N° 96
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001
Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2000 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME II
SANTÉ
Par M. Louis BOYER,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Jean-Yves Autexier, Paul Blanc, Claire-Lise Campion, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Alain Hethener, Claude Huriet, André Jourdain, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jacques Machet, Max Marest, Georges Mouly, Roland Muzeau, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2585 , 2624 à 2629 et T.A. 570
Sénat : 91 et 92 (annexe n° 18 ) (2000-2001)
Lois de finances . |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Dans un contexte marqué par le développement de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) et par une inquiétante évolution des comportements vis-à-vis du SIDA, les dépenses de santé publique et d'offre de soins auraient dû constituer, pour le Gouvernement, une véritable priorité.
Ce n'est malheureusement pas le cas. Au sein du budget de l'emploi et de la solidarité, le budget de la santé s'élève, pour 2001, à 3,8 milliards de francs, en diminution de 200 millions de francs, soit 5 %, par rapport à 2000.
Ces crédits se répartissent en deux agrégats : l'agrégat " politique de santé publique " 1 ( * ) , qui reçoit 2,307 milliards de francs, et l'agrégat " offre de soins ", auquel sont affectés 1,484 milliard de francs.
Le premier agrégat rassemble les chapitres consacrés à la lutte contre les pratiques addictives et contre le SIDA, les crédits de prévention ainsi que les subventions aux agences et institut de sécurité et de veille sanitaire et à l'Etablissement français des greffes.
Le second agrégat " offre de soins " rassemble les crédits destinés aux Agences régionales de l'hospitalisation, au Fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers, ainsi que les crédits destinés à la formation des professionnels de santé.
L'agrégat politique de santé publique verra ses dépenses diminuer de 5,9 % le faisant passer de 2,7 à 2,4 % du budget de la santé et de la solidarité. Quant à l'agrégat " offre de soins ", il voit ses crédits diminuer de 3,6 %, passant de 1,7 à 1,6 % des dépenses du ministère.
Ce budget témoigne à l'évidence d'une absence totale d'ambition en matière de santé publique et de restructurations de l'offre de soins.
Ce constat a conduit votre commission à émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la santé pour 2001.
I. LES CRÉDITS AFFECTÉS AUX POLITIQUES DE SANTÉ PUBLIQUE TÉMOIGNENT D'UNE ABSENCE D'AMBITION
A. LA VEILLE ET LA SÉCURITÉ SANITAIRES : UN BUDGET DÉCEVANT
Dans son intervention devant notre commission, le 21 novembre 2000, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'Emploi et de la Solidarité, a mis l'accent sur la priorité que constituaient pour le Gouvernement la sécurité et la veille sanitaires.
Cette priorité ne se retrouve cependant pas dans ce budget, qui témoigne d'un net relâchement de l'effort poursuivi depuis plusieurs années afin de doter les agences des moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs missions.
Ce budget prévoit en effet pour les agences et l'Institut de veille sanitaire soit des diminutions de subventions, soit des augmentations symboliques.
Le Gouvernement explique qu'il a entendu " privilégier l'affectation de ressources propres par rapport à une augmentation des subventions " ou que " le niveau du fonds de roulement de certains établissements justifie une stabilisation de la subvention malgré le développement des activités ".
Les crédits consacrés aux établissements nationaux à caractère sanitaire (chapitre 36-81) diminuent ainsi de 24,3 millions de francs (- 4,9 %) pour atteindre 471 millions de francs en 2001. Les évolutions sont cependant différenciées selon les établissements.
Ainsi, la subvention à l'Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI) reste stable à 84,7 millions de francs.
Même stabilité pour la subvention à l'Etablissement français des greffes (EFG) qui s'élève en 2001, comme en 2000, à 28,1 millions de francs.
Le budget de l'Etablissement français des greffes, conformément à la loi du 29 juillet 1994, provient en effet d'une subvention de l'Etat et d'une dotation de l'assurance maladie. La loi a prévu cependant la possibilité pour l'établissement de recevoir " des taxes et des redevances créées à son bénéfice " ainsi que " des produits divers, dons et legs ".
