Question de M. JOLY Patrice (Nièvre - SER) publiée le 10/10/2024
M. Patrice Joly attire l'attention de M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes sur les conséquences du décret n° 2022-639 du 25 avril 2022, entré en vigueur le 1er juillet 2022, relatif à l'amélioration des fonds départementaux de compensation du handicap.
Dans chaque département, il existe un fonds départemental de compensation du handicap (FDCH) géré par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), destiné à accorder des aides financières aux personnes en situation de handicap afin de les aider à faire face aux frais de compensation restant à leur charge. Ce fonds est abondé annuellement par l'État aux côtés d'autres contributeurs volontaires que sont principalement les conseils départementaux et les organismes de sécurité sociale.
Concrètement, le fonds départemental de compensation du handicap permet de limiter le coût d'une aide technique (fauteuil roulant, canne, véhicule, siège de bain...) ou humaine, après déduction de la prestation de compensation handicap (PCH).
L'article L. 146-5 du code de l'action sociale et des familles, actuellement en vigueur, prévoit que « les frais de compensation ne peuvent excéder 10 % des ressources personnelles nettes d'impôts des personnes handicapées ». Pour couvrir le reste, le fonds départemental de compensation entre en jeu sans que, pour le demandeur, le reste-à-charge ne dépasse 10 % de ses revenus.
Cependant, le décret n° 2022-639 du 25 avril 2022, entré en vigueur le 1er juillet 2022, précise que sont pris en compte les revenus « du foyer fiscal de référence » dans le calcul du reste à charge, ce qui, pour les couples, augmente mécaniquement la base de calcul et ainsi fait diminuer le montant de l'aide accordée.
Ces modalités de calcul semblent donc être en contradiction avec la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées de l'organisation des nations unies (ONU), pourtant ratifiée par la France en 2010, qui considère comme une discrimination le fait qu'une aide sociale ou prestation de compensation soit conditionnée par les revenus d'un tiers, augmentant ainsi le lien de dépendance du demandeur à ses proches et diminuant son autonomie.
Le conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) a également émis, en mars 2022, un avis défavorable vis-à-vis de cette formule de calcul, dénonçant une « discrimination » et un manque de « logique » rappelant d'ailleurs que contrairement au FDCH, la demande de PCH ne tient pas compte des revenus du conjoint dans son attribution.
C'est pourquoi il lui demande, à l'image de ce qui a été mis en oeuvre pour la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), une révision du règlement intérieur du fonds de compensation afin que les revenus du conjoint d'un adulte ne soient plus pris en compte dans son calcul des fonds départementaux de compensation du handicap.
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Transmise au Ministère délégué auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de l'autonomie et du handicap
Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de l'autonomie et du handicap publiée le 13/03/2025
Les fonds départementaux de compensation du handicap, créés par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, ont pour objectif de limiter les frais de compensation restant à la charge des personnes en situation de handicap après intervention des autres aides, notamment la Prestation de compensation du handicap (PCH). L'article L. 146-5 du code de l'action sociale et des familles fixe comme objectif que le reste à charge des personnes n'excède pas 10 % de leurs ressources personnelles nettes d'impôts, dans la limite des financements mis à disposition des fonds départementaux. Il s'agit d'une condition de ressources spécifique qui n'a pas d'équivalent dans les autres dispositifs d'aide, eu égard en particulier à l'obligation posée par le législateur de soustraire des ressources les impôts acquittés par le demandeur. Cette différence avec la « base ressources » de la PCH s'explique dans la mesure où il s'agit de deux prestations distinctes, qui ne sont pas de même nature : la PCH est une prestation d'aide sociale obligatoire, à l'inverse des fonds départementaux, considérés par le conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2023-1039 question prioritaire de constitutionnalité du 24 mars 2023, comme une prestation facultative attribuée en complément des montants reçus au titre de la PCH. Le décret n° 2022-639 du 25 avril 2022 a permis de préciser la notion de « ressources personnelles nettes d'impôts ». Il prévoit la prise en compte, d'une part, du revenu fiscal de référence diminué du montant de l'impôt sur le revenu et, d'autre part, du quotient familial. Cette modalité se justifie dans la mesure où le montant de l'impôt est déterminé de manière globale à partir de l'ensemble des revenus du foyer fiscal et qu'il existe des revenus communs dont il n'est pas possible en pratique d'identifier le titulaire parmi les membres du foyer fiscal. Dans ces conditions, le respect de l'obligation posée par le législateur de soustraire l'impôt du montant des revenus suppose de partir d'une base identique pour les impôts et les revenus et donc de considérer dans leur ensemble les revenus du foyer fiscal. La prise en compte du quotient familial permet toutefois d'individualiser les ressources à la mesure de la composition du foyer fiscal, en tenant également compte de la réduction du revenu effectivement disponible résultant des enfants à charge, renforçant ainsi l'équité de traitement des bénéficiaires dans la réponse apportée aux différentes situations. La modalité retenue, validée par le Conseil d'Etat dans le cadre de sa décision n° 465268/468567 du 9 novembre 2023, permet ainsi d'individualiser les ressources sans méconnaitre l'existence de revenus communs et le principe d'imposition unique pour le foyer fiscal, garantissant à la fois l'équité de traitement des bénéficiaires et la simplicité de mise en oeuvre par les maisons départementales des personnes handicapées, en charge de la gestion du dispositif.
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