IV. UNE ADAPTATION INÉLUCTABLE DES UNIVERSITÉS AU MONDE ACTUEL

Trop longtemps repliée sur elle-même, l'université doit aujourd'hui impérativement s'ouvrir sur l'extérieur, développer ses potentialités en usant de davantage d'autonomie et accepter une évaluation de ses formations.

A. L'OUVERTURE DU SYSTÈME UNIVERSITAIRE SUR L'EXTÉRIEUR

Cet objectif passe par la construction d'un espace européen de l'enseignement supérieur, c'est-à-dire une harmonisation des cursus universitaires et un développement des échanges étudiants, qui implique notamment de mieux accueillir les étudiants étrangers dans nos universités.

1. Vers l'harmonisation européenne des cursus

a) Le système 3-5-8 : une fragilisation des diplômes intermédiaires ?

Le processus d'harmonisation européenne des cursus d'enseignement supérieur sur le modèle anglo-saxon, engagé à l'initiative de M. Claude Allègre à la Sorbonne et prolongé à Bologne et à Prague s'est progressivement élargi à 29 puis à 32 pays. Il déborde aujourd'hui les limites de l'Union Européenne et se traduit par l'adoption, au niveau des ministres de l'éducation d'orientations qui doivent présider à la mise en place d'un espace européen de l'enseignement supérieur. Dans le même temps, les conférences nationales des présidents d'universités ont constitué, à l'échelle européenne, une association commune, l'Association de l'Université Européenne (AUE), présidée par M. Eric Froment, professeur à l'Université de Lyon.

La principale orientation retenue porte sur la recherche des niveaux de diplômes qui permettent d'organiser de manière plus satisfaisante la mobilité des étudiants en cours et en fin de cursus. Pour les différents pays, ces niveaux de référence ont été définis à bac + 3 (licence ou bachelor), à bac + 5 (mastaire ou master) et à bac + 8 (doctorat).

Des réformes ont été engagées, dans plusieurs pays européens, pour situer les diplômes majeurs par référence à ces trois niveaux.

b) Les incidences pour les diplômes nationaux

Pour la France, ce processus européen d'harmonisation des diplômes a conduit :

- à bac + 3, à réactiver la licence notamment à la faveur d'une campagne d'habilitation qui a permis d'introduire plusieurs centaines de licences professionnelles dans les établissements ;

- à créer le grade de mastaire qui constitue le cadre de référence permettant de « positionner » à bac + 5 divers types de diplômes et notamment les DEA, les DESS et des diplômes d'ingénieur ou les écoles de commerce.

En accédant à la fois aux diplômes concernés et au grade de mastaire, les titulaires de ces titres auront plus de facilité pour faire reconnaître leur niveau soit par des établissements universitaires étrangers, soit par des entreprises étrangères lorsqu'ils sont à la recherche d'un emploi.

Au cours de son intervention devant la conférence des présidents d'université, le 5 juillet 2000, le ministre a proposé aux établissements l'ouverture d'une concertation en vue de simplifier la gamme des diplômes délivrés et de réduire le nombre de ces derniers en privilégiant des intitulés plus lisibles au plan international. En lieu et place du DEA, du DESS et du magistère, il a proposé de créer un mastaire recherche et un mastaire professionnel, voire un mastaire appliqué.

On rappellera que le mastaire créé en juin 1999 par M. Claude Allègre pour harmoniser les diplômes supérieurs européens correspond à cinq années d'études après le baccalauréat. Comme le mastaire est le seul grade qui ne soit pas un diplôme, à la différence du baccalauréat, de la licence ou du doctorat, le ministre a suggéré de rassembler les diplômes universitaires de troisième cycle, DEA et DESS sous l'appellation unique de mastaire, celui devenant dans le même temps un véritable diplôme universitaire. Il a en outre suggéré de simplifier les dénominations des licences en les limitant à une dizaine d'intitulés.

Alors que l'harmonisation européenne des cursus avait pour objectif selon M. Claude Allègre, outre la création du mastaire, de « surligner » les diplômes existants, votre commission constate que ce système risque aussi de fragiliser les diplômes intermédiaires comme le DEUG et la maîtrise.

Elle souligne le manque de clarté, voire la confusion du discours officiel quant aux conséquences de l'harmonisation européenne des cursus sur les diplômes français et exprime la crainte que celle-ci ne mette en cause les diplômes post-baccalauréat (DEUG, DUT et BTS) en deux ans, ainsi que la maîtrise, effectuée en quatre ans.