Le budget de l'Etablissement français des greffes s'élève en 2000 à 88 millions de francs dont 28,1 millions de francs de subvention de l'Etat et 56,2 millions de francs de subvention de l'assurance maladie. L'effectif de cet établissement est de 126 personnes. Depuis 1997, le budget et les effectifs de l'établissement ont évolué de la façon suivante :
EFG |
Montant du budget (MF) |
Effectifs |
1997 |
63,24 |
90 |
1998 |
68,77 |
100 |
1999 |
80,43 |
107 |
2000 |
88,003 |
126 |
Conformément aux dispositions du contrat d'objectifs et de moyens, le montant du budget de l'EFG sera maintenu à l'identique en 2001. Des créations d'emplois sont cependant envisagées pour accompagner, d'une part, l'actualisation du schéma directeur informatique de l'établissement et, d'autre part, la mise en oeuvre du contrat d'objectifs et de moyens.
Pour sa part, l'Agence française du sang, créée en 1993, disparaîtra en 2001 au profit de l'Etablissement français du sang (EFS).
En effet, la loi du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et au contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme a notamment prévu un dispositif portant réorganisation du service public transfusionnel. Cette loi porte création d'un établissement public opérateur unique de la transfusion sanguine qui se substitue à l'ensemble des organismes du secteur transfusionnel. L'Etablissement français du sang (EFS) a été créé le 1 er janvier 2000, date de la nomination par décret du président de son conseil d'administration.
Aux termes de la loi, l'EFS " veille à la satisfaction des besoins en matière de produits sanguins labiles et à l'adaptation de l'activité transfusionnelle aux évolutions médicales, scientifiques et technologiques, dans le respect des principes éthiques. Il organise sur l'ensemble du territoire national les activités de collecte du sang, de préparation et de qualification des produits sanguins labiles, ainsi que leur distribution aux établissements de santé. "
La suppression en 2001 des crédits destinés à l'Agence française du sang est la dernière étape d'une réforme qui a vu la transformation de tous les établissements de transfusion sanguine de structures autonomes en services de l'EFS.
Subventions aux établissements nationaux à caractère sanitaire (chapitre 36-81)
(en millions de francs)
2000 |
PLF 2001 |
Evolution |
|
Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) |
174,5 |
171,7 |
- 1,6 % |
Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - recherche |
0,8 |
1 |
+ 25 % |
Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) |
22,8 |
27 |
+ 18% |
Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) |
- |
17 |
- |
Agence française du sang |
29,7 |
- |
- |
Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI) |
84,7 |
84,7 |
- |
Etablissement français des greffes (EFG) |
28,1 |
28,1 |
- |
Institut de veille sanitaire (InVS) |
101,1 |
103,5 |
+ 2,3 % |
Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) |
53,5 |
38 |
- 29 % |
Total |
495,2 |
471 |
- 4,9 % |
Les situations respectives de l'AFSAPS, de l'AFFSA et de l'InVS méritent un examen plus approfondi.
1. L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) : vers un désengagement financier de l'Etat ?
En termes de moyens humains et financiers, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a été constituée sur la base de ceux dont était dotée l'Agence du médicament, des moyens complémentaires devant permettre d'assurer les nouveaux champs de compétence selon une montée en charge de ces moyens prévue à horizon 2002.
Les moyens humains dont disposait l'Agence du médicament pour les compétences qui lui étaient confiées en matière de médicament et de réactif de laboratoire s'établissaient à 632 emplois.
Pour l'année 2000, l'effectif budgétaire de l'AFSSAPS s'établit à 843 emplois.
