Question de M. BROSSAT Ian (Paris - CRCE-K) publiée le 17/10/2024

M. Ian Brossat attire l'attention de Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine sur l'urgence à traiter la crise du logement dans les métropoles et les zones tendues, comme à Paris, qui s'aggrave considérablement. Des milliers de ménages, de travailleurs et d'étudiants peinent à trouver un logement décent et abordable, alors que le nombre de logements vacants et de résidences secondaires continue de croître. Aujourd'hui, dans la capitale, on dénombre plus de 145 000 logements vides et près de 262 000 résidences secondaires. Ces nombreux logements, qui pourraient permettre de loger de nombreuses familles, des travailleurs et des étudiants laissent de nombreuses personnes sans solution face à des loyers toujours plus élevés, malgré l'encadrement des loyers, qui n'est pas encore suffisamment respecté. Pendant ce temps, la demande locative augmente et l'offre de logements accessibles diminue de façon drastique. La réalité est la suivante : nous sommes confrontés à des multipropriétaires qui préfèrent laisser leurs biens vacants et qui sont prêts à payer des taxes plutôt que de remettre ces logements sur le marché locatif. À Paris, 58 % des logements en location appartiennent à des propriétaires qui possèdent au moins cinq logements ! Ce phénomène illustre l'inefficacité et l'insuffisance des mesures actuelles pour contrer l'accaparement de logements, qui ne fait qu'aggraver la pénurie et impacter les plus précaires. De nombreux leviers existent pour lutter contre la vacance et limiter la multiplication des résidences secondaires, notamment par l'instauration de taxes. Depuis 2023, le taux d'imposition est fixé à 17 % pour la première année puis 34 % pour les années suivantes. Force est de constater que cela reste trop peu pour dissuader les propriétaires ... Face à cette situation alarmante, et alors que la crise du logement devient un enjeu central pour celles et ceux qui veulent se loger à un prix décent, quelles mesures concrètes le Gouvernement entend-il prendre pour lutter contre la multiplication des logements vacants et encadrer plus strictement les résidences secondaires particulièrement dans des zones à forte tension locative ? Compte-t-elle augmenter les taxes sur les logements vacants et les résidences secondaires pour qu'elles soient véritablement dissuasives ?

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Réponse du Ministère du logement et de la rénovation urbaine publiée le 06/11/2024

Réponse apportée en séance publique le 05/11/2024

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, auteur de la question n° 123, adressée à Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine.

M. Ian Brossat. Madame la ministre, les chiffres du mal-logement sont malheureusement connus : 735 morts de la rue en 2023, quelque 2 000 enfants qui dorment dehors tous les soirs faute d'hébergement selon l'Unicef, et 2,7 millions de demandeurs de logement social, qui attendent parfois jusqu'à dix ans sans trouver de solution.

Pour remédier à cette crise sans précédent, il faut à l'évidence agir sur deux leviers.

Le premier est la construction de logements neufs. Jamais malheureusement, depuis vingt-quatre ans, nous n'aurons construit aussi peu de logements que cette année, selon les chiffres de votre propre ministère !

Le second levier est la meilleure utilisation des logements existants Il faut faire en sorte que les logements qui ont déjà été construits servent à loger effectivement des habitants.

Or nous constatons, en particulier dans nos grandes métropoles - les plus attractives et les plus touristiques -, un développement du nombre de logements vacants. Il s'agit soit d'habitations totalement inoccupées, soit de résidences secondaires, occupées une partie de l'année seulement.

Dans une ville comme Paris, 20 % des logements, soit un sur cinq, appartiennent ainsi à l'une de ces deux catégories. À Nice, ce pourcentage atteint 28 %.

Madame la ministre, ma question est simple : quels nouveaux outils, notamment fiscaux, envisagez-vous pour créer une incitation à occuper ces habitations comme des logements à l'année, et non plus comme des résidences secondaires ? Il existe déjà la taxe sur les résidences secondaires. Comptez-vous donner aux villes la possibilité de la rehausser ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre du logement et de la rénovation urbaine. Monsieur le sénateur Ian Brossat, vous avez rappelé les chiffres, et nous ne pouvons que souscrire à la nécessité de relancer la production d'hébergements d'urgence.

La situation actuelle est aussi une conséquence du niveau des taux d'emprunt immobilier, qui ont particulièrement augmenté ces deux dernières années.

Or une conjoncture plus favorable s'amorce, avec des taux de crédit qui repartent à la baisse et une diminution du taux du livret A dès février 2025, sur laquelle nous nous mobilisons, mais aussi des initiatives comme l'élargissement du prêt à taux zéro.

Nous nous intéressons bien évidemment à la situation du parc du logement social, ainsi qu'à des initiatives pour soutenir si nécessaire les opérateurs et les investisseurs privés.

La taxe sur les logements vacants a été renforcée de manière substantielle à compter de 2023. Le nombre de communes du périmètre a été significativement augmenté, de 1 140 communes à 3 697 communes en 2024, et le taux a été relevé de manière substantielle.

En outre, les communes appartenant au périmètre géographique de la taxe sur les logements vacants peuvent moduler de +5 % à +60 % la cotisation de la taxe d'habitation due au titre des logements meublés non affectés à l'habitation principale.

Il n'est pas prévu pour le moment de revenir sur ces dernières évolutions, qui sont encore trop récentes pour être évaluées.

À Paris, la part des logements du parc privé qui restent vacants au-delà de deux ans, c'est-à-dire confrontés à une vacance structurelle, est relativement faible. Elle s'établit à 1,9 % en 2023, ce qui représente 21 500 logements.

Les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris ont pu entraîner une distorsion des chiffres : certaines remises en location ont pu être reportées au mois de septembre, tandis que des logements ont été mis en location de courte durée pendant l'été.

Nous étudierons avec attention les données au 1er janvier 2025, afin d'évaluer la situation. À cet égard, j'ai demandé à la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) d'examiner très finement le cas particulier de Paris.

Je souhaite que la mobilisation du parc vacant soit avant tout poussée par nos mesures incitatives, comme le dispositif Loc'Avantages, que nous souhaitons continuer à encourager.

Le dispositif Zéro logement vacant permet quant à lui d'identifier les propriétaires de logements vacants, d'entrer en contact avec eux et de les informer sur les incitations à la remise sur le marché.

Cet outil est utilisé à Paris depuis mars 2023, et nous ne pouvons que le saluer. La Mairie de Paris a notamment lancé trois campagnes ciblées « Louez solidaire » en octobre 2023 visant près de 570 logements vacants.

Nous devons continuer dans cette direction et travailler naturellement en bonne intelligence avec le territoire pour trouver des solutions, les évaluer au fil de l'eau et adapter nos dispositifs à la réalité que nous constaterons.

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour la réplique.

M. Ian Brossat. Je vous remercie, madame la ministre. Nous formulerons évidemment des propositions visant à taxer plus lourdement les résidences secondaires.

En effet, leur nombre augmente très fortement - 7 000 de plus en moyenne par an à Paris - et ce sont, de fait, des logements qui n'accueillent pas des habitants à l'année.

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