Elle note en particulier qu'un allongement éventuel d'un an de la durée de la scolarité modifierait radicalement la nature des diplômes des filières sélectives courtes et professionnalisées, dont la vocation première reste l'insertion professionnelle immédiate, même si des diplômés d'IUT et de BTS, de plus en plus nombreux, poursuivent des études supérieures ultérieures.

S'agissant des premiers cycles, un allongement d'un an de la scolarité du DEUG se pose sans doute en d'autres termes, dans la mesure où moins de 50 % des étudiants l'obtiennent en deux ans.

Sans être opposé au principe même de l'harmonisation des cursus, votre commission souhaiterait obtenir des explications claires du ministre quant à l'avenir des diplômes nationaux qui n'entrent pas dans le moule européen.

2. La création d'un diplôme à points cumulables : la nécessité de garde-fous

Les établissements universitaires ont été incités à s'engager à titre expérimental dans un processus d'harmonisation qui suppose la traduction des programmes en unités, sur la base du découpage en crédits ECTS (European credit transfer system). Une circulaire a défini les règles d'accumulation des unités validées permettant aux étudiants de conserver le bénéfice des unités de formation acquises et a formulé des règles de conservation et de compensation.

Une telle formule est destinée à améliorer la fluidité des échanges universitaires internationaux, puisqu'elle devrait permettre de faciliter la reconnaissance des périodes de formations suivies à l'étranger. En outre, elle devrait faciliter une plus grande mobilité entre les périodes de formation effectuées dans des établissements de plusieurs pays mais aussi des alternances entre des périodes d'activité professionnelle et des périodes de formation. Cette pratique du retour périodique dans des cursus d'enseignement s'inscrit par ailleurs dans un projet de formation tout au long de la vie.

Devant la commission, le ministre a présenté ce diplôme à points, qui devrait être généralisé dans les trois ans à venir, comme une mesure phare pour l'enseignement supérieur et a indiqué que cette nouvelle organisation des diplômes, qui ne porte pas atteinte à leur caractère national était destinée à faciliter la mobilité des étudiants, notamment entre universités françaises et européennes, celle-ci étant d'ailleurs encouragée par la création de 12 000 bourses spécifiques, y compris dans le cadre de la formation continue.

Il a par ailleurs rassuré son rapporteur, qui s'inquiétait de la compatibilité de ce système à points avec la réforme pédagogique intervenue en 1997.

On peut cependant craindre qu'à l'occasion de la mise en place expérimentale du système européen de transfert de crédits (ECTS), qui découpe les cursus non plus en années universitaires, mais en unités de compte, les universités en profitent pour remettre en question le droit à la compensation des notes prévu par l'arrêté de 1997 (un étudiant peut en effet compenser une note inférieure à la moyenne par une note supérieure à dix dans une autre discipline) et que le droit à une seconde session d'examen soit remis en cause.

Consciente de la nécessité de développer la mobilité des étudiants entre les universités, qu'elles soient françaises ou étrangères, votre commission exprime également la crainte que la mise en place du système ECTS sans garde-fous porte atteinte à la cohérence des parcours universitaires, en créant une sorte de libre-service des formations universitaires.

A cet égard, elle rappellera le caractère parfois « exotique » du choix par certains étudiants de valeurs libres lors de la mise en place déjà ancienne des DEUG et s'interroge sur les recommandations qui seront données par le ministre pour résoudre le délicat problème de la « conversion » des évaluations, qui sont souvent très dépendantes des approches culturelles nationales.

Alors que le système actuel, tout en laissant aux étudiants une place aux options de leur choix, garantit la cohérence de la formation et l'homogénéité des niveaux sanctionnés par des diplômes nationaux, une organisation en modules, avec un système de points ou de crédits capitalisables, risque de porter atteinte à cette cohérence et de menacer la nécessaire homogénéité des niveaux atteints dans nos universités, voire de mettre en cause le caractère national des diplômes.

Elle souhaiterait obtenir des explications du ministre quant aux modalités de mise en oeuvre de ce diplôme à points, qui semblent susciter de nombreuses interrogations dans nos universités et qui devront rapidement être précisées compte tenu de la généralisation annoncée à court terme du nouveau système.

