Question de M. HINGRAY Jean (Vosges - UC) publiée le 13/02/2025
Question posée en séance publique le 12/02/2025
M. le président. La parole est à M. Jean Hingray, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean Hingray. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Monsieur le ministre, « Ma petite entreprise, connaît pas la crise [...] », chantait Alain Bashung en 1994. Et pour cause, c'était avant la baisse des seuils de franchise de TVA pour les autoentrepreneurs. (Sourires.) Une mesure brutale, à la fois sur le fond et sur la forme, qui nous plonge collectivement dans l'embarras.
Sur le fond, les autoentrepreneurs sont montés au créneau, et nous les comprenons. Beaucoup n'y survivront pas, sauf à basculer dans le travail dissimulé.
C'est bien pourquoi le montant des recettes annoncé pour cette mesure a varié du simple au double. Bercy en attendait 800 millions d'euros au départ ; aujourd'hui, on nous annonce 400 millions d'euros. L'administration aurait-elle donc anticipé la fraude à venir ? La ministre chargée du commerce a annoncé hier à l'Assemblée nationale avoir demandé une étude d'impact. N'est-ce pas désavouer une fois de plus les chiffres donnés précédemment ?
Sur la forme, l'amendement, adopté au Sénat un dimanche après-midi au milieu d'une batterie de secondes délibérations, n'a jamais été à proprement parler débattu par l'ensemble du Parlement. Il n'a pas été supprimé ensuite, ni lors de la réunion de la commission mixte paritaire ni, par conséquent, dans le cadre du texte considéré comme adopté en application de l'article 49.3.
Pour couronner le tout, monsieur le ministre, face à l'émoi suscité par la mesure, nous avons appris à la télévision que vous entendiez désormais la suspendre. Je m'interroge sur la légitimité démocratique de cette démarche.
Ma question est en conséquence double.
D'un point de vue formel, comment ferez-vous pour suspendre la mesure avant son entrée en vigueur prévue le 1er mars prochain ? Envisagez-vous une loi de finances rectificative pour revenir sur cette disposition ? Avec un peu de malice, je suis tenté de vous demander, monsieur le ministre, si vous comptez soutenir la proposition de loi de La France insoumise (LFI) à l'Assemblée nationale... (Sourires.)
Sur le fond, au-delà de la concertation annoncée, allez-vous proposer une étude approfondie de la fiscalité des autoentrepreneurs nous permettant de légiférer rapidement et dans de bonnes conditions ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 13/02/2025
Réponse apportée en séance publique le 12/02/2025
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Éric Lombard, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur Hingray, je vous remercie de nous soumettre cette question importante.
Comme vous l'avez mentionné, la mesure sur la franchise de TVA des autoentrepreneurs a été introduite le 1er décembre 2024 à l'article 10 du projet de loi de finances pour 2025. Pour rappel, cette franchise de TVA concerne actuellement deux millions d'entreprises dont le chiffre d'affaires est en deçà d'un certain seuil.
Je précise que la disposition votée dans le cadre du projet de loi de finances ne remet en aucun cas en cause le régime fiscal des microentrepreneurs et les avantages sociaux associés. Cependant, vous avez raison de le souligner, cette réforme n'a pas fait l'objet d'un débat suffisamment approfondi. Aussi avons-nous décidé, avec la ministre chargée du commerce, Véronique Louwagie, de nous donner le temps de la concertation et de la suspendre, de sorte à dialoguer avec l'ensemble des parties prenantes.
Cela étant, j'attire votre attention sur le fait que le dispositif que nous avons introduit a été réclamé dans certains secteurs, notamment par les entrepreneurs du bâtiment, qui s'estimaient soumis à une concurrence inéquitable, et qu'il n'est donc pas sorti du néant. Cet abaissement du seuil de franchise de TVA répondait à une demande de rééquilibrage de la part de certains professionnels.
Comme vous l'avez fait valoir, cette mesure est censée s'appliquer à partir du 1er mars. La concertation devant aboutir avant la fin du mois de février, nous déciderons à ce moment-là, en fonction des résultats que nous aurons obtenus - je suis certain que nous trouverons un point d'équilibre -, de la forme, législative ou réglementaire, que prendra la suspension de sa mise en oeuvre.
Pour conclure, je veux réaffirmer l'attachement du Gouvernement à l'égard du dynamisme impulsé par ces trois millions de microentreprises, qui ont représenté un élément nouveau dans notre paysage économique et qui contribuent grandement à notre croissance, en donnant un avenir à de nombreux entrepreneurs qui veulent s'exprimer de façon plus simple.
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