Question de M. CORBISEZ Jean-Pierre (Pas-de-Calais - CRCE-K) publiée le 06/03/2025
M. Jean-Pierre Corbisez appelle l'attention de M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice sur les responsabilités concernant la production et la distribution d'amiante, mais aussi et surtout, sur le délai d'interdiction de cette fibre tueuse comme matériau de construction ou dans les équipements de protection.
En effet, si c'est en 1977 que l'amiante a été reconnue cancérigène par l'Organisation mondiale de la santé, il aura fallu attendre 20 ans, soit 1997 pour que la France l'interdise effectivement. Pourtant, l'amiante, ce sont plus de 120 000 victimes connues et des dizaines de milliers à venir. Ce sont autant de malades atteints du cancer et une anxiété pour ceux qui n'ont pas encore développé de séquelles à cette exposition.
Dans le département du Pas-de-Calais, l'Association Choeurs de Fondeurs se bat depuis plus de vingt ans pour que les salariés de Metaleurop exposés à l'amiante obtiennent réparation et reconnaissance du préjudice d'anxiété, alors qu'ils ont déjà eu à subir un licenciement indigne pour lequel certains sont encore en procès. 326 anciens salariés exposés à l'amiante et au plomb sont encore concernés aujourd'hui. On s'achemine vers une transaction là où les victimes attendaient une reconnaissance de responsabilité.
Pouvait-il en être autrement alors que la justice s'est prononcée pour un non-lieu dans l'affaire Eternit, considérant que les responsabilités individuelles ne pouvaient pas être établies. De même, alors que rapport sénatorial de 2005 « Le drame de l'amiante en France : comprendre, mieux réparer, en tirer des leçons pour l'avenir. » a conclu que le Comité Permanent Amiante (CPA) avait agi comme un « lobby pro amiante » retardant l'interdiction de cette matière, il n'y a pas eu de condamnations pour les acteurs de ce CPA.
Il souhaite donc l'interroger pour savoir s'il entend constituer un pôle d'instruction aux moyens étendus pour faire toute la lumière sur le drame de l'amiante afin de refermer enfin cette plaie béante dans l'histoire sanitaire et sociale de notre pays.
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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre des armées, chargé de la mémoire et des anciens combattants publiée le 19/03/2025
Réponse apportée en séance publique le 18/03/2025
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, auteur de la question n° 359, adressée à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Pierre Corbisez. Madame la ministre, ma question porte sur les responsabilités concernant la production et la distribution d'amiante, mais aussi, et surtout, sur le délai d'interdiction de cette fibre tueuse comme matériau de construction ou dans les équipements de protection.
En effet, si c'est en 1977 que l'amiante a été reconnu cancérigène par l'Organisation mondiale de la santé, il aura fallu attendre vingt ans, soit 1997, pour que la France l'interdise effectivement. Pourtant, l'amiante représente plus de 120 000 victimes connues et des dizaines de milliers à venir. Ce sont autant d'agonies pour les malades atteints de cancer et une anxiété pour ceux qui n'ont pas encore développé de séquelles à cette exposition.
Dans mon département, le Pas-de-Calais, l'association Choeurs de Fondeurs se bat depuis plus de vingt ans pour que les salariés de l'usine Metaleurop exposés à l'amiante obtiennent réparation et reconnaissance du préjudice d'anxiété alors qu'ils ont déjà eu à subir un licenciement indigne, pour lequel certains sont encore en procès. De fait, 326 anciens salariés exposés à l'amiante et au plomb sont encore concernés. Nous nous acheminons vers une transaction là où les victimes attendaient une reconnaissance de responsabilité.
Pouvait-il en être autrement alors que la justice a prononcé un non-lieu dans l'affaire Eternit, considérant que les responsabilités individuelles ne pouvaient pas être établies ? De même, alors qu'il a été conclu par un rapport d'information sénatorial de 2005, Le drame de l'amiante en France : comprendre, mieux réparer, en tirer des leçons pour l'avenir, que le Comité permanent amiante (CPA) avait agi comme un lobby pro-amiante retardant l'interdiction de cette matière, il n'y a pas eu de condamnations pour les acteurs de ce dernier.
Le Gouvernement entend-il constituer un pôle d'instruction aux moyens étendus pour faire toute la lumière sur le drame de l'amiante et refermer ainsi cette plaie béante dans l'histoire sanitaire et sociale de notre pays ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée auprès du ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Monsieur le sénateur Jean-Pierre Corbisez, je vous prie d'excuser l'absence de M. le garde des sceaux. Avant toute chose, je tiens à vous affirmer que le ministre de la justice prend toute la mesure des souffrances des victimes de l'exposition à l'amiante. Il partage la légitime préoccupation de voir les procédures judiciaires engagées traitées avec toute l'attention et l'efficacité requises.
Depuis 1996, comme vous l'avez indiqué, d'importants moyens ont été mis en oeuvre afin de faire aboutir le traitement des plaintes déposées par les victimes de l'amiante. Désormais, les dossiers d'exposition à cette fibre sont traités par les pôles spécialisés en matière de santé publique des tribunaux de grande instance de Paris et de Marseille, qui en ont fait une priorité, tant du côté du siège que du parquet. Ces pôles ont vu leurs moyens augmenter de manière constante depuis leur installation en 2003. À la fin du mois de septembre 2024, ils ont eu à connaître de 76 procédures relatives à l'exposition à l'amiante depuis leur création, dont 33 étaient toujours en cours.
Parallèlement, les moyens d'enquête ont été durablement renforcés. L'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et la santé publique, principal service d'enquête saisi sur ce contentieux, dispose désormais de dix détachements sur l'ensemble du territoire, qui sont tous en mesure de traiter des procédures relatives à l'exposition à l'amiante.
En complément, la gendarmerie nationale a spécialement formé de multiples enquêteurs, titulaires de qualifications spécifiques, au sein de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et la santé publique, mais également au sein d'autres unités ou services qui peuvent être saisis par les magistrats afin d'apporter leur expertise aux enquêtes pénales.
Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, la mobilisation de l'autorité judiciaire sur ce sujet est entière. Nous ne lâchons rien.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour la réplique.
M. Jean-Pierre Corbisez. L'association Choeurs de Fondeurs tiendra son assemblée générale dans quelques jours. Je ne manquerai pas de transmettre votre réponse à ses responsables, madame la ministre.
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