3. L'université en ligne : l'expérimentation des campus numériques

Les campus numériques doivent permettre de favoriser l'ouverture internationale, la pluridisciplinarité, la formation tout au long de la vie, mais aussi la coopération entre les universités afin notamment de permettre au système universitaire de répondre au défi de l'internationalisation des formations. Dix premiers campus numériques ont ouvert leurs portes à titre expérimental à la dernière rentrée universitaire.

Ces structures nouvelles ne sont pas des établissements autonomes mais des consortiums regroupant des centres de formation professionnelle ou à distance et des universités françaises ou étrangères.

a) Les appels à projets

Constitués à la suite d'un appel à projets lancé par le ministère de l'éducation nationale en 2000 et 2001, ces campus numériques résultent de regroupements entre universités, françaises et/ou étrangers, le CNED, des entreprises privées, éditeurs ou sociétés de service et doivent être en mesure de développer une offre de « formation ouverte et à distance » et de lui donner des prolongements commerciaux, notamment au plan international.

Au total, l'appel à projets a suscité plus de 200 réponses de la part des universités et fait l'objet de plus de 480 conventions de partenariat entre établissements français ou avec des universités étrangères et de 178 partenariats avec des associations et des entreprises privées.

Sur les 117 projets présentés en 2001, 66 ont été retenus dont 27 feront l'objet d'une étude de faisabilité, 39 étant en phase de réalisation.

b) Les formations proposées

Si les ambitions affichées pour cette première rentrée universitaire restent encore modestes, des modules d'économie, de gestion, de sciences, de droit, de médecine ou de sciences de l'éducation seront proposées aux étudiants sous forme de cours en ligne ou en vidéo, en formation initiale et continue avec un système de tutorat.

Ces enseignements en ligne pourront être suivis en complément de cours traditionnels, ou de façon intensive, pour l'obtention de diplômes et ces modèles devraient s'intégrer dans la nouvelle organisation européenne de diplôme à points dite ECTS (European credits transfer system).

Des enseignants de Grenoble, Nice, Paris et Nancy ont ainsi participé à la conception des modules du campus d'économie et de gestion Canege, ouvert à la dernière rentrée universitaire.

c) Une formule encore coûteuse

En 2000, 27 projets avaient déjà été financés à hauteur de 18 millions de francs. L'appel à projet 2001 a été doté de 50 millions de francs, dont 30 millions de francs accordés au titre du budget de l'enseignement supérieur et 20 millions apportés par le Fonds de recherche technologique.

Le ministère de l'emploi et de la solidarité, la DATAR et l'agence universitaire de la francophonie se sont également associés à l'opération des campus numériques en apportant des subventions par projet.

Dans un certain nombre de projets, les universités s'associeront au CNED pour développer le service de télé-accueil des étudiants qui suivront ces formations en ligne.

Au total, l'éducation nationale aura débloqué 11,13 millions d'euros (73 millions de francs) en deux ans pour financer 77 projets.

Votre commission tient à souligner le coût de la formule pour l'éducation nationale, puisqu'elle implique le recrutement de nombreux enseignants pour animer les formations, mais aussi pour les étudiants en ligne : le coût d'une année d'étude au Canege s'élève au moins à 2 000 euros, soit 13 119 francs, sans compter les frais d'équipement et de connexion à internet, c'est-à-dire dix fois plus que le coût moyen d'une année universitaire dans un établissement traditionnel.

4. Un nécessaire développement des échanges d'étudiants

a) Le bilan de l'agence Edufrance : des résultats encore modestes et des moyens trop limités

La création de l'agence Edufrance, en 1998, avait pour objet de faciliter l'accueil des étudiants étrangers dans nos universités en leur proposant des formations et des services d'accueil spécifiques. Ses activités peuvent être ainsi résumées :

(1) Les actions de communication et de promotion

L'agence a participé en 2000 à des manifestations au salon de l'éducation et dans une dizaine de pays d'Amérique du Nord, d'Amérique Latine, d'Asie, en particulier en Inde. Ces actions sont relayées localement par le réseau des 71 « espaces Edufrance » installés dans les ambassades ou les alliances françaises, affectés à l'accueil et à l'information des étudiants étrangers. L'agence a également développé son site internet, une plate-forme d'information et d'orientation et un catalogue général des formations.

