Question de Mme CAZEBONNE Samantha (Français établis hors de France - RDPI) publiée le 06/02/2025

Question posée en séance publique le 05/02/2025

M. le président. La parole est à Mme Samantha Cazebonne, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Samantha Cazebonne. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche depuis quelques semaines a marqué le début d'une ère d'instabilité et d'inquiétude pour la France et ses partenaires européens : retrait de l'accord de Paris sur le climat et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), annulation des politiques de diversité, d'inclusion et d'équité,...

M. Stéphane Ravier. Bravo !

Mme Samantha Cazebonne. ... annonce de la transformation de la base américaine de Guantanamo, symbole de violation des droits humains, en centre de rétention pour migrants sans-papiers, traitements dégradants imposés à des personnes lors de leur expulsion vers leur pays d'origine, recul spectaculaire des droits des minorités,...

M. Stéphane Ravier. Encore bravo !

Mme Samantha Cazebonne. ... guerre commerciale mettant en péril l'économie mondiale, menace d'imposer des droits de douane sur les produits européens, et j'en passe !

M. Stéphane Ravier. Il faut faire pareil !

Mme Samantha Cazebonne. Il se pourrait que cette liste à la Prévert continue longtemps de s'allonger, tant le président américain a été proactif dans la mise en oeuvre de politiques consternantes depuis son retour aux affaires.

Dernière sortie en date, il a déclaré la nuit dernière sa volonté de prendre le contrôle de la bande de Gaza pour en faire la « Côte d'Azur du Moyen-Orient » (MM. Joshua Hochart et Stéphane Ravier s'esclaffent.), au mépris absolu du droit international et de la sécurité des otages.

On ne peut en effet appréhender qu'avec inquiétude les conséquences des politiques de Donald Trump, lequel entraîne dans son sillage les grands patrons américains qui contrôlent les principales sources privées d'influence aux États-Unis.

Je prendrai pour exemple les nouvelles « règles de la communauté » applicables sur les réseaux sociaux de Meta, qui autorisent désormais à tenir des propos haineux, ainsi que la suppression du programme de fact checking des contenus publiés sur lesdits réseaux, porte ouverte à la désinformation. Cette décision a été saluée par Elon Musk, qui utilise son propre réseau social, X, pour s'ingérer dans les processus électoraux et démocratiques européens.

Je rentre des États-Unis, où l'on m'a déjà fait part d'ingérences, y compris dans nos établissements du réseau d'enseignement français à l'étranger, par l'instauration d'un climat délétère et la remise en question de certaines de nos valeurs fondamentales.

Ma question est simple, monsieur le ministre : comment la France compte-t-elle peser au sein de l'Union européenne afin de s'affirmer comme la puissance stratégique qu'elle doit être face à un allié qui se fait de plus en plus menaçant ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées des groupes RDSE, SER et GEST.)

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 06/02/2025

Réponse apportée en séance publique le 05/02/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice, face à la multiplication des annonces tous azimuts outre-Atlantique, il nous faut évidemment garder notre sang-froid et rappeler ce que nous sommes et ce que nous voulons.

Pour ce qui est de la situation au Proche-Orient, la France est fermement opposée à tout déplacement forcé de population qui constituerait, vous l'avez dit, une violation manifeste du droit international, qui serait une atteinte aux aspirations légitimes du peuple palestinien et qui entraverait la mise en oeuvre d'une solution à deux États, seule susceptible d'apporter la paix et la stabilité dans la région.

Pour ce qui est du commerce, la France rappelle qu'il n'y a aucun déséquilibre à corriger dans la relation commerciale entre les États-Unis et l'Union européenne et que, la dernière fois que les États-Unis d'Amérique se sont lancés dans une guerre commerciale, avec la Chine et avec d'autres pays, cela leur a coûté cher : 200 euros environ par citoyen américain. J'ajoute que ce coût s'est avéré plus élevé dans les comtés républicains que dans les comtés démocrates.

En tout état de cause, si l'Europe est visée par la hausse de certains droits de douane américains, alors elle répliquera sans aucune espèce d'hésitation.

Pour ce qui concerne les géants du numérique, l'Europe s'est donné des règles. Elle refuse que le débat public soit délocalisé sur des plateformes de réseaux sociaux dont les règles seraient fixées par des milliardaires américains ou chinois. Là encore, si ces règles sont transgressées - des enquêtes sont en cours -, les plateformes doivent être sanctionnées lourdement par la Commission européenne, qui peut prononcer des amendes allant jusqu'à 6 % du chiffre d'affaires annuel mondial de la société concernée et pousser les sanctions jusqu'à la restriction d'accès sur le territoire de l'Union européenne. (M. Yannick Jadot s'exclame.)

Que fait la France pour peser dans ce débat ? Le Président de la République a participé lundi dernier à une retraite des chefs d'État et de gouvernement embrassant l'ensemble de ces sujets. Quant à moi, je réunirai le 12 février prochain les principaux pays européens afin que nous abordions la « suite des opérations », si je puis dire, autour d'un discours uni, ferme et serein face à ce qui peut arriver ou ce qui peut provenir des États-Unis d'Amérique dans un avenir prochain. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe INDEP. - M. Olivier Cadic applaudit également.)

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