Question de M. IACOVELLI Xavier (Hauts-de-Seine - RDPI) publiée le 20/02/2025
M. Xavier Iacovelli interroge Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, à défaut de disposer d'un ministère dédié à la protection de l'enfance, sur la protection de l'enfance.
Tout d'abord, il se réjouit de constater que le Président de la République prévoit de nommer très prochainement une personne à la tête du haut-commissariat à l'enfance.
Cependant, depuis plusieurs semaines, de nombreux départements annoncent une réduction significative des budgets alloués à la prévention spécialisée. Doit-on comprendre que, par choix purement politique, certains départements sacrifient l'avenir de ces enfants ? Certes, la cloche des échéances électorales résonne, incitant à privilégier des investissements électoralistes, mais sacrifier la protection de l'enfance relève d'une injustice impardonnable.
Lorsque l'on entend des propos dédaigneux émanant de certains représentants départementaux à l'égard des acteurs sociaux, force est de s'interroger sur la logique de ces arbitrages budgétaires. Il tient à rappeler que c'est grâce à la prévention juvénile, mobilisée avec force après les attentats de 2015, que de nombreux jeunes issus de quartiers défavorisés ont pu être éloignés de la délinquance. Par ailleurs, la prévention spécialisée permet aux départements de réaliser d'importantes économies, de l'ordre de 50 000 euros par placement à l'aide sociale à l'enfance (ASE) et de 30 000 euros pour une année d'incarcération.
Face à ces récentes coupes budgétaires qui fragilisent les moyens alloués à la prévention spécialisée et compromettent la protection de l'enfance, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour rectifier ces réductions au niveau départemental. Il lui demande également s'il ne serait pas temps de recentraliser la protection de l'enfance en replaçant cette mission au coeur des priorités de l'action publique, afin de garantir la continuité et le renforcement des dispositifs essentiels à la prévention de la délinquance et à l'accompagnement de ces enfants.
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Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de l'autonomie et du handicap publiée le 19/03/2025
Réponse apportée en séance publique le 18/03/2025
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, auteur de la question n° 320, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
M. Xavier Iacovelli. Madame la ministre, je me réjouis qu'une haute-commissaire à l'enfance ait enfin été nommée, en la personne de Sarah El Haïry. Nous pourrons compter sur son engagement et sa détermination pour mener à bien ses missions.
Depuis plusieurs semaines, de nombreux départements annoncent une réduction significative des budgets alloués à la prévention spécialisée. Que doit-on comprendre des choix purement politiques faits dans certains départements, qui sacrifient l'avenir des enfants placés sous la protection de l'institution ?
Élus locaux, nous savons bien que le sujet de la protection de l'enfance ne permet pas de remporter des élections. Mais il est impardonnable d'abandonner cette politique sociale réalisée pour l'avenir de nos enfants.
Madame la ministre, lorsque l'on entend certains représentants départementaux tenir lors de leurs voeux de nouvelle année des propos méprisants à l'égard des acteurs sociaux - en particulier dans le département dont vous avez été l'élue -, on peut s'interroger sur la logique des arbitrages budgétaires.
Mme Audrey Linkenheld. C'est vrai !
M. Xavier Iacovelli. Je tiens à le rappeler, à la suite des attentats de 2015, c'est grâce à la forte mobilisation de la prévention juvénile que de nombreux jeunes issus de quartiers défavorisés ont pu éviter la délinquance.
Par ailleurs, la prévention spécialisée permet aux départements de réaliser d'importantes économies. En effet, un placement leur coûte en moyenne 60 000 euros par an et par enfant.
Face aux coupes budgétaires qui entraînent la suppression de dizaines de postes dans plusieurs départements, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour corriger la réduction de ces budgets et garantir la protection de nos enfants ?
Madame la ministre, le moment ne serait-il pas venu de poser de nouveau la question de la recentralisation de la protection de l'enfance, pour garantir l'égal accès aux droits des enfants placés sous notre protection ? Il est temps aujourd'hui d'envisager un nouveau partenariat avec les départements.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l'autonomie et du handicap. Monsieur le sénateur Xavier Iacovelli, Mme Vautrin salue votre engagement sur le sujet de la protection de l'enfance.
Le Gouvernement partage votre position et vos préoccupations : la prévention spécialisée est une mission essentielle pour protéger les enfants. Elle favorise l'insertion des jeunes risquant la marginalisation et contribue à la cohésion sociale.
Pour ce faire, des actions éducatives et sociales de proximité sont menées directement auprès des jeunes et de leurs familles.
Depuis la loi de décentralisation du 22 juillet 1983, il appartient aux départements d'organiser et de financer des actions de prévention spécialisée dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance.
La jurisprudence a reconnu le caractère obligatoire de ces dépenses lorsqu'il existe sur le territoire du département des lieux où se manifestent des risques d'inadaptation sociale. Toutefois, les départements peuvent définir les conditions d'exercice de cette compétence selon les circonstances locales.
Pour mettre fin à la réduction des moyens accordée à la prévention spécialisée, la contractualisation que l'État passera avec les départements en 2025 visera à inciter ces derniers à s'engager pleinement dans ce dispositif.
À ce titre, la contractualisation doit s'adapter à de nouveaux enjeux, comme celui de l'utilisation croissante d'internet par les jeunes ou le repérage précoce des souffrances et de la radicalisation. Il existe également un enjeu de formation pour étayer la spécialisation des éducateurs de rue.
De son côté, l'État est directement intervenu pour soutenir la prévention spécialisée au travers de différentes politiques publiques.
Dans le cadre de la lutte contre l'exploitation sexuelle des mineurs, de nombreux clubs de prévention spécialisée ont été lauréats d'appels à projets.
Entre 2018 et 2022, dans le cadre de la politique de lutte contre la pauvreté, 5 millions d'euros par an ont permis de développer des actions de prévention spécialisée afin d'aller vers les publics qui rencontrent le plus de difficultés.
Dans le cadre des politiques de prévention de la délinquance, le fonds interministériel de prévention de la délinquance finance des actions de prévention spécialisée...
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre déléguée, car nous devons tenir les délais.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Dans le cadre de la politique de la ville, des moyens ont également été accordés.
Mme la ministre Vautrin a également annoncé un plan de refondation à l'occasion de son audition par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les manquements des politiques publiques de protection de l'enfance.
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