(2) L'accueil direct des étudiants étrangers

En 2000, l'agence a pris en charge directement l'accueil en France de 359 étudiants étrangers auxquels elle a proposé un "produit complet" incluant une formation supérieure et les prestations d'accueil proposées par ses partenaires (EGIDE, CNOUS...). Les « produits » vendus ont concerné pour 75 % des formations longues : la moitié de ces formations longues portait sur l'étude du français langue étrangère, pour 20 % sur les universités d'été, et sur le programme regroupant des écoles d'ingénieurs de plusieurs pays européens.

La répartition géographique des actions de l'agence montre l'importance des étudiants d'origine asiatique (226 étudiants, dont 201 chinois, soit 63 % de l'effectif accueilli). Viennent ensuite les étudiants d'Amérique latine (28 %, surtout du Mexique et du Brésil), puis ceux originaires de pays européens (8 %).

(3) L'ingénierie pédagogique

L'agence Edufrance a mis en place en 1999 un département d'ingénierie pédagogique. En 2000, les activités de ce département ont consisté notamment :

- à mener des études de faisabilité concernant des projets bilatéraux avec l'Égypte (Université française d'Égypte), la Côte d'Ivoire (utilisation du télé-enseignement dans les universités) et le Mexique (création d'un centre de formation aux métiers de la plasturgie) ;

- à participer à la semaine du développement humain de la Banque Mondiale en vue de promouvoir l'expertise française auprès des bailleurs de fonds internationaux, de manière à mieux répondre aux appels d'offres en 2001.

Edufrance a également participé à la promotion de l'expertise française, notamment en matière d'enseignement à distance, en proposant un catalogue de produits pédagogiques spécifiques.

Enfin, l'agence a répondu à l'appel d'offre EUMEDIS, lancé par la Commission Européenne en vue de créer un campus électronique réunissant les pays européens et ceux de la rive sud de la méditerranée. A la tête d'un consortium comprenant divers opérateurs européens, dont le CNED, Edufrance joue un rôle logistique d'« ensemblier » afin d'aider ce consortium à gagner l'appel d'offres qui s'élève à 3,5 millions d'euros.

(4) Des perspectives de développement entravées par des moyens trop limités

L'agence Edufrance est confrontée depuis deux ans et demi à la nécessité de se placer sur le marché mondial de l'éducation et d'y réaliser des bénéfices, tout en exerçant une mission de service public de promotion à l'étranger du système éducatif français.

Dans ce contexte, elle a su acquérir une certaine crédibilité, comme en témoigne la progression de ses adhérents : Edufrance est en effet passée de 61 adhérents en 1999 à 132 en 2000, dont 65 universités françaises. L'agence a également contribué à faire venir en France un nombre accru d'étudiants étrangers (128 000 en 1999-2000) alors que ce nombre connaissait une baisse continue depuis plusieurs années (de 136 000 en 1990-1991 à 121 500 en 1998-1999).

En 2001, les missions d'Edufrance ont évolué : l'agence centre plus particulièrement son activité sur la promotion internationale des formations supérieures françaises et sur le recrutement personnalisé d'étudiants étrangers. Le GIP développe également davantage, auprès des établissements, des actions de lancement et d'harmonisation de leurs politiques internationales.

S'agissant de son fonctionnement, l'agence a renforcé son équipe gestionnaire, s'est dotée d'un système budgétaire comptable plus efficace et met actuellement en place un contrôle de gestion.

Pour 2001, le budget primitif de l'agence était de 78,39 millions de francs en recettes, dont 56,55 millions de francs de ressources propres, 19,15 millions de francs de subventions (10 millions de francs du ministère des affaires étrangères, 8,8 millions de francs du ministère de l'éducation nationale et 0,35 million de francs de l'ENSAM), 1,794 million de francs de cotisations des adhérents et 0,9 million de francs de recettes en capital.

En dépenses, la prévision s'élève à 77,43 millions de francs : 48,27 millions de francs de frais issus de l'activité commerciale, 28,37 millions de francs de dépenses de fonctionnement (6,44 millions de francs de dépenses de personnels et 21,93 millions de francs de fonctionnement dont 2,58 millions de francs de frais de déplacement) et 0,79 million de francs de dépenses d'investissement.

En 2002, la dotation budgétaire sera reconduite et s'élèvera à 8,8 millions de francs.

