EXAMEN EN COMMISSION
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent avis au cours de sa séance du mercredi 15 novembre 2000.
A la suite de l'exposé de M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis, M. Xavier de Villepin, président, s'est étonné de la nécessité où se trouvait le ministère de la défense de devoir renforcer le recrutement de fonctionnaires pour les personnels civils, alors que les sureffectifs d'ouvriers d'Etat ne sont pas résorbés. Il a déploré la forte détérioration de la disponibilité technique des matériels majeurs de l'armée de terre, qui traduit l'érosion continue des crédits d'équipement des armées. Il s'est interrogé sur les incidences budgétaires pour l'armée de terre du renforcement des capacités européennes de défense.
M. Philippe de Gaulle a demandé des précisions sur le poids financier des opérations extérieures pour l'armée de terre.
M. Robert Del Picchia a demandé si les Nations unies adressaient à la France les remboursements pour sa contribution aux opérations extérieures.
M. Michel Caldaguès a considéré que le poids des opérations extérieures devait être envisagé en termes de moyens, et non seulement de surcoût budgétaire. S'agissant du renforcement des capacités militaires européennes, il s'est demandé si la France serait en mesure d'honorer toutes les contributions qu'elle s'engage à fournir aux diverses organisations, notamment l'OTAN et l'Union européenne.
M. Christian de La Malène s'est inquiété d'une éventuelle suspension anticipée du service national qui viendrait priver les armées de la ressource dont elles ont encore besoin.
En réponse à ces différentes interventions, M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :
- le budget de la défense supporte le coût des sureffectifs d'ouvriers d'Etat et des mises à la retraite anticipée dans les arsenaux, mais doit aussi procéder à des recrutements pour pourvoir les postes de fonctionnaires vacants ;
- les conséquences budgétaires pour la défense de la contribution de la France au renforcement des capacités militaires européennes ne sont pas encore bien évaluées ;
- le surcoût des opérations extérieures représente en 2000 3,3 milliards de francs, dont 2,2 milliards de francs pour l'armée de terre ;
- les remboursements des Nations unies concernant les opérations extérieures sont estimés, pour 2000, à 49 millions de francs ;
- il serait normal que le financement des opérations extérieures provienne du budget général et ne pèse pas exclusivement sur le budget de la défense ;
- l'armée de terre doit encore pouvoir compter sur les 17.000 postes d'appelés prévus pour 2001, ce qui rend nécessaire un bon déroulement des incorporations au cours de l'année prochaine.
Puis la commission a procédé au débat et au vote sur l'ensemble des crédits de la défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001.
M. Xavier de Villepin, président, a tout d'abord indiqué que le projet de loi de finances 2001 pour la défense, fondé sur des dotations globalement reconduites par rapport à l'an passé, relativement favorable en son titre III, demeurait en revanche préoccupant pour les crédits d'équipement du titre V. Depuis 1997, a-t-il rappelé, et hors revue de programmes, ce sont quelque 12 % des dotations prévues pour l'équipement des armées, sur la durée de la loi de programmation, qui manquaient par rapport aux bases sur lesquelles le Parlement s'était prononcé. Le projet de budget 2001 pour la défense, en s'inscrivant aussi, comme l'an passé, dans cette logique, ne permettait aucun rattrapage.
Certes, a-t-il relevé, les dotations du présent projet de loi ne mettent pas en cause la réalisation des commandes et des livraisons de matériels de l'annuité 2001 de la loi de programmation. Les armées se trouvent cependant confrontées à deux types de rigidité du fait de ces contractions budgétaires répétées : d'abord, les commandes globales, fortement mobilisatrices d'autorisations de programme, ensuite, à enveloppe de titre V constante et contrainte, les dotations étant réservées prioritairement aux livraisons et aux commandes d'équipement, des crédits font défaut pour les dépenses d'entretien programmé des matériels entraînant un taux d'indisponibilité et de vieillissement des équipements particulièrement préoccupant.
Pour M. Xavier de Villepin, président, ce budget 2001, vraisemblablement comme celui de l'année prochaine (dernière annuité de l'actuelle programmation), augurait mal d'une loi de programmation 2003-2008 qui sera une loi de fabrication, venant après la présente loi de développement de programmes. En conséquence, les engagements financiers qu'elle comportera devront être significativement augmentés et impérativement tenus.
Enfin, le projet de loi de finances 2001, en ce qu'il n'était pas conforme aux engagements pris en 1998 en matière de ressources pour l'équipement des forces, donnait un mauvais signal à l'égard de nos partenaires européens. Alors que la situation économique et financière témoigne d'une certaine embellie, notre ambition politique en ce domaine n'est pas relayée par un volontarisme budgétaire satisfaisant, à l'inverse, notamment, de ce que font nos partenaires britanniques.
Pour ces raisons, M. Xavier de Villepin, président, a indiqué qu'il se rangerait à l'avis défavorable de la majorité des rapporteurs pour avis.
M. Serge Vinçon a souscrit à l'analyse formulée par M. Xavier de Villepin, président. Il s'est félicité de ce que la professionnalisation, engagée par la présente loi de programmation, se révélait un choix positif. Il s'est dit satisfait de voir que le titre III avait honoré les engagements pris à ce titre, tout en relevant que, désormais, l'amélioration nécessaire de la condition militaire devrait être mieux prise en compte. Il s'est, en revanche, déclaré inquiet des divers " décrochages " constatés au niveau des crédits d'équipement entraînant, notamment, un retard du programme Rafale pénalisant son exportation, ou encore un volontarisme budgétaire pour la défense inférieur à celui de nos partenaires britanniques.
M. Michel Caldaguès a estimé qu'il ne saurait se prononcer en faveur d'un budget qui ne tenait pas compte de ce que le Parlement avait voté. Il décelait là une manière, pour le ministère des finances, de " tricher " sur les crédits de défense. Au surplus, il a estimé que, dans un contexte où la France affichait une ambition mondiale pour l'emploi de nos forces, les ressources financières n'étaient pas à la hauteur de l'objectif recherché.
La commission a alors émis un avis défavorable sur l'ensemble des crédits du ministère de la défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 2001.