Question de M. BLANC Jean-Baptiste (Vaucluse - Les Républicains) publiée le 31/10/2024

M. Jean-Baptiste Blanc attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur la nécessité de renforcer le droit de préemption des collectivités locales pour la protection des terres agricoles, dans le contexte d'un détournement croissant des dispositifs légaux actuels. En effet, la commune de Caumont-Sur-Durance a, face à la hausse des implantations illégales dans ses zones agricoles et inondables, établi un partenariat avec la société d'aménagement foncier et d'établissement rural visant à exercer un droit de préemption sur les terrains agricoles destinés à la vente, qui ne sont pas acquis par des exploitants agricoles. Cependant, des pratiques récentes soulignent des lacunes dans l'application de ce droit, notamment à travers des manoeuvres qui visent à en limiter l'efficacité. Des propriétaires, cherchant à esquiver la préemption de leurs terrains par les municipalités, ont initié des baux emphytéotiques, une pratique légale mais qui, dans ce contexte, sert à perpétuer l'utilisation non conforme des terres agricoles. Face à cette utilisation détournée du cadre légal, qui compromet tant les objectifs de protection des espaces agricoles que le respect des régulations en vigueur, il souhaite connaître la position du Gouvernement sur les mesures envisagées pour renforcer l'efficacité du droit de préemption et pour sanctionner les stratégies qui visent à en diminuer la portée.

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Réponse du Ministère délégué auprès du Premier ministre et du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de l'Europe publiée le 06/11/2024

Réponse apportée en séance publique le 05/11/2024

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, auteur de la question n° 172, adressée à Mme la ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt.

M. Jean-Baptiste Blanc. Je souhaite remercier mon collègue Lucien Stanzione d'avoir bien voulu inverser l'ordre des questions, me permettant ainsi de poser plus tôt la mienne, qui était destinée à Mme la ministre de l'agriculture.

Je tiens à alerter sur la nécessité de renforcer le droit de préemption des collectivités locales pour la protection des terres agricoles. Les dispositifs légaux actuels sont de plus en plus détournés, et nos communes en souffrent. Je pense notamment à la commune de Caumont-sur-Durance, dans le département de Vaucluse. Cela dit, elle est loin, je le sais, d'être la seule concernée.

Face à la hausse des implantations illégales dans des zones agricoles et inondables, la commune de Caumont-sur-Durance a établi un partenariat avec la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) visant à exercer un droit de préemption sur les terrains agricoles destinés à la vente qui ne sont pas acquis par des exploitants agricoles.

Cependant, des pratiques récentes ont mis en évidence des lacunes dans l'application de ce droit, notamment au travers de manoeuvres visant à limiter son efficacité. En effet, des propriétaires cherchant à esquiver la préemption de leur terrain par les municipalités concluent des baux emphytéotiques. Bien qu'une telle pratique soit légale, elle sert en l'espèce à perpétuer l'utilisation non conforme des terres agricoles.

Face à un tel détournement du cadre légal, qui compromet tant les objectifs de protection des espaces agricoles que le respect de la régulation, comment le Gouvernement envisage-t-il de renforcer l'efficacité du droit de préemption pour sanctionner les stratégies visant à en diminuer la portée ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du Premier ministre et du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de l'Europe. Monsieur le sénateur Blanc, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de la ministre Annie Genevard, qui est aujourd'hui en déplacement dans l'Aude et le Tarn auprès de nos agriculteurs et viticulteurs, comme elle s'y était d'ailleurs engagée.

Vous soulevez une question épineuse sur le caractère frauduleux des baux emphytéotiques. Il est en effet difficile de qualifier a priori le caractère frauduleux d'un tel bail dans la perspective d'une préemption.

La jurisprudence est venue apporter des précisions casuistiques. Elle indique notamment que, si le bail prévoit un transfert du droit réel de propriété en fin de contrat, ce dernier sera soumis au droit de préemption.

Il appartient donc au notaire chargé d'établir le bail de déterminer si celui-ci est soumis au droit de préemption. À cet égard, je ne puis que recommander à l'ensemble de la profession notariale la plus grande vigilance.

Les Safer exercent leur droit de préemption conformément à leur mission, qui est de garantir le maintien de l'usage agricole. Le cahier des charges qu'elles demandent aux candidats repreneurs et l'étude qu'elles réalisent selon les priorités des schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles contribuent également à cet objectif.

Par ailleurs, les collectivités qui possèdent des pouvoirs d'aliénation peuvent les exercer sur des baux emphytéotiques ou se prémunir contre des constructions illicites en zone naturelle ou agricole. Il convient de souligner que ce pouvoir a été renforcé par la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

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