Le personnel de l'agence est constitué de contractuels rémunérés sur fonds propres et d'agents mis à disposition par différents organismes ou administrations. Fin 2000, l'effectif de l'agence était de 27 agents ainsi répartis :

- 11 agents rémunérés sur son budget ;

- 16 agents mis à disposition, dont 3 par le ministère de l'éducation nationale, 2 par le ministère des affaires étrangères , 6 par le CIEP qui dispose de 9 emplois pour Edufrance dont 3 n'ont pas été pourvus en 2000, 5 par d'autres adhérents du GIP (CNAM, ENSAM, Université Paris VI, CCIP, Association Institut Vatel).

L'agence a disposé également d'une enveloppe annuelle de 30 mois de contrats saisonniers et de 400 demi-journées de vacations de collaborateurs extérieurs.

b) Le bilan des universités européennes d'été

Créés en 2000, les universités européennes d'été réunissent, à la suite d'un appel à projet adressé aux établissements d'enseignement supérieur, les étudiants avancés dans leur cursus, ainsi que des enseignants-chercheurs de plusieurs pays européens, pour des activités de formation, auxquelles s'ajoutent des animations culturelles et des activités de découverte du patrimoine. Organisées par les universités ou d'autres établissements, ces universités d'été mettent en oeuvre de nombreux partenariats, dont celui de collectivités territoriales.

Elles sont destinées à promouvoir la mobilité des enseignants et des étudiants à l'échelle européenne.

Dès les sessions 2000, le programme regroupait sur 12 sites, plus de 850 étudiants, dont 53 % provenaient de pays européens, et mobilisait plus de 165 enseignants (dont 30 % provenant de pays européens).

Sur le fondement de l'expérience acquise, et compte tenu du processus d'évaluation relatif aux sessions 2000, le programme des sessions 2001 de ces universités d'été a été élargi à une quarantaine de sites répartis sur le territoire français et a permis de regrouper entre 1 500 et 2 000 étudiants, provenant de France, des autres états européens ou d'autres pays étrangers.

Les sessions 2001 abordent des thèmes mêlant les champs d'enseignement et de recherche, tels que les sciences de la vie, le droit, les lettres et les sciences humaines, les sciences politiques, les technologies de l'information et de la communication, l'histoire, la sociologie, l'anthropologie et la psychologie.

5. Vers une amélioration de l'accueil des étudiants étrangers

Au cours des dernières années, de nombreuses mesures ont été introduites en vue d'améliorer les conditions d'accueil des étudiants étrangers en France. Ces mesures ont notamment porté :

- sur l'amélioration des conditions d'attribution des visas et des titres de séjour pour les étudiants étrangers, ainsi que sur l'élargissement de leurs possibilités d'accès à des emplois à temps partiel en cours de cursus ;

- sur la mise en place de nouveaux dispositifs de bourses de haut niveau dans le cadre du programme Eiffel (300 nouvelles bourses par an, 900 en nombre cumulé pour un budget de l'ordre de 15 millions d'euros) ;

- sur la création de l'Agence Edufrance qui se consacre, comme il a été vu, à la promotion de l'offre française d'enseignement supérieur à l'étranger et qui assure des prestations d'accueil spécifiques pour certains étudiants étrangers.

a) Les propositions du rapport Cohen

A la suite de la mission qui lui a été confiée, le professeur Elie Cohen, ancien président de l'université de Dauphine, a proposé cinquante mesures destinées à améliorer l'accueil des étudiants étrangers. Les propositions s'articulent autour de quatre priorités :

- la première vise à inciter les établissements à formuler une politique de développement de leurs actions internationales et à adopter des mesures d'amélioration des conditions d'accueil des étudiants étrangers. Ces mesures portent à la fois sur la définition d'un plan d'action à l'international, la structuration des services chargés de l'accueil des étudiants étrangers et la généralisation des guichets uniques ou des dépôts groupés de demandes de titres de séjour. Le rapport recommande que la déclaration internationale puisse servir de support à la négociation du contrat quadriennal, non seulement entre les établissements et le ministère de l'éducation nationale, mais également avec le ministère des affaires étrangères. Enfin, le rapport souligne la nécessité de la mise en place d'un système d'information interne aux établissements permettant le suivi des réalisations en matière de mobilité ;

- la deuxième priorité vise à mettre en place, ou à renforcer, les instruments d'information, de coordination, d'orientation et d'évaluation concernant les politiques d'accueil des étudiants étrangers ;

