Question de M. OUZOULIAS Pierre (Hauts-de-Seine - CRCE-K) publiée le 28/11/2024
M. Pierre Ouzoulias interroge M. le ministre de l'intérieur sur les droits et obligations des affectataires des édifices cultuels et sur l'articulation entre la loi du 9 décembre 1905 et l'article L. 2124-31 du code général de la propriété des personnes publiques.
L'article 13 de la loi du 9 décembre 1905, relative à la séparation des Églises et de l'État, et l'article 5 de la loi du 2 janvier 1907, sur l'exercice public des cultes, mettent à la disposition des fidèles et des ministres des cultes les édifices religieux propriétés de l'État et des collectivités territoriales pour la pratique de leur religion. La loi de 1905 affirme expressément la gratuité de l'affectation cultuelle et la jurisprudence a établi qu'elle était aussi perpétuelle, totale et exclusive. Le ministre du culte affectataire est ainsi détenteur du droit absolu d'organiser le culte et donc de s'opposer à tout usage qui pourrait le contrarier. Cet usage cultuel exclusif, dont il est le garant, est une condition du libre exercice du culte garanti par la Constitution.
Néanmoins, l'article 17 de la même loi du 9 décembre 1905 reconnait que la visite des édifices et des objets mobiliers classés qu'ils renferment est gratuite. Cette gratuité a été confirmée par l'article 118 de la loi de finances du 31 décembre 1921, toujours en vigueur, qui institue un droit d'entrée pour la « visite des musées, collections et monuments appartenant à l'État », mais exclut explicitement les édifices cultuels classés.
La loi reconnait ainsi une double affectation cultuelle et culturelle du domaine public constitué par les édifices religieux propriétés de l'État et des collectivités. Toutefois, la jurisprudence soumet leur usage culturel à l'accord préalable de l'affectataire ou ne l'autorise que s'il est organisé dans des parties du bâtiment distinctes de celles dans lesquelles se déroule le culte.
L'article L. 2124-31 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006, autorise cette double affectation dans toutes les parties d'édifices affectés au culte en la subordonnant toutefois à l'accord de l'affectataire. Il étend à toutes les « activités compatibles avec l'affectation cultuelle » ce principe de l'accord préalable qui lie le propriétaire et l'affectataire. Ces dispositions autorisent le partage d'une redevance domaniale.
La circulaire n° 2008-002 du 21 avril 2008 relative à l'utilisation des édifices de culte appartenant à l'État à des fins non cultuelles, prise par les ministères de l'intérieur et de la culture, précise les modalités d'autorisation de leur utilisation et rappelle que le desservant est seul à « apprécier la compatibilité des activités envisagées avec l'affectation cultuelle de l'édifice ». Elle indique que les principes qu'elle énonce ont « vocation à inspirer la pratique suivie pour les édifices cultuels appartenant à des collectivités territoriales. ».
L'article L. 2124-31 institue ainsi un régime dérogatoire aux lois de 1905 et 1907 en organisant l'utilisation culturelle des édifices religieux au profit de l'État et des collectivités, dans le cadre d'une relation contractuelle avec les affectataires.
Cependant, ce dispositif législatif ne précise pas si les mêmes droits sont ouverts aux affectataires. Autrement dit, à quelles conditions les cultes peuvent-ils utiliser à des fins culturelles les édifices dont ils sont affectataires ? Les autorisations de leurs propriétaires doivent-elles faire l'objet de conventions ? Enfin, juridiquement, dans quelle mesure l'article L. 2124-31 permet-il au desservant d'un édifice religieux de se soustraire à l'obligation de l'exclusivité de l'affectation cultuelle à laquelle il est soumis conformément aux lois du 9 décembre 1905 et du 2 janvier 1907 ?
- page 4515
Transmise au Ministère de l'intérieur
En attente de réponse du Ministère de l'intérieur.
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