Question de Mme BORCHIO FONTIMP Alexandra (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 14/11/2024

Mme Alexandra Borchio Fontimp interpelle Mme la ministre du travail et de l'emploi au sujet de la reconnaissance des maladies professionnelles de nos sapeurs-pompiers et particulièrement quant aux cancers qui découlent de leur exposition répétée à des produits de combustion reconnus comme cancérogènes. Cet enjeu, mis en exergue par le rapport d'information sénatorial sur les cancers imputables à l'activité des sapeurs-pompiers publié en mai 2024, est une priorité pour la profession. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a reconnu en 2022 le caractère cancérogène de la profession de sapeur-pompier, confirmant ainsi les travaux publiés par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) en août 2019. Seules deux maladies sont aujourd'hui reconnues comme imputables à la profession de sapeur-pompier, à savoir le carcinome du nasopharynx et le carcinome hépatocellulaire. Pourtant, le CIRC établit un lien entre le métier de soldat du feu et d'autres maladies comme le cancer du côlon, de la vessie ou encore de la prostate. Si la mise aux normes de leurs équipements s'avère nécessaire, cette dernière ne peut se faire sans une réelle refonte des tableaux des maladies professionnelles. Cette décision, qui relève du pouvoir réglementaire du ministère du travail et de l'emploi, demeure une avancée très attendue par nos soldats du feu. L'ancien ministre de l'intérieur avait à ce titre initié une démarche pour y aboutir. En effet, il est dorénavant urgent voire impérieux de faire évoluer la législation pour y inclure les enseignements scientifiques dispensés par le CIRC. Actuellement, seul le tableau n° 43 bis annexé au code de la sécurité sociale en application de son article R. 461-3 traite du carcinome du nasopharynx. Aucun autre ne prend en compte l'activité de « travaux d'extinction d'incendie » comme étant à l'origine d'une de ces pathologies. En conséquence, elle souhaite une modification des tableaux des maladies professionnelles, soit via une révision soit via la création de nouveaux. Il est urgent de reconnaître sans attendre le lien entre les fumées toxiques et divers types de maladies pour accompagner nos sapeurs-pompiers dans cette douloureuse épreuve.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes, chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes publiée le 04/12/2024

Réponse apportée en séance publique le 03/12/2024

M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, auteure de la question n° 201, adressée à Mme la ministre du travail et de l'emploi.

Mme Alexandra Borchio Fontimp. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je vais vous parler de la santé de ceux qui, chaque jour, risquent leur vie pour protéger la nôtre.

Nos forces de sécurité méritent, bien sûr, notre attention de tous les instants. C'est vrai en particulier de nos sapeurs-pompiers, exposés aux incendies. En effet, rappelons que, lorsque les gens fuient pour échapper à la fumée, nos soldats du feu y pénètrent.

Administratrice depuis près de dix ans du service départemental d'incendie et de secours (Sdis) des Alpes-Maritimes, département situé dans une zone particulièrement en proie aux flammes - plus de 3 200 incendies s'y sont déclarés rien qu'en 2023 -, j'ai observé et rencontré ces hommes et ces femmes qui, après dix ou vingt ans d'exercice, ont la peau ou le souffle qui transpire la fumée.

Je pense notamment à Thomas, à Sylvain, à Damien, à Frédéric ou encore à Thierry, pour ne citer qu'eux. Je vous invite à découvrir leur parcours et, surtout, leurs épreuves, parfois fatales, face à la maladie dans le documentaire qui sera diffusé le 13 décembre prochain sur Public Sénat.

Dès 2022, le Centre international de recherche sur le cancer a reconnu comme cancérogène pour l'homme l'exposition professionnelle en tant que pompier à des fumées toxiques, avalisant ainsi les travaux déjà publiés par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) en août 2019.

Le récent rapport sénatorial de mes collègues Anne-Marie Nédélec et Émilienne Poumirol a permis de remettre le sujet sur la table.

À ce jour, seules deux maladies sont reconnues comme imputables à l'exercice de cette profession. Il est désormais grand temps, madame la secrétaire d'État, de faire évoluer la reconnaissance des maladies professionnelles de nos soldats du feu !

Cette décision relève du pouvoir réglementaire, et le ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, y est favorable, tout comme l'était son prédécesseur, que j'ai alerté par le passé.

Comme vous le savez, l'empoisonnement ne s'effectue pas seulement par inhalation, quand les pompiers sont au feu : l'absorption d'effluents d'incendie peut aussi se faire par voie cutanée, voire par ingestion, malgré les équipements de protection individuelle, et ce, comme vous vous en doutez, en raison des limites de conception, de l'entretien ou de la décontamination de ces derniers.

Madame la secrétaire d'État, il est urgent de modifier les tableaux de maladies professionnelles, soit en les révisant, soit en en créant de nouveaux, afin de mieux accompagner nos sapeurs-pompiers dans cette épreuve.

C'est une priorité pour eux ; c'est un devoir pour nous.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes.

Mme Salima Saa, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes. Madame la sénatrice, Mme la ministre du travail et de l'emploi m'a chargée de répondre à votre question.

Les risques professionnels auxquels sont exposés les sapeurs-pompiers professionnels sont un sujet d'importance pour le ministère du travail.

Tout d'abord, du fait de son exposition potentielle aux fumées de combustion, la profession bénéficie des mesures de prévention prévues par le code du travail relatives aux expositions aux agents chimiques, qui visent notamment à minimiser les expositions à un niveau aussi bas que techniquement possible et à renforcer la surveillance médicale.

Concernant la réparation des pathologies professionnelles, comme vous le soulignez, les tableaux de maladies professionnelles nos 43 bis et 45 mentionnent explicitement les travaux d'extinction des incendies pour la réparation du carcinome du nasopharynx et les services de secours et de sécurité pour celle du carcinome hépatocellulaire. Par conséquent, les pompiers peuvent déjà bénéficier d'une reconnaissance automatique de maladie professionnelle pour ces deux pathologies.

Par ailleurs, sur saisine du ministère du travail, l'Anses a publié un rapport en octobre 2024 dans lequel elle fait état d'un niveau de corrélation avéré entre les cancers de la vessie, de la plèvre ou du péritoine et la profession de pompier.

À noter que ces pathologies figurent respectivement dans trois tableaux des maladies professionnelles. Ainsi, pour les pompiers relevant du régime de droit privé, la reconnaissance devant le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) est donc déjà possible.

Compte tenu du fait que les tableaux de maladies professionnelles s'imposent à l'ensemble des régimes, le ministère chargé du travail a entamé les démarches nécessaires à leur révision ou modification afin d'y intégrer le lien entre les cancers de la vessie, de la plèvre ou du péritoine et la profession de pompier.

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