE (allocation spéciale du fonds national pour l'emploi)
Les cessations anticipées d'activité totales ont
été développées il y a une vingtaine
d'années comme une réponse aux risques de licenciement des
salariés âgés dans les entreprises connaissant des
difficultés économiques.
C'est le cas en particulier des préretraites prises en charge
partiellement par l'ASFNE qui permettent, dans le cadre d'un plan social
négocié avec l'Etat, le départ des salariés
âgés d'au moins 57 ans (56 ans à titre
dérogatoire). Dans ce dispositif, il n'existe pas, hors l'âge, de
critères spécifiques quant au public concerné, ni de
contreparties concernant l'entreprise.
Depuis une dizaine d'années, l'Etat a mené une politique de
réduction du nombre des entrées en ASFNE : ce nombre qui
atteignait 56.000 en 1993 n'est plus que de 22.000 en 1997 alors qu'entre ces
deux années le taux de chômage global est resté stable et
que celui des plus de 50 ans a augmenté d'un point (de 8,3 %
à 9,3 %). Cette évolution à la baisse s'est
poursuivie entre 1997 et 2000, année durant laquelle 7.500 personnes
seulement sont entrées dans le dispositif.
L'ARPE (allocation de remplacement pour l'emploi)
De leur côté, les partenaires sociaux ont mis au point par un
accord en date du 6 septembre 1995, l'ARPE, qui permet à des
salariés remplissant certaines conditions d'âge et de durée
de cotisation au titre de l'assurance vieillesse, de mettre fin à leur
activité professionnelle de façon anticipée. Ce dispositif
a été reconduit par plusieurs accords successifs. Dans son
état actuel, il doit s'achever en 2003, et ne concerne plus que les
personnes nées en 1941 et 1942, qui justifient de 160 trimestres de
cotisation vieillesse. En contrepartie, les entreprises s'engagent à
opérer des embauches compensatrices permettant de maintenir le volume
d'heures travaillées et pour lesquelles un public prioritaire est
défini. Cette formule a connu un succès important : les taux
d'adhésion
(2)
des générations nées
entre 1938 et 1940 sont compris entre 58,6 % et 67,5 %, ce qui
correspond à des flux d'entrées de 42.800 en moyenne sur la
période » 1996-2000.
La CATS (cessation d'activité de certains travailleurs
salariés)
Par ailleurs, l'Etat ne tarit pas totalement les sources d'entrée en
préretraite : un nouveau dispositif, la CATS a été
mis au point en 2000
(décret n° 2000-105 du 9 février
2000).
Selon la circulaire d'application, ce dispositif s'inscrit dans le
mouvement de désengagement de l'Etat du financement des mesures de
cessation anticipée d'activité, tout en centrant les financements
publics sur les salariés les plus menacés dans leur emploi du
fait des conditions de travail qu'ils ont connues. Outre des conditions
d'âge (être âgé d'au moins 57 ans et au plus de 65 ans
et avoir adhéré au dispositif au plus tôt à 55 ans),
le salarié doit, pour bénéficier du financement d'une
partie de son allocation par l'Etat, avoir accompli une période d'au
moins quinze ans de travail à la chaîne ou de travail de nuit, ou
justifier de dix années d'affiliation à un régime
salarié de sécurité sociale s'il est travailleur
handicapé. En outre, cette mesure ne concerne que les salariés
appartenant à des entreprises couvertes par un accord professionnel
national qui a prévu le champ d'application de la CATS. Au sein des
entreprises, un accord collectif doit avoir prévu une durée
collective du travail inférieure à 35 heures hebdomadaires,
ainsi que des dispositions relatives à la gestion prévisionnelle
de l'emploi, au développement des compétences des salariés
et à leur adaptation à l'évolution de leur emploi.
Les autres dispositifs
Une partie des CATS n'est pas financée par l'Etat ; il s'agit de
celles concernant des salariés qui ne répondent pas aux
critères fixés par le décret de février 2000.
Toutefois, pour ces salariés, l'entreprise bénéficie d'une
exonération de cotisations sociales patronales. Sur les dix premiers
mois de fonctionnement, environ 27 % des salariés adhérents
à une CATS ne sont pas couverts par un accord de participation de l'Etat.
Il existe par ailleurs des systèmes de préretraite que les
entreprises gèrent seules ou par l'intermédiaire de compagnies
d'assurances ; ce sont les préretraites d'entreprises (parfois
appelées « maison » ou
« privées »). Ces préretraites concernent en
grande majorité des grandes entreprises appartenant à des
secteurs prospères, et son négociées avec les
organisations syndicales. Lorsque ces accords ont été
signés dans le cadre d'un plan social, l'entreprise
bénéficie d'avantages fiscaux. Dans ces dispositifs, les
critères d'éligibilité, les modalités de
départ et les systèmes de gestion sont très divers. Il
n'existe pas de système d'information centralisé permettant de
les dénombrer.
(1). Le ministère de la fonction publique chiffre à 24.586 le
nombre d'agents publics en cessation anticipée totale d'activité
fin janvier 2001.
(2). Le taux d'adhésion à l'ARPE est établi par l'UNEDIC
en rapportant au nombre de salariés qui remplissent les conditions
d'accès au dispositif le nombre de salariés qui sont
effectivement entrés dans la mesure.