Agence française de sécurité
sanitaire des produits de santé :
Les autorisations de mise sur le marché (AMM) de médicaments sont soumises à délais pour les dossiers nouveaux, les demandes pour dossiers allégés et les demandes pour dossiers complets. Selon l'AFSSAPS, un effort particulier a été réalisé pour diminuer le délai d'octroi des AMM nationales et le ramener à des valeurs proches de celles fixées pour les procédures européennes de reconnaissance mutuelle. Les délais légaux français sont de 120 jours à compter de la date de présentation du dossier complet, délai qui peut être prorogé une fois de 90 jours. En 1999, les moyens mis en oeuvre ont permis de réduire le délai moyen observé pour l'évaluation des nouvelles demandes d'AMM à 133 jours contre 220 en 1998. Et sur les 7,5 premiers mois de l'année 2000, il a été encore réduit à 116 jours (111 pour les dossiers allégés et 130 pour les dossiers complets) qui correspond à l'objectif fixé. L'effort pour respecter le délai d'octroi des AMM dans le cadre des procédures européennes centralisées de 210 jours a été maintenu en 1999 comme lors des années précédentes et lors des 7,5 premiers mois de l'année 2000. Dans les deux cas, les nombres de demandes et d'octrois d'AMM ont augmenté sensiblement. Le nombre de dossiers de nouvelles demandes est passé de 847 en 1998 à 950 en 1999 et a été estimé à plus de 1.000 pour 2000 eu égard aux demandes constatées au cours des 8 premiers mois de 2000. Dans le cadre de la reconnaissance mutuelle, il était de 91 en 1998, est passé à 101 en 1999 et passera à 110 probablement en 2000. Enfin la proportion de dossiers pour laquelle la France est l'Etat de référence a été de 22 % en 1999 pour 17 % en 1998. Quant aux délais des dossiers de demandes de modifications d'autorisations de mise sur le marché de médicaments, dites " variations ", ils sont en légère amélioration pour le thérapeutique (20 % des dossiers), 149 jours en 1999 ramené à 137 jours pour les extensions d'indication au cours des 7,5 premiers mois 2000 et 132 jours en 1999 délai ramené à 129 jours pour les variations thérapeutiques au cours des 7,5 premiers mois 2000. Par contre, ils se dégradent fortement pour les variations pharmaceutiques (80 % des dossiers reçus) 4 mois ou 120 jours en 1999 passé à 6 mois ou 180 jours à la fin de l'été 2000. Globalement toutes variations confondues, le nombre des variations déposées à l'agence française a crû de plus de 40 % en 1999 par rapport à 1998 et va dépasser globalement le nombre de 8.000 pour l'année 2000. Ceci explique la durée des délais de l'ensemble comparativement à ceux de l'Europe et la dégradation des délais pour l'évaluation de la qualité pharmaceutique des dossiers de demandes de modification d'AMM. L'absorption de cette augmentation et le retour au strict respect des délais pour toutes les demandes de modification d'AMM est l'objectif pour 2001. |
Les crédits de la santé pour 2001 témoignent d'un début de désengagement de l'Etat du financement de l'AFFSAPS.
Ainsi, l'agence recevra en 2001 une subvention de l'Etat de 171 millions de francs, soit 3 millions de francs de moins que celle qui avait été accordée en 2000.
Le Gouvernement justifie cette diminution de subvention par l'affectation de nouvelles ressources propres : l'article 55 du projet de loi crée ainsi une redevance au profit de l'AFSSAPS pour l'inscription des dispositifs médicaux sur la liste prévue à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, c'est-à-dire pour le remboursement par l'assurance maladie. Le barème de cette redevance serait fixé par décret dans la limite de 30.000 francs. Le rendement attendu devrait atteindre 14,7 millions de francs en année pleine et 7,4 millions de francs pour la première année.
En outre, l'Assemblée nationale a adopté un article additionnel 55 bis , qui résulte d'un amendement présenté par le Gouvernement, instituant une taxe annuelle sur les dispositifs médicaux, assise sur le chiffre d'affaires, destinée à l'AFSSAPS. Le taux de cette taxe serait fixé par décret, entre un minimum de 0,15 % et un maximum de 0,4 % du chiffre d'affaires annuel hors taxes réalisé. Selon l'exposé des motifs de cet amendement, le rendement moyen en année pleine de cette taxe serait de l'ordre de 35 à 38 millions de francs.
Votre commission était favorable à ce que de nouvelles ressources soient affectées à l'AFSSAPS. Elle avait d'ailleurs fait remarquer qu'il n'était pas normal que seule l'industrie pharmaceutique contribue au financement de l'agence alors que cette dernière est désormais en charge de tous les produits de santé et des produits cosmétiques.
Toutefois, votre commission a toujours considéré que ces ressources propres ne pouvaient servir de prétexte à un désengagement financier de l'Etat.