- la troisième priorité porte sur l'amélioration de la chaîne de l'accueil. En amont du cursus, elle propose de porter une attention particulière aux procédures de préinscription, notamment dans le cas des élèves des lycées français de l'étranger, dont les candidatures devraient être traitées de façon plus rapide. A cet égard, le ministre a indiqué à la commission que ces élèves pourront désormais bénéficier d'une préinscription en temps utile, c'est-à-dire dès le mois de février dans les établissements universitaires français. En cours de cursus, les préconisations concernent tant les aspects pédagogiques (généralisation des systèmes de crédits, semestrialisation véritable, effort de lisibilité sur la gamme des diplômes, tutorat) que des aspects administratifs (accès plus facile à un emploi à temps partiel). En aval du cursus, les mesures proposées visent à aider les étudiants étrangers à préparer leur retour dans le pays d'origine grâce à une aide à l'élaboration de projets d'activité ;

- la dernière priorité porte sur l'amélioration de l'hébergement des étudiants étrangers. Le rapport recommande notamment qu'un bilan soit réalisé sur les projets inscrits dans le cadre du plan U3M et que des inflexions soient apportées à ce dernier pour traduire dans les faits le caractère prioritaire reconnu à l'amélioration des conditions d'accueil des étudiants étrangers.

b) Des progrès à accomplir

A la rentrée 1999, 159 000 étudiants étrangers s'étaient inscrits dans un établissement d'enseignement supérieur français. Le nombre d'étudiants étrangers inscrits à l'université a progressé de 6 % lors de l'année 1999-2000.

Comparés à leurs homologues français, les étudiants étrangers optent davantage pour les disciplines littéraires, économiques et de santé, au détriment des sciences et des IUT et suivent plus fréquemment des formations de 3 e cycle, alors qu'ils s'orientaient davantage vers les études scientifiques et médicales, et plus encore vers le troisième cycle il y a une quinzaine d'années.

Entre 1985 et 1999, la part des étudiants africains (49 % en 1999 contre 58 % en 1985) et en particulier maghrébins (28 % contre 33 %) s'est réduite au profit des étudiants européens (30 % contre 17 %) ; par ailleurs, la présence des étudiantes étrangères s'est accrue au cours des quinze dernières années, passant de 34 % en 1985 à 51 % en 1999 5( * ) .

En dépit des progrès enregistrés, notre pays reste néanmoins loin derrière les Etats-Unis (560 000), le Royaume-Uni (350 000), l'Allemagne (200 000) même s'il précède encore l'Australie qui a réussi à attirer 110 000 étudiants étrangers en cinq ans.

L'objectif annoncé par le directeur de l'agence Edufrance est de doubler le nombre de ces étudiants en cinq ans. Outre les conséquences en résultant pour le rayonnement de notre université et la présence française dans le monde, un tel objectif représente également un marché évalué à quelque 18 milliards de francs.

6. Des programmes d'échanges européens à développer

On rappellera pour mémoire que plusieurs programmes européens d'échanges concernent l'enseignement supérieur, notamment le volet Erasmus du programme Socrates, qui a pour objet de développer la mobilité des étudiants et la coopération entre les universités européennes.

Par ailleurs, le programme Tempus apporte un soutien au développement de l'enseignement supérieur des pays d'Europe centrale, tandis que le programme Leonardo Da Vinci porte sur les échanges en matière de formation professionnelle.

En dépit du développement de ces programmes, seuls quelque 17 000 étudiants français font le choix d'étudier chaque année, pendant un semestre ou deux, dans une université européenne.

On notera que le bénéfice d'une allocation Erasmus conduit à reconnaître par l'université d'origine la période d'étude effectuée dans un établissement d'un autre pays de l'Union et que les étudiants bénéficiaires sont dispensés des frais de scolarité dans leur établissement d'accueil : le montant moyen de l'allocation mensuelle est de l'ordre de 820 francs et le ministère de l'éducation nationale complète l'aide communautaire par des crédits qui ne représentaient que 20 millions de francs dans la loi de finances pour 2001, ce qui reste dérisoire.

Les principaux pays de destination pour des étudiants français sont le Royaume-Uni (37 %), l'Espagne (18 %) et l'Allemagne (16 %).

Votre commission ne peut que souhaiter que la mise en place de bourses européennes de mobilité et la mise en oeuvre des futurs diplômes à modules capitalisables contribuent à renforcer ces échanges européens au bénéfice de nos étudiants.

