Question de M. MÉRILLOU Serge (Dordogne - SER) publiée le 24/10/2024
M. Serge Mérillou interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée du commerce extérieur et des Français de l'étranger sur les répercussions des nouvelles taxes imposées sur les véhicules électriques importés de Chine, et plus particulièrement sur les conséquences de ces mesures pour le marché exportateur du cognac. La Commission européenne a récemment ouvert une enquête sur les constructeurs chinois, les accusant de bénéficier de subventions publiques massives, ce qui créerait une concurrence déloyale susceptible de nuire gravement aux producteurs européens de véhicules électriques à batterie. Les véhicules européens, en particulier les modèles français, peinent à rivaliser en termes de prix face aux modèles chinois, plus compétitifs.
Afin de rétablir des conditions de concurrence équitable, les ministres européens du Commerce se sont réunis le 4 octobre et ont décidé de mettre en place de nouveaux droits de douane compensateurs pouvant atteindre 35 % sur les véhicules à batterie chinois, s'ajoutant aux 10 % de taxes déjà en vigueur. Ces mesures visent à renforcer l'industrie automobile européenne et à consolider la souveraineté industrielle et technologique de la France.
Cependant, en réaction à ces mesures, la Chine a imposé, dès le 11 octobre, des droits de douane temporaires anti-dumping sur les spiritueux européens, en particulier le cognac. Ces droits de douane, désormais fixés à 39 %, affectent l'ensemble des exportations européennes de ce produit. Annoncée de manière soudaine, cette décision frappe durement le secteur du cognac, un marché vital pour les producteurs français. La Chine, qui représente le deuxième plus grand marché d'exportation du cognac, a importé pour plus de 800 millions d'euros de spiritueux en 2023.
La filière du cognac se trouve aujourd'hui en péril. Bien que la protection de l'industrie automobile soit cruciale pour la souveraineté industrielle et technologique de la France, elle ne doit pas se faire au détriment d'autres secteurs clés. En Dordogne, près d'une dizaine de communes produisent du cognac, et cette production ne peut être négligée. Ce secteur, qui génère un chiffre d'affaires supérieur à 10 milliards d'euros, contribue également au rayonnement international de la France.
Dans ce contexte, Monsieur Serge Mérillou interroge Madame la ministre sur les mesures que le Gouvernement entend prendre pour soutenir les producteurs de cognac et l'ensemble de la filière face à cette hausse des taxes imposées par la Chine sur les exportations de ce spiritueux.
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Transmise au Ministère délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger
Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger publiée le 20/02/2025
La France déplore la récente décision du ministère chinois du Commerce d'appliquer des mesures antidumping provisoires sur les spiritueux européens à base de vin et de marc de raisin. Ces mesures, en vigueur depuis le 11 octobre dernier, imposent le dépôt d'une caution importante, dont nous mesurons les risques d'éviction du marché chinois qu'elle fait peser sur nos producteurs exportateurs. Lors de la visite d'État en mai dernier du président Xi Jinping, les relations commerciales franco-chinoises et euro-chinoises ont fait l'objet de discussions approfondies. À cette occasion, le Président de la République, aux côtés de la Présidente de la Commission européenne, a réaffirmé son attachement à un ordre commercial fondé sur des règles équitables. Il a défendu avec fermeté la nécessité de protéger nos filières contre toute concurrence déloyale et contre toute instrumentalisation des instruments de défense commerciale. L'annonce du 8 octobre par le ministère chinois du Commerce d'imposer des droits de douane à titre provisoire relève d'une telle instrumentalisation. Elle est évidemment contraire aux engagements pris par le Président Xi Jinping en mai dernier. La Chine avait clairement exprimé son intention de ne pas appliquer de mesures provisoires pendant la durée de l'enquête, et ce revirement met en péril des filières d'excellence qui participent au rayonnement de la France à l'étranger tout en témoignant d'une volonté inacceptable de rétorsion. Nous ne pouvons tolérer qu'un Etat use de pressions économiques pour influencer nos décisions souveraines en matière de défense commerciale. Céder maintenant reviendrait à exposer l'intégralité des filières européennes à être victime du même procédé par la suite. Il n'a jamais été question, et le message a clairement été passé à la partie chinoise, que l'Union européenne cède à cette pression en renonçant à l'enquête antisubventions sur les véhicules électriques chinois. Cette enquête est parfaitement légitime et proportionnée. Elle repose sur des preuves solides et n'a pour objectif que d'assurer un commerce respectueux des règles internationales et de protéger les filières européennes contre les subventions déloyales favorisant l'industrie chinoise. A moins que des garanties vérifiables sur le dossier des véhicules électriques ne soient apportées par la partie chinoise, plier face aux mesures de rétorsion reviendrait à exposer l'intégralité des filières européennes à de semblables mesures à l'avenir. A l'inverse, seul le maintien d'une posture de fermeté permettra de rendre caduque l'emploi de telles mesures à des fins de négociation, et pourra à terme mener à leur abandon. La Commission européenne, avec le soutien des États membres, reste pleinement engagée pour défendre les producteurs européens concernés par ces mesures injustifiées. Les discussions entamées avec le ministre chinois du Commerce en septembre dernier témoignent des efforts de la Commission pour trouver une issue négociée. Cependant, elle a également montré qu'elle était prête à défendre fermement les intérêts européens, comme en témoigne l'ouverture d'une procédure à l'OMC contre les mesures antidumping imposées sur les produits laitiers. S'agissant des spiritueux, la Commission a déjà annoncé son intention de porter cette enquête devant l'OMC si nécessaire. La France lui renouvelle son plein soutien et son entière confiance. De son côté, l'Etat est mobilisé au plus haut niveau pour soutenir la filière et l'accompagner. La ministre déléguée auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée du commerce extérieur et des Français de l'étranger s'est rendue à Shanghai du 3 au 6 novembre pour un entretien avec le ministre chinois du commerce Wang Wentao, au cours duquel elle a passé des messages de fermeté. Elle a appelé la Chine à mettre fin à ses mesures infondées et demandé le rétablissement de conditions de concurrence équitables et profitables pour tous. Elle s'est également rendue au salon international des importations de Chine (CIIE), pour soutenir les représentants de nos filières exportatrices, qu'elle a pu assurer du soutien continu et sans faille de l'Etat. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères continuera une action diplomatique résolue, avec l'objectif de rééquilibrer notre relation commerciale avec la Chine tout en protégeant nos producteurs, qui sont les acteurs d'une filière d'excellence reconnue mondialement, face à des mesures injustes et disproportionnées. Cette action passe également par un appui déterminé aux efforts de diversification de la filière.
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