Question de Mme BOYER Valérie (Bouches-du-Rhône - Les Républicains) publiée le 30/01/2025
Mme Valérie Boyer interroge M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice sur le meurtre d'un jeune homme aux Baumettes à Marseille.
Selon plusieurs médias, le 9 octobre 2024, Robin Cotta un jeune homme de 22 ans, a été tué sauvagement par son codétenu, quelques jours après son arrivée à la maison d'arrêt des Baumettes, à Marseille. Pourtant, il aurait alerté à plusieurs reprises les surveillants pénitentiaires du danger pour sa sécurité et aurait demandé de changer de cellule.
Pour rappel, le 21 septembre 2024, Robin Cotta a été interpellé avec l'un de ses amis dans une pharmacie de Mézel, dans les Alpes-de-Haute-Provence, en possession de fausses ordonnances de sirop codéiné pour la toux devant servir à la fabrication de « purple drank », cocktail euphorisant considéré comme une drogue dure. Mis en examen, il est placé en détention provisoire dans différents établissements, dans l'attente de son éventuel procès. Il est précisé que c'était pourtant la toute première incarcération du jeune homme, alors intérimaire d'une entreprise d'installation de panneaux solaires, dont le casier judiciaire de majeur est vierge. Il intègre par la suite la maison d'arrêt des Baumettes.
Le 4 octobre 2024, Robin Cotta est placé en détention avec son futur meurtrier, qui purge quant à lui une peine de six mois de prison ferme dans une affaire de transport de stupéfiants. Ce dernier a été par le passé condamné à plusieurs reprises pour vol et violences. La presse indique que selon plusieurs détenus, cet individu avait déjà menacé certains de ses codétenus en mimant de les découper à la machette. Lors de sa codétention avec ce prisonnier, Robin Cotta adresse trois courriers à la direction des Baumettes, demandant à être transféré dans une autre cellule. Il écrit notamment une lettre le matin de sa mort, à laquelle on lui répond qu'il ne peut pas être reçu dans l'immédiat. Le jeune homme a également utilisé l'interphone de sa cellule pour exiger son transfert, en vain.
Robin Cotta aurait été « frappé, assommé, puis froidement égorgé (par son codétenu) avec les tessons d'un bol en porcelaine ». Le meurtrier aurait « quasiment décapité » ce jeune homme qui ne représentait pourtant aucune menace.
Les premières conclusions de l'enquête menée par la division territoriale de la criminalité de Marseille et révélées par la presse, indiquent que la direction et le personnel de l'établissement pénitentiaire ont ignoré les demandes de Robin Cotta de changer de cellule.
Aussi, elle demande au Gouvernement de faire toute la lumière sur ce drame en précisant pourquoi les alertes de ce jeune homme n'ont pas été prises en compte et si d'autres solutions n'auraient pas été envisageables lui permettant, ainsi de garantir sa sécurité et sa survie. Par ailleurs, elle souhaite connaître le nombre d'affaires similaires, ainsi que le profil des victimes et des auteurs des meurtres.
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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre des armées, chargé de la mémoire et des anciens combattants publiée le 19/02/2025
Réponse apportée en séance publique le 18/02/2025
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, auteure de la question n° 266, adressée à M. le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Valérie Boyer. Madame la ministre, le 21 septembre 2024, Robin Cotta, 22 ans, tente d'obtenir de la codéine dans une pharmacie, muni d'une fausse ordonnance. Arrêté dans la foulée, il est incarcéré à la prison des Baumettes, à Marseille.
Le 1er octobre, le jeune homme écrit à ses parents ; il reste optimiste sur la suite de cette affaire. Malheureusement, trois jours après, Robin est transféré dans une autre cellule et son enfer débute. Selon un document relaté par la presse, il a exprimé, à plusieurs reprises, ses craintes à l'encontre de son codétenu. En effet, il a lancé l'alerte trois fois par lettre, sans compter les appels à l'interphone.
Arrive alors la soirée du 9 octobre, où le bruit d'une violence inouïe retentit dans la cellule. Son bourreau s'est servi d'un bol cassé pour le tuer, jusqu'à pratiquement le décapiter. Il lui a écrasé le visage. Comble de l'horreur, le meurtrier indique également avoir manipulé le corps de sa victime pour accélérer l'hémorragie.
Ses parents ont appris les circonstances de la mort de Robin dans la presse. Je veux leur témoigner toute ma compassion.
Au-delà de sa famille, je crois que les Français attendent des réponses. Nous sommes tous dans la stupeur, le chagrin et l'incompréhension.
Aussi, madame la ministre, même si je devine que vous allez me répondre qu'il ne vous appartient pas de commenter une affaire en cours, je vous demande de faire preuve de transparence sur ce drame.
Alors que nous venons d'apprendre que des activités ludiques sont organisées dans certaines prisons, avec des séances de massage gratuites, alors que le frère d'un des tueurs du Bataclan, pourtant fiché S, se balade tranquillement à Lure, parce qu'il y est seulement assigné à résidence, alors qu'en janvier, dans les Yvelines, un individu condamné pour le viol de sa nièce mineure a été remis en liberté faute de date disponible pour son procès, bref - la liste est trop longue, hélas ! -, alors que bien des personnes dangereuses sont en liberté, pourquoi ce jeune homme, qui n'était pas dangereux, qui n'avait pas de casier judiciaire, qui avait un travail a-t-il été rapidement incarcéré ? Au minimum, madame la ministre, veuillez répondre à cette question !
D'autres solutions n'auraient-elles pas pu être envisagées, qui auraient garanti sa sécurité et sa survie ? Pourquoi a-t-il été placé dans la même cellule qu'un détenu réputé pour être ultra-violent ? Qui est son bourreau ? Quelles étaient ses motivations ? Pouvons-nous retenir une motivation raciste pour le crime ? Enfin, pourquoi les alertes de ce jeune homme n'ont-elles jamais été prises en considération ? Faut-il avoir des relations pour être protégé en prison ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée auprès du ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Madame la sénatrice Valérie Boyer, je vous prie d'abord d'excuser l'absence du ministre de la justice.
Je voudrais, comme vous, compatir à la douleur de cette famille, pour laquelle j'ai évidemment une pensée.
Dans cette affaire, la justice et l'inspection générale de la justice ont été saisies dès la commission des faits. Les deux procédures, judiciaire et administrative, sont toujours en cours. Dès lors, vous le savez bien, je ne peux pas m'exprimer sur l'affaire. Lorsque les conclusions de ces procédures seront rendues, M. le garde des sceaux Gérald Darmanin en tirera toutes les conséquences et prendra, le cas échéant, les mesures qui s'imposent pour qu'un tel drame ne se reproduise pas.
Mme Valérie Boyer. C'est trop facile !
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée. Je ne peux pas vous répondre autre chose ; vous avez suffisamment d'expérience pour le savoir.
Mme Valérie Boyer. Pourquoi était-il en prison ? Vous pourriez au moins me répondre là-dessus !
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