Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 10/10/2024
M. Guillaume Gontard interroge Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'intelligence artificielle et du numérique sur le pouvoir des élus locaux en matière d'implantation des antennes relais de téléphonie mobile.
En 2018, dans le cadre des engagements pris par les opérateurs pour accélérer la couverture mobile des territoires, dits « New Deal Mobile », et de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi ÉLAN, la procédure de construction d'antennes relais de téléphonie mobile a été simplifiée, afin de résorber la fracture numérique, en particulier dans les territoires ruraux et enclavés. Depuis, les maires sont uniquement informés de la construction d'une antenne, mais n'ont plus le pouvoir de s'y opposer lorsque ces antennes sont contestées par la population.
Si l'objectif de réduction des zones blanches est louable, les pratiques des opérateurs posent parfois problème. Information tardive et lacunaire des maires et des habitants, multiplication des antennes dans certaines zones, absence d'information des communes alentour pourtant impactées visuellement... Cette dérégulation a entraîné une multiplication des conflits, parfois jusqu'au sabotage. D'après la fédération française des télécoms, 10 antennes sont ainsi volontairement dégradées chaque mois.
Les maires sont en première ligne dans ces conflits entre des citoyens opposés à une antenne et les opérateurs dont les décisions d'implantation sont parfois opaques. S'ils tentent souvent de jouer le rôle d'intermédiaire et de pacifier les conflits, ils n'ont en réalité plus aucun pouvoir sur le sujet. Ils sont pourtant les plus à même de pouvoir déterminer les emplacements les plus propices, en fonction de critères à la fois patrimoniaux et paysagers et de couverture mobile.
Pour tenter de trouver une issue positive à ces blocages, la communauté de communes du Trièves (Isère) a créé un groupe de travail intercommunal pour sélectionner, en lien avec les opérateurs, les meilleurs sites pour les antennes relais. Cette initiative prometteuse pourrait permettre de renforcer l'acceptation des projets en les intégrant le mieux possible à ce territoire rural. Ce type de démarche, qui repose pour l'instant sur le volontarisme des communes et des opérateurs, pourrait servir de modèle à un nouveau cadre pour définir les lieux d'implantation.
Ainsi, il souhaite savoir si le Gouvernement compte s'inspirer de cette pratique et inscrire dans la loi l'obligation d'établir des schémas intercommunaux avec les opérateurs, validés par l'autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM). Par ailleurs, il souhaite également savoir si le Gouvernement compte instaurer une obligation de mutualisation des antennes relais entre opérateurs, et à défaut, offrir à nouveau aux maires un pouvoir de veto sur ces projets. Alors que plusieurs initiatives parlementaires vont dans ce sens, il désire connaître la position du Gouvernement à leur égard.
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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie publiée le 16/01/2025
La politique d'aménagement numérique du territoire menée par le Gouvernement depuis plusieurs années pour généraliser l'accès à des services de télécommunication mobile de qualité pour tous les Français, s'est accompagnée de mesures permettant aux collectivités territoriales de mieux être associées à l'élaboration des projets d'installation de sites de télécommunication sur leur territoire. Le New Deal Mobile a notamment donné aux collectivités un véritable pouvoir de décision pour la mise en oeuvre du dispositif de couverture ciblée, dont l'objectif est que chacun des quatre opérateurs couvre 5 000 zones géographiques désignées par des équipes-projets locales. Dans le respect du nombre de dotations qui leur sont attribuées, les équipes-projets, constituées à l'échelle départementale ou régionale par des représentants des différents échelons locaux et des représentants des services de l'Etat, sont chargées d'établir chaque année des listes de zones à couvrir, répondant à des besoins de connectivité identifiés localement, traduites en arrêtés publiés au Journal officiel. Les équipes-projets ont également pour mission d'accompagner les déploiements des sites du dispositif, en s'assurant que les communes soient pleinement associées aux projets. Pour cela, elles sont d'abord tenus d'obtenir l'accord des maires pour inscrire des zones de leur territoire au dispositif, qui est vérifié à travers une consultation publique menée par les services de l'Etat, avant la publication de tout arrêté, sur chaque projet de liste de zones à couvrir. De plus, les équipes-projets doivent, dès le début des projets, organiser, avec les mairies concernées, des concertations réunissant les opérateurs et les habitants des communes désignées par le dispositif, afin d'informer l'ensemble des administrés du contenu du projet et déployer le site dans le respect des contraintes locales. Cette gouvernance partagéea été désignée par l'ensemble des acteurs impliqués, dont l'Autorité de régulation des Communications électroniques, des Postes et de la Distribution de la presse (Arcep), comme un des principaux vecteurs du succès de la politique publique menée depuis 2018, qui a permis d'atteindre un taux de couverture 99,9 % de la population en services 4G. Les procédures de concertations entre les opérateurs, les