B. UNE NÉCESSAIRE MODERNISATION DES UNIVERSITÉS

L'adaptation de notre système universitaire aux réalités d'aujourd'hui passe nécessairement par une modernisation de leur gestion, le développement de leur autonomie et l'évaluation des établissements.

1. Des responsabilités à développer

a) Une gestion en cours de modernisation

On rappellera que la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur confère aux universités la personnalité morale de droit public et une autonomie pédagogique et scientifique, administrative et financière.

Dix ans après, le décret du 14 janvier 1994 a permis de mettre en place une nouvelle réglementation budgétaire, financière et comptable tendant notamment à réaffirmer le rôle du président de l'université, ordonnateur principal et du conseil d'administration dans la gestion des établissements, dont le budget est par ailleurs complété par un budget de gestion.

Dans le même sens, la refonte des instructions relative à la comptabilité des établissements avait pour objectif de rendre plus lisibles les comptes des universités, notamment en matière d'engagement et d'amortissement et de permettre de créer des services d'activités industrielles et commerciales, en application de la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche.

b) Une autonomie qui reste limitée

La politique menée depuis 1997 vise à renforcer l'autonomie et la responsabilité des universités et de leurs présidents dans le respect des diplômes nationaux, à développer une instance compétente pour la carrière des enseignants-chercheurs et à mieux évaluer les diplômes et la recherche. L'accroissement de l'autonomie des établissements rejoint d'ailleurs la demande formulée par la conférence des présidents d'université (C.P.U.) à son colloque de Lille en mars 2001, dont les suggestions ont recueilli un accord de principe du ministre dans plusieurs domaines.

(1) La gestion des personnels

Une des premières mesures mise en oeuvre dès décembre 1997 a consisté à modifier la procédure de recrutement des enseignants chercheurs, en redonnant le dernier mot aux établissements. Cette mesure s'ajoute à la détermination au niveau de l'établissement de la moitié des contingents de promotion et à la déconcentration vers les établissements d'actes de gestion (ATER, assistants, enseignants associés). En matière indemnitaire, le nouveau régime des primes pédagogiques instaure la détermination des bénéficiaires au niveau de l'établissement et la possibilité de substitution entre primes et décharges, comme c'est déjà le cas concernant les primes pour charges administratives.

Cette déconcentration a également touché les personnels non enseignants avec la création de la commission paritaire d'établissement en 1999.

(2) Le développement des liens avec le monde économique

La loi du 12 juillet 1999 sur la recherche et l'innovation a facilité les conditions de création de structures favorisant les liens avec le monde économique : assouplissement des créations de GIP-filiales et possibilité de créer les services d'activités industrielles et commerciales. Par ailleurs, le décret du 1er août 2000 fixant les conditions dans lesquelles les établissements publics d'enseignement supérieur peuvent transiger et recourir à l'arbitrage, pris en application de l'article 7 de ladite loi, autorise les établissements à transiger afin de mettre fin aux litiges de toute nature les opposant à d'autres personnes publiques privées. L'instauration de ces procédures permet de prévenir certains litiges et de régler le contentieux de manière plus rapide.

(3) Le rôle du contrat d'établissement

Le contrat d'établissement constitue l'instrument essentiel de cohérence entre les projets des établissements et les objectifs nationaux. Depuis 1997, sont incluses dans le contrat d'établissement, les formations doctorales, les relations avec la totalité des organismes de recherche (et non plus seulement celles avec le CNRS) et l'ensemble de la gestion patrimoniale. Une importance particulière est accordée à l'offre de formation, à la gestion prévisionnelle des emplois et des personnels et au développement de l'évaluation des contrats.

(4) Une autonomie domaniale

La responsabilisation des universités touche également le secteur domanial, tant dans les domaines de la maintenance et la sécurité que dans celui des constructions :

- les crédits de maintenance sont alloués aux établissements dans le cadre de leur contrat quadriennal avec l'Etat, ce qui favorise une approche globale des besoins et des travaux à réaliser. Le ministère incite les établissements, lors de la préparation du contrat, à élaborer un schéma directeur de maintenance ;

- la répartition des crédits de mise en sécurité (plan sécurité 2000-2006) s'est effectuée sur la base de schémas directeurs de mise en sécurité que les établissements ont dû élaborer en définissant leurs besoins et un échéancier prévisionnel de travaux. Le montant de l'enveloppe allouée à chaque établissement résulte d'une négociation qui a été conduite par les recteurs avec les présidents d'université et qui a également permis de déterminer la participation propre des établissements ;

