Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE-K) publiée le 31/10/2024
M. Fabien Gay interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée du commerce extérieur et des Français de l'étranger sur la position française quant à l'aboutissement des négociations autour du traité de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et les pays du MERCOSUR.
Les négociations autour d'un traité de libre-échange avec le bloc économique du MERCOSUR, ouvertes en 1999, ont été menées par la commission européenne, qui disposait d'un mandat dont le contenu a été tenu secret, contrevenant à tous les canons démocratiques.
Lors du sommet du G7 de Biarritz, Emmanuel Macron avait déclaré que la France ne pouvait soutenir ce traité, qui ne contient aucune mesure environnementale, une position réaffirmée lors du Congrès mondial de la nature à Marseille, où il avait indiqué que « cet accord, tel qu'il a été conçu et pensé, ne peut pas être compatible avec notre agenda climatique et de biodiversité ».
Cette incompatibilité a été confirmée par les conclusions du rapport « Ampec » de la commission d'évaluation du projet d'accord UE-MERCOSUR.
Ainsi, la France avait mentionné son souhait d'exigences additionnelles qui se concentraient sur le climat, la déforestation et les normes sanitaires.
Si la commission européenne a proposé une « déclaration conjointe » ou un « protocole additionnel », ces correctifs seraient, en tout état de cause, totalement insuffisants.
Les résultats d'un sondage réalisé par YouGov entre le 1er et le 4 septembre 2020, mené en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Espagne établissaient que près de 80 % des personnes interrogées étaient défavorables à la mise en oeuvre de ce traité.
Pourtant, sans davantage de précisions, la Commission européenne a indiqué en octobre 2024, par voie de presse, envisager la mise en oeuvre de cet accord de libre-échange d'ici la fin de l'année.
Il faut souligner que l'Argentine, partie prenante au MERCOSUR, est actuellement dirigée par le président d'extrême-droite Javier Milei, dont la position climatosceptique ne fait aucun doute. Dans ce cadre, la mise en oeuvre d'exigences environnementales, de quelque nature qu'elles soient, est plus qu'incertaine.
En outre, ce traité de libre-échange est source d'inquiétude pour l'ensemble des syndicats agricoles français ; son contenu placerait les agriculteurs européens dans des situations de concurrence déloyale, et annihilerait la possibilité de travailler à un nouveau pacte agricole et une meilleure rémunération des paysans si l'on favorise dans le même temps l'import de denrées produites à moindre coûts social et environnemental.
En outre, des produits phytosanitaires interdits en Europe sont employés dans les pays du MERCOSUR, faisant naître des risques pour la santé publique.
Aussi, il demande que la France manifeste clairement son opposition à la mise en oeuvre du traité de libre-échange entre l'UE et les pays du MERCOSUR.
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Transmise au Ministère délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger
Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger publiée le 20/02/2025
La mobilisation du Gouvernement contre la conclusion prochaine des négociations de l'accord entre l'Union européenne (UE) et les pays du Mercosur a fait l'objet d'un débat et d'un vote à l'Assemblée nationale et au Sénat les 26 et 27 septembre, en application de l'article 50.1 de la Constitution. La déclaration du Gouvernement et les résultats du vote ont permis d'envoyer un message fort sur l'opposition de la France à l'accord, tel que proposé par la Commission. Ce débat a permis au Gouvernement de rappeler de nouveau que l'accord d'association UE-Mercosur n'était pas acceptable en l'état. Il ne remplit pas, en particulier, les conditions de protection de l'environnement et d'équité des conditions entre les producteurs européens et du Mercosur, rappelées à de nombreuses reprises par le Président de la République et le Gouvernement. Le Président de la République, en déplacement au Brésil et en Argentine dans le cadre du G20, a clairement rappelé cette position et sensibilisé les pays du Mercosur sur nos attentes et nos lignes rouges. Le Premier ministre a exprimé ce message avec fermeté lors de sa visite à Bruxelles et de sa rencontre avec la Présidente de la Commission européenne le 13 novembre. Tous les membres du Gouvernement concernés le répètent également lors de leurs échanges avec leurs homologues européens, qui montrent une sensibilité croissante à notre message sur la nécessité d'un rééquilibrage important de l'accord. Nous avons, en particulier, toujours demandé : - que l'Accord de Paris soit un élément essentiel de l'accord d'association UE-Mercosur : cela veut dire très concrètement que, en cas de violation de l'Accord de Paris, le bénéfice commercial de l'accord UE-Mercosur doit pouvoir être suspendu ; - que l'accord d'association UE-Mercosur soit pleinement aligné sur la nouvelle approche de l'UE en matière de commerce, de développement durable, y compris la possibilité d'appliquer des sanctions en cas de non-respect, et de normes vétérinaires et phytosanitaires ; - que la compétence des Etats membres soit respectée dans ce processus et que, par conséquent, la forme de l'accord soit celle d'un accord d'association mixte, requérant, d'une part, l'unanimité des Etats membres et d'autre part, un vote des Parlements nationaux. Nous devons également répondre concrètement aux légitimes inquiétudes des filières agricoles sensibles et nous assurer, d'une part que les flux d'importation ne déstabilisent pas nos marchés, en apportant des garanties suffisantes sous la forme de clauses de sauvegarde particulièrement protectrices en matière agricole, d'autre part que les conditions de concurrence soient justes. Ceci implique de nous assurer, par le biais de « mesures miroirs » dans la législation européenne, que les produits d'importation qui circulent sur notre marché respectent bien l'intégralité des normes que nous demandons à nos propres agriculteurs. Concernant les garanties environnementales et climatiques, il ne peut pas y avoir, avec le Mercosur, un cadre plus faible et moins disant que ce que nous avons accepté avec la Nouvelle-Zélande. Le Gouvernement est donc opposé de manière ferme et constante à la conclusion de l'accord d'association UE-Mercosur en l'état. C'est le sens de sa mobilisation, de celle du Parlement et de la société civile auprès de la Commission européenne, mais également de nos partenaires européens.
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