collectivités et leurs administrés ont, en outre, été généralisées à tous les projets de déploiements, au-delà des programmes du New Deal. Des comités nationaux de suivi et de concertation portant sur le déploiement des réseaux mobiles, poursuivent, quant à eux, leurs travaux pour identifier les obstacles et établir des bonnes pratiques facilitant les déploiements, diffusées ensuite localement par les différents membres de ces comités, dont les principales associations de collectivités territoriales et l'Agence nationale de la Cohésion des territoires. Au titre de son pouvoir général d'instruction des demandes et de délivrance des autorisations d'urbanisme (article L. 422-1 du code de l'urbanisme), le maire détient un rôle prépondérant dans la réussite d'un projet d'implantation d'un site de télécommunication mobile. Concernant le retrait d'une autorisation d'urbanisme octroyée pour l'installation d'un site de télécommunication mobile, les maires disposent déjà de ce pouvoir dans un délai de trois mois. Ce pouvoir constitue toutefois une insécurité juridique et un obstacle pour les opérateurs, dont les autorisations d'urbanisme peuvent être retirées par un maire quand bien même celles-ci respectent le cadre légal et réglementaire : certains maires ont en effet eu recours à ce pouvoir uniquement pour s'opposer à un projet de déploiement. Dans le contexte du lancement du New Deal Mobile, le Gouvernement a souhaité accélérer les déploiements des réseaux mobiles, en inscrivant à l'article 222 de la loi ELAN une dérogation temporaire de ce droit de retrait, permettant aux opérateurs de ne pas attendre l'expiration du délai de trois mois (pendant lequel le retrait de leur autorisation d'urbanisme est possible par le maire) pour édifier leurs sites. Cette dérogation, qui a été levée le 31 décembre 2022, a contribué à l'accélération des déploiements. Pour améliorer l'information des maires concernant l'installation de sites de télécommunication mobile sur le territoire qu'ils administrent, le Gouvernement et le Parlement ont également modifié le cadre législatif afin d'imposer, dès 2015, aux opérateurs de transmettre aux maires concernés un dossier d'information relatif aux différentes caractéristiques des sites qu'ils envisagent de construire - dont une simulation, sur demande du maire, de l'exposition aux champs électromagnétiques générée par l'installation -, et ce préalablement au dépôt de leur demande d'autorisation d'urbanisme (article L. 34-9-1 du code des postes et des communications électroniques). Des obligations ou incitations à mutualiser les infrastructures d'accueil des antennes s'imposent aux opérateurs de télécommunications et à leurs entreprises partenaires qui édifient les pylônes (dites tower companies). Ces différents acteurs sont notamment soumis à des obligations de répondre aux demandes raisonnables d'accès à leurs infrastructures passives (les pylônes et autres points hauts, voire aux liens de collecte associés) inscrites aux articles D. 98-6-1, L. 34-8-6 et L. 34-8-2-1 du code des postes et des communications électroniques. Ces obligations seront renforcées par les dispositions du règlement européen sur les infrastructures gigabit, qui s'appliqueront à partir du 12 novembre 2025. Les opérateurs sont, en même temps, soumis à des obligations de partage de réseaux (partage des équipements actifs) inscrites dans certaines de leurs licences d'utilisation des fréquences hertziennes : les licences en bandes 900 MHz et 1 800 MHz imposent aux quatre opérateurs de mutualiser les sites qu'ils doivent, dans le cadre du dispositif de couverture ciblée, déployer dans une même zone. Enfin, des accords commerciaux de partage d'installations actives lient les opérateurs, comme le contrat qui permet à Free Mobile d'utiliser les réseaux 2G et 3G d'Orange, ou encore l'accord Crozon entre SFR et Bouygues Telecom portant sur la mutualisation des réseaux 2G, 3G et 4G qu'ils déploient. Par ailleurs, afin de faciliter le dialogue entre opérateurs et maires sur les projets d'implantation de nouveaux pylônes, les maires des communes situées dans les zones rurales et à faible densité d'habitation et de population peuvent également, depuis la loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France du 15 novembre 2021, demander à ce que les opérateurs justifient leur choix de ne pas recourir à une solution de partage de leurs sites ou infrastructures. L'ensemble de ces mesures ainsi que la nature même du marché des télécommunications, qui s'est structuré autour des tower companies (dont l'objectif est de rationaliser les coûts par pylône édifié), ont favorisé le partage des infrastructures passives, avec 47,3 % des supports d'équipements mutualisés entre plusieurs opérateurs sur l'ensemble du territoire métropolitain à fin 2023, et 59,8 % en zones rurales. La possibilité d'imposer davantage d'obligations de mutualisation de réseaux est toutefois particulièrement restreinte par le cadre juridique européen, transposé dans le droit national : seules des obligations, prévues dans les licences d'utilisation de fréquences des opérateurs et portant sur des déploiements qui seraient impossibles « dans les conditions du marché », peuvent être imposées par le régulateur (article L. 34-8-1-2 du code des postes et des communications électroniques, transposant l'article 61 dudit code européen des communications électroniques).
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