Question de M. OUZOULIAS Pierre (Hauts-de-Seine - CRCE-K) publiée le 27/03/2025

Question posée en séance publique le 26/03/2025

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER.)

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le président, monsieur le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, mes chers collègues, une nouvelle inquisition sévit aux États-Unis. Ses victimes en sont les scientifiques, la connaissance et la rationalité. Des chercheurs sont licenciés, des mots interdits et des disciplines proscrites. Non seulement les idées sont bannies, mais la méthode scientifique est aussi répudiée. Ces nouveaux Torquemada condamnent les conditions de production du savoir, le statut de la vérité et, finalement, la raison critique héritée des Lumières.

Cette croisade obscurantiste ne touche pas uniquement les États-Unis et ne prendra pas fin avec le mandat de Donald Trump. Elle participe d'une révolution antihumaniste qui a ses thuriféraires en Europe et en France. En s'attaquant à la science, elle souhaite aussi abolir les principes éthiques et rationnels qui fondent notre démocratie.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, plusieurs milliers de scientifiques ont déjà été licenciés par l'administration américaine et près de 300 000 autres sont menacés. La France doit tout mettre en oeuvre pour accueillir ceux qui lui demandent aujourd'hui l'hospitalité. Plusieurs universités ont déjà offert à ces scientifiques les moyens de poursuivre leurs recherches. Les efforts doivent être intensifiés et coordonnés en France et en Europe.

Il nous faut venir en aide aux chercheurs, mais aussi sauver leurs données scientifiques. Elles sont le patrimoine commun de l'humanité et risquent de disparaître, avec les bases qui les hébergent, dans un gigantesque autodafé numérique.

Monsieur le ministre, la République française, qui considère avec Monge et Condorcet qu'un savoir rationnel et scientifique, autonome du pouvoir politique, est une des conditions de la démocratie, doit tout mettre en oeuvre pour soutenir ces scientifiques victimes de la persécution. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER, GEST, RDSE, RDPI, INDEP et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

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Réponse du Ministère auprès de la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 27/03/2025

Réponse apportée en séance publique le 26/03/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Philippe Baptiste, ministre auprès de la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Ouzoulias, la situation est en effet très préoccupante aux États-Unis. Il y a lieu d'être inquiet quand on regarde la situation des National Institutes of Health (NIH), de la National Science Foundation (NSF), de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) et de la Nasa : des pans entiers de la recherche, notamment médicale, aux États-Unis sont directement menacés ou voient leurs budgets sabrés, notamment pour ce qui concerne le suivi des épidémies et des zoonoses ou l'observation de la Terre et du climat.

La situation est doublement dramatique : d'une part, on constate que le nombre de chercheurs, qui sont parmi les plus performants au monde, reflue et que des programmes internationaux sont menacés ou supprimés ; par ailleurs, des bases de données utilisées par la communauté scientifique internationale ne sont plus accessibles ou interdisent certains mots-clés de recherche, ce qui pose des difficultés majeures.

Vous l'avez dit, en France, et partout en Europe, des universités ouvrent dès aujourd'hui des postes pour accueillir des chercheurs américains et nous soutiendrons évidemment cet effort avec un certain nombre de mesures spécifiques.

Au-delà, il faut aussi mobiliser la Commission européenne et toutes les institutions de l'Union pour développer l'autonomie stratégique de l'Europe en matière de recherche, en reconsidérant l'ensemble des partenariats et la manière dont nous travaillons aujourd'hui avec nos grands partenaires, partout dans le monde.

Nous devrons également nous efforcer de disposer de bases de données autonomes, afin de permettre à l'ensemble des chercheurs de mener leurs travaux de manière libre et indépendante, dans le respect de la liberté académique, laquelle est absolument fondamentale pour l'avancée des connaissances. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

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