Question de M. DURAIN Jérôme (Saône-et-Loire - SER) publiée le 07/11/2024

Question posée en séance publique le 06/11/2024

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jérôme Durain. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Plus personne n'ignore désormais que le narcotrafic menace les intérêts fondamentaux de la Nation. (M. Stéphane Ravier s'exclame.) La commission d'enquête du Sénat en a démontré au printemps la violence criminelle, l'emprise territoriale, la puissance financière corrosive.

Monsieur le ministre, vendredi, vous et M. le garde des sceaux allez faire des annonces à Marseille. J'ai compris que nous aurions le débat dans cet hémicycle au mois de janvier. Notre groupe prendra toute sa part à cet effort répressif, indispensable et urgent.

Ma question concerne le dernier kilomètre du trafic, c'est-à-dire ce qui se passe dans nos métropoles, dans nos villes, dans nos villages.

Les maires n'ont jamais autant fait pour la sécurité, avec 33 % d'augmentation des polices municipales. Pourtant, ils sont parfois mis au banc des accusés. En réalité, ils sont démunis. Faire peser sur les maires une responsabilité centrale dans de tels drames constitue un bien mauvais procès. Le Congrès des maires consacrera d'ailleurs pour la première fois une table ronde au narcotrafic.

Vous l'avez vu, à Rennes, à Poitiers, à Nîmes, nos élus, qui sont en première ligne, attendent un soutien puissant de l'État. Dans un esprit d'union nationale, nous le leur devons.

Monsieur le ministre, quelles sont vos pistes de travail ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe RDSE. - Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 07/11/2024

Réponse apportée en séance publique le 06/11/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Jérôme Durain, je voudrais d'abord saluer le travail que vous avez mené avec le rapporteur Étienne Blanc dans le cadre de la commission d'enquête. (Applaudissements sur toutes les travées.)

Honnêtement, lorsque nous avons demandé la création de cette commission d'enquête, je n'aurais jamais pensé que le mal était aussi enraciné. Vous l'avez d'ailleurs décrit, en parlant d'une véritable « submersion » sur tous les territoires.

Le trafic de cocaïne a été multiplié par cinq depuis une dizaine d'années. Surtout, les drogues les plus dures sont disponibles partout et tout le temps dans nos villes et dans nos villages, que ce soit à proximité des points de deal ou via des livraisons à domicile.

Comme je l'ai indiqué voilà quelques instants, la drogue, ce sont des enfants assassins et des enfants victimes. Nous devons donc faire un immense effort.

Et cet effort, il faut le faire d'abord dans un continuum de sécurité. L'État et tous les élus doivent se mobiliser.

À l'échelle de l'État, nous devons défendre au plus haut niveau cette cause, qui est pour moi une cause capitale, nationale. C'est la raison pour laquelle nous aurons dès demain une séance de travail avec le garde des sceaux, sous l'autorité du Premier ministre. Avec mon collègue de la place Vendôme, nous annoncerons à Marseille un certain nombre de mesures destinées à changer de cadre.

J'ai souvent comparé, ici même comme à l'Assemblée nationale, le narcotrafic au terrorisme. Je crois en effet que, comme vous l'avez dit vous-même, le narcotrafic et le crime organisé menacent jusqu'aux intérêts fondamentaux de la Nation. C'est une sauvagerie que nous devons combattre. Mais cette sauvagerie atteint aujourd'hui des niveaux qui en font une menace pour nos institutions et notre démocratie.

C'est pourquoi, cet effort, nous allons le faire. Ce sera difficile. Il faudra des années. Nous devrons changer de cadre et de braquet.

M. Pascal Savoldelli. Changer de système !

M. Bruno Retailleau, ministre. Nous reprendrons, je l'espère, bien des propositions que vous avez formulées. Je tiens d'ailleurs à rappeler qu'elles ont été votées à l'unanimité par l'ensemble des groupes de la Haute Assemblée. Je ne doute donc pas que, sur un tel sujet, nous pourrons trouver la voie de l'union nationale. C'est nécessaire.

Ce combat, de même que le combat contre le terrorisme, nous le gagnerons à une condition : que nous oubliions les étiquettes partisanes et que nous nous rassemblions tous. Et nous nous rassemblerons ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain, pour la réplique.

M. Jérôme Durain. Monsieur le ministre, je note avec satisfaction de nombreux points de convergence. Ceux-ci n'effacent pas des divergences sur d'autres points, par exemple sur la nécessité de la médiation et de l'approche sanitaire, ainsi que sur la question des racines sociales de la consommation.

Face à la criminalité organisée, il n'y a pas de solution magique : ni légalisation miraculeuse ni prohibition caricaturale. Le combat contre le narcotrafic ne pourra être remporté que s'il s'inscrit dans une recherche du consensus le plus large, sans faiblesse et sans excès. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe SER. - Mme Cathy Apourceau-Poly ainsi que MM. Bernard Buis et Henri Cabanel applaudissent également.)

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