Question de M. BRISSON Max (Pyrénées-Atlantiques - Les Républicains) publiée le 30/01/2025

M. Max Brisson appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche à propos des conséquences dramatique de l'action « mois sans pêche » sur les pêcheurs français.
Depuis mercredi 22 janvier 2025, 350 navires de pêche français sont sommés de rester à quai en raison de la répétition de l'action « mois sans pêche », déjà mise en oeuvre l'hiver dernier dans le golfe de Gascogne, et ce jusqu'au jeudi 20 février 2025.

En effet, confirmée fin décembre 2024 par le Conseil d'État pour la deuxième année consécutive, cette fermeture de la pêche sur la façade Atlantique est selon la haute juridiction « nécessaire » pour « protéger les populations de dauphins et le marsouin dans cette zone ». Sa décision s'appuie sur la base d'observations scientifiques montrant « une baisse significative de la mortalité des petits cétacés par capture accidentelle » pour la période hivernale 2024.

Pourtant, si les captures accidentelles diminuent effectivement, le nombre d'échouages de cétacés est en revanche en augmentation significative, malgré le mois sans pêche, comme en témoignent les rapports publiés par PELAGIS qui recensent 273 échouages pendant la période de fermeture en 2024, contre seulement 187 en 2023 à la même période. Ainsi, à défaut de régler le problème des dauphins, le « mois sans pêche » fait une démonstration éclatante que la pêche n'est pas la principale responsable des échouages de cétacés.

Outre son inefficacité donc, le « mois sans pêche » est également une aberration écologique. En effet, en 2022, la France a importé pour 7,7 milliards d'euros de poissons, crustacés et mollusques, ce qui représente 80 % de notre consommation. De telles actions risquent de faire un peu plus gonfler ce chiffre et de provoquer une importation toujours plus importante, une dépendance accrue et des coûts financiers et écologiques toujours plus onéreux, avec des provenances de zones toujours plus lointaines.

Enfin, en 2024, cette action a conduit à l'indemnisation partielle de 288 navires à hauteur de 16,3 millions d'euros. Un dispositif financièrement lourd pour l'État donc, alors même que son efficacité et sa pertinence demeurent sujettes à de nombreuses interrogations, voire contestations. Surtout, elle est la cause de conséquences désastreuses pour l'ensemble de la filière, car la seule indemnisation ne compense pas les lourdes pertes économiques des mareyeurs, transporteurs et poissonniers, fragilisant au contraire l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et menaçant même l'avenir des emplois de toute la filière piscicole.

Aussi, le Gouvernement s'étant engagé à de multiples reprises à trouver des solutions, il l'interroge sur ce qu'il est envisagé pour sauver la pêche française.

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Réponse du Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche publiée le 12/02/2025

Réponse apportée en séance publique le 11/02/2025

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 275, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

M. Max Brisson. Ma question est très similaire à celle que vient de poser Annick Billon.

Le mois sans pêche est reconduit pour la seconde année, alors même qu'il est largement contesté.

Il est contesté, d'abord, pour son inefficacité. Alors qu'il a été décidé pour protéger les populations de dauphins, les rapports de l'observatoire Pelagis indiquent que le nombre d'échouages a connu une forte hausse lors de la fermeture de la pêche l'année dernière, ceux-ci étant passés de 187 en 2023 à 273 en 2024, malgré le mois sans pêche.

C'est là la démonstration éclatante que la pêche n'est pas la principale responsable des échouages.

Il est contesté, ensuite, pour des raisons écologiques. Alors qu'elle importe déjà 80 % de sa consommation de produits aquatiques, la France sera encore un peu plus dépendante des importations avec des produits de provenances toujours plus lointaines. C'est une aberration écologique.

Il est contesté, enfin, pour des raisons économiques. En effet, le mois sans pêche prive des milliers de mareyeurs, de transporteurs et de poissonniers du fruit de leur travail, tandis que la seule indemnisation de l'État ne permet pas de compenser leurs lourdes pertes. Cela fragilise grandement l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et menace la pérennité des emplois de toute la filière.

Madame la ministre, ma question est très simple : comment le Gouvernement compte-t-il mettre un terme à ce dispositif du mois sans pêche, qui risque d'anéantir la pêche française sans pour autant sauver les dauphins du golfe de Gascogne ?

Mme Annick Billon. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur Brisson, je me permets d'abord de contester ce que vous venez de dire : oui, la fermeture du golfe de Gascogne est, clairement, très efficace pour réduire le nombre d'échouages de cétacés et, partant, celui de morts précoces. Ainsi, on a enregistré une division par quatre du nombre de décès de dauphins.

Ensuite, je veux le rappeler, c'est une décision de justice qui a amené le Gouvernement à prendre cette décision de fermeture à la pêche du golfe de Gascogne, laquelle vaut pour trois ans, le temps nécessaire au déploiement de mesures alternatives destinées à l'effarouchement des cétacés, ce qui permettra de concilier la préservation de ces populations avec les activités de pêche.

Dans cette attente, des mesures d'urgence ont été prises. D'une part, ainsi que vous l'avez indiqué, 20 millions d'euros ont été débloqués afin de compenser les pertes de chiffre d'affaires des pêcheurs à hauteur de 80 % à 85 %, ce qui est un niveau très élevé si on le compare à celui auquel sont indemnisés les pêcheurs espagnols, à savoir 47 %. D'autre part, en aval, les pertes d'excédent brut d'exploitation des mareyeurs sont également compensées.

Cela étant, vous avez raison sur ce point, monsieur le sénateur, on ne peut pas se satisfaire de cette situation. L'enjeu est donc de parvenir à des solutions permettant de rouvrir la pêche en 2027 tout en protégeant la nature. Je pense en particulier aux dispositifs d'effarouchement des cétacés, qui font l'objet d'évaluations par les scientifiques.

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.

M. Max Brisson. Madame la ministre, je suis très surpris par vos affirmations. Moi, je sais compter : on a dénombré 273 échouages l'année dernière, en l'absence de tout bateau de pêche, contre 187 l'année précédente, alors que les bateaux de pêche opéraient.

Que vous vouliez faire porter aux pêcheurs cette responsabilité, soit, mais, ce faisant, vous avez tort de vous en prendre à la pêche : ces échouages ont certainement bien d'autres causes. Les pêcheurs du golfe de Gascogne servent aujourd'hui de boucs émissaires, ce qu'ils vivent très mal.

Votre réponse ne donne pas l'impression que le Gouvernement a réellement l'intention de sauver la filière pêche. On continuera d'importer, d'être dépendants. Où est la souveraineté alimentaire ?

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