Question de M. BLANC Étienne (Rhône - Les Républicains) publiée le 14/11/2024
Question posée en séance publique le 13/11/2024
M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Étienne Blanc. Monsieur le ministre de l'intérieur, le rapport qui a été écrit dans le cadre de la commission d'enquête sénatoriale sur l'impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier a consacré un chapitre assez important à l'épineuse question de la corruption.
Les choses n'ont pas été faciles, car nous avons constaté que les administrations centrales et les inspections générales avaient peu de documents solides sur ce sujet, laissant entendre que le Gouvernement regardait cela d'un peu loin.
Pourtant, nous savons aujourd'hui qu'un certain nombre de services administratifs connaissent une véritable dérive.
Il en est ainsi de certaines collectivités territoriales, mais aussi de quelques dockers ou agents des douanes qui ont perçu une rémunération après avoir évité qu'un container ne soit fouillé et scanné.
Il en est ainsi de plusieurs greffiers, agents des tribunaux judiciaires et personnels des centres de détention, qui se sont abstenus d'accomplir une formalité dans le but de faire tomber une procédure judiciaire.
Il en est ainsi, hélas ! d'un certain nombre de services de police et de gendarmerie. En effet, nous déplorons une augmentation significative de la consultation illégale de fichiers : des informations sont recueillies et sont ensuite communiquées à des narcotrafiquants, moyennant rémunération.
Monsieur le ministre de l'intérieur, vous avez à plusieurs reprises utilisé le terme de « narco-État ». Nous savons aujourd'hui que la corruption en est un des qualificatifs. Elle est le moyen, sinon de détruire, du moins d'affaiblir les centres névralgiques destinés à la lutte contre la criminalité.
Dans ce contexte, quelle politique le Gouvernement entend-il mener afin que nous comprenions mieux ce phénomène ? Surtout, quelles dispositions seront prises pour lutter contre ce qui peut considérablement affaiblir la puissance de l'État ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 14/11/2024
Réponse apportée en séance publique le 13/11/2024
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Étienne Blanc, vous étiez à nos côtés lorsque le garde des sceaux et moi-même nous sommes rendus à Marseille vendredi dernier ; le président de la commission d'enquête sénatoriale sur le narcotrafic était également présent.
J'ai été impressionné par deux moments très forts. D'abord, lorsque nous avons rencontré les familles de victimes qui ont toutes relayé ce même message : « Arrêtez ce massacre ! » Ensuite, lorsque nous avons échangé avec les enquêteurs de la police judiciaire (PJ) et de l'Office anti-stupéfiants (Ofast).
Ces derniers nous ont décrit une situation terrible, caractérisée par l'extraordinaire et inquiétante métamorphose de ces organisations criminelles, dont le déploiement tentaculaire sur l'ensemble du territoire est à craindre.
La diversification de leurs activités économiques est indéniable et s'accompagne, bien évidemment, de phénomènes de corruption.
D'effrayantes méthodes sont employées, telles que la torture et la séquestration, parfois mises en scène sur les réseaux sociaux. Il est aussi fait recours à de jeunes tueurs, qui constituent désormais une main-d'oeuvre jetable.
Les agents rencontrés nous ont également indiqué qu'ils n'agissaient pas à armes égales face à ces criminels.
Vous avez vous-même réalisé cette description et dressé ces constats, monsieur le sénateur, dans le cadre de la commission d'enquête dont vous étiez le rapporteur. Vous avez même consacré un chapitre à la corruption.
Au vu des sommes en jeu et des menaces qui peuvent peser sur divers agents, à la fois publics et privés, ce phénomène doit désormais être pris au sérieux.
Il y a quelques semaines, au mois d'octobre, un policier a dû rendre des comptes parce qu'il avait vendu un certain nombre d'informations sur le darknet, en échange de cryptomonnaie.
Les moyens de résoudre ces problèmes nous seront conférés par la proposition de loi sénatoriale visant à sortir la France du piège du narcotrafic. En son article 19, celle-ci prévoit de conduire des enquêtes administratives régulières pour les administrations les plus exposées à la corruption.
Il faudra sans doute faire mention du narcotrafic d'une façon claire, car il conviendrait de développer des techniques spéciales d'enquête ; nous aurons l'occasion d'en reparler.
Il faut agir vite et fort : comptez sur nous ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
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