Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 24/10/2024

Mme Sylviane Noël attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt s'agissant de la détresse des éleveurs dont les bêtes sont touchées par la brucellose.

Le département de la Haute-Savoie a toujours été une terre agricole qui allie productions de qualité et pratiques agricoles adaptées aux contraintes du milieu montagnard. Elle s'organise notamment via des outils collectifs maîtrisés par les producteurs eux-mêmes (réseau des coopératives, syndicats de produits...), ne misant pas uniquement sur la quantité et les volumes pour maintenir un prix rémunérateur et rester compétitive. Avec 5 030 exploitations agricoles et un chiffre d'affaires de 550 millions d'euros dont près de 50 % issus de l'élevage laitier, la filière lait et fromages de vache est le premier pilier de notre agriculture de montagne.

En 2022, le Gouvernement a défini une feuille de route sur la gestion de la brucellose visant à mieux lutter contre cette zoonose en élevage comme dans la faune sauvage. Cette maladie bactérienne très contagieuse pour les ruminants peut se transmettre à l'homme et il se trouve que les bouquetins de nos massifs en sont les principaux réservoirs.
Depuis 2012, elle sévit en Haute-Savoie dans la population de bouquetins du massif du Bargy et elle a gagné depuis 2022 les Aravis. Elle fait peser une menace permanente sur les bovins en alpage, en plus de constituer un risque important pour la santé publique.

Dans la pratique, les éleveurs et l'ensemble des acteurs de la filière rencontrent d'énormes difficultés à mettre en oeuvre les mesures de sécurité et à les retranscrire sur le terrain. Avec 400 bouquetins identifiés dans le Bargy, il y a une réelle urgence à sécuriser complétement ce périmètre sachant qu'à l'heure actuelle, déjà 127 élevages sont suivis dans le Bargy faisant l'objet de dépistages accrus. Même si les résultats sont encourageants, il faut aller plus loin dans les prélèvements car le taux d'incidence actuel de 10 % n'est pas tolérable pour les éleveurs et les acteurs de la filière.

En effet, les enjeux sont forts y compris sur les produits au lait cru et les appellations d'origine protégée et indications géographiques protégées (AOP et IGP) Reblochon ou Abondance. Il faut à tout prix éradiquer la brucellose de nos massifs et ne faire ainsi courir aucun risque auprès des consommateurs de notre lait ou de nos fromages.

Il devient urgent d'avoir une gestion de fond de ce problème capital qui perdure depuis 2012 ! Les éleveurs réclament qu'on leur fasse plus confiance dans ces démarches. Ils aimeraient des assouplissements pour que la totalité de leurs troupeaux ne rentre pas en arrêté préfectoral de mise sous surveillance (APMS) en cas de suspicion car cela occasionne pour eux des pertes économiques trop importantes au-delà du drame psychologique qu'ils vivent également. Ils souhaiteraient également que le protocole applicable au transfert embryonnaire soit allégé car il est trop compliqué à mettre en oeuvre (normes de biosécurité, matériel spécifique, perte du statut d'élevage pendant 15 mois...). Ils aimeraient enfin être indemnisés plus rapidement et obtenir des moyens supplémentaires.

Aussi, elle sollicite le Gouvernement pour qu'il puisse clarifier rapidement les mesures qu'il compte mettre en place pour soutenir davantage les éleveurs dans cette démarche d'éradication totale de la brucellose, rappelant que le maintien du pastoralisme dans les alpages est essentiel pour la préservation de la biodiversité et des paysages de montagne.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire


Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 13/03/2025

La brucellose fait partie des maladies à éradication obligatoire compte tenu de l'enjeu de santé animale et de santé publique (c'est une maladie zoonotique). La France dispose du statut d'État membre indemne de brucellose bovine depuis 2005 et toutes les régions sont reconnues indemnes de brucellose ovine et caprine depuis 2023. Cette situation sanitaire favorable sur le territoire national est l'aboutissement d'une lutte collective et solidaire de l'ensemble des acteurs des filières de ruminants et de l'État. Si les critères internationaux de la reconnaissance de pays indemne de brucellose bovine sont respectés, il reste que depuis 2012, la France a connu deux foyers de cette maladie. À la suite du foyer de brucellose découvert dans le Bargy en novembre 2021, où la brucellose circule dans la faune sauvage au travers de bouquetins. Pour répondre aux inquiétudes des éleveurs, les préfets des départements de Savoie et Haute-Savoie et leurs équipes, ont mis en oeuvre une feuille de route qui vise à garantir la santé des consommateurs tout en maîtrisant les effets de cette zoonose sur les élevages et en particulier la production laitière. Grâce à la mise en place du test ELISAc à l'automne 2022, dit ELISA de confirmation, alternatif à la brucellination, le délai de mise sous surveillance des élevages a pu être réduit en majorité à moins de 4 jours. Par ailleurs, à la suite des dépistages renforcés entre le 1er mars et le 15 mai 2023 avant montée en estive, dont tous les résultats ont été conformes, il n'y eu aucun élevage mis sous surveillance. Au cours de l'été 2023, un seul élevage a été mis sous surveillance à la suite d'un résultat défavorable sur le lait. Concernant le protocole de transfert embryonnaire, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) est actuellement saisie par ses tutelles en vue qu'elle réalise une évaluation des risques de résurgence de la brucellose bovine dans un élevage dont les femelles recevraient ces embryons. Un protocole a été élaboré avec le groupement de défense sanitaire (GDS) des Savoie afin de mener la transplantation embryonnaire sur les génisses d'un troupeau complètement isolé. L'avis de l'Anses est attendu avant la fin de la mise en oeuvre de ce protocole qui pourra être revu à la lumière de l'évaluation du risque. De la même manière l'Anses a été saisie afin d'évaluer le risque lié à toutes les mesures d'assainissement envisageables et compatibles avec les prescriptions de l'Union européenne. La feuille de route des préfets de Savoie et Haute-Savoie sera enrichie par ces avis une fois publiés. Par ailleurs, un plan de gestion de la brucellose au sein des populations de bouquetins des massifs du Bargy est mise en oeuvre depuis 2012 à la suite de cas humains puis étendu dans le massif des Aravis depuis 2021 à la suite d'un foyer en élevage situé à la frontière des deux massifs. Ce plan, mis en oeuvre par l'OFB (office française de la biodiversité) en collaboration avec le Pôle EVAAS (expertise vétérinaire et agronomique Animaux sauvage) de VetAgro Sup et l'Anses, vise à maîtriser cette maladie dans la faune sauvage tout en préservant la population de bouquetins, considérée comme espèce protégée. En parallèle, le réseau SAGIR, piloté par l'OFB et la Fédération nationale des chasseurs (FNC) assure la surveillance passive (à partir des cadavres d'animaux) de toutes les maladies y compris la brucellose afin de détecter précocement ces maladies. Ainsi, l'État met en oeuvre tous les moyens pour maîtriser la brucellose dans la faune sauvage afin de protéger les élevages, notamment lors des périodes d'estives et la santé publique tout en préservant les populations des bouquetins dans les massifs du Bargy et des Aravis.

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