B. LE DÉVELOPPEMENT DES ARSENAUX NUCLÉAIRES ET BALISTIQUES EN ASIE ET AU MOYEN-ORIENT

Parmi les puissances militaires reconnues, seule la Chine n'a pas diminué son arsenal nucléaire qui, au contraire, irait plutôt en augmentant, surtout qualitativement. Elle détiendrait aujourd'hui environ 300 têtes nucléaires stratégiques, auxquelles s'ajouteraient 150 têtes tactiques non déployées. L'arsenal chinois comporte trois composantes (aérienne, terrestre et sous-marine), mais repose surtout sur les moyens basés au sol. Les missiles stratégiques Dongfong à propergol solide, d'une portée de 8 000 km, ont été testés avec succès à l'été 1999 et pourraient emporter des charges multiples.

Après les 5 essais nucléaires du mois de mai 1998, qui ont confirmé ses capacités de production de matières nucléaires et de réalisation d'armes, l' Inde semble déterminée à développer un arsenal complet dont la finalité principale est la dissuasion vis-à-vis de la Chine. Elle poursuit la réalisation d'un ambitieux programme de mise au point de missiles balistiques avec le Prithvi et surtout l'Agni, missile stratégique à propulsion solide capable d'emporter une charge de l'ordre d'une tonne sur une distance de 2 500 kilomètres. C'est la dernière version de ce missile, l'Agni -2, qui a été testée en vol en avril 1999.

Le Pakistan a lui aussi fait la démonstration de sa capacité nucléaire militaire en procédant en mai 1998 à des expérimentations souterraines. Il entreprend la réalisation de têtes pour missiles et a testé au mois d'avril 1999, peu après le tir indien, un missile balistique Ghauri, mis au point avec l'aide de la Corée du Nord, d'une portée théorique de 1 500 kilomètres pour une charge utile de 700 kg, ainsi qu'un missile à carburant solide Shaheen, inspiré semble-t-il d'une technologie chinoise, d'une portée théorique de 750 km pour une charge utile d'une tonne.

Le gel des activités nucléaires militaires nord-coréennes, prévu par l'accord cadre signé avec les Etats-Unis en 1994, demeure toujours sujet à interrogations, l'Agence internationale de l'énergie atomique n'étant pas en mesure de vérifier les déclarations des autorités de Pyongyang et d'accéder aux combustibles stockés pour juger de l'état du programme d'accès au plutonium. En revanche, la Corée du Nord est incontestablement devenue en quelques années l'un des acteurs majeurs de la prolifération balistique dans le monde, particulièrement en direction du Moyen-Orient. La Corée du Nord développerait actuellement deux types de missiles balistiques Taepo-Dong dont la portée pourrait être respectivement de 2 000 et 3 500 km, des essais ayant été effectué pendant l'été 1998 puis en juillet 2000. Il faut par ailleurs rappeler que la Corée du Nord n'a pas adhéré à la convention d'interdiction des armes chimiques et dispose de sites de production d'agents chimiques et de munitions chimiques.

L' Iran est soupçonné de vouloir mettre en oeuvre clandestinement un programme nucléaire militaire sous couvert du développement de son industrie nucléaire civile. Les Etats-Unis estiment que ce programme pourrait aboutir à la fabrication d'armes nucléaires dans une dizaine d'années. La " National Intelligence Estimate " américaine rendue partiellement publique fin 1999 évalue comme " probable " l'existence en 2010 d'une menace d'atteinte du territoire des Etats-Unis par un missile à longue portée iranien équipé d'une tête nucléaire. L'Iran nie les intentions qu'on lui prête et met en avant les futurs besoins en énergie du pays pour justifier les investissements considérables qu'il met en oeuvre pour développer son industrie nucléaire, ce malgré d'importantes réserves en pétrole et surtout en gaz naturel.

Si la volonté politique iranienne de développer un programme nucléaire militaire semble moins affirmée depuis le changement de gouvernement en 1997, certaines activités entreprises par l'Atomic Energy Organization of Iran (AEOI) indiquent toutefois que ce pays n'a pas renoncé à son ambition nucléaire militaire. Les contrôles de l'AIEA n'ont toutefois pas permis de détecter des preuves concrètes de l'existence d'un programme nucléaire militaire, mais l'Agence de Vienne ne peut aujourd'hui inspecter que les sites nucléaires déclarés par l'Iran.

L' Irak a vu une partie de ses infrastructures nucléaires détruites par les raids alliés durant la guerre du Golfe et les destructions d'après-guerre ordonnées par l'ONU ont parachevé le démantèlement des installations dédiées au nucléaire militaire. Depuis décembre 1998, les inspections et contrôles sur place de l'AIEA sont interrompus. Le pays possède l'expertise scientifique, technique et humaine pour reprendre rapidement un programme nucléaire militaire. L'AIEA a pu inspecter les sites nucléaires irakiens le 23 janvier 2000 dans le cadre des accords de garanties passés avec Bagdad au titre du traité de non-prolifération nucléaire (TNP). Par ailleurs, le Conseil de sécurité de l'ONU a approuvé le 17 décembre 1999 une nouvelle résolution sur le désarmement de l'Irak (résolution 1284). La Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations-Unies (COCOVINU) créée par cette résolution pour remplacer la Commission spéciale pour le désarmement de l'Irak (UNSCOM) devra reprendre la vérification sur place des installations sensibles irakiennes interrompues fin 1998.

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