Les subventions de l'Etat sont désormais très minoritaires dans le financement de l'agence : ainsi, en 2000, sur un budget de 506 millions de francs, elles ne représentent plus que 36 % des ressources de l'agence. Cette part devrait encore diminuer en 2001 compte tenu des nouvelles recettes affectées et de la diminution de la subvention budgétaire.
Le législateur avait souhaité, au moment de la création de l'agence, que la part des subventions budgétaires ne soit pas inférieure à 40 % du budget de l'agence.
Votre commission s'inquiète, dans ces conditions, des conséquences que pourrait avoir un désengagement financier de l'Etat sur l'indépendance de l'agence.
2. L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) : un financement encore essentiellement fondé sur la subvention du ministère de l'Agriculture
L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) a été mise en place sur le fondement du décret du 26 mars 1999, le 1 er avril 1999. Outre les missions nouvelles qui lui sont confiées par la loi du 1 er juillet 1998, elle s'est substituée au CNEVA, établissement public sous tutelle du ministère de l'Agriculture, dont elle a repris les moyens, tant ceux des laboratoires que ceux de l'Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV).
En 2000, les effectifs de l'établissement sont de 813 personnes dont seulement 565 sont embauchées sur des emplois budgétaires, le reste du personnel correspondant soit à des mises à disposition (135) par divers organismes (ministère de l'Agriculture, collectivités territoriales...), soit à des emplois sur conventions (61) ou à des contrats emploi solidarité (33).
L'AFSSA a repris en son sein les 12 laboratoires de l'ex-CNEVA et le laboratoire national d'hydrologie qui a été rattaché à l'occasion de la création de l'agence. Les modalités pratiques de mise à disposition de l'AFSSA des laboratoires des services de l'Etat, telle qu'elle est prévue par l'article L. 794-1 du code de la santé publique, n'ont pas été définies pour d'autres laboratoires, mais un protocole entre les trois ministères de tutelle et l'AFSSA organisant la transmission des données, dont celles recueillies par les laboratoires publics, permet néanmoins à l'agence d'exercer ses missions.
Outre la poursuite des activités de recherche et d'appui technique conduites dans les laboratoires de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, dans la continuité des programmes engagés par l'ex-CNEVA, l'AFSSA développe de nouvelles thématiques liées aux missions d'évaluation qui lui sont confiées, les projets de recherche scientifique qui seront proposés pour l'année 2001 et présentés au Conseil scientifique de l'établissement, ayant été conçus par les laboratoires en étroite relation avec les unités de la Direction de l'évaluation des risques nutritionnels et sanitaires.
Par ailleurs, l'agence a été très fréquemment saisie par les ministères de tutelle, soit dans le cadre de dossiers d'autorisations de produits (additifs, arômes...), soit pour avis sur des textes réglementaires, soit pour l'évaluation de risques particuliers notamment en situation de crise (Coca-cola, dioxines, ESB...). Au total, en 1999, 180 avis ont été rendus par l'AFSSA dont 136 au titre des instances préexistantes dont le secrétariat est assuré par l'agence.
Comme prévu par l'article L. 794-2 du code de la santé publique, l'AFSSA a rendu compte de son activité dans son premier rapport d'activité, approuvé par le Conseil d'administration le 9 mai 2000, transmis au Gouvernement et au Parlement et rendu public en juillet 2000.
Le financement de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) gagnerait à être complété.
Celui-ci ne comprend aujourd'hui, en pratique, que des subventions publiques pour sa mission d'évaluation des risques sanitaires des aliments. Si l'article L. 794-7 du code de la santé publique tel qu'il résulte de la loi du 1 er juillet 1998 dispose que les ressources de l'agence sont constituées par des subventions des collectivités publiques, par des taxes prévues à son bénéfice, par des redevances pour services rendus, par des produits divers, dons, legs et emprunts, force est de constater qu'aucune nouvelle taxe n'a été prévue à son bénéfice, et aucune taxe existante n'a été affectée, même en partie, à l'agence, à l'exception des redevances liées à l'activité de l'agence du médicament vétérinaire.
