Question de Mme LOISIER Anne-Catherine (Côte-d'Or - UC-R) publiée le 24/10/2024
Mme Anne-Catherine Loisier attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargée de la ruralité, du commerce et de l'artisanat sur les modalités de la mise en place de la responsabilité élargie des producteurs (REP) pour le secteur du bois construction.
Elle dénonce l'insoutenabilité des contributions demandées et la concurrence déloyale qu'elles génèrent.
La responsabilité élargie des producteurs sur les produits et matériaux de construction pour le secteur du bâtiment (REP PMCB) est issue de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (loi AGEC).
Pour le bois, matériau décarboné par excellence et promu pour la transition écologique de la construction française, la situation tourne au cauchemar.
Les coûts supportés par les professionnels du bois pour la prise en charge du recyclage de leurs produits en fin de vie sont beaucoup plus élevés que ceux appliqués pour le béton ou l'acier.
En outre, ce sont les industriels de la première transformation du bois (scieurs, trancheurs, dérouleurs de bois) qui doivent s'acquitter de l'écocontribution à destination des éco-organismes chargés de la collecte et du recyclage des produits en fin de vie. Pour l'ensemble des autres filières sous REP, le contributeur est le dernier acteur industriel ayant transformé ou assemblé les produits et matériaux avant-vente.
En 2023, les scieurs devaient déjà payer 2 % de leur chiffre d'affaires au titre de cette REP. Certains produits bois se voient infliger, depuis le 1er mai 2024, des écocontributions proches de 3 %. Pour 2025, les barèmes augmentent de 50% !
En 2 ans, les prix des matériaux ont considérablement diminué, provoquant une hausse forte de l'impact des écocontributions sur le prix des produits. Par exemple, pour un parquet contrecollé a un prix moyen sortie usine de 35 euros/m2, la taxe va passer à 5 euros/m2, représentant donc 14% de la valeur du produit. Dans le même temps, le PVC reste à moins de 1 euros/m2.
Imposer de tels surcoûts au bois, matériau de décarbonation, quand, parallèlement les produits « carbonés » comme le pvc, le béton ou l'acier sont mieux traités, pose question. En cause, la loi elle-même qui ne se préoccupe « que de la fin de vie » et ne tient aucun compte du cycle de vie du produit et de son profil écologique.
Le système actuel est profondément inadapté aux réalités. Le bois de déconstruction est en effet largement trié et valorisé pour la production de panneaux, de palettes, ou à défaut en énergie. Le "déchet" bois a une valeur écologique et environnementale. Il est intégré dans un circuit de valorisation vertueux.
La survie des 1 500 entreprises de la filière (dont 90 % de petites et moyennes entreprises) est en jeu.
Elles souhaitent continuer d'être acteurs de la souveraineté industrielle et de la neutralité carbone de notre pays.
Les mesures adoptées par le précédent Gouvernement en février et juillet 2024 n'apportent pas de solution satisfaisante. Les nouveaux tarifs de l'écotaxe prennent déjà en compte ces mesures...
Il est a craindre que le tarif final ne soit pas atteint car les volumes vont progresser et le cahier des charges des éco-organismes impose pour l'avenir la prise en charge de nouveaux coûts.
Elle lui demande donc d'examiner les modalités de mise en oeuvre de la REP PMBC avec la plus grande attention afin de trouver une solution qui ne porte pas préjudice à la filière de transformation du bois, déterminante dans la stratégie de planification écologique.
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Transmise au Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche
Réponse du Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche publiée le 27/02/2025
La filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) de produits et matériaux de construction du bâtiment, créée par la loi anti-gaspillage de février 2020, comporte de très nombreux acteurs. Le cahier des charges de la filière et l'agrément des 4 éco-organismes, qui à la fois collectent les contributions financières des entreprises metteurs en marché des produits et matériaux de construction, organisent la collecte et soutiennent les collectivités locales participant à la gestion de ces déchets pour les particuliers ou les professionnels, a été pleinement effective au début de l'année 2023. Les éco-organismes ont défini dès septembre 2022 le montant des contributions qu'ils appellent en tenant compte de la trajectoire de montée en puissance des soutiens à accorder aux nouvelles installations de collecte et de tri à mettre en oeuvre. Les points de collecte à développer et les actions à mener en 2024 et en 2025 nécessitent ainsi des moyens supplémentaires, et les éco-organismes n'ont d'autre choix que d'augmenter le montant de la contribution. Toutefois, le précédent Gouvernement a fait évoluer le cadre réglementaire relatif à ces contributions afin notamment de rétablir l'équité entre les produits de construction en bois issus de scieries qui sont principalement fabriqués en France et les produits de construction en bois préfabriqués qui sont souvent importés. Un premier arrêté a effectivement été publié le 20 février 2024 afin de mettre sur un pied d'égalité les bois français et les bois d'importation grâce à l'introduction d'un taux d'abattement de 20 % applicable aux bois frais de sciage. Il permet également une réduction des coûts supportés par la filière par un report de certaines mesures ; les éco-organismes estimaient la réduction du montant des contributions financières perçues de l'ordre de 100 millions d'euros pour l'année 2024. Un second arrêté a été publié pour compléter ce dispositif le 3 juillet 2024. Il prévoit un nouvel abattement de contribution pour les produits générant des déchets qui sont mieux collectés et valorisés que ceux issus d'autres produits (par exemple les produits en bois versus ceux en plastique) ; le gain pour la filière bois est estimé à près de 45 Meuros. De plus, un décret permettant de mutualiser les obligations de reprise sans frais des distributeurs de produits et de matériaux de construction entre sites proches, qui permettra un gain pour l'ensemble de la filière REP d'au moins 180 Meuros, a été publié au Journal Officiel le 21 novembre 2024. Par ailleurs, par un avis publié au Journal Officiel le 5 décembre 2024, le point de prélèvement de la contribution financière a été déplacé plus en aval sur la chaîne de valeur ce qui libérera les entreprises de première transformation du bois du paiement de la contribution financière à compter du 1er janvier 2026. Enfin, les travaux réalisés par les éco-organismes, les services du ministère chargé de l'environnement ainsi que l'ADEME ont permis de diminuer de 40 % le gisement de déchets devant être pris en charge par la filière en 2024, ce qui permettra une diminution des besoins financiers liés au fonctionnement de la filière. Le Gouvernement reste attentif à la situation de la filière bois, et souhaite engager de nouvelles discussions sur la REP PMCB permettant de mieux prendre en compte les besoins des acteurs.
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