Question de Mme SOLLOGOUB Nadia (Nièvre - UC) publiée le 20/02/2025
Question posée en séance publique le 19/02/2025
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Nadia Sollogoub. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, « La sécurité de l'Europe est à un tournant. » Ces mots ont été prononcés par la présidente de la Commission européenne, à la suite de la conférence de Munich qui a eu lieu dimanche dernier.
Munich, tout un symbole, a été un électrochoc pour l'Europe...
À Munich, nous avons ouvert les yeux. Nous nous sommes enfin réveillés pour constater que le monde d'après 1945 n'était plus. La relation transatlantique a fait long feu. Les États-Unis ne veulent plus assurer la sécurité européenne. Notre continent est livré à lui-même. Il peut éventuellement compter sur l'aide de l'Amérique en fonction de ses intérêts, mais pas davantage...
Or l'addition de nos armées nationales n'est pas un ensemble homogène ni suffisant face à un envahisseur qui, déjà, a franchi les frontières de l'Ukraine. L'économie de la France n'est pas structurée pour affronter la guerre. Telle est la réalité de notre sécurité.
Face à cette situation, deux voies s'offrent à nous : poursuivre dans la division et disparaître, ou bien nous doter d'une véritable armée européenne, garante de notre paix.
Rêve des pères fondateurs de l'Europe, le projet de défense commune s'est toujours heurté aux veto nationaux. La France, en 1954, refusa la Communauté européenne de défense (CED), tandis que, après l'effondrement soviétique, les pays de l'Est préférèrent le parapluie américain à une hypothétique armée du continent. Mais, à cause de Donald Trump, les choses pourraient avoir véritablement changé, dans la douleur et la nécessité.
Aussi, monsieur le ministre, la sécurité de l'Europe est-elle vraiment à un tournant ? Si oui, sur quels moyens industriels, humains et budgétaires pourrait-on compter, pour mettre en place une véritable défense européenne ? Peut-on maintenant y croire ?
Votre réponse est attendue par la représentation nationale comme par nos collègues de la Rada d'Ukraine, que les dernières déclarations américaines plongent dans une profonde sidération et une immense inquiétude. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 20/02/2025
Réponse apportée en séance publique le 19/02/2025
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le président, je me joins aux félicitations que vous avez adressées à Nadia Sollogoub pour le travail qu'elle a mené sans relâche afin de cultiver et d'entretenir les liens entre la France et l'Ukraine.
Madame la sénatrice, le Premier ministre l'a dit : l'Europe fait face à une menace existentielle. Comment en sommes-nous arrivés là ?
Lorsque la première guerre contre le Donbass et la Crimée a été lancée il y a dix ans, sans doute avons-nous fait preuve de faiblesse en acceptant un cessez-le-feu fragile, que la Russie a violé par vingt fois avant de lancer son invasion à grande échelle de l'Ukraine.
Entre-temps, les États-Unis ont changé d'orientation stratégique et ont décidé de laisser l'Europe assumer seule la charge de sa sécurité et de sa défense.
Aujourd'hui, l'Ukraine joue le rôle de sentinelle de l'Europe et ce sont les Ukrainiens qui tiennent la première ligne de défense de notre continent.
Heureusement, la France a pris un peu d'avance. Grâce aux dernières lois de programmation militaire qui ont été adoptées et dont les objectifs ont été tenus, les moyens consacrés à la défense nationale auront bientôt doublé.
Cependant, certains de nos partenaires européens sont en retard. C'est la raison pour laquelle le Président de la République a convié certains d'entre eux à Paris lundi et aujourd'hui encore. Sa volonté n'était pas seulement d'appeler à un réveil européen, mais aussi d'exiger de la Commission européenne qu'elle relâche certaines des contraintes budgétaires qui empêchent les États membres de faire les efforts nécessaires.
Ce réveil des dirigeants européens est une bonne chose, certes. Mais rien ne sera possible sans un réveil des peuples et de leurs représentants. Aussi, je vous invite à vous saisir du débat qui se tiendra dans les deux chambres sur le fondement de l'article 50-1 de la Constitution, annoncé par le Premier ministre. En effet, ce n'est que par un réarmement moral embarquant toute la Nation que nous parviendrons à dissuader la menace en lui opposant la force plutôt que la faiblesse. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et UC.)
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