Sur ce point, la réponse du Gouvernement au questionnaire budgétaire reste très vague :
" Si, à ce jour, le principe de ressources propres à l'AFSSA sous forme de redevances ou de prélèvements obligatoires, n'est pas arrêté, il apparaît donc d'ores et déjà souhaitable de réfléchir à de nouvelles mesures budgétaires à la lumière de l'évolution des activités et des recettes de l'agence et, plus généralement, de la nécessité d'assurer la pérennité et l'indépendance de son financement. "
L'agence, pour ses activités non vétérinaires, doit donc négocier l'intégralité de ses ressources avec les administrations centrales de la santé, de l'agriculture et de l'économie et des finances dont on a vu, au cours de la discussion de la proposition de loi sur la veille et la sécurité sanitaires, que leur première préoccupation n'était pas toujours de favoriser le développement de l'agence.
En 2001, le budget de l'AFSSA serait en augmentation de 15 % et s'établirait à 400 millions de francs, dont 281 millions de francs de subventions, soit 70 % des ressources de l'agence. Ces subventions proviennent à 84 % du ministère de l'Agriculture.
En 2001, la subvention du ministère de la Santé augmenterait de 4,2 millions de francs pour atteindre 27 millions de francs ; elle ne représenterait toutefois que 6 % du budget de l'agence.
Chacun conviendra qu'il s'agit là d'un effort modeste eu égard aux enjeux et à une actualité brûlante...
La coopération entre l'AFFSAPS et l'AFFSA La coopération entre l'Afssa et l'Afssaps (Direction de l'évaluation des médicaments et produits biologiques - DEMEB) a surtout porté en 1999 sur des questions de sécurité sanitaire relatives aux phtalates et à la dioxine. Dans le cas des phtalates, une réunion commune Afssa-Afssaps-Industriels et autres organismes concernés a été organisée. Les acteurs principaux étaient pour l'Afssaps, le responsable des vigilances et pour l'AFSSA, un toxicologue. Sur la question de la dioxine, les échanges ont essentiellement portés sur un échange de données relatives à la présence de dioxines dans les kaolins. Ces kaolins étant utilisés aussi bien comme additifs dans l'alimentation animale que comme excipients pharmaceutiques ou composants en cosmétologie. Enfin pour la TSE (Transmissible Spongiform encephalopathy), concernant les produits d'origine animale et plus particulièrement ceux d'origine bovine (constitués pour l'essentiel de lactose, gélatine, dérivés du suif), une étude conduite par l'Afssa a pris en compte les mesures appliquées par l'Afssaps aux produits de santé, c'est-à-dire l'application de la note explicative européenne et des décisions visant à interdire l'utilisation de matériel à risques spécifiés (MRS). Depuis la création de l'Afssa et la mise en place d'une coordination des vigilances à l'Afssaps, tous les problèmes de sécurité sanitaire sont évalués en collaboration. C'est ainsi que les dangers et les risques des phtalates, de la dioxine, de l'aluminium ont fait l'objet d'expertise en commun et d'échange des données (avec l'Afssa et les représentants de l'Environnement en tant que de besoin). Dans le cas de l'aluminium, une réunion d'expert a été organisée par l'Afssaps et l'Afssa et a permis de faire le point sur toutes les données disponibles sur la toxicité de l'aluminium et les risques en fonction des différentes sources alimentaires, environnementales et sanitaires. L'Afssaps a également été présente dans le groupe " Codex Alimentarius " piloté par la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes). Ce groupe auquel participe l'Afssa fait suite au groupe mis en place par le comité scientifique de l'Agence du médicament, sur les produits à allégations santé. Il est piloté par le Professeur Cano, Président du conseil d'administration de l'Affsaps, et le Professeur Ambroise Martin. Ce groupe a pour mission d'élaborer le chapitre du Codex Alimentarius faisant référence aux allégations-santé. A la demande de la DGS (Direction générale de la santé), l'Afssaps a également participé au groupe de travail du CSHF sur les " Compléments alimentaires " et leur consommation, dont le but était de piloter une enquête réalisée par le CREDOC. Le département d'enquête sur la consommation alimentaire du CREDOC fait désormais partie de l'Afssa. |
3. L'Institut de veille sanitaire : des moyens en faible progression
Les activités de l'Institut de veille sanitaire (InVS), troisième institution créée par la loi du 1 er juillet 1998, s'inscrivent avant tout dans la continuité de celles déjà développées par le Réseau national de santé publique (RNSP). Cependant la loi du 1 er juillet 1998 a confié à l'InVS un champ de compétence plus large puisque celui-ci est chargé d'effectuer la surveillance et l'observation permanente de l'état de santé de la population, de rechercher les causes de toute modification de celui-ci et d'alerter les pouvoirs publics en cas de menace.
