Question de Mme MARTIN Pauline (Loiret - Les Républicains) publiée le 10/10/2024
Mme Pauline Martin attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'intensification et la recrudescence des vols de matériel agricole dans nos campagnes.
Des bandes parfaitement organisées se rendent coupables de douloureuses actions de pillage et de dégradation de matériels agricoles dans nos territoires ruraux. Ces méfaits peuvent prendre la forme de vol d'engins agricoles, de carburant, de GPS, de câbles ou encore de matériels d'irrigation, ressentis comme des agressions répétées contre nos agriculteurs. Ce matériel, indispensable à l'exercice du métier d'agriculteur, est garant de bonnes conditions de travail. Il représente un important investissement pour les exploitants et leur disparition met en difficulté les exploitations, par ailleurs soumises aux mêmes contraintes que toute autre entreprise. Par exemple, le vol de matériel d'irrigation entraine une perte d'exploitation de quatre semaines.
Au sein du département du Loiret dont elle est élue, les vols de GPS et de câbles ont été multipliés par trois sur l'année 2023 et font du Loiret le troisième département le plus impacté par ces actes malveillants, comme rapporté par nos gendarmes qui ont beaucoup de mal à enrayer cette démultiplication de cambriolages agricoles.
Avec une députée du groupe Renaissance, elle a eu l'occasion de rencontrer les victimes de ces agissements, accompagnée de représentants des partenaires sociaux, des services de l'État et des forces de gendarmerie. Outre le préjudice financier écrasant pour des agriculteurs déjà acculés par l'inflation des coûts de production, les prix insuffisants imposés par les industriels agroalimentaires et les distributeurs, les démultiplications de charges et l'abrutissement normatif, ainsi que les indemnisations des catastrophes naturelles bien trop faibles, elle a pu appréhender la lassitude, voire la colère, des agriculteurs hautement éprouvés par ces agissements qui s'ajoutent aux actes de vandalisme par des militants qui bénéficient souvent d'une certaine complaisance des autorités.
À l'heure où le monde agricole s'embrase, l'ampleur de ce phénomène de vol de matériel agricole reste sans solution. Aussi, elle l'appelle à prendre en compte ce sujet dans les toutes prochaines mesures que le Gouvernement s'apprête à prendre en faveur de notre précieux secteur agricole afin qu'une réponse satisfaisante puisse leur être apportée.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 12/12/2024
La prise en compte des vulnérabilités du monde rural est un enjeu stratégique, au coeur des préoccupations gouvernementales. Des mesures sécuritaires importantes destinées à endiguer les atteintes envers le monde agricole ont été prises. En métropole, et spécifiquement en zone gendarmerie, les atteintes aux biens dans le milieu agricole ont enregistré une tendance à la baisse depuis 2018 (-10,26 % en 2021), malgré quelques interruptions en 2019 et 2022. En 2023, bien que la délinquance générale ait augmenté de 4,1 %, une légère baisse des atteintes aux biens agricoles à l'échelle nationale (-0,56 %) a été observée avec 15 899 faits constatés. Les vols simples et dégradations sur exploitations agricoles ont respectivement diminué de 5,24 % et 2,88 %, alors même que les vols avec violence et cambriolages ont augmenté. Les chiffres de 2024 ne sont pas consolidés et ne permettent pas à ce stade d'établir d'analyse complète. Force de proximité dans les territoires ruraux, la gendarmerie y déploie des dispositifs de prévention et de partenariat au profit des agriculteurs et se mobilise dans la judiciarisation des infractions touchant le monde agricole. S'agissant des actions de prévention, la gendarmerie est pleinement engagée dans la lutte contre toutes les formes d'atteintes en garantissant une présence de voie publique toujours plus importante, qui permet de dissuader le passage à l'acte. La création de 239 nouvelles brigades, dont deux tiers de brigades mobiles, s'inscrit pleinement dans cette démarche et participe à la densification du maillage territorial. Pour leur part, les référents et correspondants « sûreté », présents dans chaque groupement de gendarmerie départementale et commandements de la gendarmerie d'outre-mer, arment la chaîne de prévention technique de la malveillance. À la demande des agriculteurs, ils peuvent être engagés, toujours à titre gratuit, pour réaliser des évaluations portant sur les vulnérabilités des propriétés agricoles et fournir des préconisations techniques, humaines et organisationnelles afin d'y remédier. En parallèle, les chaînes d'alerte SMS « Vigi-agri », mises en oeuvre dans les groupements en lien avec les chambres d'agriculture départementales, permettent de lutter contre les atteintes aux biens (ex. : vols, dégradations, intrusions) et de prévenir les agressions au sein des exploitations agricoles. En fonction des besoins locaux, l'offre de sécurité est adaptée par les groupements de gendarmerie. Le dispositif « Gend'Viti », initié par le groupement de la Marne, permet ainsi aux gendarmes d'être plus particulièrement à l'écoute du monde viticole, durant les vendanges. Cette brigade mobile saisonnière a vocation à recueillir des signalements, prendre des plaintes en mobilité et assurer une présence au plus près des agriculteurs et de la population. Cette démarche « d'aller vers » les agriculteurs tient compte de leurs contraintes professionnelles et facilite le