- les établissements sont invités à adopter une gestion informatisée de leur patrimoine et peuvent à ce titre recevoir un soutien financier du ministère dans le cadre des négociations contractuelles ;

- en matière de construction, les établissements, depuis 1990, peuvent s'ils le souhaitent exercer la maîtrise d'ouvrage de leurs opérations.

c) Un développement souhaitable des relations avec les collectivités territoriales et de la décentralisation

La procédure des CPER, particulièrement depuis le plan Université 2000, a permis d'instituer un partenariat avec les collectivités territoriales, notamment les régions. Le dernier contrat de plan 2000-2006 dans le cadre du schéma U3M en témoigne par l'importance de son montant, par la nature des activités soutenues et par l'implication des collectivités territoriales, notamment la Ville de Paris et la Région Île-de-France qui ont consenti un effort important.

D'une manière générale ce partenariat illustre, comme il a été vu plus haut, le rôle de l'enseignement supérieur et de la recherche, dans le développement économique et urbain du territoire.

S'agissant en revanche du transfert du patrimoine universitaire aux régions, qui a été proposé par le rapport de la commission pour l'avenir de la décentralisation, remis par M. Pierre Mauroy au Premier ministre le 17 octobre 2000, cette option n'a pas été retenue par le ministère.

Votre commission rappellera que le rapport Mauroy, outre la mise à disposition des personnels IATOS aux collectivités territoriales et une représentation des régions aux conseils d'administration des universités, préconisait de transférer aux régions la construction et l'entretien des établissements d'enseignement supérieur, l'Etat conservant la maîtrise de l'implantation des universités, du contenu des enseignements, de la responsabilité des personnels enseignants, des programmes et des diplômes nationaux.

Pour leur part, les présidents d'université ont souhaité que s'instaure progressivement la dévolution du patrimoine aux établissements, afin de donner aux établissements les droits et obligations du propriétaire.

Tout en prenant acte des évolutions et des progrès enregistrés pour adapter l'université aux réalités du moment et pour accroître les responsabilités des établissements, votre commission considère que ces efforts trop timides doivent être poursuivis, et que la véritable garantie de l'efficacité de notre enseignement supérieur passe d'abord par le renforcement de l'autonomie des universités, c'est-à-dire la maîtrise de leurs moyens, y compris des ressources humaines. Cet objectif suppose, en contrepartie, une véritable évaluation des établissements d'enseignement supérieur et de leurs formations.

2. La nécessité d'une véritable évaluation des universités

L'autonomie des universités doit s'accompagner d'une véritable évaluation des résultats des établissements, notamment dans la perspective de l'élaboration des contrats quadriennaux passés entre ces derniers et le ministère.

Force est de constater que cette évaluation est aujourd'hui embryonnaire et que les moyens consacrés à cette action sont dérisoires, notamment par le biais du comité national d'évaluation (CNE) et de l'IGAEN, qui est pourtant chargée, depuis la loi de 1984 sur l'enseignement supérieur, d'une mission générale d'évaluation, et notamment des formations.

Un nouvel élan devrait être donné à l'évaluation à titre expérimental pour les contrats quadriennaux couvrant la période 2003-2006, qui devraient être évalués par le CNE et l'inspection générale avant leur renégociation ; par ailleurs, l'évaluation des formations, qui a été étendue aux écoles d'ingénieurs en 1998, devrait être étendue aux IUT.

Devant la commission, le ministre a indiqué que le CNE serait profondément rénové, en s'ouvrant notamment à des personnalités étrangères, et que l'autonomie des universités supposait en retour une véritable évaluation dans le cadre d'une politique nationale, la conférence des présidents d'université souhaitant par ailleurs que l'évaluation soit partagée sur la base d'indicateurs fournis par les établissements.

Votre commission considère que ces efforts doivent être poursuivis, non pour établir un classement nécessairement controversé des universités, comme en témoignent les réactions qui ont suivi la publication de l'étude de la DPD sur les chances de réussite des étudiants des premiers cycles dans chacune des universités françaises, mais pour apprécier la véritable « valeur ajoutée » de chaque établissement, en termes de formations dispensées, un tel contrôle étant la contrepartie naturelle des crédits publics qui sont octroyés à chaque université.

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