Question de Mme BELLAMY Marie-Jeanne (Vienne - Les Républicains-A) publiée le 14/11/2024

Mme Marie-Jeanne Bellamy attire l'attention de Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation sur la situation financière dramatique des départements. Depuis plusieurs années déjà, les départements ont absorbé de nouvelles missions dans le domaine social. Des missions, dont le coût en constante augmentation, représente plusieurs milliards de dépenses supplémentaires. Les dépenses sociales qui progressent sont la prestation de compensation du handicap (2,8 milliards d'euros, en augmentation de 11,7 %) et l'aide sociale à l'enfance (6,3 milliards d'euros, + 11,8 %). A cela, s'est ajoutée l'inflation normative et une conjoncture économique défavorable. Dans le même temps, les départements font face à une baisse brutale et conséquente de leurs ressources à la suite notamment de l'effondrement des droits de mutation, de la suppression des leviers fiscaux, ou encore de l'absence de compensation juste et équitable de la part de l'État. Les départements font face à une équation insoluble, le fameux « effet ciseaux » : des dépenses qui augmentent considérablement et des recettes qui baissent. Une situation inquiétante qui a été confirmée par la Cour des comptes dans son rapport annuel de juillet 2024. Le 17 octobre 2024, à l'annonce du nouvel effort budgétaire demandé par le Gouvernement, l'Assemblée des départements de France a dénoncé un projet de loi de finances pour 2025 de nature à mettre « en impasse budgétaire » près de 85 % des départements d'ici fin 2025. Pour le département de la Vienne, cet effort représente 9 millions d'euros d'économie à réaliser, ce alors même que, depuis 2 ans, le département a déjà absorbé 46 millions d'euros de dépenses imposées par l'État et non compensées. Aussi, elle souhaiterait connaître les réelles mesures envisagées par le Gouvernement pour sauver nos départements, premiers partenaires de nos communes, piliers de la République.

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Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports publiée le 04/12/2024

Réponse apportée en séance publique le 03/12/2024

M. le président. La parole est à Mme Marie-Jeanne Bellamy, auteure de la question n° 193, adressée à Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.

Mme Marie-Jeanne Bellamy. Monsieur le ministre, comme vous, j'ai assisté aux Assises des départements de France. Nos départements sont en sursis. Conseillère départementale de la Vienne, je constate un effet de ciseaux significatif en fonctionnement, avec une baisse de recettes de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 23 millions d'euros entre 2022 et 2024 et, dans le même temps, une augmentation des dépenses supplémentaires imposées par l'État, non ou mal compensées, à hauteur de 23 millions d'euros, soit une perte de 46 millions d'euros en trois ans. À cela s'ajoutent l'inflation et la hausse des taux d'intérêt.

Pourtant, le projet de loi de finances exige un nouvel effort susceptible de mettre « en impasse budgétaire » près de 85 % des départements d'ici à la fin de 2025. Pour la Vienne, c'est 16 millions d'euros d'économies à réaliser.

Nous sommes dans une impasse financière, avec cette particularité que les dépenses des départements ne sont pas pilotables.

Comme vous, j'ai écouté attentivement le discours du Premier ministre. Je partage son constat : le modèle départemental que nous connaissons a atteint ses limites. Je partage également son souhait « d'inventer un autre modèle » pour mener à bien les projets que les départements souhaitent mettre en oeuvre. Maintenant que cela est dit, qu'allez-vous faire ?

Nos départements sont en première ligne pour accompagner la ruralité et les populations fragiles face aux défis du bien vieillir et aux enjeux de sécurité civile.

Quelle commune allons-nous cesser d'accompagner ? Quelles routes, quel patrimoine allons-nous cesser d'entretenir ? Quelle population du département allons-nous devoir abandonner ?

Si rien n'est fait, au printemps prochain, trente départements, dont la Vienne, n'auront d'autre choix que de vous remettre leurs clés. La mise en oeuvre du 49.3 et le dépôt de motions de censure compliquent évidemment la donne.

Je souhaite que le Gouvernement soit confirmé pour que nous puissions avancer et répondre aux attentes nombreuses des Français. Si tel était le cas, donnerez-vous suite aux propositions de Départements de France ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Durovray, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports. Madame la sénatrice, Mme Catherine Vautrin m'a chargé de vous répondre. C'est une question à laquelle je suis d'ailleurs sensible en tant que président d'un département, étant moi-même confronté aux difficultés que vous mentionnez et dont le Gouvernement a pleinement conscience.

Vous avez évoqué les récentes Assises des départements de France au cours desquelles le Premier ministre a eu l'occasion de rappeler à la fois son soutien aux élus, sa connaissance de la difficulté des départements et sa volonté de réduire de manière significative le niveau d'efforts demandés aux collectivités.

Qu'il me soit permis de saluer l'esprit de responsabilité qui a animé les présidents de département et les conseillers départementaux face à la situation budgétaire de l'État.

Le Premier ministre s'est notamment engagé à ce que les départements qui le souhaitent puissent relever de 0,5 point supplémentaire le taux de DMTO pendant une période de trois ans. Sur la base d'une estimation de 2024, cela pourrait générer de l'ordre de 1 milliard d'euros de recettes supplémentaires.

Le Gouvernement a également entendu travailler sur les ressources et financements des départements relevant de la sphère sociale.

Tout d'abord, je vous rappelle que le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) vient de finaliser un projet sur lequel Catherine Vautrin s'est engagée : celui de l'expérimentation de la fusion des sections soins et dépendance, qui débutera le 1er janvier 2025, ce qui permettra à vingt-trois départements de proposer des solutions plus attractives, notamment en ce qui concerne les modalités de reprise de ressources. Ces vingt-trois départements expérimentateurs pourront ainsi dégager une économie de près de 100 millions d'euros par an.

Par ailleurs, comme l'a annoncé le Premier ministre, le Gouvernement enclenche en 2025 la première étape de la réforme des concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et de leur simplification. En l'état, son objectif est clair : faire en sorte qu'aucun département n'ait en 2025 un taux de couverture de dépenses d'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou de prestation de compensation du handicap (PCH) inférieur au taux de 2024, soit un geste supplémentaire de 150 millions d'euros.

Comme vous, je souhaite que le PLFSS soit adopté afin que ces dispositions puissent être mises en oeuvre pour les départements, au-delà de la baisse significative du taux d'effort dont nous avons discuté ici la semaine dernière.

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