Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SER) publiée le 03/04/2025

Question posée en séance publique le 02/04/2025

M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Hervé Gillé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a soixante ans était adoptée une importante loi sur l'eau par laquelle notre pays se dotait d'un modèle ambitieux de gouvernance décentralisée.

Pourtant, aujourd'hui, nous constatons des reculs : le Gouvernement décide de prélèvements sur la trésorerie des agences de l'eau ; l'État demande à ces mêmes agences de financer des actions de la politique agricole commune (PAC) ; le ministre Rebsamen lui-même s'interroge sur leur gouvernance et leur fonctionnement ; le Gouvernement renonce à ses engagements concernant la réforme des redevances, dont l'objet était pourtant de financer le plan d'action pour une gestion résiliente et concertée de l'eau, dit plan Eau.

Ces constats étant posés, comment comptez-vous nous rassurer quant à votre politique des moyens ?

D'une conférence nationale sur l'eau, version « Michel Barnier », à des conférences régionales, version « François Bayrou », quelle est la méthode de travail ? Quel rôle le Comité national de l'eau jouera-t-il ? Qu'en sera-t-il des comités de bassin ?

Vous avez enfin lancé votre feuille de route sur la qualité de l'eau. Avec ma collègue Florence Blatrix Contat et les membres du groupe SER, j'ai déposé une proposition de loi visant à renforcer la protection des ressources en eau potable contre les pollutions diffuses.

Mais, parmi les annonces, que retenir ? La réactivation d'un groupe de travail ? Celui-ci est essentiellement technique. La publication d'un guide à destination des préfets ? Ce document n'est assorti d'aucun pouvoir coercitif.

Côté financement, on nous apprend que 6,5 millions d'euros seront dégagés du plan Écophyto. Tout cela est bien faible au regard des besoins !

Deux ans après les annonces du plan Eau, moins de 5 % des aires de captage sont protégées. Personne n'est dupe : nous reportons toujours à demain le traitement des urgences du moment.

Madame la ministre, la politique de l'eau reste-t-elle une priorité de votre ministère ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST.)


Réponse du Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche publiée le 03/04/2025

Réponse apportée en séance publique le 02/04/2025

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur Gillé, je vous remercie de votre question et de votre engagement sur le sujet de l'eau. Je pense en particulier à votre rapport d'information publié en 2023, qui a beaucoup enrichi nos réflexions.

Nous fêtons aujourd'hui, quasiment jour pour jour, les deux ans du plan Eau, qui avait été lancé le 30 mars 2023 par le Président de la République et par mon prédécesseur Christophe Béchu.

L'objet de ce plan est de réduire notre consommation d'eau et de protéger, du point de vue de la quantité, notre ressource en eau. Deux ans après son lancement, 64 % de ses mesures ont déjà été mises en oeuvre et 100 % d'entre elles ont été engagées. Par exemple, cinquante sites industriels sont d'ores et déjà dotés d'un plan de sobriété en eau, l'objectif étant de diminuer de 10 % les prélèvements en eau d'ici à 2030.

Par ailleurs, j'ai présenté vendredi dernier, aux côtés de mes collègues Annie Genevard et Yannick Neuder, notre feuille de route pour améliorer la qualité de l'eau potable. Cette feuille de route vise, premièrement, à identifier les aires de captage prioritaires afin d'y concentrer nos efforts et, deuxièmement, à doter les collectivités, les agriculteurs et les industriels de moyens financiers dédiés.

Je veux préciser quels sont ces moyens.

Vous avez mentionné les 6,5 millions d'euros destinés à la définition des périmètres de protection des captages ; mais vous avez omis les 2 milliards d'euros d'Aqua Prêts débloqués par la Banque des territoires à des taux ultracompétitifs : ce n'est pas exactement l'épaisseur du trait... De surcroît, et comme vous le savez, la Banque des territoires a annoncé, à ma demande et à celle de mon collègue ministre de l'économie, qu'elle mobilisait un complément de 2 milliards d'euros pour financer l'ensemble de ses politiques d'accompagnement de la transition écologique. Les collectivités locales doivent à présent se saisir de ces instruments.

J'ajoute enfin que le Premier ministre lancera prochainement une grande conférence sur l'eau. Elle sera organisée  c'est important  à l'échelon des territoires. Nous ne saurions en effet nous contenter d'une discussion nationale sur l'eau : il s'agit de savoir comment, bassin par bassin, répondre au mur d'investissements à venir tout en conservant une tarification acceptable pour les consommateurs et en appliquant le principe pollueur-payeur.

C'est de ce sujet que nous allons nous saisir.

M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.

M. Hervé Gillé. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Hier, j'ai rencontré le directeur de la Banque des territoires ; lui-même reconnaît que les Aqua Prêts sont faiblement mobilisés au regard de l'enveloppe disponible.

En outre, il ne s'agit que de prêts, comme leur nom l'indique, si bien qu'à défaut d'une politique de soutien efficace ce dispositif conduit à un reste à charge trop important pour les collectivités territoriales et les maîtres d'ouvrage. De fait, on rencontre des difficultés pour enclencher les investissements.

Enfin, madame la ministre, je vous alerte sur les structures du type « conférence régionale » : le Parlement ne dispose aujourd'hui d'aucune information quant à votre méthode d'élaboration. Or nous souhaitons évidemment, en tant que parlementaires, être associés aux travaux que vous évoquez, aux côtés du Comité national de l'eau et de l'ensemble des parties prenantes, dans le respect d'une logique de travail qui doit faire prévaloir l'échelle du comité de bassin. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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