L'élaboration du contrat d'objectifs et de moyens pour les années 2001-2003 permet de regrouper les programmes en cinq objectifs principaux :
• Renforcer la capacité d'alerte et d'intervention en situation d'urgence ;
• Renforcer l'expertise en matière de surveillance et d'évaluation de risque ;
• Structurer la veille prospective sur les risques sanitaires ;
• Développer l'action internationale ;
• Promouvoir la diffusion des connaissances et des informations.
L'Institut a connu une rapide montée en charge : ses effectifs sont passés de 130 personnes en 1999 à 187 en 2000 ; parallèlement, son budget s'élevait à 145 millions de francs en 2000, en augmentation de 25 % par rapport à 1999.
La subvention du ministère de la Santé s'établirait en 2001 à 103,4 millions de francs, en hausse de seulement 2,2 millions de francs par rapport à 2000. Là encore, il s'agit d'un effort bien modeste eu égard aux enjeux.
4. L'Agence française de sécurité sanitaire environnementale : un organisme aux contours encore flous
Le budget 2001 comporte également la création d'un article, doté de 17 millions de francs, destiné à permettre la naissance de la nouvelle agence de sécurité sanitaire environnementale annoncée par le Premier ministre à l'issue des Etats généraux de la santé du 30 juin 1999.
Cette dotation figure vraisemblablement à titre de provision dans la mesure où les contours de cet établissement restent encore assez flous.
En effet, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture le 25 avril 2000 une proposition de loi créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFFSE).
Le schéma retenu à l'issue du vote de l'Assemblée nationale est une agence d'expertise et d'évaluation des risques sanitaires environnementaux, placée sous la double tutelle des ministres chargés de la santé et de l'environnement, " tête de réseau " et coordonnatrice des organismes publics intervenant dans ce domaine.
Lors de sa séance du 19 septembre 2000, votre commission a examiné le texte adopté par l'Assemblée nationale.
Elle s'est tout d'abord félicitée que l'Assemblée nationale ait pris l'initiative, avec l'accord du Gouvernement, d'adopter une proposition de loi créant une agence française de sécurité sanitaire environnementale. Ce texte s'inscrivait dans la logique des travaux conduits par le Sénat, qui ont permis, dans le cadre de la loi du 1 er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme, de mettre en place l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et l'Institut de veille sanitaire (InVS).
Votre commission était tentée de voir un signe encourageant dans le fait que la proposition de loi avait été adoptée à l'unanimité par les députés présents le 25 avril dernier.
Toutefois, après avoir examiné le nouvel organisme au regard de trois critères -la nécessité d'une telle agence, l'ampleur et les difficultés de la mission qui lui est assignée et l'efficacité des moyens qui lui seraient nécessaires-, votre commission a partagé le sentiment de déception éprouvé par le rapporteur, M. Claude Huriet.
La nécessité de la création d'une agence chargée d'évaluer les risques sanitaires environnementaux n'est pas contestable parce que l'attente de l'opinion est très forte pour disposer d'une meilleure information sur les dossiers des atteintes à l'environnement. Elle attend qu'en tout domaine soit renforcée " la sécurité sanitaire " conformément aux priorités annoncées par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 19 juin 1997.
Le système français d'analyse des risques sanitaires environnementaux repose aujourd'hui sur le foisonnement, le cloisonnement et la dispersion de multiples organismes, conseils et laboratoires, peu lisibles et dont le rapport coût-efficacité est faible.
Il reste que la difficulté d'évaluer les risques est encore plus grande en matière environnementale qu'elle ne l'était en matière de produits de santé ou dans la filière alimentaire : la notion d'environnement est très vaste ; les études épidémiologiques ne permettent pas aisément de discerner la part réelle que jouent les facteurs environnementaux ; les risques encourus sont souvent des risques chroniques mettant en jeu de faibles doses de produits toxiques dont les effets n'apparaissent qu'à long terme.
