Question de M. LE RUDULIER Stéphane (Bouches-du-Rhône - Les Républicains) publiée le 27/02/2025
M. Stéphane Le Rudulier attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur le projet de décret relatif à la nouvelle procédure d'autorisation d'accueil du jeune enfant (EAJE) et de renforcement de la qualité d'accueil dans les micro-crèches qui suscite des inquiétudes chez les personnels de la petite enfance, dont la mise en application, prévue pour le 1er janvier 2026, risque d'avoir des conséquences désastreuses sur le secteur de la petite enfance et en particulier, des micro-crèches.
Aujourd'hui, les professionnels encadrant les jeunes enfants dans les structures se trouvent dans une situation préoccupante. Leur condition a toujours fait l'objet d'enjeux majeurs, tant par leur effectif, que par leur qualification, mais la mise en vigueur du décret risque de dégrader la profession et de rendre la situation plus instable.
Ce projet de décret imposerait une refonte des qualifications requises pour encadrer les jeunes enfants dans ces structures. De nombreux professionnels, aujourd'hui reconnus et compétents, ne seraient ainsi plus autorisés à exercer, sans qu'aucune mesure transitoire suffisante ne soit prévue pour assurer la formation de nouveaux personnels qualifiés ou la requalification de ces professionnels laissés sur le carreau.
Dans l'immédiat, l'État est dans l'incapacité de former un nombre suffisant de candidats pour pallier cette perte, aggravant ainsi une pénurie déjà préoccupante. Des conséquences pondéreuses surviendront à la suite de la publication du décret pour l'ensemble du territoire français, comme la disparition de structures de petite enfance privées, la perte d'emplois locaux. Il y aura une pression accrue sur les structures publiques d'accueil, qui sont elles-mêmes déjà saturées.
Force est de constater que les mesures portées par le projet de décret auront un impact fort et négatif sur les familles demandeuse de ce type de structure, ainsi que sur l'économie et in fine sur l'ensemble de la société. Une mobilisation d'un collectif de gestionnaires de micro-crèche, sous l'appellation « crèche morte » s'est d'ailleurs tenue le 3 février 2025, à Aubagne, afin de protester contre cette situation alarmante et d'interpeller les pouvoirs publics.
Face à la situation, il souhaite connaître les mesures concrètes et les améliorations que le Gouvernement envisage afin de résoudre ces difficultés, tout en assurant une réelle pérennité des micro-crèches et le bien-être des enfants, sur tout le territoire français.
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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé du travail et de l'emploi publiée le 26/03/2025
Réponse apportée en séance publique le 25/03/2025
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, auteur de la question n° 344, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
M. Stéphane Le Rudulier. Madame la ministre, le décret relatif à la nouvelle procédure d'autorisation des établissements d'accueil du jeune enfant (EAJE) et au renforcement de la qualité de l'accueil dans les microcrèches, dont la mise en oeuvre est prévue pour le 1er janvier 2026, suscite de nombreuses inquiétudes chez les professionnels de la petite enfance.
Bien sûr, personne n'a rien de plus précieux à confier à la garde d'autrui que ses enfants. Chacun peut donc trouver louable que les normes d'encadrement en vigueur dans les crèches de petite taille s'appliquent également dans les microcrèches.
Néanmoins, force est de constater que l'État se trouve, pour l'heure, dans l'impossibilité de former un nombre suffisant de candidats pour répondre aux besoins, ce qui menace directement l'avenir du secteur de la petite enfance. En effet, les nouvelles normes pourraient entraîner la disparition de 80 000 places d'accueil et la fermeture de plusieurs milliers de microcrèches sur l'ensemble du territoire français, alors même qu'il existe déjà une pénurie de professionnels qualifiés dans ce secteur.
Madame la ministre, ma question s'articule en deux temps.
Pouvez-vous nous confirmer que cette réforme ne s'appliquera pas aux 15 000 professionnels déjà en poste qui sont titulaires d'un CAP petite enfance et que le niveau de qualification exigé ne s'appliquera aux recrutements qu'à compter du 1er septembre 2026 ?
Par ailleurs, vous engagez-vous à entamer un processus de concertation sur le calendrier de déploiement de cette réforme, sur la formation de professionnels en urgence pour répondre aux nouvelles exigences de qualification et sur la mise en oeuvre de mesures transitoires ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Stéphane Le Rudulier, le projet de décret que vous mentionnez est fondamental pour assurer la qualité de l'accueil du jeune enfant. De nombreuses informations erronées ayant circulé à son sujet, je me dois d'être très claire sur ce que prévoit ce projet de décret, qui vient d'être examiné par le Conseil d'État.
Il a pour objet d'aligner les normes d'encadrement des microcrèches sur celles des crèches classiques de taille similaire, les petites crèches. Ainsi, les microcrèches devront compter au moins un professionnel de catégorie 1, c'est-à-dire titulaire d'un diplôme d'État. De même, l'accueil de moins de trois enfants par un professionnel seul ne pourra être assuré qu'à la condition que celui-ci soit titulaire d'un tel diplôme. Par ailleurs, un directeur ne pourra exercer des fonctions de direction que dans deux établissements au maximum.
Toutefois, il convient de rappeler que ce décret n'entrera en vigueur qu'à compter du 1er septembre 2026. Les auxiliaires de puériculture ou tout autre professionnel occupant le poste de référent technique avant cette date pourront être maintenus à leur poste.
Les titulaires d'un CAP présents dans les crèches n'auront pas à acquérir le diplôme d'État d'auxiliaire de puériculture et pourront continuer d'exercer. En effet, de nombreuses crèches disposent déjà d'un directeur ou référent technique pour deux structures et comptent 40 % de personnel dit qualifié, c'est-à-dire de catégorie 1.
Ces mesures sont essentielles pour respecter les besoins des enfants et assurer leur sécurité. En effet, les enfants accueillis dans les microcrèches étant les mêmes que ceux qui sont accueillis dans les petites crèches classiques, il n'y a aucune raison que les conditions d'encadrement diffèrent.
L'État n'abandonne pas les microcrèches. Au contraire, il les finance, notamment par le versement aux parents du complément de libre choix du mode de garde (CMG). En ce qui concerne les microcrèches subventionnées par la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje), j'attire votre attention sur le fait que le coût de revient moyen reste à ce jour inférieur au plafond de 10 euros par heure et que je ne dispose à ce jour d'aucun élément financier me démontrant l'inverse.
Enfin, pour reconnaître l'engagement des professionnels et renforcer l'attractivité des métiers, le Gouvernement entend faciliter l'accès au diplôme d'État d'auxiliaire de puériculture ou tout autre diplôme appartenant à la catégorie 1 par voie de validation des acquis de l'expérience (VAE).
Le Gouvernement est donc pleinement mobilisé pour accompagner ce changement, qui est conduit en faveur de la sécurité et du bien-être de nos enfants.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour la réplique.
M. Stéphane Le Rudulier. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Une mobilisation importante s'est exprimée en février par l'opération « crèches mortes » et j'estime qu'il est urgent d'ouvrir une phase de concertation avec les professionnels du secteur et les élus locaux pour améliorer la qualité de l'accueil de l'enfant en tenant compte du manque cruel d'effectifs dans le secteur.
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