Question de Mme PLUCHET Kristina (Eure - Les Républicains) publiée le 28/11/2024
Mme Kristina Pluchet interroge Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques sur l'exigence de conformité acoustique à laquelle sont confrontés les porteurs de projets éoliens terrestres conformément aux articles 26 et 28 de l'arrêté du 26 août 2011 afin de garantir la santé et la sécurité du voisinage, en complément de sa question écrite 00705 du 3 octobre 2024, précédemment publiée le 21 mars 2024 (question 10728).
Conscient que le respect des exigences méthodologiques jusqu'à présent en vigueur n'empêche pas de déceler des émergences préjudiciables à la santé ou la sécurité du voisinage, comme l'ont retenu différentes décisions jurisprudentielles (CA Toulouse, 8 juillet 2021, no RG 20/01384 et CA Rennes, 28 mars 2023, n° 20/02706), le Gouvernement a élaboré un protocole de mesure gouvernemental de l'impact acoustique afin de mesurer de manière plus adaptée les nuisances sonores imposées aux riverains. Toutefois, ce protocole, comme l'ancien cadre règlementaire, persiste à introduire une dérogation à l'encadrement des nuisances sonores prévu par le code de la santé publique (articles R. 1336-4 à R. 1336-13), et présente au moins deux écueils connus et reconnus. D'abord, il implique de se référer à des médianes qui masquent les émissions sonores les plus dérangeantes pour la santé des riverains, incluant leur sommeil. Ensuite, les protocoles de mesurage ignorent les basses et très basses fréquences, ainsi que les modulations d'amplitude, qui sont pourtant à la source des troubles ayant conduit à des condamnations judiciaires.
Or, le 8 mars 2024, le Conseil d'État a annulé partiellement 2 arrêtés (du 10 décembre 2021) et trois décisions ministérielles (des 10 décembre 2021, 31 mars 2022 et 11 juillet 2023) d'approbation du protocole de mesure de l'impact acoustique d'un parc éolien terrestre, ainsi que les différentes versions du protocole au motif que ces décisions ministérielles de mesure de bruit, ayant par leurs effets une incidence directe et significative sur l'environnement, n'avaient pas fait l'objet d'une évaluation environnementale, pourtant de prescription légale et qu'elles n'avaient pas été soumises à la participation du public, enfreignant ainsi les principes de participation et de transparence.
Par ailleurs la loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables a enjoint au Gouvernement dans son article 68 le dépôt d'un rapport d'évaluation des nuisances sonores occasionnées aux riverains par les projets éoliens terrestres, au regard de critères liés à l'intensité des nuisances et à la répétition des bruits, en particulier à travers la définition d'indicateurs de bruit événementiel tenant compte notamment des pics de bruit, critère jusqu'alors non pris en compte dans les contrôles de conformité acoustique.
Il est donc désormais avéré que les impératifs de santé publique ne peuvent plus être traités comme un facteur plus ou moins bloquant du développement de l'éolien mais qu'ils doivent désormais gouverner l'objectif poursuivi par la réforme à venir de la règlementation acoustique propre à cette énergie.
Elle lui demande donc comment le Gouvernement entend, dans le cadre des exigences de concertation et d'évaluation rappelées par le Conseil d'État, garantir une meilleure prise en compte réglementaire des impératifs de santé, et des enjeux attestés qu'ils impliquent pour des riverains de plus en plus nombreux, dans les instruments de mesure de l'ensemble des nuisances sonores générées par les installations éoliennes sur les riverains.
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Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports publiée le 04/12/2024
Réponse apportée en séance publique le 03/12/2024
M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, auteure de la question n° 227, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Mme Kristina Pluchet. Monsieur le ministre, vous n'êtes pas sans savoir que les porteurs de projets éoliens terrestres ont l'obligation de respecter des normes acoustiques définies aux articles 26 et 28 de l'arrêté du 26 août 2011.
Or il se trouve que de récentes décisions judiciaires ont condamné des promoteurs, pourtant en règle à l'égard des protocoles de mesure, retenant que le respect des normes prônées par ces protocoles ne garantissait pas efficacement la santé et la sécurité du voisinage, expressément visées dans notre droit.
En effet, les basses et très basses fréquences, ainsi que les modulations d'amplitude, qui sont pourtant à la source des troubles ayant conduit à ces condamnations, sont toujours ignorées, par dérogation à l'encadrement des nuisances sonores prévues par le code de la santé publique.
C'est pourquoi le Parlement, à l'article 68 de la loi du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, a enjoint au Gouvernement de lui remettre un rapport d'évaluation des nuisances sonores occasionnées aux riverains par les projets éoliens terrestres, au regard de critères liés à l'intensité des nuisances et à la répétition des bruits.
Le dernier protocole de mesure du bruit élaboré par le Gouvernement, entré en vigueur en 2021, mais annulé par le Conseil d'État pour défaut d'évaluation environnementale en mars dernier, n'intégrait d'ailleurs toujours pas ces critères.
Ma question est simple, monsieur le ministre. Puisque la réglementation en vigueur est, à ce jour, insuffisante et préjudiciable, quand et comment comptez-vous garantir rapidement la prise en compte des impératifs de santé pour les riverains, qui sont de plus en plus nombreux, dans les instruments de mesure des nuisances sonores provoquées par les installations éoliennes terrestres ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Durovray, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports. Madame la sénatrice, Agnès Pannier-Runacher m'a chargée de répondre à votre question sur l'installation des éoliennes et sur leurs incidences pour les riverains.
Vous avez raison, les nuisances sonores, quelles qu'elles soient, sont un fléau pour de nombreux Français et peuvent avoir un effet majeur sur la santé publique. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a lancé ces dernières années de nombreuses actions pour réduire le bruit, notamment celui des éoliennes.
Avant toute autorisation d'un parc éolien, une étude d'impact est déposée, comprenant évidemment une étude acoustique.
Depuis 2021, un contrôle acoustique systématique a lieu dans les douze mois suivant la mise en service des parcs éoliens. Des vérifications concrètes sont mises en oeuvre.
Je précise que l'annulation par le Conseil d'État de plusieurs dispositions sur le bruit des parcs éoliens est fondée sur des motifs de procédure uniquement ; elle ne remet en cause ni les seuils ni la validité des méthodes proposées.
Le rapport que vous mentionnez a justement permis de constater que les mises à jour des protocoles acoustiques en 2022 ont amélioré les études d'impact acoustique et ont donc permis d'encadrer encore plus précisément le bruit des éoliennes.
Agnès Pannier-Runacher porte une attention toute particulière à cette question afin que le développement, dans certains lieux, des parcs éoliens, qui sont nécessaires à la transition énergétique et aux objectifs de décarbonation du pays, se fasse en bonne intelligence avec les populations riveraines. Celles-ci ne doivent en aucun cas subir des désordres trop importants.
Je ne manquerai évidemment pas de relayer votre question à Mme la ministre.
M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour la réplique.
Mme Kristina Pluchet. J'insiste sur le fait que, aujourd'hui, l'instrument de mesure acoustique n'est ni homologué ni approprié à l'éolien. Je compte donc vraiment sur vous pour transmettre ce message à Mme la ministre !
Il est temps de prendre en compte ce problème de santé publique et de mettre en place un outil homologué et réellement approprié à l'évaluation des problèmes acoustiques liés à l'éolien terrestre.
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