Face à l'enjeu que représente la sécurité sanitaire environnementale, l'agence que l'Assemblée nationale proposait de créer ressemblait fort à une " coquille vide " aux attributions réduites .
Son champ de compétence, qui n'était pas cerné précisément, ne recouvrait pas explicitement le domaine des radiations et autres risques physiques très sensible dans l'opinion publique.
L'agence n'était pas une " agence de moyens " mais une simple " agence d'objectifs " chargée " ex nihilo " de mobiliser la capacité d'expertise des organismes existants et d'assurer une meilleure coordination entre eux ; elle ressemble plus à un institut ou un observatoire ou encore au Haut comité scientifique en santé environnementale, dont la création avait été suggérée dans le rapport de M. Aschieri et Mme Grzegrzulka, qu'à une agence d'évaluation au sens de la loi du 1 er juillet 1998.
Enfin, aucune décision n'est prise pour intégrer dans la nouvelle structure des organismes existants.
Plutôt que d'ajouter un nouvel organisme d'expertise, dans un secteur qui en compte déjà beaucoup, votre commission a jugé qu'il apparaissait préférable de rechercher les moyens d'engager, dès maintenant, une réorganisation du dispositif actuel. Sinon, à quoi bon légiférer ?
Votre commission a constaté que pour donner à l'agence un statut digne de ce nom et une capacité d'expertise autonome au moins égale à celles des deux agences existantes, l'alternative était la suivante :
- soit doter l'agence, dès sa création, de moyens humains et budgétaires importants permettant de recruter des experts et des chercheurs de haut niveau ;
- soit créer l'agence à partir d'un " noyau dur " constitué d'établissements publics existants en affirmant son champ de compétence au niveau législatif.
Pour donner à la nouvelle agence de sécurité sanitaire environnementale une existence réelle et non virtuelle, votre commission a proposé d'adopter deux modifications à la proposition de loi :
- préciser dans la loi que la mission d'évaluation porte sur les risques physiques, chimiques ou biologiques liés à l'environnement naturel, du travail et de la vie quotidienne qui résultent notamment de la pollution de l'air, des eaux et des sols et des rayonnements ionisants ou non ionisants ;
- constituer la nouvelle agence par absorption de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) et de l'Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI) dont les compétences sont les plus proches de celles exigées de la nouvelle agence. Cette absorption donnerait lieu au transfert des laboratoires publics nécessaires et serait effectuée dans le respect des garanties statutaires des personnels.
Lors de l'examen de ce texte en séance publique, le 4 octobre 2000, le Sénat a suivi la position de votre commission et a modifié la proposition de loi en conséquence.
Ce texte devrait être examiné par l'Assemblée nationale en deuxième lecture le 12 décembre prochain.
*
* *
Votre rapporteur souhaite, en conclusion de cette analyse sur la veille et la sécurité sanitaire, souligner une nouvelle fois l'application très insuffisante de la loi du 1 er juillet 1998.
Si les mesures nécessaires à l'installation des institutions de veille et de sécurité sanitaires ont bien été prises, la plupart des textes réglementaires relatifs aux règles de sécurité sanitaire applicables aux produits de santé ne sont toujours pas publiés deux ans après la promulgation de la loi. A ce jour, 35 dispositions ne sont toujours pas applicables faute de décret.
