Question de Mme RENAUD-GARABEDIAN Évelyne (Français établis hors de France - Les Républicains-R) publiée le 14/11/2024
Mme Évelyne Renaud-Garabedian attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la fermeture des comptes bancaires détenus en France par des Français de l'étranger.
De nombreux Français résidant l'étranger ont soudainement vu leur compte bancaire français clôt par leur banque. Depuis quelques années les réglementations européennes et internationale de lutte contre le blanchiment de capitaux, la corruption et le financement du terrorisme imposent aux banques un devoir de vigilance accru. Pour éviter la charge administrative de la vérification de l'origine des fonds transitant sur le compte, les établissements bancaires préfèrent clore ou ne pas en ouvrir de comptes aux Français résidant dans des pays qu'ils estiment à risque ou sensibles. La procédure du droit au compte vers lesquelles ces Français sont bien souvent orientés n'est pas adaptée. En effet, le compte ouvert dans une banque désignée par la Banque de France ne dispose que de services basiques. Par ailleurs, cette même banque peut à son tour clore le compte lorsque qu'elle n'est pas en mesure de satisfaire aux obligations de vigilance à l'égard de la clientèle.
Alors que la loi bancaire de 1984 reconnait aux résidents en France comme aux Français de l'étranger le droit de posséder un compte bancaire, elle lui demande quelles mesures il entend mettre en oeuvre pour faire respecter ce droit. Elle suggère que la Banque postale - filiale de la Poste - devienne la banque de référence pour les Français établis hors de France en leur garantissant l'ouverture et le maintien de leur compte bancaire dès lors qu'ils respectent le formalisme exigé.
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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 30/01/2025
La loi permet à toute personne (particulier ou professionnel) domiciliée en France, sans condition de nationalité et tout Français résidant à l'étranger, qui n'a pas de compte, d'obtenir l'ouverture d'un compte bancaire en France (article L. 312-1 du code monétaire et financier). Dans le cas où la banque refuse d'ouvrir un compte, elle doit délivrer au demandeur une attestation de refus d'ouverture de compte. Ce document permet de faire valoir le droit au compte auprès de la Banque de France. En application de la procédure du droit au compte, la Banque de France désigne un établissement bancaire qui sera tenu d'ouvrir le compte. La banque désignée est dans l'obligation de fournir, gratuitement, au demandeur, les services bancaires de base notamment une carte de paiement à autorisation systématique, l'encaissement de chèques et de virements et les dépôts et retraits d'espèces à ses guichets (article D. 312-5 du code monétaire et financier). Dans le cadre d'une relation entre une banque et son client, en dehors d'une procédure de droit au compte, la clôture d'un compte bancaire peut intervenir soit à l'initiative de la banque, qui n'est pas tenue de motiver sa décision, soit à l'initiative du client, en vertu du principe de liberté contractuelle. Toutefois, cette opération doit s'effectuer dans le respect de la convention de compte de droit privé en accordant au client un préavis d'au moins deux mois (article L. 312-1-1 du code monétaire et financier). Ce délai de préavis doit donner au client le temps suffisant pour ouvrir un autre compte et effectuer les dernières opérations utiles à la continuité de gestion des opérations en cours. Si en vertu du principe de liberté contractuelle une banque peut clôturer un compte bancaire, cette liberté ne peut méconnaitre les limites posées par la loi en matière de discrimination, et notamment les articles L. 225-1 et L. 225-2 du code pénal. L'article L. 225-2 du code pénal précité précise que le fait de refuser la fourniture d'un bien ou d'un service en raison notamment de la nationalité ou de la localisation géographique constitue une discrimination. L'attention des établissements bancaires est ainsi régulièrement attirée sur l'importance du respect de la règlementation en matière de pratiques discriminatoires et des sanctions qui y sont associées en cas de non-respect. Si des expatriés s'estimaient victimes de fermetures abusives de comptes bancaires, il leur serait loisible dans un premier temps de saisir le service relations clientèle de la banque pour faire part de leur litige. Si celui-ci persistait, ils auraient la possibilité dans un second temps de se rapprocher du médiateur désigné par leur établissement bancaire. Les coordonnées de ces services figurent sur les sites internet des banques. En cas de soupçon de discrimination, plusieurs possibilités sont offertes aux personnes qui s'estiment victimes de telles pratiques, il est possible de saisir le Défenseur des droits de la République française (https://www.defenseurdesdroits.fr) et si nécessaire d'effectuer un signalement auprès de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution via la Banque de France (par courrier TSA 50120, 75035 Paris cedex 01, par téléphone 3414 ou par formulaire en ligne https://accueil.banque-france.fr/uti/#/accueil) qui contrôle la conformité des pratiques commerciales des établissements de crédit et sanctionne leurs manquements le cas échéant. Par ailleurs, la jurisprudence a développé une acception large des faits relevant des pratiques discriminatoires. Cette interprétation, alliée aux aménagements de la charge de la preuve tels qu'ils résultent de la loi, sont protecteurs pour les victimes, qui demeurent libres d'ester en justice contre leur établissement bancaire si elles estiment que la clôture du compte est constitutive d'une pratique discriminatoire. Enfin, s'agissant plus spécifiquement de la Banque postale, il peut être rappelé que la mission d'accessibilité bancaire qui lui a été confiée par l'État, la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, permet d'assurer la mise à disposition à toute la population de certains services bancaires de base grâce à un fonctionnement spécifique du livret A, ceci, en complément de dispositifs tel que le « droit au compte ».
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