Question de Mme CONWAY-MOURET Hélène (Français établis hors de France - SER) publiée le 10/10/2024
Mme Hélène Conway-Mouret attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur les difficultés relatives à la délivrance de certificats de nationalité française (CNF), de plus en plus fréquemment demandés par l'administration pour obtenir un titre, faire valoir un droit, ou tout simplement réaliser un acte essentiel tel que la déclaration de la naissance d'un enfant.
D'une part, depuis la réforme opérée par le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 relatif au CNF, entré en vigueur le 1er septembre 2022, l'alinéa 1er de l'article 1045-1 du code de procédure civile prévoit que la demande doit être accompagnée « de pièces répondant aux exigences de l'article 9 du décret n°93-1362 du 30 décembre 1993 » modifié par le décret n°2023-65 du 3 février 2023. Le ministère de la justice a récemment indiqué que lorsque la demande n'est pas conforme à ces exigences, le dossier est « retourné au demandeur avec un courrier précisant le motif exact du retour lui permettant ainsi de compléter son dossier » afin de « prévenir un refus de délivrance de certificat de nationalité française pour des motifs purement formels ». Or, il apparaît que cette procédure n'est pas systématiquement appliquée dans les faits et que, de surcroît, de nombreuses décisions de refus de délivrance ne comportent ni la liste des pièces justificatives produites par l'intéressé ni les motifs sur lesquels se fondent le refus. Elle souhaiterait donc savoir si les décisions pourraient systématiquement comporter ces informations dans leurs visas.
D'autre part, le décret du 17 juin 2022 introduit un changement majeur pour contester les décisions de refus de délivrance de CNF : il remplace le recours hiérarchique auprès du ministre de la justice par le recours contentieux devant le tribunal judiciaire, avec ministère d'avocat obligatoire. Or, de nombreux compatriotes ne disposent pas des ressources financières suffisantes pour s'acquitter des frais d'avocat. Certains ressortissants français résidant à l'étranger se voient ainsi privés d'obtenir la sécurité juridique qui découle du CNF, pour des motifs essentiellement techniques. Elle voudrait donc savoir si ces refus techniques, opposés depuis l'entrée en vigueur dudit décret, pourraient faire l'objet d'un réexamen.
Enfin, il apparaît que le refus de délivrance d'un CNF peut entraîner des conséquences extraordinaires pour certains de nos compatriotes, telles que la radiation du registre des Français de l'étranger et de la liste électorale consulaire, le refus de délivrance des actes d'état civil (naissance, mariage, etc.), voire le non-renouvellement ou le retrait des titres de voyage et d'identité, qui risquent de rendre l'intéressé apatride. Elle désirerait donc connaître le fondement textuel de telles décisions.
- page 3847
Réponse du Ministère de la justice publiée le 21/11/2024
Depuis la réforme opérée par le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 relatif au certificat de nationalité française, la procédure de délivrance de ce document a été clarifiée et améliorée, notamment en imposant que la demande soit formalisée au moyen d'un formulaire Cerfa et accompagnée de pièces justificatives, répondant à des exigences formelles énumérées à l'article 9 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, auquel renvoie le nouvel article 1045-1 du code de procédure civile, issu de la réforme. Le formulaire Cerfa permet au demandeur de connaître les pièces à fournir en fonction de sa situation. Le service de la nationalité du tribunal judiciaire de Paris, qui est compétent pour les demandes de délivrance d'un certificat de nationalité française présentées par les Français (es) né (e) s et établi (e) s hors de France, traite ainsi le plus large volume de demandes en France. Ce service a progressivement instauré des modalités de traitement différenciées en fonction de l'état des différentes demandes qu'il reçoit. Ces modalités ont évolué dans les premiers mois suivant l'entrée en vigueur du décret du 17 juin 2022, afin de s'adapter à la manière dont les demandeurs se sont saisis de cette réforme. À ce jour, le service a mis en place un système lui permettant de prévenir les difficultés et d'accompagner au mieux les demandeurs de certificats de nationalité française dans la présentation de demandes en état d'être instruites. Ainsi, une demande qui ne respecte pas le formalisme exigé par l'article 1045-1 du code de procédure civile (absence de CERFA par exemple), fait l'objet d'un retour par voie postale, accompagné d'une lettre précisant le motif exact du retour, afin de permettre à l'intéressé (e) de compléter son dossier. Les demandes qui remplissent les conditions formelles exigées par l'article 1045-1 du code de procédure civile sont maintenant systématiquement enregistrées et attribuées à un agent pour instruction. Si l'instruction de la demande nécessite la production de pièces justificatives complémentaires, une lettre est adressée à l'intéressé (e), l'invitant à produire des pièces énumérées précisément, dans un délai donné. La décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française est motivée, ce qui doit permettre de déterminer le motif du rejet. Cette obligation de motivation de la décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française est rappelée dans la circulaire du 14 mars 2023 de présentation de la procédure de délivrance des certificats de nationalité française, telle que réformée par le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 relatif au certificat de nationalité française. En cas de décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française pour défaut d'une ou plusieurs pièce (s), deux situations sont à distinguer : Lorsque les pièces déposées lors de la demande initiale sont encore valables : le demandeur produit seulement les pièces manquantes et un nouveau dossier pourra être créé, qui prendra en compte l'ensemble des pièces qu'il a communiquées ; Lorsque la date de validité des pièces déposées dans le premier dossier est dépassée mais que le demandeur pense disposer désormais des éléments nécessaires pour prouver sa nationalité française, il pourra former une nouvelle demande de certificat de nationalité française dans les conditions de l'article 1045-1 du code de procédure civile, en fournissant un nouveau dossier complet. En cas de recours devant le tribunal judiciaire contre la décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française, le requérant, qui doit constituer avocat, a la possibilité de faire une demande d'aide juridictionnelle si ses ressources financières sont insuffisantes. Enfin, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères est compétent en matière d'instruction des demandes de titres d'identité française déposées à l'étranger, en application de l'article 9 du décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 pour les passeports et de l'article 2 du décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 pour la carte nationale d'identité. Il exerce également les compétences relatives à la tenue du registre des Français de l'étranger, des listes électorales consulaires et de l'état civil consulaire. Le ministère de la Justice n'est donc pas à même d'apporter des précisions quant au fondement textuel de décisions prises dans ces matières.
- page 4472
Page mise à jour le