Question de M. KANNER Patrick (Nord - SER) publiée le 23/01/2025
Question posée en séance publique le 22/01/2025
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, les Français ne sont ni coupables ni responsables de la destruction de plus de 50 milliards d'euros de recettes fiscales tous les ans, pas plus que de l'explosion de la dette publique, qui a augmenté de plus de 1 000 milliards d'euros sous Emmanuel Macron, ou de l'illusion de la théorie du ruissellement, laquelle s'est traduite par une aggravation des inégalités sociales.
Nous sommes et restons une opposition responsable. (M. Olivier Paccaud rit.) Malgré nos désaccords profonds, nous étions présents à la table des négociations, dès le 6 janvier.
Nous avons formulé des propositions concrètes et utiles pour les Français. Ainsi, des milliers d'emplois ont été créés ou sauvés dans l'enseignement ou l'hôpital. Nous avons obtenu des avancées pour le service public et ses agents.
M. Olivier Paccaud. C'est votre budget, bien sûr !
M. Patrick Kanner. Nous avons oeuvré à consolider les moyens des collectivités territoriales, tant hexagonales qu'ultramarines. J'exprime d'ailleurs ma solidarité à nos concitoyens mahorais.
L'injuste réforme des retraites de 2023 est remise en chantier avec les partenaires sociaux, le Parlement ayant le dernier mot.
Bref, nous avons obtenu des résultats tangibles et conformes à l'intérêt du pays. Pourtant, le compte n'y est toujours pas.
Il ne reste que sept jours avant la date cruciale de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances, alors que les manques sont nombreux. Dans l'intérêt des Français, nous voulons des gages en matière d'écologie, mais aussi de justice sociale et fiscale.
Je me limiterai à trois questions claires, qui appellent trois réponses claires. Quand présenterez-vous au Parlement un texte sur la taxation des hauts patrimoines ? Allez-vous imposer aux salariés 7 heures de travail non rémunérées ? Renoncerez-vous à diminuer l'indemnité journalière des fonctionnaires en cas d'arrêt maladie ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Olivier Paccaud. Elles sont belles, les concessions !
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Réponse du Premier ministre publiée le 23/01/2025
Réponse apportée en séance publique le 22/01/2025
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. François Bayrou, Premier ministre. Monsieur le président Kanner, vous reconnaissez que nous avons accompli des progrès considérables. Le travail de dialogue qui a été le nôtre a en effet permis de trouver des zones d'accord inédites.
Nous avons ainsi oeuvré à réunir les différents groupes du Sénat. Ceux de l'Assemblée nationale ont pu également s'entendre, alors qu'ils étaient assez profondément divisés pour décider, in fine, de renverser le Gouvernement.
Nous avons collectivement payé le prix de cette censure...
Mme Cathy Apourceau-Poly. Et le prix des 49.3 ?
M. François Bayrou, Premier ministre. Nous avons ainsi été incapables de mettre des milliards d'euros à la disposition des Français et de remplir les engagements que nous avions pris.
En effet, monsieur le président, nous avons remis en chantier la réforme des retraites. C'est un fait suffisamment rare pour que l'un des intervenants à cette conférence sociale ait rappelé à ses collègues que la France est le seul pays où les partenaires sociaux se voient confier une responsabilité aussi importante. (Exclamations sur les travées des groupes GEST et SER.)
Je peux en témoigner, la réunion que nous avons organisée s'est très bien déroulée et s'est révélée utile. Nous sommes parvenus à trouver des chemins d'accord sur le budget, tels que l'augmentation de l'Ondam et la restauration des postes d'enseignants à l'éducation nationale, entre autres.
Pour autant, avons-nous relevé le défi budgétaire qui se présente à nous ? Existe-t-il un puits sans fond dans lequel nous pourrions puiser tous les crédits possibles afin de répondre à l'ensemble des problèmes ? Non, je ne le crois pas. Il ne suffit pas de signer des chèques pour que notre pays résolve enfin les difficultés qui se posent.
Vous avez évoqué les jours de carence. Sur ce sujet, le Gouvernement a proposé deux mesures qui ont été adoptées par le Sénat.
Plusieurs sénateurs du groupe SER. Par la droite !
M. François Bayrou, Premier ministre. Certes, mais il s'agit du vote du Sénat - permettez-moi de ne pas faire de tri parmi les membres qui composent votre assemblée. (Exclamations sur des travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. Très bien !
M. François Bayrou, Premier ministre. La première mesure consiste à imposer trois jours de carence sans indemnité aux fonctionnaires bénéficiant d'un arrêt maladie - dans le privé, les choses sont plus compliquées, car il faut tenir compte des mutuelles.
La seconde mesure est celle d'une réduction modérée de 10 % du montant de l'indemnité journalière en cas de maladie ordinaire.
Nous avons fini par abandonner la règle des trois jours de carence (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), une partie des sensibilités politiques représentées ayant manifesté son désaccord.
En revanche, la réduction du montant de l'indemnité journalière, proposée par voie d'amendement, est un impératif si nous voulons permettre au budget de la sécurité sociale de retrouver le meilleur équilibre possible. Il ne serait ni raisonnable ni sérieux d'abandonner cette mesure, car nous n'avons pas d'autre moyen pour rétablir cet équilibre.
Voilà un exemple des progrès que nous avons accomplis, des zones d'accord que nous avons trouvées et du sérieux budgétaire que nous devons défendre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.
M. Patrick Kanner. Je vous remercie pour la tonalité de vos propos, monsieur le Premier ministre, mais vous n'avez pas répondu sur la taxation des hauts patrimoines - dont acte ! Nous aurons certainement l'occasion d'en discuter à d'autres moments.
Il n'y aura pas d'égalité républicaine dans ce pays sans équité, notamment sur le plan fiscal. À un moment donné, il faudra que vous fassiez le choix entre défendre les rentiers ou défendre les salariés. (Eh oui ! sur les travées du groupe SER.) Or vos réponses m'inquiètent, même si je ne doute pas de leur sincérité.
Je vous le répète, monsieur le Premier ministre : nous ne sommes ni vos alliés ni vos partenaires. Nous serons néanmoins des interlocuteurs exigeants. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Ne l'oubliez pas, car, le moment venu, nous ne l'oublierons pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. - Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
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