Loi n° 98-0535 du 1
er
juillet
1998
relative au renforcement de la veille sanitaire
et du contrôle
de la sécurité sanitaire des produits destinés à
l'homme
Décrets non publiés
Objet du décret |
Articles |
Nature |
Relatif à la préservation de la confidentialité des données transmises à l'IVS |
Art. 2
|
CE |
Relatif aux autres affections iatrogènes dans les établissements de santé |
Art. 4-1
|
CE |
Relatif à la mise en place d'une assurance-qualité de la stérilisation des dispositifs médicaux dans les établissements de santé |
Art. 4-1
|
CE |
Relatif à la nature, au recueil et au signalement des infections nosocomiales et iatrogènes dans les établissements de santé |
Art. 4-II
|
CE |
Fixant les modalités de transmission à l'autorité sanitaire de données individuelles concernant les maladies visées à l'art. L. 3113-1 du CSP |
Art. 4-IV
|
CE |
Saisine de l'AFSSAPS par les associations de patients et d'usagers de la médecine |
Art. 6
|
SI |
Redevance médicaments homéopathiques |
Art. 8-VIII |
SI |
Redevance publicité (y compris visas PP) |
Art. 8-IX |
SI |
Activité privée des anciens agents contractuels de l'AFSSA |
Art. 9
|
CE |
Définition des modalités de l'attestation technique de conformité des dispositifs médicaux aux exigences essentielles |
Art. 14
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SI |
Modalités du contrôle de qualité pour certains dispositifs médicaux |
Art. 14
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SI |
Modalités de déclaration à l'AFSSAPS des fabricants |
Art. 14
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CE |
Catégories de dispositifs sensibles |
Art. 14
|
CE |
Ajout des réactifs utilisés pour les examens d'anatomie et de cytologie pathologiques |
Art. 15
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CE |
Déclaration des établissements de fabrication, d'importation, ou de distribution de réactifs |
Art. 16
|
CE |
Bonnes pratiques de fabrication, d'importation ou de distribution de réactifs |
Art. 16
|
CE |
Autorisation d'importation d'un PSL ou d'une pâte plasmatique |
Art. 18-IV
|
SI |
Autorisation de procédés pour tissus et cellules |
Art. 19-IV
|
CE |
Autorisation d'activité de thérapies génique et cellulaire |
Art. 19-XIV
|
CE |
Autorisations de protocoles d'essais cliniques de thérapies génique et cellulaire |
Art. 19-XV
|
CE |
Condition d'octroi, de suspension ou de retrait de l'autorisation de mise sur le marché des produits thérapeutiques annexes |
Art. 20
|
CE |
Modalités de transmission des informations sur les effets inattendus ou indésirables des produits thérapeutiques annexes |
Art. 20
|
CE |
Déclaration préalable à la mise sur le marché des aliments diététiques destinés à des fins médicales spéciales |
Art. 22
|
CE |
Matières premières à usage pharmaceutique |
Art. 23
|
CE |
Allergènes préparés spécialement pour un seul individu |
Art. 24
|
CE |
Définition des activités privées qu'en raison de leur nature les agents contractuels de l'AFSSAPS ayant cessé leurs activités ne peuvent exercer |
Art. 6
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CE |
Fixation des règles applicables aux contractuels de droit public de l'AFSSAPS |
Art. 6
|
CE |
Conditions dans lesquelles l'AFSSAPS peut attribuer des subventions |
Art. 6
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SI |
Fixation des conditions d'utilisation professionnelle des produits cosmétiques |
Art. 7
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SI |
Fixation des qualifications des différentes catégories des personnels de l'AFSSAPS |
Art. 18
|
CE |
Conditions d'application des dispositions relatives à l'import/export de gamètes |
Art. 19 - XXII
|
CE |
Conditions de la modification ou du retrait de l'agrément des ETS |
Art. 18
|
CE |
Conservation et transformation des tissus et cellules du corps humain à des fins scientifiques |
Art. 19-II
|
CE |
Conditions dans lesquelles les MISP sont habilités et assermentés |
Art. 25
|
CE |
Habilitation à exercer en qualité de médecin de prévention et de médecin du travail |
Art. 28 |
CE |
CE : décret en conseil d'Etat
SI : décret simple
Ces retards sont extrêmement regrettables. Lors de l'audition de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'Emploi et de la Solidarité, le 21 novembre 2000, votre rapporteur a interrogé la ministre sur les raisons d'un tel retard.
Mme Guigou a reconnu que seuls 24 décrets étaient intervenus sur un total de 53 prévus par la loi. Elle a souligné que les textes non encore publiés portaient sur des sujets complexes, qui nécessitaient la consultation des professionnels concernés, et s'est engagée à faire en sorte que la préparation des décrets restant à publier soit accélérée.
* 1 On rappellera que l'essentiel de l'effort en faveur de la santé publique est aujourd'hui financé par l'assurance maladie et se trouve dès lors retracé en loi de financement de la sécurité sociale.