recueil de plaintes et donc la judiciarisation des faits. Cette manoeuvre globale de prévention est confortée par la volonté d'identifier le plus en amont possible les éventuelles menaces. La recherche du renseignement est ainsi menée localement par les brigades, quotidiennement, dans le cadre de la prévention de proximité, avec des capacités d'analyse détenues par des services spécialisés comme le service de renseignement criminel de la gendarmerie nationale. Au-delà de ces actions de prévention, la sécurité du monde agricole nécessite sa pleine et parfaite information quant aux menaces encourues. Ainsi, la gendarmerie nationale mobilise tous les vecteurs possibles, tant traditionnels (ex. : sensibilisation des instances agricoles, chambres d'agriculture, associations de type AMF et AMRF, réunions publiques, presse quotidienne, radio, etc.) que digitaux (application MaSécurité du ministère de l'intérieur, réseaux sociaux, etc.), afin de sensibiliser les exploitants à l'émergence de phénomènes délictuels et diffuser des conseils de mise en sûreté. En matière de partenariats, l'accompagnement des agriculteurs s'opère également par la promotion d'une culture commune de sécurité reposant sur des échanges réguliers entre les acteurs du monde agricole et les forces de gendarmerie. Dans ce sens, une convention de partenariat a été signée en décembre 2019 entre le ministère de l'intérieur, la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) et les jeunes agriculteurs (JA). Cette convention fait l'objet d'une animation trimestrielle par la gendarmerie, permettant d'aborder l'état de la délinquance et les préoccupations du monde agricole (ex. : vols sur exploitations, agribashing, mesures de prévention des actes de malveillance, etc.). En outre, cette convention nationale a été déclinée au niveau local par les groupements de gendarmerie départementale, qui entretiennent des liens réguliers avec les représentants locaux de ces instances professionnelles. A titre d'exemple, des opérations de sensibilisation ou d'information permettent de rappeler les gestes préventifs qu'il convient de mettre en oeuvre pour se prémunir ou mieux identifier les menaces (vols de GPS, vols de carburant, dégradations, atteintes à l'environnement, maltraitance animale, etc.). Dans l'optique de toujours mieux connaître et mieux appréhender le monde agricole, ses enjeux et contraintes, des formations théoriques et des journées d'immersion à la ferme peuvent être également proposées aux gendarmes par certaines chambres d'agriculture (ex. : Charente, Dordogne, Deux-Sèvres). Enfin, la gendarmerie est toujours présente au salon international de l'agriculture (SIA), lors duquel elle veille à rappeler les bonnes pratiques qu'il convient de mettre en oeuvre, par la diffusion d'un guide spécifique intitulé « Sécuriser mon exploitation agricole ». En ce qui concerne la situation spécifique du département du Loiret, les actions conduites par la gendarmerie illustrent bien l'action sur le spectre offensif. Tous ces vols, loin d'être minimisés, font systématiquement l'objet d'une enquête judiciaire et il n'existe aucune forme de complaisance. Les lieux cambriolés bénéficient d'une prise en compte systématique par des gendarmes techniciens spécifiquement formés aux constatations sur ce type de faits (TICP et TIC), lesquels disposent de matériels adaptés et dédiés à la recherche d'indices. Les gendarmes sont également sensibilisés à la dimension numérique de la preuve et s'attachent à rechercher tous les moyens d'identifier les auteurs via les objets connectés, la téléphonie et les dispositifs de vidéosurveillance (publics et privés). La plainte en mobilité permet à l'exploitant agricole de déposer plainte sans se déplacer dans une unité de gendarmerie. Présentant souvent un caractère sériel, ces vols font également l'objet d'études à des fins de rapprochement de la part de la brigade de renseignements et d'investigations judiciaires pour le niveau départemental et de la section d'appui judiciaire pour la région Centre-Val de Loire. Le vol de consoles GPS fait quant à lui l'objet d'une attention particulière de la part des sections de recherches d'Orléans et de Bourges et de l'office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI), tant il est déjà établi que ces vols, perpétrés par des équipes particulièrement mobiles, alimentent un trafic au niveau européen voire international. Ainsi, les investigations des enquêteurs ont permis d'interpeller l'auteur du vol de plusieurs dizaines de mètres de câbles sur une exploitation agricole à BONNEE, en 2022. En 2023, ce sont 13 individus impliqués dans le vol de carburant au détriment d'exploitations agricoles qui ont été interpellés par la brigade de recherches de Montargis. L'un des auteurs a été écroué à l'issue de la procédure. Proactif dans la recherche de solutions à ce fléau, le groupement du Loiret a suivi de près une expérimentation menée par l'entreprise Thalès dans deux exploitations agricoles. Cette dernière consiste à fournir une solution technologique innovante et adaptée au milieu agricole, qui permette la surveillance et le tracking des matériels utilisés. Une démonstration de l'outil a été réalisée en juin 2024 à Juranville. Au travers des actions des forces de sécurité intérieure, le Gouvernement démontre sa volonté de garantir de manière constante la sécurité des agriculteurs sur l'ensemble du territoire national.
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