Question de Mme HERZOG Christine (Moselle - UC-R) publiée le 19/12/2024
Mme Christine Herzog interroge M. le ministre de l'intérieur sur la complémentarité de la police municipale aux forces de sécurité régalienne. L'augmentation, ces dernières années, de la délinquance en milieu rural n'a pas induit d'augmentation suffisante des effectifs de police nationale ou de gendarmerie présents dans ces territoires.
Pour maintenir un certain niveau de sécurité dans leur commune, les maires,lorsqu'ils en ont les moyens financiers, recrutent des policiers municipaux.
Premier constat : les communes pauvres ne peuvent pas forcément se doter d'une police municipale, lesquelles subissent pourtant elles aussi, l'augmentation de la délinquance. Deuxième constat : les prérogatives des policiers municipaux et parfois leur équipement, sont beaucoup plus limités que ceux des forces de sécurité régaliennes.
Le bilan est éloquent : une police municipale coûte cher à la commune quand elle a les moyens d'en financer une, et cette police a un niveau d'efficacité moindre par rapport aux policiers et gendarmes nationaux pour répondre aux besoins des habitants. Il en résulte pour les maires, une inquiétude sur la baisse des effectifs de la police et gendarmerie nationales pouvant intervenir dans leur commune, sous prétexte que celle-ci s'est dotée d'une police municipale. Les policiers ne sont pas et ne doivent pas être les supplétifs des deux premières forces de sécurité intérieure.
La police municipale doit rester une police de sécurité du quotidien dans la main du maire.
Elle demande s'il est envisagé que l'État déjudiciarise le traitement de certaines infractions pénales afin d'augmenter l'efficacité des polices municipales, et elle l'interroge sur les pistes qu'il envisage pour faire évoluer l'interopérabilité entre police municipale et police/gendarmerie.
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Transmise au Ministère de l'intérieur
Réponse du Ministère délégué auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement publiée le 12/02/2025
Réponse apportée en séance publique le 11/02/2025
M. le président. La parole est à Mme Christine Herzog, auteure de la question n° 243, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Mme Christine Herzog. Ma question porte sur l'avenir de la police municipale.
Créé sur l'initiative du maire, ce service de proximité est chargé de la surveillance de l'ordre public et de la prévention.
Face à l'augmentation de la délinquance et des violences urbaines, face à la progression du narcotrafic et à l'ensauvagement de la population, les policiers municipaux sont les premiers sur le terrain. Ils interviennent souvent avant la police ou la gendarmerie nationales. Le maintien de la sécurité est pourtant l'une des premières fonctions régaliennes.
Le maire ne doit pas être contraint d'orienter les missions de ses agents de police pour suppléer les carences de l'État en matière de sécurité des populations. Les effectifs de la police et de la gendarmerie nationales, dont le détail n'est d'ailleurs pas connu, tendent pourtant à être remplacés par des policiers municipaux.
La mission de prévention et de proximité de la police municipale s'en trouve nécessairement mise à mal. En outre, un tel effort coûte cher aux collectivités territoriales : en 2023, les polices municipales représentaient près de 4 % des dépenses de fonctionnement des communes.
J'ajoute que les policiers municipaux doivent prendre de plus en plus de risques, faute d'équipements suffisants et de prérogatives judiciaires étendues.
Opter pour des solutions judiciaires, c'est choisir un modèle plus répressif, qui changerait le rapport des policiers municipaux au public ; ce n'est pas forcément ce que souhaitent les élus.
Madame la ministre, l'État va-t-il consentir davantage de moyens pour permettre l'intervention des policiers et gendarmes partout sur le territoire ? Ne peut-on pas trouver une meilleure complémentarité avec les policiers municipaux sur le terrain pour garantir la sécurité de nos concitoyens ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Christine Herzog, vous le soulignez avec raison, plus aucune partie de notre territoire, pas même les zones rurales, n'est épargnée par la délinquance.
Vous le savez, le renforcement de la présence de la police et de la gendarmerie nationales passe non seulement par les effectifs, mais aussi par le maillage territorial. C'est tout le sens des 239 brigades que le Gouvernement a décidé de constituer, dont 80 ont été créées en 2024.
Pour autant, quel que soit le point du territoire concerné, les forces de sécurité intérieure ne peuvent agir seules. Leur travail doit s'articuler au mieux avec celui des autres acteurs du continuum de sécurité.
Les maires sont, dans leur commune, les pivots de la lutte contre la délinquance. Ils disposent de compétences propres, d'outils dédiés, comme la vidéoprotection, et de moyens humains spécifiques, parmi lesquels ceux des polices municipales. Ces dernières constituent une troisième force de sécurité intérieure - je n'oublie pas le tribut qu'elles paient, elles aussi, à la violence.
Si des progrès ont été enregistrés, nous devons aller plus loin pour que les polices municipales s'engagent plus efficacement dans la sécurité du quotidien.
M. le ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, a élevé au rang d'enjeu majeur la montée en puissance des polices municipales. Il a ainsi demandé aux préfets d'en faire un axe fort de leurs plans d'action départementaux de restauration de la sécurité du quotidien.
Je n'irai pas jusqu'à parler d'interopérabilité, car bien des éléments singularisent les polices municipales, parmi lesquels leurs autorités d'emploi - vous l'avez rappelé -, le rôle de l'autorité judiciaire et leurs compétences légales. J'ajoute que la libre administration des collectivités reste un principe essentiel.
Cela étant - nous sommes d'accord sur ce point -, il faut davantage de complémentarité et de synergies opérationnelles. Nous devons aussi accroître les prérogatives et les moyens des polices municipales, notamment leur armement et leur protection.
Les conclusions du Beauvau des polices municipales, mené par François-Noël Buffet, sont attendues pour le début du mois d'avril prochain. Le renforcement des dispositifs de coordination figure parmi les axes de travail retenus dans ce cadre. La contraventionnalisation de certains délits, par exemple ceux qui ne sont pas punis d'une peine d'emprisonnement, constitue plus précisément une hypothèse à étudier.
La représentation nationale sera bien sûr informée de l'issue de ces discussions, et je ne doute pas que nous aurons, ensemble, à faire ensuite avancer un certain nombre de sujets de nature législative.
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